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En application de l’article L. 653-8 al 3 du code de commerce, le tribunal peut prononcer une interdiction de diriger, gérer, administrer ou contrôler, directement ou indirectement, toute entreprise commerciale ou artisanale, toute exploitation agricole et toute personne morale, à l’encontre de toute personne mentionnée à l’article L. 653-1 qui a omis sciemment de demander l’ouverture d’une procédure de redressement ou de liquidation judiciaire dans le délai de quarante-cinq jours à compter de la cessation des paiements.
L’article L. 653-11 énonce que le tribunal fixe la durée de la mesure qui ne peut être supérieure à 15 ans.
En l’espèce, le tribunal de commerce a prononcé une mesure d’interdiction de gérer à l’encontre de M. [S] sur le fondement de l’article L. 653-8 al 3 en raison du dépassement du délai de 45 jours après la cessation des paiements.
L’appelant ne conteste pas le principe de la sanction mais sa durée, arguant que celle-ci doit être motivée au regard de la gravité des fautes et de sa situation personnelle.
M. [S] fait valoir que les opérations de vérification du passif sont toujours en cours et que la durée de la sanction devrait être réduite compte tenu de sa longue période sans problèmes de gestion.
Après examen des éléments présentés, la cour estime qu’une durée de 6 ans constitue une sanction proportionnée, infirmant ainsi le jugement initial.
La durée de l’interdiction de gérer est fixée à 6 ans, les dispositions relatives aux mesures de publicité légale et aux dépens étant confirmées. M. [S] est condamné aux dépens de l’appel.
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REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
AFFAIRE :N° RG 22/02412 –
N° Portalis DBVC-V-B7G-HCEB
ARRÊT N°
JB.
ORIGINE : DECISION en date du 06 Septembre 2022 du Tribunal de Commerce de COUTANCES
RG n° 2022001231
COUR D’APPEL DE CAEN
DEUXIEME CHAMBRE CIVILE ET COMMERCIALE
ARRÊT DU 07 SEPTEMBRE 2023
APPELANT :
Monsieur [U] [G] [E] [X] [S]
N° SIRET : 444 422 356
né le [Date naissance 2] 1984 à [Localité 8]
[Adresse 3]
[Localité 4]
représenté par Me Jérémie PAJEOT, avocat au barreau de CAEN,
assisté de Me Nicolas SIMON DE KERGUNIC, substitué par Me ROBERT, avocats au barreau de GRASSE
INTIMES :
Maître [I] [M] liquidateur judiciaire de M. [U] [S]
[Adresse 6]
[Localité 5]
représenté et assisté de Me Estelle DARDANNE, avocat au barreau de COUTANCES
Monsieur le Procureur Général
Cour d’Appel de Caen, [Adresse 7]
[Localité 1]
représenté par M. FAURY, Substitut Général
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :
Mme EMILY, Président de Chambre,
Mme COURTADE, Conseillère,
M. GOUARIN, Conseiller,
DÉBATS : A l’audience publique du 25 mai 2023
MINISTERE PUBLIC : En présence du Ministère Public représenté par M. FAURY, Substitut Général,
GREFFIER : Mme LE GALL, greffier
ARRÊT prononcé publiquement le 07 septembre 2023 à 14h00 par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile et signé par Madame EMILY, président, et Mme LE GALL, greffier
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M. [U] [S], immatriculé au registre du commerce en décembre 2002, exerce depuis le 30 janvier 2003 une activité de terrassements travaux publics et bureaux, entretien d’espaces verts et forestiers, locations de matériel avec chauffeur, achat et vente de matériaux, transport de marchandises.
Par jugement en date du 13 octobre 2020, le tribunal de commerce de Coutances a ouvert une procédure de redressement judiciaire au profit de M. [U] [S], a fixé provisoirement la date de cessation des paiements au 14 avril 2019 et a désigné Me [I] [M] en qualité de mandataire judiciaire.
Par jugement en date du 4 janvier 2022, le tribunal a prononcé la liquidation judiciaire de M. [U] [S] et désigné Me [I] [M] en qualité de liquidateur judiciaire.
Le 6 mai 2022, Me [I] [M], ès qualités de liquidateur judiciaire, a émis et transmis au procureur de la République, ainsi qu’au juge-commissaire, un rapport aux fins de voir prononcer une mesure d’interdiction de gérer à l’égard de M. [U] [S].
Par jugement du 6 septembre 2022, le tribunal de commerce de Coutances, saisi par le procureur de la République, a :
– prononcé à l’encontre de M. [U] [S], une mesure d’interdiction de diriger, gérer, administrer ou contrôler, directement ou indirectement, toute entreprise commerciale ou artisanale, toute exploitation agricole et toute personne morale, pour une durée de dix ans ;
– dit qu’en application des articles L. 128-1 et suivants et R. 128-1 et suivants du code de commerce, cette sanction fera l’objet d’une inscription au fichier national automatisé des interdits de gérer, tenu sous la responsabilité du conseil national des greffiers des tribunaux de commerce auprès duquel la personne inscrite pourra exercer ses droits d’accès et de rectification prévus par les articles 15 et 16 du règlement (UE) 2016/679 du Parlement européen et du Conseil du 27 avril 2016 relatif à la protection des personnes physiques à l’égard du traitement des données à caractère personnel et à la libre circulation de ces données ;
– dit que le greffier procédera à la signification de la présente décision, dans les quinze jours, à M. [U] [S] ;
– dit que le greffier procédera aux publicités légales lorsque la présente décision sera définitive ;
– condamné M. [U] [S] aux entiers dépens de l’instance, mais dit qu’ils seront avancés par la procédure collective.
Par déclaration en date du 15 septembre 2022, M. [S] a relevé appel de ce jugement.
Par dernières conclusions déposées le 5 décembre 2022, M. [U] [S] demande à la cour de :
– Infirmer le jugement entrepris en ce qu’il a fixé à 10 ans la durée de l’interdiction de gérer infligée à [U] [S],
– Condamner [U] [S] à une interdiction de gérer limitée à deux années,
– Débouter Me [I] [M] et le Procureur général de surplus de leurs demandes,
– Statuer ce que droit quant aux dépens.
Par dernières conclusions récapitulatives déposées le 13 décembre 2022, le ministère public conclut à la confirmation de la décision entreprise, sauf à ramener à la plus juste proportion de six années la durée de l’interdiction prononcée.
Par dernières conclusions déposées le 4 janvier 2023, Me [I] [M] ès qualités de liquidateur judiciaire de M. [S] demande à la cour de :
– Le déclarer bien fondé en ses demandes.
En conséquence,
– Confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a condamné M. [U] [S] à une interdiction de gérer et condamner M. [U] [S] à une interdiction de gérer,
– Statuer ce que de droit quant à la durée de ladite interdiction,
– Condamner M. [U] [S] aux entiers dépens de première instance et d’appel.
L’ordonnance de clôture est intervenue le 12 avril 2023.
Il est expressément renvoyé aux écritures précitées pour un plus ample exposé des prétentions et moyens des parties.
MOTIFS
En aplication de l’article L. 653-8 al 3 du code de commerce, le tribunal peut prononcer une interdiction de diriger, gérer, administrer ou contrôler, directement ou indirectement, soit toute entreprise commerciale ou artisanale, toute exploitation agricole et toute personne morale, soit une ou plusieurs de celles-ci, à l’encontre de toute personne mentionnée à l’article L. 653-1 qui a omis sciemment de demander l’ouverture d’une procédure de redressement ou de liquidation judiciaire dans le délai de quarante-cinq jours à compter de la cessation des paiements, sans avoir, par ailleurs, demandé l’ouverture d’une procédure de conciliation.
L’article L. 653-11 énonce que le tribunal fixe la durée de la mesure qui ne peut être supérieure à 15 ans.
En l’espèce, le tribunal de commerce a prononcé une mesure d’interdiction de gérer à l’encontre de M. [S] sur le fondement de l’article L. 653-8 al 3 en retenant que ce dernier était en état de cessation des paiements depuis au moins 18 mois lorsqu’il a sollicité l’ouverture d’une procédure de redressement judiciaire et que le délai de 45 jours était donc largement dépassé.
L’appelant ne conteste pas le principe de la sanction mais sa durée.
Le quantum de la sanction doit être motivé’au regard de la gravité des fautes et de la situation personnelle de l’intéressé.
Il résulte des pièces produites que les opérations de vérification du passif sont toujours en cours ; qu’au 15 décembre 2022, le passif total définitif s’élevait à la somme de 1.505.598,56 euros et le passif non définitif (contesté) à 1.854.917,56 euros ; que le passif généré entre la date de cessation des paiements retenue et la date du jugement d’ouverture s’élève à 738.762,93 euros , ce montant tenant compte de l’arrêt de la cour d’appel de Caen du 4 octobre 2022 statuant sur la créance d’AT2N (pièces n° 4 et 5 de Me [M]).
Le défaut de déclaration dans le délai légal constitue une faute grave de M. [S] au regard de la longue période pendant laquelle il a poursuivi indûment son activité (18 mois) et de la très forte augmentation du passif pendant celle-ci.
Les causes de l’état de cessation des paiements, les griefs portés contre le créancier Diffuco et les mesures prises par l’appelant postérieurement à l’ouverture de la procédure collective (restructurations, action en justice contre Diffuco) ne sont pas de nature à enlever à son manquement son caractère de gravité.
En revanche, il doit être tenu compte du fait que M. [S] a créé son entreprise en 2002 et qu’il n’a pas connu de problèmes de gestion pendant près de 17 ans.
M. [S] ne produit aucune pièce relative à sa situation professionnelle et personnelle actuelle.
Au vu de ces éléments, la cour estime qu’une durée de 6 années constitue une sanction proportionnée.
Il convient donc d’infirmer le jugement et de fixer la durée de l’interdiction de gérer à 6 ans.
Les dispositions relatives aux mesures de publicité légale et aux dépens sont confirmées.
M. [S] succombant, est condamné aux dépens de l’appel.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire, mis à disposition au greffe,
CONFIRME le jugement entrepris sauf en ce qu’il a fixé la durée de l’interdiction de gérer à 10 ans ;
Statuant à nouveau du chef de la disposition infirmée et y ajoutant,
PRONONCE à l’encontre de M. [U] [S], une mesure d’interdiction de diriger, gérer, administrer ou contrôler, directement ou indirectement, toute entreprise commerciale ou artisanale, toute exploitation agricole et toute personne morale, pour une durée de six ans ;
CONDAMNE M. [U] [S] aux dépens de l’appel.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT
N. LE GALL F. EMILY