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22 septembre 2022
Cour d’appel de Versailles
RG n°
20/05798
COUR D’APPEL
DE
VERSAILLES
Code nac : 3EB
12e chambre
ARRET N°
CONTRADICTOIRE
DU 22 SEPTEMBRE 2022
N° RG 20/05798 – N° Portalis DBV3-V-B7E-UFJT
AFFAIRE :
SAS DENTELLE SOPHIE HALLETTE
C/
S.A. ETAM LINGERIE
Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 08 Octobre 2000 par le tribunal judiciaire de NANTERRE
N° Chambre : 1
N° RG : 17/07350
Expéditions exécutoires
Expéditions
Copies
délivrées le :
à :
Me Monique TARDY
Me Christophe DEBRAY
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE VINGT DEUX SEPTEMBRE DEUX MILLE VINGT DEUX,
La cour d’appel de Versailles a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre :
SAS DENTELLE SOPHIE HALLETTE
RCS Douai n° 672 029 725
[Adresse 1]
[Localité 3]
Représentant : Me Monique TARDY de l’ASSOCIATION AVOCALYS, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire: 620 – N° du dossier 004756
Représentant : Me Corinne CHAMPAGNER KATZ de la SELASU CORINNE CHAMPAGNER KATZ, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : C1864
APPELANTE
****************
S.A. ETAM LINGERIE
RCS Nanterre n° 478 355 753
[Adresse 2]
[Localité 4]
Représentant : Me Christophe DEBRAY, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 627 – N° du dossier 20581
Représentant : Me Marie GEORGES PICOT de l’AARPI HOYNG ROKH MONEGIER HRM, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : P0512
INTIMEE
****************
Composition de la cour :
En application des dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue à l’audience publique du 17 Mai 2022 les avocats des parties ne s’y étant pas opposés, devant Monsieur Patrice DUSAUSOY, Magistrat honoraire chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Monsieur François THOMAS, Président,
Madame Véronique MULLER, Conseiller,
Monsieur Patrice DUSAUSOY, Magistrat honoraire,
Greffier, lors des débats : M. Hugo BELLANCOURT,
EXPOSE DU LITIGE
La société Dentelle Sophie Hallette a pour activité la création, l’élaboration, et la commercialisation de dentelles destinées notamment à l’habillement et plus particulièrement au prêt-à-porter féminin et à la lingerie. Elle déclare fabriquer en France cette dentelle et disposer d’un savoir-faire particulier en utilisant notamment des métiers à tisser uniques (Leavers) permettant une reproduction mécanique de la dentelle réalisée à la main mettant en valeur la haute créativité des dessins de dentelle et la qualité de leur réalisation.
Elle exploite en son nom deux dessins de dentelle :
– Un dessin de dentelle géométrique correspondant au dessin n°55860, caractérisé par la combinaison de deux motifs carrés,
– Un dessin de dentelle d’inspiration florale, correspondant au dessin n°970110, constitué d’un motif floral accompagné d’un feuillage abondant.
La société Dentelle Sophie Hallette a constaté que des produits, fabriqués partiellement dans une dentelle qu’elle estime reproduire les caractéristiques des dessins référencés 55860 (tee-shirts T plume New MC et T plume New ML) et 970110 (short Angel et débardeur Amira), étaient proposés à la vente et commercialisés sur le site internet www.etam.com, géré par la société Etam lingerie et dans les boutiques exploitées par la société Etam prêt-à-porter.
Par ordonnance du président du tribunal de grande instance de Nanterre du 24 mai 2017, des opérations de saisie-contrefaçon ont été diligentées au siège des sociétés Etam Lingerie et Etam Prêt-à-Porter, le 9 juin 2017.
Par acte du 6 juillet 2017, la société Dentelle Sophie Hallette a assigné les sociétés Etam prêt-à-porter et Etam lingerie devant le tribunal de grande instance de Nanterre aux fins de les voir condamnées en contrefaçon de droits d’auteur et, à titre subsidiaire, en responsabilité délictuelle du fait d’agissements parasitaires.
Le 28 janvier 2019, la société Etam prêt-à-porter a fait l’objet d’une fusion absorption par la société Etam lingerie.
Par jugement du 8 octobre 2020, le tribunal judiciaire de Nanterre a :
– Dit que la société Dentelle Sophie Hallette est titulaire des droits patrimoniaux d’auteur sur les dessins de dentelle référencés 55860 et 970110 ;
– Déclaré irrecevables les demandes de la société Dentelle Sophie Hallette au titre de la contrefaçon de son dessin 970110 pour défaut d’originalité ;
– Rejeté les demandes de la société Dentelle Sophie Hallette au titre de la contrefaçon de droit d’auteur de son dessin 55860 ;
– Rejeté les demandes de la société Dentelle Sophie Hallette au titre des agissements parasitaires ;
– Rejeté les demandes des parties au titre des frais irrépétibles ;
– Condamné la société Dentelle Sophie Hallette à payer à la société Etam lingerie la somme de
10.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
– Condamné la société Dentelle Sophie Hallette à supporter les entiers dépens de l’instance ;
– Dit n’y avoir lieu à l’exécution provisoire du jugement.
Par déclaration du 23 novembre 2020, la société Dentelle Sophie Hallette a interjeté appel limité du jugement.
Par ordonnance du 6 mai 2021, le conseiller de la mise en état de la 12e chambre de la cour d’appel de Versailles a :
– Donné acte à la société Dentelle Sophie Hallette de son désistement d’appel partiel à l’encontre de la société Etam prêt-à-porter ;
– Constaté l’extinction de l’instance et le dessaisissement de la cour, en ce qui concerne la société Etam prêt-à-porter ;
– Constaté que l’instance se poursuit à l’encontre de la société Etam lingerie ;
– Dit que sauf meilleur accord des parties, les dépens resteront à la charge de la société Dentelle Sophie Hallette.
Par ordonnance du 15 juillet 2021, le conseiller de la mise en état de la 12e chambre de la cour d’appel de Versailles a :
– Débouté la société Etam Lingerie de sa fin de non-recevoir (visant à déclarer irrecevables les demandes soutenues par la société Dentelle Sophie Halette au titre de la contrefaçon du dessin de dentelle 970110 en ce qu’elles excèdent la portée de sa déclaration d’appel du 23 novembre 2020) ;
– Rejeté toute autre demande ;
– Dit que les dépens de l’incident suivront le sort des dépens de l’instance d’appel.
PRÉTENTIONS DES PARTIES
Par dernières conclusions notifiées le 6 avril 2022, la société Dentelle Sophie Hallette demande à la cour de :
– Déclarer recevable et fondée la société Dentelle Sophie Hallette en son appel ;
– Infirmer le jugement du tribunal judiciaire de Nanterre en date du 8 octobre 2020, en toutes ses dispositions, sauf en celle qui a dit que la société Dentelle Sophie Hallette est titulaire des droits patrimoniaux d’auteur sur les dessins de dentelle référencés 55860 et 970110 ;
Statuant à nouveau sur les demandes de la société Dentelle Sophie Hallette,
– La dire bien fondée en ses demandes et y faisant droit ;
A titre liminaire,
– Dire que la cour d’appel a été saisie de tous les chefs critiqués et mentionnés dans cet acte d’appel comprenant aussi la disposition que la société Etam lingerie prétend n’avoir pas été dévolue à la cour ;
– Déclarer en conséquence la société Etam lingerie irrecevable en sa demande tenant à faire déclarer irrecevables les demandes de la société Dentelle Sophie Hallette au titre de la contrefaçon du dessin 970110 ;
A titre principal,
– Dire le dessin de dentelle 970110 de la société Dentelle Sophie Hallette original ;
– Dire et juger que la société Etam lingerie a commis des actes de contrefaçon au préjudice de la société Dentelle Sophie Hallette ;
En conséquence,
– Condamner la société Etam lingerie à payer à la société Dentelle Sophie Hallette la somme de 838.329,18 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice commercial subi résultant des actes de contrefaçon ;
– Condamner la société Etam lingerie à payer à la société Dentelle Sophie Hallette la somme de 200.000 euros à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice moral résultant de la contrefaçon des dessins 55860 et 970110 ;
A titre subsidiaire,
– Dire et juger qu’en offrant à la vente et en commercialisant les produits référencés T plume New MC, T plume New ML et Angel 648039205003 et Amira référencé 648039005003, la société Etam lingerie a commis des actes de parasitisme en bénéficiant indûment de la valeur économique des dessins 55860 et 970110 ;
– Condamner la société Etam lingerie à verser à la société Dentelle Sophie Hallette la somme de 800.000 euros au titre des agissements parasitaires ;
En tout état de cause,
– Ordonner à la société Etam lingerie de :
– Faire établir et de communiquer l’inventaire précis et détaillé, établi sous contrôle d’huissier de justice, de l’ensemble des produits argués de contrefaçon restant en stock dans tous les lieux des locaux de la société Etam lingerie, ou des prestataires et clients, qu’ils soient boutiques physiques de détail, grossistes, plate-forme internet, logisticien, transitaires, transporteurs et plus généralement tous prestataires détenant les produits référencés T plume New MC, T plume New ML et Angel 648039205003 et Amira référencé 648039005003 revêtus en tout ou partie des caractéristiques des dessins 55860 et 970110 de la société Dentelle Sophie Hallette, à la date de la signification de la présente décision ;
– Procéder à ses frais à la destruction, sous contrôle d’huissier, de tous les produits contrefaisants restant en stock au sein de la société Etam lingerie, chez tous détaillants, grossistes, logisticiens, plate-forme de stockage, transitaires et transporteurs, et qu’il en soit justifié à l’appelante dans les 30 jours suivant la signification de la décision à intervenir ;
– Rappeler des circuits commerciaux internet et boutiques physiques, les produits référencés T plume New MC, T plume New ML et Angel 648039205003 et Amira référencé 648039005003, la société Etam lingerie reproduisant tout ou partie des caractéristiques des dessins 55860 et 970110 de la société Dentelle Sophie Hallette ;
– Interdire à la société Etam lingerie de faire fabriquer directement ou indirectement et offrir directement ou indirectement à la vente internet et boutiques physiques, la commercialisation, par tous canaux de distribution, des produits référencés T plume New MC, T plume New ML et Angel 648039205003 et Amira référencé 648039005003, et ce sous astreinte définitive de 1.000 euros par infraction constatée et par jour de retard, à compter de la signification de la décision à intervenir, la cour se réservant le droit de liquider l’astreinte directement ;
– Ordonner la publication de la décision à intervenir, en intégralité ou par extraits, au choix de la société Dentelle Sophie Hallette :
– Dans 10 journaux ou publications professionnels (y compris électroniques), au choix de la société Dentelle Sophie Hallette, et aux frais avancés de la société Etam lingerie, sur simple présentation des devis, dans la limite de 8.000 euros HT par insertion ;
– Sur le site internet de la société Etam lingerie, www.etam.com, pendant soixante jours, en police de taille minimum 12, sur un espace qui ne pourra être inférieur à 15 centimètres de longueur et 20 centimètres de largeur, et ce, sous astreinte définitive de 1.000 euros par jour de retard, à compter de la signification de la décision à intervenir, la cour se réservant le droit de liquider l’astreinte directement ;
– Sur la page Instagram Etam, pendant soixante jours, et ce, sous astreinte définitive de 1.000 euros par jour de retard, à compter de la signification de la décision à intervenir, la cour se réservant le droit de liquider l’astreinte directement ;
– Rejeter la demande reconventionnelle de la société Etam lingerie tenant au versement de la somme de 300.000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive ;
– Condamner la société Etam lingerie à verser à la société Dentelle Sophie Hallette la somme de 40.000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;
– Condamner la société Etam lingerie au remboursement des frais de constat et de saisie-contrefaçon d’un montant de 5.230, 02 euros exposés par la société Dentelle Sophie Hallette ;
– Condamner la société Etam lingerie aux entiers dépens, dont distraction au profit de Me Monique Tardy, en application des dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.
Par dernières conclusions notifiées le 20 avril 2022, la société Etam lingerie demande à la cour de :
In limine litis,
– Déclarer irrecevables les demandes de la société Dentelle Sophie Hallette au titre de la contrefaçon du dessin de dentelle 970110, en ce qu’elles excèdent la portée de sa déclaration d’appel du 23 novembre 2020 au regard de l’effet dévolutif en application des articles 561 et 562 du code de procédure civile ;
– Confirmer le jugement déféré en ce qu’il a débouté la société Dentelle Sophie Hallette de ses demandes en contrefaçon de droit d’auteur et en parasitisme, sauf en ce qu’il a :
– Dit que la société Dentelle Sophie Hallette était titulaire des droits patrimoniaux d’auteur sur les dessins de dentelle référencés 55860 et 970110 ;
– Dit que le dessin 55860 présentait un caractère original et déclaré recevable les demandes en contrefaçon de la société Dentelle Sophie Hallette sur ce fondement ;
– Réformer le jugement déféré en ce qu’il a débouté Etam lingerie de sa demande reconventionnelle en procédure abusive et faisant droit à son appel incident ;
Statuant à nouveau et si par extraordinaire la cour déclarait recevable les demandes de la société Dentelle Sophie Hallette relatives au dessin 970110,
– Débouter la société Dentelle Sophie Hallette de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions comme étant, si ce n’est irrecevables ou à tout le moins mal fondées ;
– Déclarer la société Dentelle Sophie Hallette irrecevable à agir en contrefaçon des dessins de dentelle invoqués, faute pour elle de démontrer qu’elle en est titulaire ou qu’une présomption de titularité peut être établie à son bénéfice ;
– Déclarer la société Dentelle Sophie Hallette irrecevable à agir en contrefaçon des dessins de dentelle invoqués en raison de leur défaut d’originalité ;
– Juger que les actes de contrefaçon allégués par la société Dentelle Sophie Hallette ne sont pas constitués ;
– Juger que les actes de parasitisme allégués par la société Dentelle Sophie Hallette à titre subsidiaire ne sont pas constitués ;
En tout état de cause,
– Rejeter les demandes de condamnations pécuniaires sollicitées par la société Dentelle Sophie Hallette ;
– Rejeter l’ensemble des mesures sollicitées par la société Dentelle Sophie Hallette ;
– Condamner la société Dentelle Sophie Hallette à verser à la société Etam lingerie, la somme de 300.000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive et vexatoire ;
– Condamner la société Dentelle Sophie Hallette à verser à la société Etam lingerie la somme de 40.000 euros, quitte à parfaire, au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
– Condamner la société Dentelle Sophie Hallette aux entiers dépens de la présente instance, dont distraction au profit de Me Christophe Debray en application des dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.
L’ordonnance de clôture a été prononcée le 21 avril 2022.
Pour un exposé complet des faits et de la procédure, la cour renvoie expressément au jugement déféré et aux écritures des parties ainsi que cela est prescrit à l’article 455 du code de procédure civile.
MOTIFS
Sur la procédure
L’article 901 du code de procédure civile dispose que la déclaration d’appel est faite par acte contenant notamment les chefs du jugement expressément critiqués auxquels l’appel est limité, sauf si l’appel tend à l’annulation du jugement ou si l’objet du litige est indivisible.
Il ressort de l’article 562 alinéa 1er du code de procédure civile, dans sa rédaction issue du décret n° 2017-891 du 6 mai 2017, que l’appel défère à la cour la connaissance des chefs de jugement qu’il critique expressément et de ceux qui en dépendent.
In limine litis
Sur la demande de la société Etam tendant à voir déclarer irrecevables les demandes de la société Dentelle Sophie Hallette (ci-après société DSH) au titre de la contrefaçon du dessin 970110
La société ETAM fait valoir que l’effet dévolutif de l’appel n’opère qu’à l’égard des chefs de jugement expressément critiqués dans la déclaration de l’appelant, et que toute demande qui ne porterait pas sur un chef de jugement expressément critiqué dans la déclaration d’appel doit être déclaré irrecevable. Elle soutient que la société DSH n’a pas visé dans sa déclaration d’appel la mention suivante du jugement : ‘
Déclare irrecevables les demandes de la société Sophie Hallette au titre de la contrefaçon de son dessin 970110 pour défaut d’originalité.’
Elle sollicite donc de la cour qu’elle déclare irrecevable l’ensemble des demandes de la société DSH relatives au dessin de dentelle 970110.
La société DSH soutient que sa déclaration d’appel déposée au greffe de la cour et retournée ‘re-matérialisée’ à l’avocat de la concluante comporte bien toutes les dispositions faisant grief dont celle litigieuse. Elle fait valoir que l’omission matérielle figurant dans la déclaration d’appel lors de l’envoi de celle-ci à l’huissier en vue de sa signification par application de l’article 902 du code de procédure civile n’a pas affecté l’étendue de la dévolution par l’appel des dispositions.
*
Par ordonnance du 15 juillet 2021, le conseiller de la mise en état, saisi de cette même fin de non-recevoir soulevée par la société ETAM, a débouté cette dernière non pas en raison du fait que cette demande était relative à une question d’effet dévolutif et d’étendue de la saisine de la cour, qui ne relèverait pas de la compétence du conseiller de la mise en état, comme le soutient à tort la société ETAM, mais après avoir constaté que le chef de demande litigieux figurait bien à la déclaration d’appel de la société DSH.
Le conseiller de la mise en état a, à bon droit, constaté que le chef de demande litigieux figurait bien à la déclaration d’appel de sorte que la société ETAM sera déboutée de sa fin de non-recevoir soulevée devant la cour.
A titre principal
Sur le droit d’auteur
Sur la titularité des droits de la société Dentelle Sophie Hallette sur les dessins référencés 55860 et 970110
La société DSH invoque, à l’égard de la société ETAM tiers recherché pour contrefaçon, le principe de présomption de titularité de droits d’auteur consacré par la jurisprudence au bénéfice des personnes morales exploitant de façon non équivoque une oeuvre. Elle revendique ainsi des droits d’auteur sur un dessin de dentelle référencé 55860 et sur un autre référencé 970110, chacun décrit dans ses écritures. Elle sollicite la confirmation du jugement sur ce point.
La société ETAM soutient que pour bénéficier de cette présomption il appartient à la personne morale qui s’en prévaut d’identifier l’oeuvre revendiquée, de justifier de la date à laquelle elle a commencé à en assurer la commercialisation et d’apporter la preuve que les caractéristiques de l’oeuvre qu’elle a commencé à commercialiser à cette date sont identiques à celles qu’elle revendique. Elle fait valoir que la société DSH ne rapporte ni la preuve de sa qualité de cessionnaire ni ne caractérise l’existence d’une présomption de titularité à son profit. Elle sollicite l’infirmation du jugement sur ce point.
*
L’article L113-1 du code de la propriété intellectuelle prévoit que la qualité d’auteur appartient, sauf preuve contraire, à celui ou à ceux sous le nom de qui l’oeuvre est divulguée.
La personne morale qui exploite de façon non équivoque une oeuvre de l’esprit est présumée, à l’égard des tiers recherchés en contrefaçon et en l’absence de toute revendication du ou des auteurs, détenir sur ladite oeuvre les droits patrimoniaux de l’auteur.
Pour bénéficier de cette présomption simple, il lui appartient d’identifier précisément l’oeuvre qu’elle revendique et de justifier de la date à laquelle elle a commencé à en assurer la commercialisation. Il lui incombe également d’établir que les caractéristiques de l’oeuvre qu’elle revendique sont identiques à celles dont elle rapporte la preuve de la commercialisation sous son nom.
Enfin, si les actes d’exploitation propres à justifier l’application de cette présomption s’avèrent équivoques, elle doit préciser les conditions dans lesquelles elle est investie des droits patrimoniaux de l’auteur.
*
Sur le dessin référencé 55860
La société DSH verse aux débats :
– deux échantillons de la dentelle 55860 de couleurs noire et écrue sous robrack estampillé Sophie Hallette sur lequel figure une étiquette avec la référence en gras 055860, sous laquelle apparaît le numéro 55864.25/17 (pièce n° 7),
– 25 factures à en-tête de la société Dentelle Sophie Hallette adressées à divers clients situés à l’étranger mais aussi 7 situés en France, émises entre le 28 février 2005 et le 20 avril 2016 sur lesquelles sont mentionnées les références 055864 ou 055869, puis, à compter de 2012, la référence « 055860 anc. Réf.55864 » (pièce n° 9),
– une attestation de son expert-comptable relatif au chiffre d’affaires 137.353,49 euros réalisé avec le dessin 55860 sur les exercices 2010/2011 à 2014/2015 (pièce n° 49),
– un reçu d’horodatage Fidealis en date du 9 octobre 2009 (18:25:01) (pièce n°10), portant le n° 55864 reproduisant la dentelle revendiquée,
– une attestation du 29 avril 2016 de Mme [S] [P], responsable des dessins chez Sophie Hallette et précisant, avant de céder ses droits à son employeur, avoir créé le dessin numéro 55860 en février 2005, lequel était inspiré d’un autre numéro 13590/56090 (pièce n° 11).
Ainsi que l’ont relevé les premiers juges, ces éléments précis et concordants, qui se réfèrent tous au même dessin (l’identification précise du dessin n’étant pas remise en cause par la double référence 55864 puis 55860) permettent d’identifier clairement celui qui est revendiqué, de déterminer ses caractéristiques et d’établir la date de la première commercialisation.
Ces éléments prouvent que le dessin référencé 55860 a été exploité de façon continue et non équivoque depuis février 2005 par la société Dentelle Sophie Hallette.
Ils suffisent ainsi à établir une présomption de titularité des droits d’auteur au profit de la société DSH sur le dessin 55860 revendiqué rendant inutile la justification par la société DSH d’une cession de droit à son profit comme le sollicite la société ETAM. La société ETAM succombe ainsi à renverser cette présomption.
La société DSH est ainsi titulaire d’un droit de propriété incorporelle sur le dessin de dentelle 55860 et dès lors recevable à agir en contrefaçon de droits d’auteur sur ledit dessin.
Le jugement sera confirmé sur ce point.
Sur le dessin référencé 970110
La société DSH produit aux débats :
– un échantillon de la dentelle en cause de couleur écrue sous robrack estampillé Sophie Hallette sur lequel figure une étiquette avec la référence en gras 970110 sous laquelle apparaît le numéro 70964.1/85 (Pièce n°12) ;
– 3 factures à en-tête de la société Dentelle Sophie Hallette adressées à divers clients situés en France et émises entre le 17/12/2013 et le 22/04/2015 sur lesquelles est mentionnée la référence « 970110 anc. Réf RM 70964.1/85 » (Pièce n°15) ;
– l’attestation, en date du 13 janvier 2016, de Monsieur [I] [Y], président de la société Holesco, indiquant que celle-ci est propriétaire des sociétés Riechers Marescot et la société Dentelle Sophie Hallette depuis 2006. Cette attestation précise : ‘En date du 6 avril 2005 Riechers Marescot a divulgué et commercialisé pour la première fois le dessin de dentelle alors référencé 70964 (dont) elle a poursuivi l’exploitation jusqu’en 2011. Suite à la réorganisation des entreprises Riechers Marescot et la société Dentelle Sophie Hallette au sein du groupe (…) le dessin dont la propriété a été transférée à la société Dentelle Sophie Hallette est commercialisé depuis lors sous la référence non plus 70964 mais 970110 ‘ (pièce n°14).
– un reçu d’horodatage Fidealis en date du 10 mai 2012 (18:40:51) indiquant ‘nom du fichier 970110″ (pièce n°16),
– un catalogue ‘Sophie Halette’ Dentelles 2014-2015 au sein duquel figure (page 17) une photographie de mannequin portant une robe de dentelle rouge avec la légende suivante ‘collection Riechers Marescot pour SACAÏ 70964.1/85 agrume’ (pièce n° 17),
– des articles de presse consacrés au défilé SACAÏ automne-hiver 2013-2014 dans lesquels est visible la robe décrite ci-dessus sous le titre ‘Look 18″ (pièce n° 48),
– des photographies de jupes et de robes confectionnées avec la dentelle référencée 970110, extraites du défilé PRADA automne-hiver 2008-2009 (pièce n°18) ,
L’exploitation du dessin 970110 est en outre corroborée par l’attestation du commissaire aux comptes de la société DSH relative au chiffre d’affaires de l’article 970110 qui fait ressortir un montant de chiffre d’affaires de 1.997.288,43 € HT pour la période du 1er septembre 2015 au 27 août 2019.
Ces éléments précis, datés et concordants se réfèrent tous au même dessin de dentelle numéro 970110 et permettent d’identifier clairement celui qui est revendiqué, de déterminer ses caractéristiques et d’établir la date de la première commercialisation, justifiant ainsi de son exploitation, par la société Dentelle Sophie Hallette, sous son nom et au plus tard à compter de l’année 2013 ainsi que les premiers juges l’ont relevé.
Ces éléments prouvent que le dessin référencé 970110 a été exploité de façon continue et non équivoque depuis 2013 par la société Dentelle Sophie Hallette contrairement à l’affirmation de la société ETAM.
lls suffisent ainsi à établir une présomption de titularité des droits d’auteur au profit de la société DSH sur le dessin 970110 revendiqué rendant également inutile la justification par la société DSH d’une cession de droit à son profit comme le sollicite là encore la société ETAM.
La société DSH doit donc être déclarée recevable à agir en contrefaçon de droits d’auteur sur ledit dessin.
Le jugement sera confirmé sur ce point.
Sur l’originalité du dessin de dentelle
Au visa de l’article L.111-1 du code de la propriété intellectuelle, la société DSH rappelle que les dessins de dentelle sont régulièrement considérés par les juridictions comme protégeables au titre du droit d’auteur et qu’en l’espèce ses deux dessins présentent, chacun, un caractère original ainsi qu’elle s’en explique.
Au visa de l’article L.112-1 du code de la propriété intellectuelle, la société ETAM soutient que si un motif de dentelle peut prétendre à une protection au titre du droit d’auteur c’est à la condition que celui-ci constitue une création de forme propre à son auteur et porte l’empreinte de la personnalité de ce dernier et qu’il appartient à celui qui la revendique de l’établir ce à quoi la société DSH échoue.
*
L’article 111-1 du code de la propriété intellectuelle, dans sa version alors applicable, dispose que l’auteur d’une oeuvre de l’esprit jouit sur cette oeuvre, du seul fait de sa création, d’un droit de propriété incorporelle exclusif et opposable à tous. Ce droit comporte des attributs d’ordre intellectuel et moral ainsi que des attributs d’ordre patrimonial, qui sont déterminés par les livres Ier et III du code de la propriété intellectuelle.
L’article L.112-1 du même code précise que :’Les dispositions du présent code protègent les droits des auteurs sur toutes les oeuvres de l’esprit, quels qu’en soient le genre, la forme d’expression, le mérite ou la destination.’.
L’article L.112-2 14° du même code prévoit que sont considérées notamment comme oeuvres de l’esprit les créations des industries saisonnières de l’habillement et de la parure.
*
Ainsi que les premiers juges l’ont relevé, la protection d’une ‘uvre de l’esprit est acquise à son auteur sans formalité du seul fait de la création d’une forme originale entendue comme portant l’empreinte de la personnalité de son auteur exclusive d’une banale reprise d’un fonds commun non appropriable. La reconnaissance de l’originalité du dessin de dentelle confère à celui qui s’en prévaut une protection légale de sorte qu’il lui appartient de définir et d’expliciter les caractéristiques et les contours de l’originalité qu’il allègue afin de préciser le périmètre de cette appropriation et permettre, le cas échéant, à celui qui la conteste d’apporter la preuve qui lui incombe de l’absence d’originalité.
Il est nécessaire que celui qui se prévaut explique en quoi le dessin exprime la personnalité de son auteur.
Sur le dessin 55860
La société DSH sollicite la confirmation du jugement qui a reconnu l’originalité de ce dessin de dentelle.
La société DSH apporte une analyse descriptive du dessin 55860 reproduit ci-dessous et extrait des écritures de l’appelante (page 43) ainsi qu’une analyse subjective, fondées sur sa pièce 8 (photographie annotée de la dentelle).
– Analyse descriptive revendiquée par la société DSH :
‘Le dessin 55860 est un dessin de dentelle géométrique caractérisé par la combinaison de
deux motifs carrés.
Ces deux carrés sont chacun remplis de motifs distincts et sont placés en quinconce sur un
fond de tulle.
Le premier motif (A) se compose ainsi d’une allée centrale de trois losanges, dont le centre ajouré crée une impression de relief. De part et d’autre, cette allée est entourée de dômes alliant des traits sinueux au centre et des traits onduleux dans la partie extérieure.
Le second motif (B) quant à lui se découpe en trois parties distinctes, découpées à la verticale et évoquant l’alignement de trois fins bracelets distincts, le losange situé au centre de chaque bracelet évoquant une pierre précieuse. La partie centrale reprend les trois losanges du motif du carré A à l’horizontale.
L’allée centrale représente un bracelet de type gourmette composé d’une chaînette linéaire
tandis que les bracelets situés aux extrémités disposent de chaînes plus souples et sinueuses.’.
– Analyse subjective revendiquée par société DSH :
‘Pour chaque motif, l’auteur a souhaité créer un effet de miroir, aussi bien horizontal que vertical.
Le choix de cette symétrie, intensifiée par la finesse des dessins, répond à une volonté d’exprimer le raffinement et la subtilité.
L’harmonie géométrique présente dans le dessin n’est pas sans rappeler l’esthétique des jardins à la française.
Les motifs sont disposés de manière à créer un équilibre entre linéarité et ondulations.
La combinaison de ces motifs et le choix d’alterner des motifs géométriques évoquant tantôt la linéarité et tantôt l’ondulation témoigne de la recherche d’un équilibre délicat au sein de la composition.
La combinaison de ces éléments pris ensemble reflète un parti pris esthétique empreint de
la personnalité de son auteur.’ .
Contrairement aux affirmations de la société ETAM, les premiers juges ne se sont pas fondées uniquement sur l’analyse descriptive – qui n’aurait pas été suffisante à caractériser l’expression de la personnalité de l’auteur-, mais aussi sur l’analyse subjective pour reconnaître l’originalité du dessin.
La société DSH se prévaut seule d’un droit d’auteur sur le dessin litigieux de sorte qu’il est indifférent de connaître l’avis, au demeurant peu précis de la créatrice du dessin (Mme [P]) évoquant une commande ou une inspiration d’un précédent modèle ce qui ne constitue pas un obstacle à la démonstration par la société DSH du caractère original du dessin litigieux.
La société DSH revendique l’originalité de ce dessin, par la recherche d’une harmonie géométrique par agencement symétrique des motifs créant ainsi un effet miroir contrasté par la finesse des formes exprimant tantôt la linéarité tantôt l’ondulation témoignant de la recherche d’un équilibre de l’ensemble.
La cour constate que le dessin révèle le travail créatif de son auteur exprimant sa personnalité dans le choix arbitraire d’une composition géométrique construite sur une symétrie régulière de deux motifs sous forme de carrés qui se répondent dans une progression en quinconce, chacun de ces motifs étant composé d’une suite de trois losanges placés verticalement ou horizontalement selon le motif, dans un environnement évocateur de dômes ou de chaînettes donnant un effet de lignes ou de courbes, créant un contraste entre la géométrie rigoureuse de l’ensemble du dessin et la légereté du détail de chacun des motifs. L’auteur a ainsi effectué des choix propres de différents éléments qui composent les motifs dans un certain agencement, exprimant son parti pris esthétique conférant à l’ensemble du dessin une réelle originalité.
La cour confirmera les premiers juges qui ont reconnu au dessin 55860 un caractère original lui conférant la protection offerte par le droit d’auteur.
Sur le dessin 970110
La société DSH sollicite l’infirmation du jugement qui n’a pas reconnu l’originalité de ce dessin de dentelle.
La société DSH propose une analyse descriptive du dessin 970110 ainsi qu’une analyse subjective, fondées sur sa pièce 13 (ci-dessous ).
– Analyse descriptive proposée par la société DSH
‘Le dessin 970110 est une dentelle d’inspiration florale, constitué d’un motif floral accompagné d’un feuillage, ce motif se répétant horizontalement de manière à former une ligne.
Les lignes sont ensuite répétées en quinconce dans toute la largeur de la laize.
Le dessin est constitué d’un motif (en jaune ci-dessus) répété horizontalement, formant de ce fait une ligne régulière et dense dans laquelle les motifs se superposent quasiment.
Les lignes sont ensuite répétées en quinconce sur tout le lé.
Le motif se compose d’une fleur ronde et plate faite d’une première rangée de cinq pétales
trilobés.
A l’intérieur, est placée une seconde partie (en orange ci-dessus) composée de six feuilles remplies d’une armure en carrés se plaçant autour d’un pois. ; Cet agencement compact ne résulte nullement de contraintes techniques liées à la fabrication de la dentelle mais procède au contraire de l’unique volonté de l’auteur d’insuffler une impression d’abondance et de luxuriance dans cette composition.
De la fleur part une branche qui se divise en deux rapidement. Un premier rameau
se recroqueville presque sur lui-même dans un mouvement rotatif, de l’extérieur du motif vers l’intérieur. Elle est garnie de seize feuilles allongées et courbées dont les extrémités sont arrondies. Le repli de la branche et la dispersion de ses feuilles participent à l’impression de mouvement global et manifestent plus précisément le souffle de la brise. Les nombreuses feuilles témoignent de la recherche d’une abondance et d’une densité particulières.
Le second rameau, garni de trois feuilles, se divise lui-même en deux. Une première crosse
qui s’achève par un bouquet de trois feuilles, est garnie d’une rangée de sept pois placés en
anneau, une feuille en arc de cercle venant clore cet anneau. La disposition des pois en demi-cercle et l’orientation des feuilles dans un même sens participent à la sensation de
rotation du motif.
L’anneau est lui-même garni de trois feuilles de tailles différentes.
La seconde crosse forme un mouvement rotatif entourant la fleur et est composée de
nombreuses feuilles disposées comme des plumes. Elles retombent délicatement, dans un
mouvement aérien.’.
– Analyse subjective telle que revendiquée par DSH :
‘ L’auteur du dessin 970110 a fait le choix de représenter l’envolée légère d’un ensemble
floral, en réalisant à cette fin des variations dans la transparence de la dentelle et des
nuances dans la finesse de ses traits.
La forme circulaire du motif choisie par l’auteur participe à créer l’impression que les feuilles
tournoient et virevoltent au gré du vent. Les compositions florales semblent en suspension,
portées par un mouvement unique et perpétuel.
L’originalité de ce dessin réside dans la combinaison et le traitement particuliers des motifs
et du tissage constituant le fond de la laize (corps du dessin), qui reflète, comme exposé
plus haut…, la créativité et la personnalité de l’auteur.’.
La société ETAM fait valoir que les caractéristiques revendiquées par la société DSH ne reflètent aucun parti pris créatif notamment parce que la composition florale telle que décrite n’a rien d’originale dans l’univers de la dentelle, que ce dessin est dépourvu d’originalité au regard d’un dessin antérieur de plusieurs années et encore commercialisé (dentelle dite ‘Rameaux’) et qu’enfin ce dessin s’inscrit dans une tendance de mode.
La notion de nouveauté est indifférente à la caractérisation de l’originalité d’une oeuvre de droit d’auteur de sorte que la référence à un dessin antérieur, en soi, n’est pas pertinente. Le thème d’une composition florale utilisée dans la fabrication de la dentelle peut ne pas être nouveau ainsi que la société ETAM en rapporte la preuve par la production de plusieurs dessins et notamment d’une dentelle dite ‘Rameaux’. Un auteur peut, néanmoins, faire oeuvre créatrice en proposant un dessin de dentelle inspiré de ce thème de composition florale (fleur et feuilles), plusieurs années plus tard, même si cela s’inscrit dans une tendance de la mode et en revendiquer la protection au titre du droit d’auteur à condition que son dessin soit original.
Par son analyse subjective, la société DSH précise l’originalité du dessin litigieux résultant du choix de l’auteur de représenter l’envolée légère d’un ensemble floral, en réalisant à cette fin des variations dans la transparence de la dentelle et des nuances dans la finesse de ses traits. L’auteur a fait le choix d’une forme circulaire du motif afin de créer l’impression que les feuilles tournoient et virevoltent au gré du vent suggérant que les compositions florales sont en suspension, portées par un mouvement unique et perpétuel. L’originalité réside notamment dans la combinaison et le traitement particuliers des motifs et du tissage.
La société DSH caractérise ainsi suffisamment les éléments constitutifs de l’originalité du dessin litigieux.
Ce dessin, dans son ensemble, traduit un effort créatif de son auteur portant l’expression de sa personnalité en ce qu’il a créé un motif répétitif défini comme un ensemble floral (fleurs et feuilles) en mouvement, d’une particulière densité suggérant l’abondance, en choisissant une disposition particulière de sa composition et en réalisant à cette fin plusieurs variations dans la dimension des mailles et des nuances dans la finesse de ses traits créant une impression de relief (en opposition à l’impression d’à-plat donnée par le dessin Rameaux par exemple). Cette composition autour d’une fleur ronde et plate de cinq pétales trilobés avec 6 feuilles en son centre, donnant naissance à une branche rappelant les feuilles d’acanthe, stylisée dans un mouvement rotatif obtenu par l’opposition de rameaux de cette branche dont l’un se recroqueville et l’autre au contraire s’épanouit, crée l’impression de mouvement empreint de légereté accentué par l’impression de relief. La composition prise dans son ensemble loin d’être banale traduit l’effort créatif de son auteur dans le traitement du thème floral révélant l’empreinte de sa personnalité.
L’ensemble de ces éléments, pris dans leur ensemble, confère au dessin de dentelle référencé 970110 un aspect esthétique propre et original reflétant ainsi l’empreinte de la personnalité de son auteur.
Il importe peu que sa création corresponde aux critères de la mode du moment, en l’espèce le motif floral, laquelle n’affecte pas le caractère original du dessin litigieux.Comme le souligne la société DSH il existe une possibilité infinie de traiter un même thème ce qui n’exclut pas le parti pris esthétique et les choix arbitraires du traitement de ce thème.
Il y a donc lieu en conséquence d’infirmer le jugement et de reconnaître au dessin 970110 un caractère original lui conférant la protection offerte par le droit d’auteur.
Sur la contrefaçon
En vertu de l’article L.122-4 du code de la propriété intellectuelle ‘Toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle faite sans le consentement de l’auteur ou de ses ayants droit ou ayants cause est illicite. Il en est de même pour la traduction, l’adaptation ou la transformation, l’arrangement ou la reproduction par un art ou un procédé quelconque.’.
Le premier paragrahe de l’article L. 335-3 du même code dispose qu’ ‘Est également un délit de contrefaçon toute reproduction, représentation ou diffusion, par quelque moyen que ce soit, d’une oeuvre de l’esprit en violation des droits de l’auteur, tels qu’ils sont définis et réglementés par la loi.’.
Il est admis que la contrefaçon ne se limite pas à la copie servile. L’examen de la contrefaçon s’apprécie par la reprise des caractéristiques identifiées comme constitutives de l’originalité de l’oeuvre au vu des ressemblances et non d’après les différences constatées. En l’espèce l’examen attentif auquel doit se livrer la juridiction saisie doit porter sur la dentelle dont les vêtements incriminés sont constitués, et non sur l’ensemble des caractéristiques desdits vêtements, par comparaison avec celle exploitée par la société DSH.
*
sur le dessin 55860
La société DSH fait valoir que la société ETAM a reproduit les éléments caractéristiques de son dessin 55860 lors de la fabrication et la commercialisation d’un tee shirt manches longues (Plume New ML) et d’un tee shirt manches courtes (Plume New MC).
La société ETAM sollicite la confirmation du jugement et soutient qu’il n’existe aucune ressemblance entre le dessin 55860 et les produits Plume New qu’elle commercialise.
Les éléments caractéristiques du dessin 55860, reconnu comme original, se définissent, ainsi qu’il a été établi précédemment, par :’une symétrie régulière de deux motifs sous forme de carrés qui se répondent dans une progression en quinconce, chacun de ces motifs étant composé d’une suite de trois losanges placés verticalement ou horizontalement selon le motif, dans un environnement évocateur de dômes ou de chaînettes donnant un effet de lignes ou de courbes, créant un contraste entre la géométrie rigoureuse de l’ensemble du dessin et la légereté du détail de chacun des motifs.’.
Il résulte de l’examen comparatif de ces dentelles, (photographies ci-dessous extraites des écritures de l’appelante page 49) ainsi que l’ont relevé les premiers juges, que la perception d’ensemble est différente entre les dessins litigieux même si la dentelle utilisée par la société ETAM s’inspire de motifs géométriques avec alternance symétrique de deux motifs carrés à l’intérieur desquels figurent des losanges et des lignes courbes ou sinusoïdales. La prééminence des dômes dans l’un des deux motifs du dessin de la société DSH s’efface au profit d’une double barres verticales de losanges dans le motif correspondant de la dentelle litigieuse. L’autre motif du dessin de la société DSH se caractérise par l’emploi d’une horizontale de trois losanges formant une croix avec une ligne de trois boucles de part et d’autre de cette verticale, tandis que le motif ‘analogue’ de la dentelle litigieuse utilise le principe d’une horizontale composée de quatre losanges, interrompue par une ligne verticale formée de cinq boucles en forme de fleurs. La combinaison de la ligne verticale et de la ligne horizontale composées respectivement de 10 et 6 fleurs fait ressortir la symbolique d’une croix séparant le motif ETAM en quatre carrés tandis que le dessin DSH oppose deux motifs rectangles de sorte que l’impression d’ensemble est différente entre les deux dessins litigieux.
Le jugement sera confirmé et la société DSH déboutée de ses demandes au titre de la contrefaçon du modèle 55860.
sur le dessin 970110
La société DSH soutient que la société ETAM a reproduit les éléments caractéristiques de son dessin 970110 lors de la fabrication et la commercialisation d’un short (Angel) et d’un débardeur (Amira).
La société ETAM fait valoir que le short Angel et le débardeur Amira ne reproduisent en rien les caractéristiques du dessin 970110 revendiquées par la société DSH dès lors que l’impression d’ensemble n’est pas la même. Elle reproche à la société DSH de vouloir s’approprier un genre: la dentelle florale de type ‘guipure’.
La protection accordée à ce dessin 970110 ne porte pas sur le thème d’un ensemble floral traité en guipure, souvent rencontré en lingerie, mais sur les caractéristiques essentielles du traitement de ce thème source de son originalité qui, selon la société DSH, se résument ainsi : ‘un motif répétitif défini comme un ensemble floral en mouvement, d’une particulière densité suggérant l’abondance, créant l’impression de relief, en choisissant une disposition particulière de sa composition et en réalisant à cette fin plusieurs variations dans la dimension des mailles et des nuances,dans la finesse de ses traits. Cette composition autour d’une fleur ronde et plate de cinq pétales trilobés avec 6 feuilles en son centre, donnant naissance à une branche rappelant les feuilles d’acanthe, stylisée dans un mouvement rotatif obtenu par l’opposition de rameaux de cette branche dont l’un se recroqueville et l’autre au contraire s’épanouit, crée l’impression de mouvement empreint de légereté accentué par l’impression de relief.’.
La comparaison, effectuée par la cour, de la dentelle revendiquée par la société DSH et celle employée dans la confection du débardeur et du short par la société ETAM conduit au constat d’une reproduction à l’identique de la combinaison des caractéristiques essentielles de la dentelle référencée 970110 telles que décrites ci-dessus, notamment par le choix d’un agencement identique des différents éléments qui la composent, d’une dimension de la fleur et des branches équivalente, par la reproduction d’une fleur ronde et plate de cinq pétales trilobés avec six feuilles en son centre sur laquelle une branche stylisée composée de rameaux se déploie similairement à la branche du dessin revendiqué créant un mouvement aérien, avec emploi de différentes mailles suggérant un effet de relief (photographies ci-dessous extraites des écritures de l’appelante, page 39).
Les quelques différences observées relevant essentiellement du détail des compositions florales, ne sont pas de nature à modifier la même impression d’ensemble qui se dégagent des dentelles en cause.
La contrefaçon de droits d’auteur est donc établie.
Sur la réparation du préjudice résultant des actes de contrefaçon
Au visa de l’article L.331-1-3 du code de la propriété intellectuelle, la société DSH sollicite la réparation de son préjudice consécutif à la contrefaçon de son dessin 970110, ainsi :
– manque à gagner : 146.341,44 euros,
– atteinte aux investissements de production : 58.380 euros,
– bénéfices et économies d’investissements réalisés indument : 394.418,78 euros,
– préjudice moral : 200.000 euros.
La société ETAM au visa du même article et de la jurisprudence, fait valoir que la société DSH n’établit pas la réalité d’un gain manqué sur le territoire français, que cette dernière n’identifie pas précisément les investissements dont elle réclame la prise en charge sans lien avec la faute prétendument commise par la société ETAM, qu’au titre des bénéfices réalisés seul le nombre de produits vendus en France doit être pris en considération et non le nombre de produits commandés en Europe, que la réalité du préjudice moral n’est pas démontrée.
*
L’article L.331-1-3 du code de la propriété intellectuelle dispose que :
‘Pour fixer les dommages et intérêts, la juridiction prend en considération distinctement
1° Les conséquences économiques négatives de l’atteinte aux droits, dont le manque à gagner et la perte subis par la partie lésée ;
2° Le préjudice moral causé à cette dernière ;
3° Et les bénéfices réalisés par l’auteur de l’atteinte aux droits, y compris les économies d’investissements intellectuels, matériels et promotionnels que celui-ci a retirées de l’atteinte aux droits.
Toutefois, la juridiction peut, à titre d’alternative et sur demande de la partie lésée, allouer à titre de dommages et intérêts une somme forfaitaire. Cette somme est supérieure au montant des redevances ou droits qui auraient été dus si l’auteur de l’atteinte avait demandé l’autorisation d’utiliser le droit auquel il a porté atteinte. Cette somme n’est pas exclusive de l’indemnisation du préjudice moral causé à la partie lésée.’.
Il convient, afin d’apprécier l’entier préjudice subi par la société DSH, de prendre en compte distinctement les éléments énoncés à l’article susvisé sans en faire le cumul et d’apprécier le préjudice sur les éléments de preuves fournis.
Le préjudice matériel
– le manque à gagner
Il ressort des opérations effectuées dans le cadre de la saisie-contrefaçon, selon procès-verbal du 9 juin 2017, que 13.664 articles contrefaisant le dessin 970110 ont été commandés, dont 7.155 pour l’article Angel short et 6.509 pour le débardeur Amira.
Le chiffre de 13.664 articles sera retenu aucun élément n’étant versé pour justifier qu’il ne correspond pas à l’intégralité des ventes de ces articles.
Il ressort également des débats que le prix de vente moyen au mètre carré de la dentelle 970110 est de 31,50 euros HT et que la marge réalisée est de 34% selon l’attestation du commissaire aux comptes de la société DSH du 5 septembre 2019, soit une marge de 10,71 € (31,50 € x 0.34).
La société DSH estime qu’un article nécessite 1 mètre de dentelle (débardeur Amira et short Angel).
Le gain manqué revendiqué par la société DSH s’élève à :
13.664 x 1 m x 10,71 € = 146 341,44 euros.
Toutefois, la société ETAM conteste le calcul du métrage effectué par la société DSH. Elle fait également valoir que la société DSH s’est toujours défendue d’une production de masse et qu’elle ne pourrait, dès lors, répondre à une commande d’une telle ampleur.
La société ETAM soutient également que cette évaluation se fonde sur un volume commandé pour tout le territoire européen et non pas pour le seul territoire français alors que seul celui-ci doit être pris en considération. La société ETAM ne fournit cependant aucune information sur la répartition des produits en fonction de cette distinction géographique.
– l’atteinte aux investissements de production
La société DSH sollicite la somme de 58.380 euros pour deux dessins au titre des investissements de production associés aux dépenses de communication (salons professionnels, dépenses marketing, maintenance, …). Elle en justifie par la production d’une attestation de l’expert comptable COGEFIS (pièce 80 de l’appelante) accompagnée d’un tableau détaillé des coûts de mise en production sur la période 2017 à 2021.
La société DSH ne peut invoquer une atteinte à ses investissements de création puisque la dentelle 970110 a été créée par la société Riechers Marescot ainsi qu’elle le précise dans ses écritures. La société DSH ne soutient pas en avoir vair fait l’acquisition à titre onéreux. Au surplus la société DSH ne justifie pas du montant des investissements consacrés au seul dessin 970110.
La cour ne retiendra pas ce poste de péjudice.
– les bénéfices et les économies d’investissements réalisés par la société ETAM
La société DSH réclame la condamnation de la société ETAM à la somme totale de 394.418,78 euros au titre des bénéfices réalisés par la commercialisation des articles fabriqués avec la dentelle contrefaisante du dessin 970.110.
Elle évalue le bénéfice indument réalisé sur l’article Angel short (7.155 unités) à 207.208,80 euros [7.155 x (34,33 euros prix de vente – 5,37 euros prix d’achat)] et à 187.209,98 euros pour l’article Amira débardeur (6.509 unités) soit [6.509 x (33,71 euros prix de vente – 4,80 euros prix d’achat)].
La société ETAM fait valoir que cette évaluation se fonde sur un volume commandé pour tout le territoire européen et non pas pour le seul territoire français. La société ETAM ne fournit toutefois aucune information sur la répartition géographique des produits commandés.
La société ETAM soutient, en outre, que la dentelle litigieuse ne compose qu’une partie des vêtements en cause ce dont il conviendrait de tenir compte, la dentelle ne représentant, selon elle, que la moitié de la valeur du vêtement. Elle ne justifie pas de cette répartition de valeur. Il sera observé que la reprise de ce dessin de dentelle a permis à l’intimée de profiter de l’attractivité des produits de la société DSH pour commercialiser les siens. Par ailleurs le short Angel est entièrement constitué de la dentelle selon le dessin 970110.
La société ETAM fait valoir enfin qu’il convient de ne retenir que la marge nette et non pas la marge brute. Elle ne fournit pas d’information sur la justification de cette distinction ni sur les conséquences financières de celle-ci.
Le préjudice tel qu’évalué par la société DSH calculé sur la seule base de la différence entre le prix d’achat et le prix de vente au public ne tient pas compte des frais de transport, de distribution et de marketing exposés par la société ETAM qu’il convient de prendre en considération.
La cour, en fonction des éléments portés à sa connaissance, tenant compte certes des prix d’achat et de vente, mais également des coûts supportés par la société Etam fixera le préjudice subi par la société DSH du fait des actes de contrefaçon à 10 euros par article contrefait soit 136.640 euros ([7.155+6509] x10 €).
Le préjudice moral
La société DSH fait valoir l’atteinte à son savoir faire ancestral, à sa créativité et sa réputation. Elle soutient que la contrefaçon contribue à avilir et banaliser son dessin au regard des très nombreux (745) points de vente de la société ETAM en France, cette banalisation et cet avilissement étant amplifiés par les ventes par internet. Elle sollicite la condamnation de la société ETAM à la somme de 200.000 euros.
La société ETAM soutient que la société DSH ne démontre par la notoriété du dessin en cause. Elle fait valoir que la société DSH ne justifie pas de l’existence d’un détournement de clientèle résultant de l’avilissement et de la banalisation allégués, ni d’une atteinte à sa réputation.
La cour reconnait à la société DSH un préjudice moral lié à la banalisation de la dentelle 970.110 et une atteinte portée à sa valeur patrimoniale et sa réputation, dans la mesure où sa clientèle à la recherche d’un produit original sera conduite à se détourner d’un dessin avili par la reproduction importante qui en a été faite.
La cour fixera à 30.000 euros le préjudice moral.
*
La société DSH ne peut, au titre de son préjudice, solliciter le cumul de son manque à gagner, de ses investissements de production et des bénéfices réalisés par la société ETAM sauf à obtenir , en l’espèce, une double indemnisation d’un même préjudice.
Après examen de l’ensemble des postes de préjudices visés à l’article L. 331-1-3 du code de la propriété intellectuelle, appréciés distinctement, la cour retiendra au titre du préjudice matériel, la somme de 136.640 euros et de 30.000 euros au titre du préjudice moral.
La société ETAM sera ainsi condamnée à verser à la société DSH la somme de 166.640 euros au titre du préjudice matériel et moral subi par cette dernière du fait de la contrefaçon du dessin 970110.
Les mesures d’interdiction
Les mesures d’interdiction et de destruction
La société DSH sollicite des mesures d’interdiction et de destruction des stocks de produits contrefaisant.
La société ETAM affirme sans le justifier que les produits litigieux ‘ne sont plus commercialisés depuis longtemps’ de sorte qu’il n’y pas lieu à la cour de prononcer ces mesures.
Faute pour la société DSH d’établir la poursuite de la vente de ces produits, ou leur présence dans les points de vente de la société ETAM, il n’y a pas lieu d’ordonner leur destruction.
La cour au regard de la contrefaçon du dessin 970100 constituée fera droit à la demande d’interdiction sous astreinte, dans les conditions du dispositif ci-après.
Les mesures de publication
Les condamnations précédemment prononcées à l’encontre de la société ETAM sont suffisantes à réparer le préjudice subi par la société DSH au titre de la contrefaçon du dessin 970110 commise par la société ETAM.
Il n’y pas lieu de prononcer la mesure de publication sollicitée par la société DSH.
Sur la demande subsidiaire en concurrence parasitaire
La société DSH ayant été déboutée de ses demandes au titre de la contrefaçon du dessin de dentelle 55860 sur lequel un droit privatif a été reconnu au titre du droit d’auteur ne peut solliciter réparation sur un autre fondement pour des faits identiques.
Le jugement entrepris sera confirmé en ce qu’il a débouté la société DSH de sa demande subsidiaire au titre de la concurrence parasitaire.
Sur la demande reconventionnelle en procédure abusive
Les condamnations prononcées à l’encontre de la société ETAM conduisent à considérer qu’aucun abus ne peut être reproché à la société DSH dans l’exercice de son droit d’agir en justice.
Il y a lieu de confirmer le jugement qui a rejeté la demande de la société ETAM à ce titre.
Sur les dépens et l’article 700 du code de procédure civile
Le jugement sera infirmé en ses dispositions relatives aux dépens et aux frais irrépétibles.
La société ETAM sera condamnée aux dépens de première instance et d’appel.
La société ETAM sera condamnée à verser à la société DSH une indemnité de 25.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, en ce compris les frais de constat et de saisie-contrefaçon.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant par arrêt contradictoire,
Déboute la société ETAM lingerie de sa fin de non-recevoir soulevée devant la cour visant à déclarer irrecevables les demandes de la société Dentelle Sophie Halette au titre de la contrefaçon du dessin 970110,
Infirme le jugement du tribunal judiciaire de Nanterre du 8 octobre 2020 en ce qu’il a déclaré irrecevables les demandes de la société Dentelle Sophie Hallette au titre de la contrefaçon de son dessin 970110 pour défaut d’originalité et en ce qu’il a condamné la société Dentelle Sophie Hallette aux dépens et à une indemnité de 10.000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile,
Confirme pour le surplus,
Statuant à nouveau,
Dit que le dessin de dentelle 970110 est original,
Dit que la société ETAM lingerie a commis des actes de contrefaçon du dessin de dentelle 970110 au préjudice de la société Dentelle Sophie Halette,
Condamne la société ETAM lingerie à verser la somme de 166.640 euros à la société Dentelle Sophie Halette en réparation du préjudice matériel et moral causé par ces actes de contrefaçon,
Interdit à la société ETAM lingerie de faire fabriquer, directement ou indirectement, et offrir, directement ou indirectement, à la vente internet et boutiques physiques, la commercialisation, par tous canaux de distribution, des produits référencés ANGEL 648039205003 et AMIRA référencé 648039005003, reprenant les caractéristiques du dessin de dentelle 970.110 et ce sous astreinte provisoire de 1.000 euros par infraction constatée, pendant une durée de 100 jours à compter de la date de signification de l’arrêt,
Rejette toutes autres demandes,
Y ajoutant,
Condamne la société ETAM lingerie aux dépens de première instance et d’appel, avec droit de recouvrement direct en application de l’article 699 du code de procédure civile,
Condamne la société ETAM lingerie à verser à la société Dentelle Sophie Halette une indemnité de 25.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
Prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
Signé par Monsieur François THOMAS, Président et par M. BELLANCOURT, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le greffier,Le président,