Gérant de fait : 15 juin 2023 Cour d’appel de Paris RG n° 23/02389

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Gérant de fait : 15 juin 2023 Cour d’appel de Paris RG n° 23/02389
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Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 5 – Chambre 9

ARRÊT DU 15 JUIN 2023

(n° , 5 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 23/02389 – N° Portalis 35L7-V-B7H-CHB2D

Décision déférée à la Cour : Jugement du 16 Janvier 2023 -Tribunal de Commerce de Meaux – RG n° 2022010203

APPELANTE

S.A.S. SUSHI ALES

Prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège.

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représentée par Me Malik GUELLIL, avocat au barreau de PARIS, toque : PC 345

INTIMES

S.E.L.A.R.L. GARNIER-GUILLOUET

Prise en la personne de Maître [J] [T], agissant en qualité de liquidateur judiciaire de la société SUSHI ALES, SAS, désignée à cette fonction par jugement du Tribunal de Commerce de MEAUX en date du 16.01.2023

[Adresse 3]

[Adresse 3]

Représentée par Me Carole BOUMAIZA de la SCP GOMME et BOUMAIZA, avocat au barreau de PARIS, toque : J094

M. LE PROCUREUR GENERAL – SERVICE FINANCIER ET COMMERCIAL

[Adresse 2]

[Adresse 2]

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 01 Juin 2023, en audience publique, devant la Cour composée de :

Mme Sophie MOLLAT, Présidente

Mme Isabelle ROHART, Conseillère

Mme Déborah CORICON, Conseillère

qui en ont délibéré

Un rapport a été présenté à l’audience dans les conditions prévues à l’article 804 du code de procédure civile.

GREFFIER : Mme Saoussen HAKIRI lors des débats.

ARRET :

– contradictoire,

– rendu par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile,

– signé par Mme Sophie MOLLAT, Présidente et par Mme Saoussen HAKIRI, Greffier présent lors de la mise à disposition.

*********

La SAS Sushi Ales exercice une activité de restauration rapide dans des kiosques situés dans les supermarchés.

Saisi par requête du ministère public, par jugement en date du 7 novembre 2022, le tribunal de commerce de Meaux a ouvert une procédure de redressement judiciaire à l’égard de la société Sushi Ales, désigné Me [U] en qualité d’administrateur judiciaire et la SELARL Garnier [T], prise en la personne de Me [T], en qualité de mandataire judiciaire.

La date de cessation des paiements a été fixée au 8 mai 2021.

L’administrateur judiciaire et le mandataire judiciaire faisant état de l’absence d’activité de la société, de l’absence de comptabilité et de fraude apparente, ont sollicité la conversion de la procédure en liquidation judiciaire.

Par jugement en date du 16 janvier 2023, le tribunal de commerce de Meaux a prononcé la liquidation judiciaire de la société Sushi Ales et a nommé la SELARL Garnier [T], prise en la personne de Maître [T], en qualité de liquidateur judiciaire.

Le tribunal a retenu que l’entreprise ne justifiait d’aucune comptabilité, qu’elle n’a pas apporté les réponses aux interrogations du mandataire judiciaire sur les différents flux financiers constatés par l’administration fiscale, intervenus avec les sociétés du gérant de fait M. [L] et qu’il y avait donc lieu de prononcer la liquidation judiciaire.

Par déclaration en date du 24 janvier 2023, la société Sushi Ales a interjeté appel du jugement.

******

Dans ses conclusions notifiées par RPVA en date du 1° juin 2023, la société Sushi Ales demande à la cour de :

INFIRMER le jugement déféré en toutes ses dispositions.

Statuant à nouveau et y ajoutant :

DIRE n’y avoir lieu de prononcer la liquidation judiciaire de la société Sushi Ales.

OUVRIR une procédure de redressement judiciaire à l’égard de la société Sushi Ales.

DESIGNER la SELARL Garnier-[T], prise en la personne de Maître [J] [T], en qualité de mandataire judiciaire.

RENVOYER l’affaire devant le tribunal de commerce de Meaux pour la poursuite des opérations, pour la désignation des éventuels autres organes de la procédure et pour le suivi de celle-ci.

OUVRIR une nouvelle période d’observation de trois mois.

DIRE que l’arrêt fera l’objet des publications légales.

ORDONNER l’emploi des dépens en frais privilégiés de procédure collective.

******

Dans ses conclusions notifiées par RPVA en date du 30 mai 2023, la SELARL Garnier-[T], prise en la personne de Maître [J] [T], en qualité de liquidateur judiciaire demande à la cour de :

CONFIRMER le jugement du tribunal de commerce de Meaux du 16 janvier 2023.

STATUER ce que de droit sur les dépens.

******

MOTIFS DE LA DECISION,

‘ Sur la motivation du jugement

La société Sushi Ales fait grief au tribunal de ne pas avoir caractérisé l’impossibilité manifeste du redressement et soutient que le jugement n’est pas motivé. Elle ne tire aucune conséquence juridique du défaut de motivation allégué.

Cependant, la cour relève que pour décider de la conversion en liquidation judiciaire, le tribunal a motivé son jugement,retenant notamment l’absence de comptabilité, ce qui ne permet pas d’entrevoir sérieusement des perspectives de redressement.

‘ Sur la tenue de la comptabilité

Le liquidateur judiciaire fait valoir que la société Sushi Ales ne respecte pas les dispositions comptables et fiscales nécessaires à la direction d’une entreprise. Il indique que le dirigeant n’a remis aucun élément de comptabilité au cours de la période d’observation, hormis un bilan au titre de l’exercice 2021. Il souligne que les comptes sociaux 2020 ont été déposés le 28 septembre 2022, soit après l’enquête ouverte par le tribunal.

Il rappelle qu’une société doit tenir une comptabilité constituée d’un livre journal et d’un grand livre et que l’administration fiscale a considéré que la comptabilité n’était pas probante en raison de son dépôt postérieur à la date limite. Il ajoute enfin que la société n’a souscrit aucune déclaration de TVA au titre du début d’activité jusqu’au 31 décembre 2020.

La société Sushi Ales répond avoir versé dans le cadre de la présente procédure le bilan détaillé, le compte de résultat, les annexes et la liasse fiscale de l’exercice 2021, précisant que la comptabilité est tenue par le cabinet Exi Conseils et audit.

Concernant l’exercice 2020, elle indique que les écritures comptables ont été validées tardivement le 22 février 2022.

Elle affirme que la comptabilité est désormais complète et que la déclaration de TVA dont fait état le liquidateur judiciaire a été déposée le 4 mars 2022.

‘Sur les possibilités de redressement

La société Sushi Ales fait valoir que son chiffre d’affaires était en augmentation de 2020 à 2021 mais qu’il a diminué en 2022 en raison de l’arrêt de l’exploitation du site d’Alès et de l’ouverture de la procédure collective, ainsi que du fait de l’existence d’une charge exceptionnelle de 62 276 euros consécutive au contrôle fiscal.

Elle ajoute que son résultat négatif de 96 078 euros au titre de l’exercice 2022 n’est pas représentatif de l’activité de la société Sushi Ales et qu’elle dispose de 38 196,77 euros de disponibilités.

Elle fournit un prévisionnel de trésorerie pour l’exercice 2023 faisant état d’un chiffre d’affaires de 336 304 euros, d’un résultat d’exploitation de 23 470 euros et d’une trésorerie de 18 611 euros et pour l’exercice 2024 avec un chiffre d’affaires de 365 775 euros, un résultat d’exploitation de 24 994 euros et une trésorerie de 17 906 euros. Elle précise que l’expert comptable a pris en considération l’apurement du passif en cas d’adoption d’un plan de continuation à hauteur de 1 800 euros par mois sur 4 ans pour une dette totale de 90 000 euros.

Elle souligne que sa candidature a été retenue par la société Asia General Food pour l’exploitation d’un kiosque de vente au sein d’un supermarché et qu’elle a signé un contrat le 6 janvier 2023 à ce titre.

Concernant sa licence d’exploitation, elle indique que le contrat prévoit une redevance annuelle de 25 400 euros qui doit faire l’objet d’un premier versement de 5 000 euros puis du paiement d’un solde de 20 400 euros. Elle fait observer que le prévisionnel prévoit le paiement d’une redevance mensuelle de 1 583, 33 euros soit 19 000 euros par an.

Le liquidateur judiciaire répond que la société Sushi Ales n’a plus d’activité et n’a plus de salarié. Il précise que la société n’avait plus d’activité au jour de l’ouverture de la procédure collective et qu’elle a perdu son fonds de commerce sans que cela ne soit expliqué par le dirigeant. Il soutient qu’il est impossible de se fonder sur les bilans 2020 et 2021 pour établir un plan car la comptabilité a été considérée comme non probante par l’administration fiscale.

Il indique en outre que le prévisionnel est établi sur une évaluation du chiffre d’affaires faite par la société Sushi Ales et qu’il n’existe par conséquent aucune certitude sur la réalité du chiffre d’affaires. Il ajoute que le contrat de licence n’a pas été contresigné par l’administrateur judiciaire et que le prévisionnel ne reprend pas avec exactitude les conditions du contrat de licence d’exploitation tel que produit par la société Sushi Ales.

‘ Sur le passif de la société Sushi Ales

La société Sushi Ales fait état d’un passif déclaré d’un montant de 211 102,59 euros dont un passif définitif échu de 83 678,95 euros, un passif définitif à échoir de 18 245,64 euros et un passif provisionnel de 112 938 euros. Elle soutient que son passif provisionnel représente plus de la moitié du passif total et qu’en l’absence de confirmation de ces créances déclarées à titre provisionnel, le montant du passif à retenir dans le cadre d’un plan est de 83 678, 95 euros.

Elle ajoute qu’il peut être envisagé un plan de continuation progressif, prévoyant le paiement d’annuités plus importantes à compter de la cinquième année, dans l’attente de la fixation définitive du montant des créances provisionnelles.

Elle affirme ainsi qu’elle est en mesure de présenter un plan de continuation sérieux et que son redressement n’est manifestement pas impossible.

Le liquidateur judiciaire répond qu’il convient de prendre en compte à la fois le passif échu et le passif à échoir dans le cadre d’un plan. Il verse aux débats un état du passif d’un montant de 149 179,64 euros et s’interroge sur la faisabilité d’un plan alors que la société débitrice n’a plus d’activité , ni de fonds de commerce.

‘ Sur la direction et la gestion de la société Sushi Alves

Le liquidateur judiciaire fait valoir que dans le cadre de la procédure de rectification de la comptabilité, il s’est avéré que M. [C] [L], associé majoritaire, qui n’est pas le dirigeant, assurait la gestion quotidienne de la société. Il souligne que M. [S] [L], gérant de droit, n’a pas honoré les rendez-vous qu’il lui a fixés ainsi que ceux que le commissaire de justice lui a fixés, lequel a dressé un procès verbal de carence.

Il ajoute en outre que des factures ont été comptabilisées pour les sociétés ACF Business et Sifu Consulting qui n’ont plus d’activité mais présidées par M. [C] [L], également actionnaire. Il fait valoir que ces factures ne correspondent à aucune prestation réelle et ont donné lieu à redressement fiscal au titre de la TVA et de l’IS.

La société Sushi Ales répond que M. [S] [L] est le seul décisionnaire et représentant de la société Sushi Ales, mais qu’il a pu être assisté par M. [C] [L], son frère, plus familier de ce type d’activité.

Elle prétend que les flux financiers avec d’autres sociétés en contrepartie de prestations non avérées datent de 2020 et ne sont pas pertinents pour évaluer les perspectives de redressement.

Elle indique enfin que le dirigeant ne s’est pas vu reprocher son absence de collaboration par le jugement de conversion et rappelle sa détermination à maintenir l’activité de la société tout en collaborant de manière constante et efficace avec les organes de la procédure, notamment par le biais de son nouveau conseil.

SUR CE,

Il résulte de l’aricle L.631-15 du code de commerce, qu’à tout moment de la procédure de liquidation judiciaire, le tribunal peut prononcer la liquidation judiciaire si le redressement est manifestement impossible.

En l’espèce, la société Sushi Ales n’a plus d’activité, plus de fonds de commerce, plus de salariés, éléments qui ne semblent pas avoir été pris en compte par l’expert comptable lorsqu’il a établi les documents prévisionnels, celui-ci ayant précisé avoir établi ce prévisionnel « sur la base des travaux initialement réalisés par le client ».

Compte tenu de cette absence d’activité, de fonds de commerce et de salariés, aucun plan de continuation permettant de rembourser un passif de 149.179,64 euros n’apparait réalisable, de sorte que c’est à juste titre que le tribunal a prononcé la liquidation judiciaire.

En conséquene, le jugement sera confirmé.

Les dépens seront employés en frais privilégiés de procédure collective.

PAR CES MOTIFS

Confirme le jugement,

Ordonne l’emploi des dépens seront employés en frais privilégiés de procédure collective.

LE GREFFIER LA PRESIDENTE

 


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