Gérant de fait : 29 juin 2022 Cour d’appel d’Amiens RG n° 21/03715

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Gérant de fait : 29 juin 2022 Cour d’appel d’Amiens RG n° 21/03715
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ARRET

Association UNEDIC DELEGATION AGS CGEA D'[Localité 6]

C/

[M]

S.C.P. ANGEL [T]

copie exécutoire

le 29/06/2022

à

selarl LEXAVOUE -2

selarl WIBAULT

FB/IL/SF

COUR D’APPEL D’AMIENS

5EME CHAMBRE PRUD’HOMALE

ARRET DU 29 JUIN 2022

*************************************************************

N° RG 21/03715 – N° Portalis DBV4-V-B7F-IFK6

JUGEMENT DU CONSEIL DE PRUD’HOMMES – FORMATION PARITAIRE DE CREIL DU 24 JUIN 2021 (référence dossier N° RG 20/00181)

PARTIES EN CAUSE :

APPELANTE

Association UNEDIC DELEGATION AGS CGEA D'[Localité 6]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

[Localité 6]

représentée et concluant par Me Hélène CAMIER de la SELARL LEXAVOUE AMIENS-DOUAI, avocat au barreau D’AMIENS

ET :

INTIMES

Monsieur [Y] [M]

né le 01 Mai 1960 à [Localité 7]

de nationalité Française

[Adresse 3]

[Localité 5]

représenté et concluant par Me François-xavier WIBAULT de la SELARL WIBAULT AVOCAT, avocat au barreau d’ARRAS substituée par Me Pierre AZAR, avocat au barreau de LILLE

S.C.P. ANGEL [T] es qualité de mandataire liquidateur de la SARL DMI DEPANNAGE MAINTENANCE IMMOBILIERE

[Adresse 2]

[Localité 4]

représentée et concluant par Me Hélène CAMIER de la SELARL LEXAVOUE AMIENS-DOUAI, avocat au barreau D’AMIENS

DEBATS :

A l’audience publique du 18 mai 2022, devant Mme Fabienne BIDEAULT, siégeant en vertu des articles 786 et 945-1 du code de procédure civile et sans opposition des parties, l’affaire a été appelée.

Mme Fabienne BIDEAULT indique que l’arrêt sera prononcé le 29 juin 2022 par mise à disposition au greffe de la copie, dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

GREFFIERE LORS DES DEBATS : Mme Isabelle LEROY

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE :

Mme Fabienne BIDEAULT en a rendu compte à la formation de la 5ème chambre sociale, composée de :

Mme Laurence de SURIREY, présidente de chambre,

Mme Fabienne BIDEAULT, conseillère,

Mme Marie VANHAECKE-NORET, conseillère,

qui en a délibéré conformément à la Loi.

PRONONCE PAR MISE A DISPOSITION :

Le 29 juin 2022, l’arrêt a été rendu par mise à disposition au greffe et la minute a été signée par Mme Laurence de SURIREY, Présidente de Chambre et Mme Isabelle LEROY, Greffière.

*

* *

DECISION :

Vu le jugement en date du 24 juin 2021par lequel le conseil de prud’hommes de Creil, statuant dans le litige opposant M. [Y] [M] au liquidateur de la société Dépannage Maintenance Immobilière (DMI), en présence du CGEA d'[Localité 6], a dit M. [M] bien fondé dans ses demandes, a dit que la décision de la SCP [T]-Angel du 26 septembre 2017 est dépourvue de cause réelle et sérieuse, a fixé la moyenne des trois derniers mois de salaire de M. [M] à 3 814 euros, a fixé au passif de la société DMI diverses sommes à titre de rappels de salaires échus et impayés à la date du jugement déclaratif (11 148,64 euros) et congés payés afférents (1 144,20 euros), indemnité compensatrice de congés payés (8 105,45 euros), indemnité compensatrice de licenciement pour motif économique (8 549,57 euros), indemnité compensatrice de préavis (11 442 euros) et congés payés afférents (1 144,20 euros), dommages et intérêts (11 442 euros), indemnité de procédure (500 euros), a ordonné à Me [T] ès qualité de remettre au salarié ses documents de fin de contrat sous astreinte de 100 euros par mois à compter de la notification du jugement, s’est réservé la liquidation de l’astreinte, a déclaré la décision opposable au CGEA d'[Localité 6], a dit que les dépens seront inscrits en frais privilégiés au passif de la liquidation judiciaire de la société DMI ;

Vu l’appel interjeté par voie électronique le 16 juillet 2021par l’Unédic délégation AGS CGEA d'[Localité 6] venant aux droits du CGEA d'[Localité 6] à l’encontre de cette décision qui lui a été notifiée le 28 juin précédent ;

Vu la constitution d’avocat de Me [T], liquidateur de la société DMI, intimé, effectuée par voie électronique le 18 août 2021 ;

Vu la constitution d’avocat de M. [M], intimé, effectuée par voie électronique le 8 novembre 2021 ;

Vu les dernières conclusions notifiées par voie électronique le 23 février 2022 par lesquelles l’Unédic délégation AGS CGEA d'[Localité 6], appelante, soutenant que M. [Y] [M] n’avait pas la qualité de salarié de la société, qu’il se comportait en qualité de gérant de fait de l’entreprise, contestant l’existence d’un lien de subordination eu égard aux circonstances de l’espèce et notamment aux relations familiales existant entre l’intimé et le gérant de la société, aux précédentes fonctions occupées par l’intimé, sollicite à titre principal l’infirmation du jugement entrepris, demande à la cour de débouter M. [M] de l’intégralité de ses demandes, demande à titre subsidiaire que celui-ci soit débouté de sa demande de dommages et intérêts et précise s’en rapporter à l’appréciation de la cour sur les demandes de rappels de salaire, congés payés afférents indemnité compensatrice de congés payés, préavis et congés payés afférents et indemnité de licenciement, rappelle en tout état de cause les termes de sa garantie ;

Vu les dernières conclusions notifiées par voie électronique le 22 octobre 2021 aux termes desquelles le liquidateur ès qualités, intimé, appelant incident, contestant la réalité du contrat de travail invoqué par M. [M], sollicite à titre principal l’infirmation du jugement entrepris, demande à la cour de débouter M. [M] de l’intégralité de ses demandes, demande à titre subsidiaire que celui-ci soit débouté de sa demande de dommages et intérêts et précise s’en rapporter à l’appréciation de la cour sur les demandes de rappels de salaire, congés payés afférents indemnité compensatrice de congés payés, préavis et congés payés afférents et indemnité de licenciement, sollicite en tout état de cause la condamnation de l’intimé au paiement d’une indemnité de procédure (1 000 euros) ainsi qu’aux dépens ;

Vu les dernières conclusions notifiées par voie électronique le 14 janvier 2022 aux termes desquelles M. [M], intimé, réfutant les moyens et l’argumentation de la partie appelante, contestant avoir eu la qualité de gérant de fait de la société, affirmant être salarié de la société depuis le 23 juin 1986, ne pas avoir été intégralement rempli de ses droits au titre de l’exécution de son contrat de travail en ce qu’il n’a pas perçu de salaires pour la période comprise entre avril et juin 2017 et n’a pas été rempli de ses droits au titre de ses congés payés, soutenant ne pas avoir été rempli de ses droits au titre de la rupture du contrat de travail en ce qu’il n’a pas perçu d’indemnité de licenciement et d’indemnité compensatrice de préavis, sollicite la confirmation du jugement entrepris en toutes ses dispositions, demande que la société DMI soit en outre condamnée à lui verser une indemnité de procédure (3 000 euros) ainsi qu’aux dépens ;

Vu l’ordonnance de clôture en date du 9 mars 2022 renvoyant l’affaire pour être plaidée à l’audience du 18 mai 2022 ;

Vu les conclusions transmises le 23 février 2022 par l’appelante et les 22 octobre 2021 et 14 janvier 2022 par les intimés auxquelles il est expressément renvoyé pour l’exposé détaillé des prétentions et moyens présentés en cause d’appel ;

SUR CE, LA COUR

La société Dépannage Maintenance Immobilière (DMI) avait pour activité l’entretien, la maintenance de bâtiments, le nettoyage et l’hygiène de locaux, espaces verts, industriels, commerciaux et particuliers. Elle employait 12 salariés.

La société a été créée le 1er septembre 1994 et immatriculée au registre du commerce et des sociétés le 17 octobre 1994.

Elle a été créée par M. [Y] [M], M. [W] [M], Mme [H] [M], MM [C], [V] et [U] étant précisé que M. [W] [M] est le fils de M. [Y] [M] et de Mme [H] [M].

M. [Y] [M] était gérant de droit de la société jusqu’au 1er avril 2010, date à partir de laquelle M. [W] [M] a été désigné gérant.

Par jugement du 28 juin 2017, le tribunal de commerce de Compiègne a prononcé la liquidation judiciaire de la société DMI et désigné Me [T] en qualité de liquidateur.

M. [M] a été convoqué à un entretien préalable à un éventuel licenciement puis licencié pour motif économique par lettre recommandée avec demande d’avis de réception du 12 juillet 2017 motivée comme suit:

‘Par jugement en date du 28 juin 2017, le tribunal de commerce de Compiègne a prononcé la liquidation judiciaire de votre employeur: SARL DMI-DEPANNAGE MAINTENANCE IMMOBILIÈRE dont le siège social est sis [Adresse 3]. Ce même jugement m’a désigné aux fonctions de liquidateur judiciaire.

En conséquence, ce jugement emporte de plein droit la cessation de toute activité, suppression de tous les poste et de travail et de tous les emplois, dont le vôtre, fermeture de l’entreprise et licenciement collectif de la totalité du personnel inscrit au jour du jugement et au plus tard au terme de la poursuite d’activité si une autorisation a été accordée par le tribunal.

Lors de l’entretien préalable du 10/07/2017, il vous a été indiqué que compte tenu du prononcé de la liquidation judiciaire et la cessation totale de l’activité qui en découle, le poste que vous occupez se trouve supprimé.

Es-qualité, compte tenu de la cessation totale de l’activité, je me vois contraint de procéder à votre licenciement, à titre conservatoire, pour cause économique au motif de la suppression de votre poste de travail, de votre emploi et de l’impossibilité de vous proposer un reclassement, lequel prendra effet à compter de la date de réception de la présente.

Ce licenciement est effectué, en tant que de besoin, sous réserve de la réalité de votre contrat de travail et de votre activité au sein de cette entreprise, ce compte tenu de votre lien de parenté avec le dirigeant et l’associée Mme [M] [H], de votre qualité d’ancien gérant de la société DMI puis de votre qualité d’associé des société DMI, CAEO et PRADES SERVICES CHAUFFE, la vérification auprès de l’AGS de votre appartenance au Régime d’Assurances Chômage est indispensable. Cette lettre n’implique en conséquence aucune reconnaissance de votre qualité de salarié.

Au cas où il n’existerait pas, entre l’entreprise déclarée en liquidation judiciaire et vous-même, de lien de subordination caractérisant un contrat de travail, la présente lettre ne saurait vous ouvrir les droits découlant d’un tel type de contrat.

Sous réserve de tout ce qui précède et en tant que de besoin, conformément aux dispositions de la loi n°2011-893 du 28 juillet 2011, je vous propose le bénéfice du contrat de sécurisation professionnelle ( CSP), dont un dossier vous a été remis lors de l’entretien préalable. (…)’

Par courrier du 26 septembre 2017 adressé à M. [M], le liquidateur ès qualités a indiqué ne pas donner de suite favorable au dossier de l’intimé aux motifs que le lien de subordination le liant à l’entreprise n’était pas établi et que sa qualité de salarié était contestée.

Par requête en date du 25 juin 2018, M. [M] a saisi le conseil de prud’hommes de Creil afin de juger que la relation de travail le liant à la société DMI s’analysait en un contrat de travail, de juger le licenciement prononcé dépourvu de cause réelle et sérieuse, de fixer au passif de la liquidation judiciaire de la société DMI diverses sommes à titre de rappels de salaire et congés payés afférents, d’indemnités de rupture, de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Statuant par jugement du 24 juin 2021, dont appel, le conseil de prud’hommes de Creil s’est prononcé comme indiqué précédemment.

Sur l’existence d’un contrat de travail

L’Unédic délégation AGS CGEA d'[Localité 6] soutient que M. [M] n’avait pas la qualité de salarié de la société, qu’il était en réalité gérant de fait de cette dernière.

Elle rappelle que M. [Y] [M], père de M. [W] [M], a été dirigeant de droit de la société de sa création jusqu’en 2010 et qu’il est associé de la société.

Elle indique qu’il détenait une carte bancaire de la société avec des retraits autorisés tant en France qu’à l’étranger, qu’initialement il ne justifiait du versement d’aucun de ses salaires depuis son embauche en 1986, qu’il s’est immiscé dans la gestion de la société a minima les mois précédant l’ouverture de la procédure collective puisque le 12 janvier 2017 à la suite de l’absence de son fils, il a adressé un courrier à Me [T] lui demandant un entretien car la société passait selon lui ‘une crise grave’ et qu’il avait besoin de directives.

Dans le cadre du délibéré, sur demande du conseil de prud’hommes, il a produit des relevés de banque d’un compte courant professionnel de la société DMI ouvert auprès du Crédit Mutuel, compte à partir duquel des virements ont été effectués entre avril 2016 et Avril 2017 à son profit sous des intitulés laissant à penser qu’il s’agissait de salaires, alors que son fils, gérant de droit était absent depuis plusieurs mois.

Elle fait valoir égalementqu’il a communiqué au conseil, dans le cadre du délibéré, la DSN pour 2016/2017 ce qui démontre qu’il avait accès à des documents de gestion inaccessibles à un simple salarié.

Elle indique que M. [M] est par ailleurs associé, avec son épouse, des sociétés Caleo Service et Prades Service Chauffe, dont la société DMI est actionnaire, ces sociétés ayant fait l’objet d’un jugement de liquidation judiciaire le 28 juin 2017 sur déclarations de cessation des paiements.

Elle observe que M. [M] n’a jamais sollicité de son employeur le paiement des salaires dont il se prévaut aujourd’hui, ce qui démontre que son comportement n’était pas celui d’un salarié mais celui d’un gérant de fait.

Elle soutient l’absence de lien de subordination, élément essentiel à l’existence d’une relation salariale.

Le liquidateur ès qualités s’associe aux demandes de l’AGS ainsi qu’aux moyens développés.

M. [M], qui rappelle que la notion de dirigeant de fait n’est définie par aucun texte mais relève d’une construction jurisprudentielle, soutient ne jamais avoir commis d’acte positif de direction et de gestion. Il considère les éléments invoqués par le liquidateur ès qualités inopérants, ne permettant pas de le qualifier de gérant de fait de la société au regard des indices pris en compte par la construction jurisprudentielle en la matière. Il précise être associé minoritaire de la société en ce qu’il ne détient que 149 parts sociales sur 500.

Il soutient produire des éléments relatifs à l’exercice d’une prestation de travail pour le compte de la société, justifie des salaires perçus jusqu’en mars 2017, affirme qu’il travaillait sous l’autorité du gérant.

Sur ce ;

Il résulte des article L 1221-1 et suivants du code du travail que le contrat de travail suppose un engagement à travailler pour le compte et sous la subordination d’autrui moyennant rémunération.

Le lien de subordination est caractérisé par l’exécution d’un travail sous l’autorité d’un employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d’en contrôler l’exécution et de sanctionner les manquements de son subordonné.

L’existence d’un contrat de travail dépend, non pas de la volonté manifestée par les parties ou de la dénomination de la convention, mais des conditions de fait dans lesquelles est exercée l’activité du travailleur.

L’existence d’un contrat ne peut se déduire de la seule délivrance de bulletins de paie ou du licenciement notifié sous condition par les organes de la procédure collective de la société employeur.

L’apparence d’un contrat de travail se déduit d’un examen de fait. Elle peut découler d’un élément déterminant ou d’un faisceau d’indices.

En présence d’un contrat de travail apparent, il appartient à celui qui en conteste la réalité d’en démontrer le caractère fictif, notamment en établissant que l’état de subordination juridique du salarié, élément caractéristique du contrat de travail, fait défaut.

Le caractère fictif du contrat de travail est avéré lorsque le salarié se comporte comme un dirigeant de fait, situation exclusive d’une relation de subordination.

En l’espèce, il ressort des éléments du dossier que M. [M] ne dispose pas de contrat de travail écrit mais produit des bulletins de paie pour la période comprise entre le 1er avril 2016 et le 1er mars 2017. Ces fiches de paie mentionnent d’une part que l’intimé est entré au sein de l’entreprise le 23 juin 1986 et d’autre part qu’il exerce en qualité de conducteur de travaux, statut cadre.

Ces éléments révèlent l’existence d’un contrat de travail apparent.

Dans ces circonstances, il revient à l’Unédic AGS, qui en revendique le caractère fictif, d’en rapporter la preuve.

Le lien de subordination est caractérisé par l’exécution d’un travail sous l’autorité d’un employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d’en contrôler l’exécution et de sanctionner les manquements de son subordonné.

L’appelante et le liquidateur ès qualités tirent de la fonction de gérant occupée précédemment par M. [M], du contexte familial de la relation contractuelle, de l’absence de rémunération pendant plusieurs mois et de ses facultés à obtenir des éléments propres à la société, des éléments illustrant selon eux l’absence de lien de subordination, constatant qu’il n’est versé aux débats aucun élément relatif aux directives données par le gérant, celui-ci étant le fils de l’intimé.

Si les activités antérieures de M. [M] ne constituent pas à elles seules un élément suffisant pour établir l’absence de lien de subordination dans la relation que ce dernier entretenait avec la société, il y a lieu de constater que M. [M], qui soutient ne pas avoir été rémunéré pour la période comprise entre avril et juin 2017 n’a pas revendiqué le paiement de son salaire antérieurement à la saisine du conseil de prud’hommes faisant, comme justement relevé par l’appelante, prévaloir les intérêts de la société sur les siens.

Il sera constaté que, devant le conseil de prud’hommes, afin de justifier du paiement de ses salaires jusqu’en avril 2017, M. [M] a produit des relevés de compte de la société. Il ressort de la lecture de ces relevés et du rapprochement de ceux-ci avec les bulletins de paie délivrés que les sommes ne correspondent pas systématiquement. Ainsi, en octobre 2016, il est viré un salaire à M. [M] en deux fois (1 000 et 1 955,19 euros) ainsi qu’un rappel au titre du salaire de septembre 2016 alors qu’il ne ressort pas du bulletin de paie de septembre 2016 que le salaire n’ait pas été intégralement versé à échéance, ce dont il se déduit que M. [M] n’était pas réglé régulièrement de ses salaires dans leur intégralité aux échéances prévues.

En ne sollicitant pas le paiement de ses salaires antérieurement à l’ouverture de la procédure collective, M. [M] caractérise une implication de fait dans la gestion et les choix financiers stratégiques de l’entreprise de son fils, ce qui a eu pour conséquence de masquer les difficultés financières de l’entreprise et de retarder l’état de cessation des paiements.

L’Unédic délégation AGS établit que M. [M] disposait d’une carte bancaire au nom de la société permettant notamment des retraits en espèces en France comme à l’étranger contrairement aux autres salariés de l’entreprise, sans que l’intimé ne s’explique sur les raisons de cette attribution et sur l’usage qu’il pouvait en faire au regard de sa fonction de conducteur de travaux.

Au cours des mois précédents l’ouverture de la procédure collective, M. [M] s’est immiscé dans la gestion de la société en ce qu’il a adressé un courrier à Me [T] lui demandant un entretien.

Il ressort en outre du jugement du tribunal de commerce de Compiègne et des éléments du dossier que M. [W] [M], gérant était, en raison de sa maladie, absent depuis plusieurs mois de l’entreprise.

La procédure collective a été ouverte à la demande du procureur de la République de Compiègne à la suite du courrier d’alerte reçu de la part d’un salarié, M. [B]. Au sein de ce courrier, M. [B] indiquait ‘le père, M. [Y] [M] qui est employé dans la société essaie de gérer les employés en l’absence de son fils M. [W] [M].’

Il ne ressort pas des éléments du dossier que des ordres, des directives aient été donnés par le gérant de la société à M. [Y] [M]. Aucun élément relatif aux congés sollicités ou obtenus n’est par exemple produit aux débats.

Si M. [M] verse aux débats des attestations, il ressort de la lecture de celles-ci que les témoins évoquent sa fourniture de travail au profit de l’entreprise sans témoigner spécifiquement de l’existence d’un lien de subordination avec M. [W] [M]. Si certains salariés évoquent le fait que les travaux étaient validés par M. [W] [M], ces témoignages ne sont pas corroborés par d’autres pièces.

Si l’existence d’un lien familial avec le gérant n’est pas exclusive de la qualité de salarié, la cour constat qu’en l’espèce les éléments du dossier permettent d’établir d’une part l’existence d’une gestion de fait de la part de M. [Y] [M] et d’autre part l’absence de lien de subordination.

L’Unédic délégation AGS précise enfin que M. [M] est dirigeant de la société Clean Tech 60, créée en 2013, pour laquelle M. [W] [M] a été dirigeant jusqu’en janvier 2016 ; qu’il est associé avec son épouse au sein des sociétés Caleo Services et Prades Services Chauffe, dont la société DMI est également actionnaire, ces sociétés ayant toutes fait l’objet d’un jugement de liquidation judiciaire en date du 28 juin 2017 sur déclaration de cessation des paiements.

Au vu de ces éléments, il sera désormais jugé que M. [Y] [M] n’avait pas la qualité de salarié de la société DMI.

Par voie de conséquence, par infirmation du jugement entrepris, M. [M] doit être débouté de ses demandes relatives au rappel de salaire ainsi que de ses demandes relatives à la rupture de son contrat de travail.

Sur les frais irrépétibles et les dépens

M. [M], qui perd le procès, sera condamné à payer au liquidateur ès qualités la somme précisée au dispositif application de l’article 700 du code de procédure civile.

M. [M], succombant, sera condamné aux entiers dépens de première instance et d’appel.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant contradictoirement et en dernier ressort;

Infirme le jugement du conseil de prud’hommes de Creil du 24 juin 2021 en toutes ses dispositions ;

Statuant à nouveau et y ajoutant:

Dit que M. [Y] [M] n’était pas lié à la société Dépannage Maintenance Immobilière (DMI) par un contrat de travail ;

Déboute M. [Y] [M] de l’intégralité de ses demandes ;

Déclare la présente décision opposable à l’Unédic AGS délégation CGEA d'[Localité 6] ;

Condamne M. [M] à payer à Me [T] ès qualités, la somme de 500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile pour l’ensemble de la procédure ;

Rejette toute autre demande ;

Condamne M. [Y] [M] aux entiers dépens de première instance et d’appel.

LA GREFFIERE, LA PRESIDENTE.

 


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