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En matière d’épuisement des droits, il est conseillé de se préconstituer une preuve en utilisant, par exemple, un système de marquage de la destination géographique des produits permettant de déterminer si l’exemplaire litigieux est ou non destiné au marché de l’EEE. Le titulaire d’un modèle est en droit de faire écarter la règle de l’épuisement des droits lorsque son modèle a subi une modification essentielle ne respectant pas la configuration initiale du produit. La fonction essentielle de la marque, qui est de garantir l’origine du produit, est donc compromise.
L’article 15 du règlement 2017/1001 sur la marque de l’union européenne intitulé “Epuisement du droit conféré par la marque de l’Union européenne”, dispose que 1. Une marque de l’Union européenne ne permet pas à son titulaire d’interdire l’usage de celle-ci pour des produit qui ont été mis sur le marché dans l’EEE sous cette marque par le titulaire ou avec son consentement. 2. Le paragraphe 1 n’est pas applicable lorsque des motifs légitimes justifient que le titulaire s’oppose à la commercialisation ultérieure des produits, notamment lorsque l’état des produits est modifié ou altéré après leur mise dans le commerce.
Transposant en droit interne l’article 15 de la directive (UE) 2015/2436 du Parlement européen et du conseil du 16 décembre 2015, l’article L. 713-4 du code de la propriété intellectuelle dispose que le droit conféré par la marque ne permet pas à son titulaire d’interdire l’usage de celle-ci pour des produits qui ont été mis dans le commerce dans l’Union européenne ou dans l’Espace économique européen sous cette marque par le titulaire ou avec son consentement.Toutefois, faculté reste alors ouverte au titulaire de la marque de s’opposer à tout nouvel acte de commercialisation s’il justifie de motifs légitimes, tenant notamment à la modification ou à l’altération, ultérieurement intervenue, de l’état des produits.
La société [B] oppose un motif légitime à l’épuisement des droits sur l’un de ses modèles, qu’il lui appartient de démontrer, pour s’opposer à un nouvel acte de commercialisation alors même qu’il serait admis que les produits ont été mis dans le commerce dans l’EEE sous sa marque, par elle ou avec son consentement.
Le motif légitime peut, notamment, tenir à la modification ou à l’altération ultérieure de l’état des produits, sans que les contours de cette atteinte à l’état d’origine du produit ne soient davantage précisés par les textes.
L’atteinte à “l’image de sérieux et de qualité qui s’attache à un tel produit ainsi qu’à la confiance qu’il est susceptible d’inspirer au public concerné” préjudicie à la marque. (CJCE 26 avr. 2007, Boehringer Ingelheim E.A., aff. C-348/04 point 43).
L’altération du produit peut également concerner la question du conditionnement ou de l’image de marque du produit (CJUE, 23 avr. 2009, aff. C-59/08, Copad c/ Dior). En effet, l’atteinte à la réputation de la marque ou du fabriquant, qui peut résulter de modalités de vente incompatibles avec l’image de marque et de prestige des produits ou de la renommée du titulaire de la marque, peut constituer un motif légitime.
La Cour de justice de l’Union européenne précise, dans son arrêt rendu le 8 juillet 2010 Portakabin BV c. Primakabin BV, qu’il y a également un motif légitime au sens de l’article 7, paragraphe 2, de la directive 89/104, lorsque le revendeur donne, par son annonce faite à partir du signe identique ou similaire à la marque, l’impression qu’il existe un lien économique entre lui et le titulaire de la marque, et notamment que l’entreprise du revendeur appartient au réseau de distribution du titulaire de cette marque ou qu’il existe une relation spéciale entre les deux entreprises.
En effet, une annonce susceptible de donner une telle impression n’est pas nécessaire pour assurer la commercialisation ultérieure de produits mis sur le marché sous la marque par le titulaire ou avec son consentement et, partant, pour assurer l’objectif de la règle d’épuisement prévue à l’article 7 de la directive 89/104 (voir, en ce sens, arrêts BMW, précité, points 51 et 52, ainsi que du 26 avril 2007, Boehringer Ingelheim e.a., C-348/04, Rec. p. I-3391, point 46) (point 80), ajoutant qu’à cet égard, force est de constater que, lorsque le revendeur enlève, sans le consentement du titulaire d’une marque, la mention de cette marque sur les produits (démarquage) et remplace cette mention par une étiquette portant le nom du revendeur, de sorte que la marque du fabriquant des produits concernés soit entièrement dissimulée, le titulaire de la marque est habilité à s’opposer à ce que le revendeur utilise ladite marque pour annoncer cette revente.
En effet, en pareil cas, il existe une atteinte à la fonction essentielle de la marque qui est d’indiquer et de garantir l’origine du produit et il est fait obstacle à ce que le consommateur distingue les produits provenant du titulaire de la marque de ceux provenant du revendeur ou d’autres tiers (voir, en ce sens, arrêts du 11 novembre 1997, Loendersloot, C-349/95, Rec. p. I-6227, point 24, ainsi que Boehringer Ingelheim e.a., précité, points 14, 32 et 45 à 47) (point 86).
Il est acquis que les protections conférées par le droit des marques ne doivent pas conduire à interdire le marché légitime des biens d’occasion, en tenant compte également des besoins d’entretien et de réparation inhérents à l’écoulement du temps.
Cependant, lorsque le produit vendu sous la marque d’origine a, postérieurement à sa mise sur le marché autorisée, été transformé au point que sa nature en a été changée, alors la fonction essentielle de garantie d’origine du produit aux consommateurs par la mention de la marque est mise à mal.
En effet, dans une telle hypothèse, le consommateur risque d’être induit en erreur par la présence de la marque sur ce produit et imputer à son titulaire l’état modifié de ce produit, qui ne peut pourtant plus être considéré, compte-tenu des modifications essentielles dont il a été l’objet, comme celui dont la commercialisation sous la marque a été autorisée licitement par le titulaire de la marque.
S’agissant de la marque de l’Union européenne, l’article 9 du règlement (UE) 2017/1001 du parlement européen et du conseil du 14 juin 2017 sur la marque de l’Union européenne intitulé ” Droit conféré par la marque de l’Union européenne “, dispose que :1. L’enregistrement d’une marque de l’Union européenne confère à son titulaire un droit exclusif.
En application des dispositions de l’article L. 717-1 du code de propriété intellectuelle, constitue une contrefaçon engageant la responsabilité civile de son auteur la violation des interdictions prévues aux articles 9, 10, 13 et 15 du règlement (UE) 2017/1001 du 14 juin 2017 sur la marque de l’Union européenne.
S’agissant des marques françaises, en application de l’article L. 713-2 du code de la propriété intellectuelle est interdit, sauf autorisation du titulaire de la marque, l’usage dans la vie des affaires pour des produits ou des services :
1° D’un signe identique à la marque et utilisé pour des produits ou des services identiques à ceux pour lesquels la marque est enregistrée ;
2° D’un signe identique ou similaire à la marque et utilisé pour des produits ou des services identiques ou similaires à ceux pour lesquels la marque est enregistrée, s’il existe, dans l’esprit du public, un risque de confusion incluant le risque d’association du signe avec la marque.
L’article L.716-4 du code de la propriété intellectuelle dispose en outre que l’atteinte portée au droit du titulaire de la marque constitue une contrefaçon engageant la responsabilité civile de son auteur. Constitue une atteinte aux droits attachés à la marque la violation des interdictions prévues aux articles L. 713-2 à L. 713-3-3 et au deuxième alinéa de l’article L. 713-4.
Le droit exclusif du titulaire d’une marque de consentir à la mise sur le marché d’un produit revêtu de sa marque, qui constitue l’objet spécifique du droit de marque, s’épuise ainsi par la première commercialisation de ce produit avec son consentement.
A partir du moment où le titulaire d’une marque a mis sur le marché ou autorisé la commercialisation dans un pays de l’Union Européenne de produits revêtus de sa marque, il ne peut plus restreindre ou interdire la circulation de ces produits marqués à travers les divers Etats membres. L’épuisement des droits garantit ainsi la libre circulation des marchandises et fait obstacle à la possibilité, pour le titulaire de ce droit, de s’opposer aux reventes successives d’exemplaires de produits marqués dont il a déjà autorisé la mise en circulation.
L’extinction du droit exclusif résulte donc soit du consentement du titulaire à une mise dans le commerce dans l’espace économique européen, que ce soit de manière expresse ou implicite, soit de la mise dans le commerce dans ledit espace économique par le titulaire lui-même. De fait, le titulaire de la marque, en vendant le produit, a réalisé la valeur économique de la marque. Cette exercice du droit exclusif, qui se traduit par le consentement à la commercialisation ou la mise dans le commerce des produits couverts par la marque, constitue donc un élément déterminant de l’extinction de ce droit.
En principe, s’agissant d’un moyen de défense au fond, il appartient à celui qui se prévaut de l’épuisement du droit d’en rapporter la preuve pour chacun des produits concernés (CJUE, 17 novembre 2022, Harman, C-175/21, point 50 et jurisprudence citée.)
Cependant, dans son arrêt Sté Van Doren c/ Sté Lifestyle sports rendu le 8 avril 2003 (aff. C -244/00), la Cour de justice de l’Union Européenne, statuant sur l’interprétation des articles 28 CE et 30 CE (protection de la libre circulation des marchandise) ainsi que de l’article 7 paragraphe 1 de la première directive 89/104/CEE du Conseil, du 21 décembre 1988, rapprochant les législations des États membres sur les marques, telle que modifiée par l’accord sur l’Espace économique européen, du 2 mai 1992, a dit pour droit que “les exigences découlant de la protection de la libre circulation des marchandises, consacrée, notamment, aux articles 28 CE et 30 CE, peuvent nécessiter que cette règle de preuve subisse des aménagements.
Ainsi, dans l’hypothèse où le tiers parvient à démontrer qu’il existe un risque réel de cloisonnement des marchés nationaux si lui-même supporte la charge de cette preuve, en particulier lorsque le titulaire de la marque commercialise ses produits dans l’Espace économique européen au moyen d’un système de distribution exclusive, il appartient au titulaire de la marque d’établir que les produits ont été initialement mis dans le commerce par lui-même ou avec son consentement en dehors de l’Espace économique européen. Si cette preuve est apportée, il incombe alors au tiers d’établir l’existence d’un consentement du titulaire à la commercialisation ultérieure des produits dans l’Espace économique européen”.