Gérant de fait : 22 juin 2022 Cour de cassation Pourvoi n° 21-83.036

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Gérant de fait : 22 juin 2022 Cour de cassation Pourvoi n° 21-83.036
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N° R 21-83.036 F- B

N° 00816

GM
22 JUIN 2022

CASSATION

M. SOULARD président,

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
________________________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,
DU 22 JUIN 2022

MM. [X] [H] et [W] [P] ont formé des pourvois contre l’arrêt de la cour d’appel de Poitiers, chambre correctionnelle, en date du 28 avril 2021, qui, sur renvoi après cassation (Crim., 25 novembre 2020, n° 19-85.205), pour banqueroute les a condamnés chacun à une amende de 10 000 euros, et a prononcé sur les intérêts civils.

Les pourvois sont joints en raison de la connexité.

Des mémoires, en demande et en défense, ainsi que des observations complémentaires ont été produits.

Sur le rapport de Mme Fouquet, conseiller référendaire, les observations de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de M. [W] [P], les observations de la SARL Le Prado, avocat de M. [X] [H], les observations de de la SCP Spinosi, avocat de M. [E], des sociétés [1], [4], et les conclusions de Mme Mathieu, avocat général, après débats en l’audience publique du 25 mai 2022 où étaient présents M. Soulard, président, Mme Fouquet, conseiller rapporteur, Mme de la Lance, conseiller de la chambre, et M. Maréville, greffier de chambre,

la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l’article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Il résulte de l’arrêt attaqué et des pièces de procédure ce qui suit.

2. Le 30 décembre 2008, la SCI [4] (la SCI) a acquis un terrain en vu de la réalisation d’un vaste programme immobilier, financé en totalité par un découvert en compte d’un montant de 1 400 000 euros.

3. Le 4 juin 2012, la société [1] et son gérant M. [V] [E], actionnaires de la SCI, ont déposé plainte auprès du procureur de la République pour abus de confiance. Ils ont reproché aux dirigeants de la SCI, MM. [W] [P] et [X] [H], d’avoir détourné une partie de la trésorerie au profit du Groupe [2], dont ils assuraient également la direction.

4. Par jugement du tribunal de grande instance en date du 15 octobre 2013, une procédure de redressement judiciaire a été ouverte au profit de la SCI.

5. L’administrateur provisoire a transmis au procureur de la République le rapport d’expertise comptable établi par le cabinet [3], désigné par le tribunal dans le cadre de cette procédure, certaines irrégularités constatées par l’expert lui paraissant relever d’une qualification pénale.

6. A l’issue des investigations, MM. [P] et [H] ont été poursuivis devant le tribunal correctionnel, en qualité de dirigeants de fait ou de droit de la SCI, des chefs de banqueroute par emploi de moyens ruineux et tenue d’une comptabilité manifestement irrégulière ou incomplète.

7. Les juges du premier degré ont reconnu les prévenus coupables du délit
de banqueroute pour les faits commis à compter de la date de cessation
des paiements, reçu les constitutions de partie civile de M. [E], de
la société [1], de la SCI et de La SCP [F]-[O], ès qualités de commissaire à l’exécution du plan et déclaré MM. [P] et [H] solidairement responsables de leurs préjudices.

8. Par arrêt en date du 3 juillet 2019, la cour d’appel, infirmant le jugement a relaxé les deux prévenus.

9. Sur pourvoi du procureur général, la Cour de cassation a cassé cet arrêt et renvoyé l’affaire devant une autre cour d’appel.

Examen des moyens

Sur le premier moyen proposé pour M. [P], pris en sa troisième branche, les premier, deuxième et huitième moyens, pris en sa troisième branche proposés pour M. [H]

10. Ils ne sont pas de nature à permettre l’admission du pourvoi au sens de l’article 567-1-1 du code de procédure pénale.

Sur le premier moyen proposé pour M. [P] et le huitième moyen proposé pour M. [H], pris en leurs première et deuxième branches

Enoncé des moyens

11. Le premier moyen proposé pour M. [P], pris en ses deux premières branches, critique l’arrêt attaqué en ce qu’il l’a déclaré coupable de l’infraction de banqueroute par comptabilité manifestement irrégulière ou incomplète pour l’exercice 2012 pour la période du 1er janvier au 1er juillet 2012, alors :

« 1°/ que l’article L. 654-2, 5°, du code de commerce incrimine le fait d’avoir tenu une comptabilité manifestement incomplète ou irrégulière au regard des dispositions légales ; qu’il appartient au juge répressif qui entre en voie de
condamnation du chef de ce texte d’identifier la disposition légale en matière de comptabilité qui n’a pas été respectée par l’agent ; qu’en déclarant
M. [P] coupable du délit de l’article L. 654-2, 5°, du code de commerce, sans identifier la disposition légale en matière de comptabilité qui aurait été violée, la cour d’appel a méconnu ce texte, ensemble les articles 111-3 du code pénal et 7 de la Convention européenne des droits de l’homme garantissant le principe de légalité des délits et des peines ;

2°/ qu’il résulte de l’article L. 123-12 du code de commerce que les comptes annuels doivent être établis une fois par an, à la clôture de l’exercice, et que si les mouvements affectant le patrimoine de l’entreprise doivent être enregistrés chronologiquement, ils n’ont pas à l’être au jour le jour ; que la
cour d’appel ayant constaté que M. [P] avait démissionné de ses fonctions de gérant de la SCI à compter du 1er juillet 2012 et jugé qu’aucun élément du dossier ne permettait de considérer qu’après cette date, il avait exercé une gérance de fait de cette société, il s’en déduisait qu’il n’appartenait pas à M. [P] d’établir la comptabilité de l’exercice clos le 31 décembre 2012 ; que la cour d’appel, qui a pourtant retenu la responsabilité pénale de celui-ci concernant l’infraction de banqueroute par comptabilité manifestement irrégulière et incomplète sur l’exercice 2012 en énonçant qu’il importait peu qu’il n’ait plus été en fonction à la clôture de l’exercice, n’a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a violé les articles L. 123-12 et L. 654-2, 5°, du code de commerce. »

12. Le huitième moyen proposé pour M. [H], pris en ses deux premières branches, critique l’arrêt attaqué en ce qu’il a déclaré coupable de l’infraction de banqueroute par comptabilité incomplète et par absence de comptabilité sur la période comprise entre le 1er janvier 2012 et le 13 septembre 2013 ; qu’il l’a condamné pénalement et a prononcé sur les intérêts civils, alors :

« 1°/ que l’article L. 654-2, 5°, du code de commerce incrimine le fait d’avoir tenu une comptabilité manifestement incomplète ou irrégulière au regard des dispositions légales ; qu’il appartient au juge répressif qui entre en voie de condamnation du chef de ce texte d’identifier la disposition légale en matière de comptabilité qui n’a pas été respectée par l’agent ; qu’en déclarant M. [H] coupable du délit de l’article L. 654-2, 5°, du code de commerce, sans identifier la disposition légale en matière de comptabilité qui aurait été violée, la cour d’appel a méconnu ce texte, ensemble les articles 111-3 du code pénal et 7 de la Convention européenne des droits de l’homme garantissant le principe de légalité des délits et des peines ;

2°/ qu’ il résulte de l’article L. 123-12 du code de commerce que les comptes annuels doivent être établis une fois par an, à la clôture de l’exercice, et que si les mouvements affectant le patrimoine de l’entreprise doivent être enregistrés chronologiquement, ils n’ont pas à l’être au jour le jour ; que la
cour d’appel ayant constaté que M. [H] ne pouvait se voir reprocher les faits de banqueroute que jusqu’au 13 septembre 2013, date de la cessation des paiements de la SCI, il s’en déduisait qu’il n’appartenait pas à M. [H] d’établir la comptabilité de l’exercice clos le 31 décembre 2013 ; que la cour d’appel, qui a pourtant retenu la responsabilité pénale de celui-ci concernant l’infraction de banqueroute par comptabilité incomplète et par absence de comptabilité sur l’exercice 2013, n’a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a violé les articles L. 123-12 et L. 654-2, 5°, du code de commerce. »

 


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