ICI Concept Store c/ ICHI

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ICI Concept Store c/ ICHI
Ce point juridique est utile ?

Le dépôt de la marque ICHI est valide et ne porte pas atteinte à la marque ICI Concept Store dès lors qu’il existe une nette différence de perception intellectuelle entre les deux signes lesquels, sont, en outre, également arbitraires et donc, distinctifs, pour les produits qu’ils sont appelés à désigner.

Si l’expression anglophone CONCEPT STORE, évocatrice d’un point de vente ou d’une boutique dédiée à des produits se rattachant à un même concept, est moindrement distinctive, le signe ICI CONCEPT STORE, pris dans son ensemble, présente en effet un caractère distinctif de par la présence en position dominante de l’élément arbiraire ICI.

Il importe de rechercher, dès lors que le signe second n’est pas identique aux marques premières qu’il ne reproduit pas sans modification ni ajout en tous les éléments les composant, s’il existe un risque de confusion, lequel doit être apprécié globalement en tenant compte de tous les facteurs pertinents du cas d’espèce ; à cet égard, le degré élevé de similarité des produits en cause, qui n’est pas discuté, sera pris en considération à titre de facteur pertinent du cas d’espèce; l’appréciation globale du risque de confusion est fondée, en ce qui concerne la similitude visuelle, phonétique ou conceptuelle des signes en présence, sur l’impression d’ensemble produite par ceux-ci en tenant compte de leurs éléments dominants et distinctifs; il est, sur ce point, précisé que la marque qui jouit d’une large connaissance sur le segment de marché concerné se verra reconnaître un caractère distinctif renforcé de nature à aggraver le risque de confusion ; enfin, le risque de confusion comprend le risque d’association, c’est -à-dire le risque que le consommateur perçoive les signes en présence comme des déclinaisons de marques servant à désigner différentes gammes de services provenant d’une même entreprise ou d’entreprises économiquement liées.

Résumé de l’affaire : Le 24 novembre 2022, le directeur général de l’INPI a rejeté l’opposition de la société DK Company Vejle, titulaire de la marque ICHI en classe 25, contre l’enregistrement de la marque ICI Concept Store, déposée le 11 mars 2022 par Mme [E] [F] pour la société en formation Ici Concept Store, visant des vêtements, chemises, foulards et chaussures de plage. La société DK Company Vejle a introduit un recours en annulation de cette décision, déposé le 8 février 2023, avec des conclusions supplémentaires remises le 8 juin 2023 et notifiées le 30 juin 2023. Le directeur général de l’INPI a fourni des observations écrites le 10 juillet 2023. Les conclusions de Mme [E] [F] et de la société ICI Concept Store ont été déposées et notifiées le 8 septembre 2023. Le ministère public a été informé de l’audience prévue le 28 mai 2024.

REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

18 septembre 2024
Cour d’appel de Paris
RG n°
23/03488
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 5 – Chambre 1

ARRÊT DU 18 SEPTEMBRE 2024

(n° 101/2024, 5 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : 23/03488 – N° Portalis 35L7-V-B7H-CHE4O

Décision déférée à la Cour : décision du 24 novembre 2022 de l’Institut national de la propriété industrielle – Réf OPP 22-2267

DÉCLARANTE AU RECOURS

Société DK COMPANY VEJLE A/S

Société de droit danois (CVR 76180113), agissant en la personne de son directeur général domicilié au siège social situé

[Adresse 9]

[Localité 5]

DANEMARK

Représentée par Me Frédérique ETEVENARD, avocat au barreau de PARIS, toque : K0065

Assistée de Me Tiphaine CHEVALIER et Me Magali LORSIN-CADORET, avocats au barreau de PARIS, toque : B0905

EN PRÉSENCE DE :

MONSIEUR LE DIRECTEUR GÉNÉRAL DE L’INSTITUT NATIONAL DE LA PROPRIÉTÉ INDUSTRIELLE

[Adresse 7]

[Adresse 7]

[Localité 6]

Représenté par Héloise TRICOT, chargée de mission, munie d’un pouvoir général

APPELÉES EN CAUSE

Madame [E] [P] [K] [T] épouse [F]

née le 21 avril 1971 à [Localité 8], de nationalité française

Demeurant [Adresse 4]

[Localité 2]

S.A.S. ICI CONCEPT STORE

Immatriculée au registre du commerce et des sociétés de NICE sous le numéro 912 594 256, rise en la personne de ses représentants légaux domiciliés au siège social situé

[Adresse 3]

[Localité 1]

Représentées par Me Myriam MOATTY de l’ASSOCIATION COUSIN ET ASSOCIES, avocat au barreau de PARIS, toque : R159

Assistées de Me Eva DURAND substituant Me Myriam MOATTY, toutes deux de l’ASSOCIATION COUSIN ET ASSOCIES, avocats au barreau de PARIS, toque : R159

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions de l’article 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 28 mai 2024, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Mme Isabelle DOUILLET, présidente de chambre et Mme Brigitte CHOKRON, magistrat honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles.

Ces magistrates ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

– Mme Isabelle DOUILLET, présidente de chambre,

– Mme Françoise BARUTEL, conseillère,

– Mme Brigitte CHOKRON, magistrat honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles.

Greffier lors des débats : Mme Karine ABELKALON

ARRÊT :

contradictoire ;

par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

signé par Isabelle DOUILLET, présidente de chambre, et par Soufiane HASSAOUI, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

*

Vu la décision rendue le 24 novembre 2022 par le directeur général de l’Institut national de propriété industrielle (INPI) rejetant l’opposition formée par la société DK Company Vejle, titulaire de la marque verbale ICHI en classe 25, à la demande d’enregistrement de la marque verbale ICI Concept Store déposée le 11 mars 2022 par Mme [E] [F] pour le compte de la société en formation Ici Concept Store et destinée à désigner en classe 25 des ‘vêtements; chemises; foulards; chaussures de plage’.

Vu le recours de la société DK Company Vejle (de droit danois) en annulation de cette décision, remis au greffe le 8 février 2023, et les conclusions au soutien de ce recours remises au greffe le 8 juin 2023 et notifiées par voie électronique le 30 juin 2023.

Vu les observations écrites du directeur général de l’INPI en date du 10 juillet 2023.

Vu les conclusions de Mme [E] [F] et la société ICI Concept Store (SAS) remises au greffe et notifiées par voie électronique le 8 septembre 2023.

Le ministère public ayant été avisé de la date de l’audience tenue devant la cour le 28 mai 2024.

SUR CE :

Pour rejeter l’opposition à la demande d’enregistrement, la décision du directeur général de l’INPI, objet du recours, a retenu que le signe ICI CONCEPT STORE est exclusif de tout risque de confusion avec la marque antérieure ICHI, même si les produits en cause sont similaires ou identiques.

La marque antérieure, constituée du signe verbal ICHI, désigne en classe 25 des ‘vêtements; chaussures; chapellerie’.

La demande d’enregistrement, portant sur le signe verbal ICI CONCEPT STORE, est destinée à désigner en classe 25 des ‘vêtements; chemises; foulards; chaussures de plage’.

Il n’est pas contesté que les produits en cause sont similaires ou identiques.

La discussion est en effet circonscrite à la comparaison des signes .

Selon la requérante, les signes opposés présentent des ressemblances telles que le consommateur moyen de la catégorie de produits de consommation courante en cause serait fondé à leur attribuer, une origine commune ou, à tout le moins, à les associer comme provenant d’entreprises économiquement liées car le signe second ICI CONCEPT STORE pourrait être perçu comme une déclinaison de la marque première ICHI.

Elle estime en conséquence que le risque de confusion est caractérisé et l’atteinte à ses droits antérieurs constituée, justifiant l’annulation de la décision du directeur général de l’INPI qui a rejeté son opposition à la demande d’enregistrement.

Mme [E] [F] et la société ICI CONCEPT STORE approuvent quant à elles la décision du directeur général de l’INPI dont elles s’approprient, pour l’essentiel, les motifs.

Ceci posé, il importe de rechercher, dès lors que le signe second n’est pas identique aux marques premières qu’il ne reproduit pas sans modification ni ajout en tous les éléments les composant, s’il existe un risque de confusion, lequel doit être apprécié globalement en tenant compte de tous les facteurs pertinents du cas d’espèce ; à cet égard, le degré élevé de similarité des produits en cause, qui n’est pas discuté, sera pris en considération à titre de facteur pertinent du cas d’espèce; l’appréciation globale du risque de confusion est fondée, en ce qui concerne la similitude visuelle, phonétique ou conceptuelle des signes en présence, sur l’impression d’ensemble produite par ceux-ci en tenant compte de leurs éléments dominants et distinctifs; il est, sur ce point, précisé que la marque qui jouit d’une large connaissance sur le segment de marché concerné se verra reconnaître un caractère distinctif renforcé de nature à aggraver le risque de confusion ; enfin, il doit être rappelé que le risque de confusion comprend le risque d’association, c’est -à-dire le risque que le consommateur perçoive les signes en présence comme des déclinaisons de marques servant à désigner différentes gammes de services provenant d’une même entreprise ou d’entreprises économiquement liées.

Force est de constater, au plan visuel, que le signe ICI CONCEPT STORE de la demande d’enregistrement se distingue d’emblée, en ce qu’il se compose de trois éléments verbaux, de la marque antérieure ICHI constituée d’un élément verbal unique. Les signes présentent ainsi des structures différentes outre qu’ils occupent dans l’espace des longueurs différentes à raison des quinze lettres que renferme l’un quand l’autre n’en comprend que quatre.

La requérante souligne que l’élément ICI est très proche du signe ICHI avec lequel il partage les deux premières lettres IC et la lettre finale I ; elle ajoute que l’élément ICI est situé en position d’attaque ce qui lui confère au sein du signe second un caractère dominant et accentue, auprès du public, la perception de ressemblance entre les signes.

Cependant, le directeur général de l’INPI a pertinemment relevé qu’en présence de signes courts tels ICI et ICHI respectivement constitués de trois lettres et quatre lettres, toute différence entre les signes est aisément remarquable et peut s’avérer déterminante pour les discriminer. En l’espèce, l’ajout de la lettre H, de surcroît située en position centrale, contribue à différencier nettement la marque antérieure ICHI de l’élément ICI, ce d’autant qu’il s’agit de signes courts, donc facilement mémorisables pour le consommateur d’attention moyenne auquel la présence de cette lettre supplémentaire ne pourra pas échapper.

Au plan phonétique les signes opposés s’énoncent sur des rythmes différents de deux temps pour la marque antérieure et cinq temps pour le signe de la demande d’enregistrement. En outre, les sonorités finales CHI et ORE sont radicalement distinctes.

La requérante fait valoir que les termes ICHI et ICI offrent le même son d’attaque I et le même son final I, ajoutant que les séquence CH et C ‘sont phonétiquement proches étant composées de consonnes fricatives sourdes’.

Cependant, la séquence CI, qui se prononce ‘SI’, donne à entendre un sifflement que l’on ne retrouve aucunement dans le son ‘CHI’.

En outre, le signe contesté ICI CONCEPT STORE doit être considéré dans son ensemble et la comparaison entre les signes ne saurait tenir compte que du seul élément ICI pris isolément.

Or, les signes opposés, pris dans leur ensemble, offrent, au plan phonétique, des différences notables qui sont immédiatement perceptibles en dépit de la présence, commune aux deux signes, de la lettre I en position d’attaque.

Au plan intellectuel, la dénomination ICHI de la marque antérieure ne revêt aucune signification pour le public français, tandis que l’élément ICI du signe contesté sera d’emblée compris comme désignant l’adverbe de lieu ‘ici’ définissant l’endroit où l’on se trouve.

Au soutien de son recours la société DK Company Vejle fait nouvellement valoir que la dénomination ICHI est issue de différents patois du nord de la France et se traduit, ainsi qu’en attestent les dictionnaires de patois, datant du 19ème siècle, versés aux débats, par l’adverbe de lieu ICI. Or, les recours à l’encontre des décisions du directeur général de l’INPI statuant sur une opposition à l’enregistrement d’une marque sont, par application des dispositions de l’article R. 411-19 du code de la propriété intellectuelle, des recours en annulation dépourvus d’effet dévolutif et non pas des recours en réformation déférant à la cour l’entier litige en fait et en droit. La cour saisie de tels recours ne peut donc connaître de pièces qui n’auraient pas été préalablement soumises au directeur général de l’INPI. Il est en toute hypothèse peu probable que la connaissance des patois du 19ème siècle du nord de la France soit répandue au sein du public français du 21ème siècle et il n’est donc pas établi que ce public associera la dénomination ICHI à l’adverbe de lieu ICI et lui attribuera la même signification.

Il découle de ce qui précède une nette différence de perception intellectuelle entre les deux signes lesquels, sont, en outre, également arbitraires et donc, distinctifs, pour les produits qu’ils sont appelés à désigner. Si l’expression anglophone CONCEPT STORE, évocatrice d’un point de vente ou d’une boutique dédiée à des produits se rattachant à un même concept, est moindrement distinctive, le signe ICI CONCEPT STORE, pris dans son ensemble, présente en effet un caractère distinctif de par la présence en position dominante de l’élément arbiraire ICI.

La requérante soutient nouvellement devant la cour que le large succès rencontré par les produits couverts par sa marque constitue un facteur aggravant du risque de confusion à raison du caractère distinctif renforcé dont jouit cette marque. Cependant, la cour ne peut connaître des allégations de la requérante qui ne sont pas recevables dans le cadre du présent recours en annulation faute d’avoir été préalablement examinées dans le cadre de la procédure d’opposition.

Il résulte en définitive de leur comparaison globale que les signes présentent au plan visuel, au plan phonétique et au plan intellectuel des différences prépondérantes qui conduisent à écarter, nonobstant le fort degré de similitude entre les produits, le risque de confusion incluant le risque d’association. En effet, si un faible degré de similitude entre les signes peut être compensé par un fort de degré de similitude entre les produits, encore faut-il qu’il existe suffisamment de ressemblances entre les signes ce qui n’est pas le cas en l’espèce car, ainsi qu’il a été observé, les signes se distinguent radicalement l’un de l’autre par des différences prépondérantes. En conséquence, le consommateur moyen de la catégorie de produits concernés, à savoir des produits d’habillement, produits de consommation courante, normalement attentif et avisé, ne sera pas enclin à confondre le signe second avec la marque antérieure ni à percevoir ce signe comme une déclinaison de la marque première servant à désigner une gamme de produits provenant d’une même entreprise ou d’entreprises économiquement liées.

La société DK Company Vejle souligne, vainement, que la marque ICI CONCEPT STORE fonde son identité sur la vente saisonnière de vêtements artisanaux ce qui correspond exactement au concept proposé par la marque antérieure ICHI. Ainsi qu’il a été justement rappelé par le directeur général de l’INPI, les conditions d’exploitation de la marque sont indifférentes dans l’appréciation globale du risque confusion qui ne doit exclusivement porter que sur la comparaison des signes tels qu’ils sont libellés dans l’enregistrement.

En conséquence, la décision du directeur général de l’INPI qui a déclaré mal fondée l’opposition à la demande d’enregistrement de la marque ICI CONCEPT STORE n’est pas critiquable et le recours en annulation de cette décision doit être rejeté.

Il n’est pas inéquitable de laisser à la charge des parties les frais irrépétibles exposés à l’occasion de la présente procédure qui ne donne pas lieu à condamnation aux dépens.

PAR CES MOTIFS,

Rejette le recours de la société DK Company Vejle,

Dit n’y avoir lieu à condamnation au titre des frais irrépétibles,

Dit n’y avoir lieu à condamnation aux dépens,

Dit que le présent arrêt sera notifié par lettre recommandée avec avis de réception par les soins du greffier aux parties et au directeur général de l’Institut national de la propriété industrielle.

LE GREFFIER LA PRÉSIDENTE


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