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17 octobre 2012
Cour d’appel de Paris
RG n°
10/20895
Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE
aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE PARIS
Pôle 5 – Chambre 1
ARRÊT DU 17 OCTOBRE 2012
(n° , pages)
Numéro d’inscription au répertoire général : 10/20895
Décision déférée à la Cour : Jugement du 15 Octobre 2010 -Tribunal de Grande Instance de PARIS – RG n° 09/07837
APPELANTE
Madame [I] [I]
[Adresse 1]
[Localité 2]
Représentée par la SELARL Antoine GITTON Avocats (Me Antoine GITTON) (avocats au barreau de PARIS, toque : L0096)
assistée de Me Antoine GITTON, Avocat au barreau de PARIS, Toque L96
INTIMÉE
SA MAGNARD-VUIBERT
prise en la personne de son représentant légal
[Adresse 3]
[Localité 4]
Représentée par la SCP FISSELIER – CHILOUX – BOULAY (Me Alain FISSELIER) (avocats au barreau de PARIS, toque : L0044)
assistée de Me François POUGET de la SELARL FACTORI (avocat au barreau de PARIS, toque : P0300)
COMPOSITION DE LA COUR :
L’affaire a été débattue le 05 Septembre 2012, en audience publique, devant la Cour composée de :
Monsieur Benjamin RAJBAUT, Président de chambre
Mme Brigitte CHOKRON, Conseillère
Madame Anne-Marie GABER, Conseillère
qui en ont délibéré
Un rapport a été présenté à l’audience dans les conditions prévues à l’article 785 du code de procédure civile.
Greffier, lors des débats : Mme Marie-Claude HOUDIN
ARRÊT :
– contradictoire
– rendu publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
– signé par Monsieur Benjamin RAJBAUT, président, et par Mme Marie-Claude HOUDIN, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
* * *
E X P O S É D U L I T I G E
Mme [I] [I] est auteur et illustratrice d’ouvrages pour la jeunesse et la SA MAGNARD-VUIBERT, à l’enseigne ‘Editions Magnard’ publie des collections scolaires, parascolaires et de la littérature pour la jeunesse.
Les parties ont débuté des relations professionnelles en 1996 et Mme [I] [I] a illustré plusieurs ouvrages qui ont fait l’objet de contrats d’édition, elle indique avoir participé à d’autres ouvrages commandés par la société MAGNARD-VUIBERT, sans contrat d’édition et reproche à cette société d’avoir procédé à des retirages de livres après modification des illustrations de couverture et avoir exploité des titres en ligne sur son site Internet sans reddition de comptes.
Après une mise en demeure infructueuse en date du 22 septembre 2008, Mme [I] [I] a fait assigner le 06 mai 2009 la société MAGNARD-VUIBERT devant le tribunal de grande instance de Paris en réparation de son préjudice né de la violation par la société MAGNARD-VUIBERT de son obligation de conseil et d’information, en résiliation des contrats relatifs à l’exploitation de ses illustrations et en dommages et intérêts.
Vu le jugement rendu contradictoirement le 15 octobre 2010 par le tribunal de grande instance de Paris qui a :
– dit que Mme [I] [I] a consenti des cessions de droits de reproduction à la société MAGNARD, aujourd’hui dénommée MAGNARD-VUIBERT, pour les ouvrages suivants : Le caméscope fantôme, Puzzles CE1, CE2, CM1, CM2, Grammaire et communication 5ème, Motard sans visage, [C] enfant de la nuit, Grammaire et communication 4ème, l’Anse rouge, Le souffle de la pierre d’Irlande, Le chant sacré des baleines, L’aigle de Kylemore moyennant le paiement d’une rémunération forfaitaire,
– débouté Mme [I] [I] de ses demandes en résiliation et en responsabilité contractuelle de la société défenderesse,
– dit qu’en modifiant sans autorisation les illustrations de couverture des ouvrages Le souffle de la pierre d’Irlande et Le chant sacré des baleines, la société MAGNARD-VUIBERT a porté atteinte au droit moral de Mme [I] [I],
– condamné en conséquence la société MAGNARD-VUIBERT à payer à Mme [I] [I] la somme d’un Euro à titre de dommages et intérêts,
– interdit à la société MAGNARD-VUIBERT toute exploitation des couvertures illustrées par Mme [I] [I] modifiées pour les ouvrages Le souffle de la pierre d’Irlande et Le chant sacré des baleines, sous astreinte de 150 € par jour de retard à l’expiration d’un délai de quinze jours à compter de sa décision,
– dit qu’il se réserve la liquidation de l’astreinte qui sera limitée à deux mois,
– débouté Mme [I] [I] du surplus de ses demandes,
– débouté la société MAGNARD-VUIBERT de l’ensemble de ses demandes,
– dit que chacune des parties conservera la charge de ses propres frais et dépens,
– dit n’y avoir lieu à l’exécution provisoire de sa décision.
Vu l’appel interjeté le 25 octobre 2010 par Mme [I] [I].
Vu les dernières conclusions récapitulatives de Mme [I] [I], signifiées le 20 septembre 2011.
Vu les dernières conclusions de la SA MAGNARD-VUIBERT, signifiées le 20 février 2012.
Vu l’ordonnance de clôture en date du 15 mai 2012.
M O T I F S D E L ‘ A R R Ê T
Considérant que, pour un exposé complet des faits de la cause et de la procédure, il est expressément renvoyé au jugement déféré et aux écritures des parties ; qu’il suffit de rappeler que le litige porte sur les commandes d’illustrations passées par la SA MAGNARD-VUIBERT auprès de Mme [I] [I] entre 1996 et 2002 pour les onze ouvrages suivants : Le caméscope fantôme, Puzzles : des récits à lire CE2 – CM1 – CM2, Grammaire et communication 5ème, Le motard sans visage, Puzzles : des récits à lire CE1, [C], enfant de la nuit, Grammaire et communication 4ème, L’anse rouge, Le souffle de la pierre d’Irlande, Le chant sacré des baleines, L’aigle de Kylemore ;
I : SUR LA QUALIFICATION DES RELATIONS CONTRACTUELLES ENTRE LES PARTIES :
Considérant que Mme [I] [I] revendique la qualité d’auteur sur ses illustrations insérées dans les onze ouvrages susvisés ;
Considérant qu’elle soutient que l’édition de ses illustrations devait s’inscrire dans le cadre de contrats d’édition alors qu’il n’existe aucun contrat écrit et, par voie de conséquence, aucune délimitation des droits cédés ni aucune indication d’étendue, de destination, de lieu, de durée ; qu’elle ajoute ne pas avoir donné son consentement formel à une rémunération forfaitaire, conformément aux dispositions de l’article L 132-6 du code de la propriété intellectuelle ;
Considérant qu’elle fait en conséquence valoir l’inexistence des contrats d’édition pour l’édition de ses illustrations ; que dès lors la société MAGNARD-VUIBERT exploite sans contrat les illustrations qu’elle lui a remises et a ainsi commis le délit de contrefaçon ;
Considérant qu’en réparation elle demande la somme de 127.099 € au titre de son préjudice matériel ;
Considérant que la société MAGNARD-VUIBERT, qui conclut à titre principal à la confirmation du jugement entrepris en ce qu’il a débouté Mme [I] [I] de ses demandes en responsabilité contractuelle, ne conteste pas la qualité d’auteur de celle-ci et réplique que pour chaque illustration, un bon de commande était passé par la société, une livraison des illustrations était effectuée par Mme [I] [I] qui lui adressait sa facture, une note de comptabilité et un paiement avaient lieu et une exploitation commerciale des illustrations dans les ouvrages visés dans les bons de commande était effectuée par la société ; que ces actes établissent l’existence et la rencontre des consentements et, par conséquent, la formation du contrat opérant cession des droits ;
Considérant que la société MAGNARD-VUIBERT fait valoir qu’elle a uniquement exploité les illustrations litigieuses dans le cadre des ouvrages pour lesquels elles avaient été commandées, ce que Mme [I] [I] savait pertinemment ;
Considérant ceci exposé, que la qualité d’auteur de Mme [I] [I] n’est pas discutée et que le litige porte sur les commandes d’illustrations suivantes :
(1) – Bon de commande du 13 août 1996 pour 7 illustrations intérieures et une couverture pour le roman ‘Le caméscope fantôme’ (auteur [K] [K]), facture du 02 octobre 1996 établie par Mme [I] [I] pour un montant ‘droits d’auteur forfaitaires’ de 6.000 F. (914,69 €), note comptable de la société MAGNARD du 31 octobre 1996.
(2) – Bon de commande du 13 janvier 1997 pour respectivement 7, 6 et 5 illustrations pour les trois ouvrages scolaires ‘Puzzles : des récits à lire : CE2, CM1 et CM2’, facture du 14 mars 1997 établie par Mme [I] [I], facture du 28 janvier 1997 établie par Mme [I] [I] pour un montant de 6.000 F. (914,69 €) ‘pour utilisation dans manuel scolaire’, note comptable de la société MAGNARD du 25 février 1997.
(3) – Bon de commande du 19 mars 1997 pour 24 illustrations et une couverture pour l’ouvrage scolaire ‘Grammaire et communication 5ème’, facture du 14 mars 1997 établie par Mme [I] [I] pour un montant de 12.600 F. (1.920,86 €) ‘pour utilisation dans Grammaire et communication 5ème’, note comptable de la société MAGNARD du 23 avril 1997.
(4) – Bon de commande du 17 février 1998 pour 7 illustrations intérieures et une couverture pour le roman ‘[C], enfant de la nuit’ (auteur [E] [E]), facture du 28 février 1998 établie par Mme [I] [I] pour un montant de 6.000 F. (914,69 €), note comptable de la société MAGNARD du 23 mars 1998.
(5) – Bon de commande du 05 septembre 1997 pour 7 illustrations intérieures et une couverture pour le roman ‘Le motard sans visage’ (auteur [O] [X]), facture du 10 septembre 1997 établie par Mme [I] [I] pour un montant de 6.000 F. (914,69 €), note comptable de la société MAGNARD du 30 septembre 1997.
(6) – Bon de commande du 05 septembre 1997 pour 3 illustrations pour l’ouvrage scolaire ‘Puzzles : des récits à lire : CE1’, facture du 10 septembre 1997 établie par Mme [I] [I] pour un montant de 990 F. (150,92 €) ‘pour utilisation dans manuel scolaire’, note comptable de la société MAGNARD du 30 septembre 1997.
(7) – Bon de commande du 31 mars 1998 pour 18 illustrations et une couverture pour l’ouvrage scolaire ‘Grammaire et communication 4ème’, facture du 27 octobre 1998 établie par Mme [I] [I] pour un montant de 7.200 F. (1.097,63 €) ‘pour utilisation dans Grammaire 4ème’, note comptable de la société MAGNARD du 30 avril 1998.
(8) – Bon de commande non daté pour 7 illustrations intérieures et une couverture pour le roman ‘L’anse rouge’ (auteur [W] [W]), facture du 19 octobre 1998 établie par Mme [I] [I] pour un montant de 6.000 F. (914,69 €) ‘pour utilisation dans roman L’Anse Rouge’, note comptable de la société MAGNARD du 30 novembre 1998.
(9) – Bon de commande du 20 janvier 2000 pour 7 illustrations intérieures et une couverture pour le roman ‘Le souffle de la pierre d’Irlande’ (auteur [O] [L]), facture du 20 janvier 2000 établie par Mme [I] [I] pour un montant de 6.000 F. (914,69 €) ‘pour utilisation dans la roman Le souffle de la pierre d’Irlande’, note comptable de la société MAGNARD du 31 janvier 2000.
(10) – Bon de commande non daté pour 7 illustrations intérieures et une couverture pour le roman ‘Le chant sacré des baleines’ (auteur [O] [L]), facture du 15 mars 2001 établie par Mme [I] [I] pour un montant de 6.000 F. (914,69 €) pour ‘illustration du roman jeunesse Le chant sacré des baleines’, note comptable de la société MAGNARD du 27 mars 2001.
(11) – Commande de 7 illustrations intérieures et d’une couverture pour le roman ‘L’aigle de Kylemore’ (auteur [O] [L]), facture de droits d’auteur du 26 septembre 2002 établie par Mme [I] [I] pour un montant de 915 € pour ‘illustration du roman L’aigle de Kylemore’, note comptable de la société MAGNARD du 31 octobre 2002 ;
Considérant que Mme [I] [I] ne saurait sérieusement soutenir l’inexistence de toute relation contractuelle avec la société MAGNARD pour ces onze commandes d’illustrations, alors surtout qu’elle considère par ailleurs que l’éditeur a traité avec elle ‘comme en matière de simples contrats d’entreprise’ ; que la question à trancher porte sur la qualification juridique de ces contrats ;
Considérant que la société MAGNARD a passé commande des illustrations objet de ces contrats pour illustrer des oeuvres (romans ou ouvrages scolaires) qui étaient déjà écrites et qu’il n’est ni justifié ni même sérieusement soutenu que ces oeuvres auraient fait l’objet d’une conduite concertée entre Mme [I] [I] et leurs auteurs de nature à qualifier les oeuvres en cause d’oeuvres de collaboration ;
Considérant dès lors que les contrats en cause ne sauraient recevoir la qualification de contrats d’édition de ces oeuvres mais de contrats de louage d’ouvrage pour la commande d’illustrations destinées à être insérées dans des oeuvres ;
II : SUR LA PREUVE DE LA CESSION DES DROITS DE PROPRIÉTÉ INTELLECTUELLE DE MME [I] [I] SUR SES ILLUSTRATIONS :
Considérant qu’à titre subsidiaire Mme [I] [I] soutient que la société MAGNARD-VUIBERT ne démontre pas l’existence de cessions des droits de reproduction des illustrations en cause ;
Considérant que la SA MAGNARD-VUIBERT réplique qu’en dehors des contrats de représentation, d’édition et de production, la cession des droits n’est soumise à aucune exigence de forme et que Mme [I] [I] avait parfaitement conscience depuis le début que ses illustrations étaient destinées à être reproduites dans les ouvrages qu’elle exploite ;
Considérant que le louage d’ouvrage n’emporte, aux termes de l’article L 111-1 du code de la propriété intellectuelle, aucune dérogation à la jouissance du droit de propriété intellectuelle de l’auteur et que la preuve de la cession des droits de celui-ci doit être rapportée ;
Considérant que les dispositions de l’article L 131-3 ne visent que les seuls contrats énumérés à l’article L 131-2, 1er alinéa, à savoir les contrats de représentation d’édition et de production audiovisuelle, et ne s’appliquent pas aux autres contrats ; que dès lors la cession d’exploitation sur les illustrations en cause n’est soumise à aucune exigence de forme et la preuve peut en être rapportée selon les prescriptions des articles 1341 à 1348 du code civil auxquelles l’article L 131-2, 2ème alinéa du code de la propriété intellectuelle renvoie expressément ;
Considérant qu’il ressort des pièces produites ci-dessus analysées que pendant plus de six années les relations contractuelles entre les parties se sont toujours effectuées selon le même processus : bons de commande de la société MAGNARD, livraison des illustrations avec envoi de facture de la part de Mme [I] [I], note comptable émanant de la société MAGNARD et paiement de la facture ; que ces relations contractuelles remontent à plus de seize années et sont anciennes ; que les illustrations ont été exploitées tout comme les oeuvres dans lesquelles elles ont été insérées ;
Considérant que si les bons de commandes n’ont pas été signés par Mme [I] [I], toutefois cette dernière en a accepté les termes en envoyant sans aucune réserve les illustrations en cause, en mentionnant expressément dans la facturation l’exploitation qui devait en être faite et en ne protestant pas lorsque les premières publications ont eu lieu ; qu’ainsi Mme [I] [I] savait, dès l’origine que ces illustrations ne lui étaient commandées que pour être reproduites ;
Considérant dès lors qu’il résulte des relations commerciales qui existaient entre les parties que tous les contrats litigieux sont des contrats pour lesquels Mme [I] [I] n’a pas seulement réalisé des illustrations et été payée pour un travail, mais a cédé ses droits, chaque bon de commande mentionnant l’oeuvre pour laquelle les illustrations étaient commandées à Mme [I] [I] et précisant ainsi, à tout le moins, la destination des illustrations ; que la facturation des illustrations livrées emporte nécessairement cession du droit de reproduction et vaut manifestation expresse de la volonté du cessionnaire ;
Considérant en conséquence que les faits de contrefaçon résultant d’une prétendue exploitation des illustrations en cause sans contrat de cession des droits ne sont pas établis ;
III : SUR LA DEMANDE SUBSIDIAIRE EN RÉSILIATION DES CONTRATS :
Considérant que très subsidiairement, si la cour devait valider une éventuelle cession de droits, Mme [I] [I] demande la résiliation de ces contrats d’édition ou de cession de droits pour inexécution par la société MAGNARD-VUIBERT de ses obligations (absence de rémunération proportionnelle aux recettes, pas de garantie d’un minimum d’exemplaires pour le premier tirage, modification des illustrations sans autorisation écrite, absence de reddition de comptes) ;
Considérant que la SA MAGNARD-VUIBERT réplique que les griefs allégués ne s’appliquent qu’aux contrats d’édition dont les critères ne sont pas réunis en l’espèce et que Mme [I] [I] a pu être rémunérée forfaitairement dans la mesure où les illustrations litigieuses ont un caractère accessoire à l’oeuvre principale ;
Considérant ceci exposé, que les griefs formulés par Mme [I] [I] sur le fondement des articles L 132-10 (absence de garantie d’un minimum d’exemplaires pour le premier tirage), L 132-11 (absence de fabrication selon les conditions, dans la forme et suivant les modes d’expression prévus au contrat), L 132-13 et L 132-14 (absence de reddition de comptes et de justification de l’exactitude des comptes) du code de la propriété intellectuelle ne s’appliquent qu’aux contrats d’édition alors qu’il a été jugé que les contrats passés entre les parties pour les illustrations litigieuses ne sont pas des contrats d’édition mais des contrats de louage d’ouvrage avec cession des droits de propriété intellectuelle ;
Considérant qu’en ce qui concerne la rémunération des travaux d’illustration, il ressort des pièces ci-dessus analysées qu’elle a été forfaitaire ;
Considérant que l’article L 131-4, 5° du code de la propriété intellectuelle permet d’évaluer forfaitairement la rémunération de l’auteur lorsque l’utilisation de l’oeuvre ne présente qu’un caractère accessoire par rapport à l’objet exploité ;
Considérant qu’en ce qui concerne les romans il apparaît que Mme [I] [I] a réalisé, pour chacun d’eux, l’illustration de couverture et 7 illustrations intérieures, soit 8 pages, sur un total de 112 pages pour le roman ‘Le caméscope fantôme’, de 170 pages pour le roman ‘[C], enfant de la nuit’, de 159 pages pour le roman ‘Le motard sans visage’, de 112 pages pour le roman ‘L’anse rouge’, de 150 pages pour le roman ‘Le souffle de la pierre d’Irlande’, de 159 pages pour le roman ‘Le chant sacré des baleines’ et de 156 pages pour le roman ‘L’aigle de Kylemore’ ; qu’il est au demeurant constant que les textes de ces romans préexistaient aux illustrations et qu’ils constituent bien l’élément prédominant et essentiel de chacune de ces oeuvres dont les illustrations n’ont qu’un caractère accessoire ;
Considérant qu’en ce qui concerne les ouvrages scolaires il apparaît que Mme [I] [I] a réalisé 3 illustrations sur un total de 120 réalisées par 19 dessinateurs pour ”Puzzles CE1′, 7 illustrations sur un total de 114 réalisées par 23 dessinateurs pour ‘Puzzles CE2’, 6 illustrations sur un total de 120 réalisées par 23 dessinateurs pour ‘Puzzles CM1’, 5 illustrations sur un total de 114 réalisées par 23 dessinateurs pour ‘Puzzles CM2’, l’illustration de couverture et 24 illustrations sur un total de 178 réalisées par 3 dessinateurs pour ‘Grammaire et communication 5ème’ et l’illustration de couverture et 18 illustrations sur un total de 182 réalisées par 2 dessinateurs pour ‘Grammaire et communication 4ème’ ; qu’il est également constant que les textes de ces ouvrages scolaires préexistaient aux illustrations et qu’ils constituent l’élément prédominant et essentiel de chacune de ces oeuvres dont les illustrations n’ont qu’un caractère accessoire ;
Considérant dès lors que les commandes des illustrations en cause ont pu légalement faire l’objet de rémunérations forfaitaires expressément acceptées par Mme [I] [I] ;
Considérant que le jugement entrepris sera en conséquence confirmé en ce qu’il a dit que Mme [I] [I] a consenti des droits de reproduction de ses illustrations à la SA MAGNARD-VUIBERT pour les onze ouvrages en cause, moyennant le paiement d’une rémunération forfaitaire et en ce qu’il l’a déboutée de ses demandes en résiliation et en responsabilité contractuelle ;
IV : SUR LES ATTEINTES AU DROIT MORAL DE L’AUTEUR :
Considérant que Mme [I] [I] conclut à la confirmation du jugement entrepris en ce qu’il a dit que la société MAGNARD-VUIBERT avait porté atteinte à son droit moral en modifiant sans autorisation les illustrations de couverture des ouvrages ‘Le souffle de la pierre d’Irlande’ et ‘Le chant sacré des baleines’ mais réclame à ce titre la somme de 20.000 € de dommages et intérêts en réparation de son préjudice moral ;
Considérant qu’elle demande en outre de porter à 3.000 € par jour et par infraction constatée le montant de l’astreinte faisant interdiction à la société MAGNARD-VUIBERT d’exploiter ces illustrations ;
Considérant que la SA MAGNARD-VUIBERT ne conteste pas avoir procédé à ‘un léger recadrage’ des illustrations figurant en couverture de ces deux ouvrages mais soutient que cela n’altère pas le dessin et ne change en rien l’impression visuelle, cette circonstance étant liée aux besoins de la maquette de la nouvelle collection ;
Considérant que l’éditeur conclut au débouté des demandes de Mme [I] [I] ou, à titre subsidiaire, à la confirmation du jugement entrepris qui a évalué son préjudice moral à la somme d’un Euro ;
Considérant qu’il est constant qu’à l’occasion de la réimpression en 2002 des ouvrages ‘Le souffle de la pierre d’Irlande’ et ‘Le chant sacré des baleines’ les illustrations de couverture ont fait l’objet, de la part de la SA MAGNARD-VUIBERT, de recadrages et de modifications de couleurs sans l’autorisation de Mme [I] [I] ;
Considérant que la comparaison des couvertures montre que ces recadrages (images agrandies, premier plan détouré pour ‘Le souffle de la pierre d’Irlande’) et modifications des couleurs (ciel éclairci pour ‘Le chant sacré des baleines’, nuages orageux du ciel remplacé par un ciel mauve pour ‘Le souffle de la pierre d’Irlande’) dénaturent la forme et le fond des dessins, altérant ainsi les oeuvres de Mme [I] [I] et la perception que peut en avoir le public ; que ces modifications portent atteinte au droit au respect de son oeuvre au sens de l’article L 121-1 du code de la propriété intellectuelle ;
Considérant que les premiers juges ont fait une exacte évaluation du préjudice moral en résultant à la somme d’un Euro en observant que Mme [I] [I] avait conservé le silence durant plus de sept années à compter des réimpressions en cause et qu’en outre ces deux ouvrages ont fait l’objet en juin 2005 et mai 2007 de rééditions avec de nouvelles illustrations émanant d’autres auteurs ;
Considérant en conséquence que le jugement entrepris sera confirmé en ce qu’il a condamné la SA MAGNARD-VUIBERT à payer à Mme [I] [I] ladite somme d’un Euro à titre de dommages et intérêts et a interdit à la SA MAGNARD-VUIBERT toute exploitation des couvertures en cause sous astreinte de 150 € par jour de retard sans qu’il y ait lieu à augmenter le montant de cette astreinte ;
V : SUR LES AUTRES DEMANDES DE MME [I] [I] :
Considérant que Mme [I] [I] soutient que la société MAGNARD-VUIBERT n’a pas respecté son obligation de conseil dans le cadre des contrats d’entreprise en ne concluant pas des contrats d’édition et en contournant le droit d’auteur ; qu’elle réclame à ce titre la somme de 5.000 € de dommages et intérêts ;
Considérant enfin qu’elle réclame également à la société MAGNARD-VUIBERT la somme de 15.000 € à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive compte tenu de sa mauvaise foi ;
Considérant que la SA MAGNARD-VUIBERT conteste toute mauvaise foi de sa part et réplique avoir appliqué les règles du droit d’auteur, faisant valoir que Mme [I] [I] ne caractérise aucun manquement ni aucun préjudice distinct au titre d’une prétendue obligation de conseil et de loyauté ; qu’elle conclut ainsi à la confirmation du jugement entrepris qui a débouté Mme [I] [I] de ses demandes à ce titre ;
Considérant qu’il a été jugé précédemment que les contrats en cause n’étaient pas des contrats d’édition et que la SA MAGNARD-VUIBERT a respecté ses obligations contractuelles, que dès lors Mme [I] [I] ne rapporte la preuve d’aucun manquement particulier de la SA MAGNARD-VUIBERT à son obligation de conseil et de loyauté dans leurs relations contractuelles ;
Considérant d’autre part que dans la mesure où Mme [I] [I] est perdante dans la quasi-totalité de ses demandes, à l’exception de l’atteinte portée au respect de son oeuvre pour deux illustrations, il apparaît que la SA MAGNARD-VUIBERT n’a pas résisté abusivement à ses demandes et n’a pas fait dégénérer en abus son droit de se défendre en justice ;
Considérant en conséquence que le jugement entrepris sera confirmé en ce qu’il a débouté Mme [I] [I] du surplus de ses demandes relatives à la prétendue violation des obligations contractuelles et à la prétendue résistance abusive de la SA MAGNARD-VUIBERT ;
VI : SUR LA DEMANDE RECONVENTIONNELLE DE LA SA MAGNARD-VUIBERT :
Considérant que la SA MAGNARD-VUIBERT soutient que Mme [I] [I] a agi de façon malicieuse et de mauvaise foi en multipliant les griefs les plus artificiels, en proposant des modes de calcul qu’elle savait inexacts et en sollicitant des dommages et intérêts au titre de prétendus préjudices qui ne sont ni expliqués ni avérés, lui réclamant la somme de 2.000 € à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive ;
Considérant que Mme [I] [I] conclut sur ce point au débouté de la SA MAGNARD-VUIBERT ;
Considérant qu’il n’est pas établi à l’encontre de Mme [I] [I] une faute de nature à faire dégénérer en abus son droit d’ester en justice et d’user des voies de recours prévues par la loi, étant rappelé qu’un justiciable peut légitimement se méprendre sur l’étendue ou la réalité de ses droits sans que cela constitue en soi une faute engageant sa responsabilité civile ;
Considérant en conséquence que le jugement entrepris sera confirmé en ce qu’il a débouté la SA MAGNARD-VUIBERT de l’ensemble de ses demandes reconventionnelles ;
VII : SUR LES AUTRES DEMANDES :
Considérant qu’il est équitable d’allouer à la SA MAGNARD-VUIBERT la somme de 2.000 € au titre des frais par elle exposés en cause d’appel et non compris dans les dépens, le jugement entrepris étant au surplus confirmé en ce qu’il a débouté chacune des parties de leurs demandes respectives au titre des frais irrépétibles de première instance ;
Considérant que Mme [I] [I], partie perdante en son appel, ne pourra qu’être déboutée de sa demande en paiement au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
Considérant que pour les mêmes motifs, Mme [I] [I] sera condamnée au paiement des dépens de la procédure d’appel, le jugement entrepris étant au surplus confirmé en ce qu’il a laissé à chacune des parties la charge de ses propres dépens de première instance ;
P A R C E S M O T I F S
La Cour, statuant publiquement et contradictoirement,
Confirme en toutes ses dispositions le jugement entrepris,
Condamne Mme [I] [I] à payer à la SA MAGNARD-VUIBERT la somme de DEUX MILLE EUROS (2.000 €) au titre des frais exposés en cause d’appel et non compris dans les dépens,
Déboute Mme [I] [I] de sa demande en paiement au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
Condamne Mme [I] [I] aux dépens de la procédure d’appel, lesquels seront recouvrés conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.
LE GREFFIER LE PRESIDENT