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COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE
Chambre 3-2
ARRÊT AU FOND
DU 16 JUIN 2022
N° 2022/375
Rôle N° RG 21/07087 – N° Portalis DBVB-V-B7F-BHN6C
[C] [D]
C/
[V] [Z]
Pierre-Alexandre LECA
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
– Me Isabelle ZULIAN
– Me Florent LADOUCE
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Tribunal de Commerce de DRAGUIGNAN en date du 27 Avril 2021 enregistré (e) au répertoire général sous le n° 2021/153.
APPELANT
Monsieur [C] [D]
né le [Date naissance 2] 1992 à [Localité 7] ([Localité 7]), de nationalité Française, demeurant [Adresse 4] – [Localité 6]
représenté par Me Isabelle ZULIAN, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE, assistée de Me Olivier HASENFRATZ, avocat au barreau de TOULON, plaidant
INTIMES
Monsieur [V] [Z]
demeurant [Adresse 3] – [Localité 5]
défaillant
Maître Pierre-Alexandre LECA
agissant en sa qualité de liquidateur judiciaire de la SARL KHK, demeurant [Adresse 1] – [Localité 5]
représenté par Me Florent LADOUCE, avocat au barreau de DRAGUIGNAN
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
L’affaire a été débattue le 27 Avril 2022 en audience publique. Conformément à l’article 804 du code de procédure civile, Madame Michèle LIS-SCHAAL, Présidente a fait un rapport oral de l’affaire à l’audience avant les plaidoiries.
La Cour était composée de :
Madame Michèle LIS-SCHAAL, Président de chambre
Madame Muriel VASSAIL, Conseiller
Madame Agnès VADROT, Conseiller
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Madame Chantal DESSI.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 16 Juin 2022.
MINISTERE PUBLIC :
Auquel l’affaire a été régulièrement communiquée.
ARRÊT
Défaut,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 16 Juin 2022,
Signé par Madame Michèle LIS-SCHAAL, Président de chambre et Madame Chantal DESSI, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
Par jugement du 16 janvier 2018, le tribunal de commerce de Draguignan a ouvert une procédure de redressement judiciaire à l’encontre de la société KHK , a fixé la date de cessation des paiements au 16 juillet 2016 et a désigné Me Pierre-Alexandre LECA en qualité de mandataire judiciaire.
Par jugement du 6 mars 2018, le tribunal de commerce de Draguignan a prononcé la liquidation judiciaire de la société KHK et désigné Me LECA es qualité de liquidateur.
M. [C] [D] en a été le gérant à la création de la société le 21 novembre 2012 jusqu’au 25 mai 2017 et ensuite M. [Z] à compter du 22 juin 2017.
Par actes des 15 et 18 janvier 2021, Me LECA es qualité de liquidateur de la société KHK a assigné devant le tribunal de commerce de Draguignan M. [C] [D] et M. [V] [Z] pour les entendre condamner à payer la totalité de l’insuffisance d’actif d’un montant de 96 460 euros .
Par jugement du 27 avril 2021, le tribunal de commerce de Draguignan a condamné solidairement Messieurs [D] et [Z] à payer la somme de 96 460 euros à Me LECA, es qualité de liquidateur judiciaire de la société KHK ainsi que le montant de 2 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
Les premiers juges ont retenu à l’encontre de M. [D] la non déclaration de l’état de cessation des paiements dans le délai légal, le non établissement des comptes annuels en application de l’article L 123-12 du code de commerce, le non respect des obligations fiscales et sociales ( cotisations de l’URSSAF depuis le 1er trimestre 2016, cotisations CFE dès 2017) et la disparition d’actifs de la société dont deux véhicules alors que le bilan 2015 faisait état d’immobilisations corporelles de 75 015 euros.
Ils ont retenu à l’encontre de M [Z] la non déclaration de l’état de cessation des paiements dans le délai légal, la poursuite de l’exploitation d’une activité manifestement déficitaire, le non établissement des comptes annuels en application de l’article L 123-12 du code de commerce, le non respect des obligations fiscales et sociales ( cotisations de l’URSSAF depuis le 1er trimestre 2016 , cotisations CFE dès 2017), la disparition d’actifs de la société dont deux véhicules alors que le bilan 2015 faisait état d’immobilisations corporelles de 75 015 euros et l’achat à des fins personnelles ( facture de la société SIMC de 8 344,99 euros pour des matériaux de construction de gros-oeuvre).
Les juges ont estimé que ces fautes ont contribué directement à l’insuffisance d’actif.
M. [C] [D] a interjeté appel de cette décision le 10 mai 2021.
Par conclusions notifiées par le RPVA du 5 juillet 2021, auxquelles il est fait référence pour plus ample exposé des motifs, M. [C] [D] conclut :
Réformer le jugement entrepris en ce que la faute et le lien de causalité avec le passif ne sont pas établis,
En tout état de cause:
Réformer le montant de la dette exigible, non certaine en l’état du jugement sans que cette dette ne soit opposable à M. [D],
Condamner tout succombant à la somme de 2 500 euros au titre de l’article 700 du CPC ainsi qu’aux entiers dépens.
Il soutient que le contradictoire n’a pas été respecté n’ayant pas eu connaissance de convocation envoyée à une mauvaise adresse et reproche au liquidateur son absence d’information.
Il expose avoir cédé le 25 mai 2017 par assemblée générale ses parts sociales et avoir démissionné de sa gérance avec quitus pour sa gestion. La convention entre associés a été communiquée le 26 février 2021 au mandataire par son conseil.
Il précise que les dettes de METRO ( 4226 euros) sont postérieures à la cession des parts après sa démission , la créance de LOCAM concerne des loyers impayés depuis juillet 2017 après sa démission, de même pour BNP LEASING ( 5834 euros), le bailleur PEUGEOT pour lequel le véhicule a été repris par une autre société en mai 2017, BMW Finances la mini Cooper devait être prise en charge par M. [Z] et a été cédée le 24 juillet 2017 à M. [U] [G], la facture de matériaux SMC ne le concerne pas, la créance de l’URSSAF de 40 000 euros a été générée après la cession, elle était de 10 947 euros au moment de la cession et devait être prise en compte par la société selon la convention entre associés.
Il soutient que ces fautes ne lui sont donc pas imputables.
Par conclusions notifiées par le RPVA du 5 août 2021, auxquelles il est fait référence pour pus ample exposé des motifs, Me Pierre-Alexandre LECA es qualité de liquidateur de la société KHK conclut
Débouter M. [D] de toutes ses demandes,
Confirmer le jugement entrepris,
Y ajoutant,
Condamner M. [C] [D] à lui payer la somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du CPC,
Condamner solidairement M. [D] aux entiers dépens.
Il rappelle que le passif est de 96 460,77 euros. Aucune réalisation d’actifs n’a pu être effectuée.
Si M. [D] a démissionné le 25 mai 2017, sa responsabilité peut être engagée si la situation ayant conduit à la liquidation judiciaire a été créée ou aggravée alors qu’il était en fonction.
Le fautes reprochées à M. [D]:
– Au moment de la cessation des paiements, le 16 juillet 2016, M. [D] était le gérant. Il n’a pas déclaré la cessation des paiements dans le délai de 45 jours avant 31 août 2016 ( article L 631-4 du code de commerce).
– Il n’a pas tenu de comptabilité conformément à l’article L 123-1 2 du code de commerce (comptes annuels) à la suite de l’exercice clos au 31 décembre 2015 ce qui constitue une faute de gestion. Aucun document n’a été communiqué au liquidateur, seule la comptabilité concernant l’exercice 2015 ne comprenant que les 3 pages de la déclaration fiscale a été déposé au greffe du tribunal.
Le dépôt des comptes de l’exercice clos au 31 décembre 2016 le 9 juin 2021 pose problème alors que M. [D] n’est plus le dirigeant depuis mai 2017.
– La disparition des actifs mobiliers résulte de la lecture du bilan 2015 qui fait apparaître des immobilisations corporelles de 75 015 euros alors que le commissaire priseur qui a procédé à l’inventaire a déposé un PV de carence.
-M. [D] n’a pas respecté ses obligations fiscales et sociales, la déclaration de l’URSSAF d’un montant de 30 697 euros ( soit un tiers du passif) faisant apparaître des sommes dues dès le premier trimestre 2016.
Le liquidateur reprend les fautes reprochées à M. [Z] devenu gérant en juin 2017 qui n’a pas fait appel soit de ne pas avoir demandé un état des comptes au moment de sa prise de fonction en juin 2017 ( faute qui n’a pas été retenue par les premiers juges), l’absence de tenue de comptabilité, le non respect de ses obligations fiscales et sociales, l’utilisation de biens ou de crédits de la société à des fins personnelles, la soustraction d’actif mobilier de la personne morale, le défaut de déclaration des paiements dans le délai légal de 45 jours, la poursuite d’une activité manifestement déficitaire.
Le liquidateur soutient que l’ensemble des ces fautes ont contribué de manière directe à l’insuffisance d’actif.
Par avis notifié le 21 mars 2022, le ministère public conclut à la confirmation du jugement entrepris pour les deux dirigeants estimant que le rôle de M. [Z] semble s’être limité à celui d’un gérant de paille destiné à dissimuler aux tiers l’identité réelle du gérant de fait.
L’ordonnance de clôture a été rendue le 24 mars 2002.
Par courrier notifié par le RPVA du 28 mars 2002, le conseil de M. [D] sollicite du ministère public le versement d’une fiche pénale de M. [Z] qui aurait été incarcéré en août 2017 ( bilan 2016 non transmis) ou une réouverture des débats.
Me LECA es qualité s’y oppose soulignant que cette pièce date de 2017.
M. [V] [Z] assigné le 18 janvier 2018 par PV de recherches de l’article 659 du CPC, n’a pas constitué avocat.
SUR CE;
Attendu que faute d’une cause grave, il ne convient pas d’ordonner la révocation de l’ordonnance de clôture pour la production d’une pièce qui date de 2017,
Attendu que M. [D] soutient que le principe du contradictoire de la procédure du premier degré n’a pas été respecté mais n’en tire aucune conséquence dans ses prétentions et dans son dispositif qui seul lie la Cour,
Attendu qu’en application de l’article L 651-2 du code de commerce «’ Lorsque la liquidation judiciaire d’une personne morale fait apparaître une insuffisance d’actif, le tribunal peut, en cas de faute de gestion ayant contribué à cette insuffisance d’actif, décider que le montant de cette insuffisance d’actif sera supporté, en tout ou en partie, par tous les dirigeants de droit ou de fait, ou par certains d’entre eux, ayant contribué à la faute de gestion. En cas de pluralité de dirigeants, le tribunal peut, par décision motivée, les déclarer solidairement responsables. Toutefois en cas de simple négligence du dirigeant de droit ou de fait dans la gestion de la société, sa responsabilité au titre de l’insuffisance d’actif ne peut être engagée.’» (‘),
que l’insuffisance d’actif se détermine par la différence entre l’actif et le passif,
que l’insuffisance d’actif doit être certaine et doit être appréciée au moment où la juridiction statue, le passif ayant son origine antérieurement au jugement d’ouverture étant pris en compte,
qu’il n’est pas nécessaire que le passif soit définitif à partir du moment où l’insuffisance d’actif est certaine;
Attendu qu’ en l’espèce, l’insuffisance d’actif de la société KHK est de 96 460,77 euros,
que la date de cessation des paiements a été fixée par jugement du 16 janvier 2018 devenu définitif au 16 juillet 2016, paye
que cette date ne peut plus être contestée;
Attendu que le 16 juillet 2016, M. [C] [D] était le gérant de la société KHK et ne peut contester ne pas avoir déclaré l’état de la cessation des paiements de la société dans le délai de 45 jours conformément à l’article L 631-4 du code de commerce,
que le redressement judiciaire a été ouvert par jugement du 16 janvier 2018 suite à une assignation de l’URSSAF,
que cette faute de gestion au sens de l’article L 651-2 du code de commerce est donc établie;
Attendu qu’il convient de rappeler que la responsabilité de M. [D] qui n’était plus le gérant de droit depuis le 25 mai 2017 mais avait été le dirigeant de la société pendant 5 ans, peut être engagée si la situation ayant conduit à la liquidation judiciaire a été créée ou aggravée alors qu’il était en fonction,
que M. [D] n’a pas tenu de comptabilité conformément à l’article L 123-1 2 du code de commerce (comptes annuels) à la suite de l’exercice clos au 31 décembre 2015 ce qui constitue une faute de gestion, aucun document n’ayant été communiqué au liquidateur excepté la comptabilité concernant l’exercice 2015 ne comprenant que les 3 pages de la déclaration fiscale ayant été déposé au greffe du tribunal,
qu’il peut paraître étonnant que n’étant plus le gérant depuis le 25 mai 2017, il ait pu produire un récépissé des comptes de l’exercice clos en 2016 auprès du greffe du tribunal de commerce de Draguignan,
que la disparition des actifs mobiliers qui constitue une faute de gestion résulte de la lecture du bilan 2015 et 2016 qui fait apparaître des immobilisations corporelles d’ un montant de 75 015 euros alors que le commissaire priseur qui a procédé à l’inventaire a déposé le 2 mai 2018 un PV de carence,
que M. [D] n’a pas respecté ses obligations fiscales et sociales, la déclaration de l’URSSAF d’un montant de 30 697 euros ( soit un tiers du passif) faisant apparaître des sommes dues dès le premier trimestre 2016,
que la convention conclue le 25 mai 2017 entre les associés n’exonère pas M. [D] de sa responsabilité,
que l’ensemble de ces fautes ont contribué directement à l’insuffisance d’actif, l’absence de comptabilité, la non déclaration de l’état de cessation des paiements, le non respect des obligations fiscales et sociales, la soustraction des actifs mobiliers ont privé la société d’une analyse financière ne permettant pas de savoir si la société était ou non en état de cessation des paiements en continuant à augmenter le passif,
que les fautes de gestion reprochées à M. [Z] ont contribué à l’insuffisance d’actif dans la limite le concernant des dettes nées postérieurement à sa gérance d’un montant total de 60 643 euros ( Metro 4426 euros, Locam 3039 euros, BNP Leasing 5834 euros, BMW Finances 39 000 euros, matériaux SMC 8344 euros),
qu’en conséquence, il convient de confirmer le jugement entrepris qui a condamné solidairement les deux dirigeants concernant M. [Z] à hauteur de 96 460,77 euros et M. [D] à hauteur de 35 817 euros;
Attendu que l’équité impose de condamner M. [D] à payer à Me LECA es qualité la somme de 2 000 euros au titre de l’article 700 du CPC;
PAR CES MOTIFS;
La Cour statuant publiquement par arrêt de défaut,
Dit n’y avoir lieu à la révocation de l’ordonnance de clôture,
Confirme le jugement entrepris en ce qu’il a condamné solidairement M.[Z] à payer à Me LECA es qualité de liquidateur de la société KHK la somme de 96 460 euros,
L’infirme sur le montant concernant M. [D];
Statuant à nouveau,
Condamne M. [D] solidairement avec M. [Z] à payer à Me LECA es qualité de liquidateur de la société KHK la somme de 35 17 euros;
Condamne M. [C] [D] à payer à Me LECA es qualité de liquidateur de la société KHK la somme de 2 000 euros au titre de l’article 700 du CPC;
Le condamne aux entiers dépens.
LA GREFFIERELA PRESIDENTE