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24 janvier 2023
Cour d’appel de Versailles
RG n°
21/04023
COUR D’APPEL
DE
VERSAILLES
Code nac : 59D
13e chambre
ARRET N°
CONTRADICTOIRE
DU 24 JANVIER 2023
N° RG 21/04023
N° Portalis DBV3-V-B7F-US77
AFFAIRE :
S.A.R.L. APYC
C/
S.A.S. LOCAM – LOCATION AUTOMOBILES MATERIELS
Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 10 Février 2021 par le Tribunal de Commerce de VERSAILLES
N° Chambre :
N° Section :
N° RG : 2020F00256
Expéditions exécutoires
Expéditions
Copies
délivrées le :
à :
Me Martine DUPUIS
Me Véronique BUQUET-ROUSSEL
TC VERSAILLES
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE VINGT QUATRE JANVIER DEUX MILLE VINGT TROIS,
La cour d’appel de Versailles a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre :
S.A.R.L. APYC
[Adresse 2]
[Localité 3]
Représentant : Me Martine DUPUIS de la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 625 – N° du dossier 2166460
Représentant : Me Victor STEINBERG, Plaidant, avocat au barreau de PARIS
APPELANTE
****************
S.A.S. LOCAM – LOCATION AUTOMOBILES MATERIELS
[Adresse 4]
[Localité 1]
Représentant : Me Véronique BUQUET-ROUSSEL de la SCP BUQUET-ROUSSEL-DE CARFORT, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 462 – N° du dossier 16821
Représentant : Me Guillaume MIGUAUD, Plaidant, avocat au barreau du VAL-DE-MARNE, vestiaire : 129
INTIMEE
****************
Composition de la cour :
En application des dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue à l’audience publique du 22 Novembre 2022 les avocats des parties ne s’y étant pas opposés, devant Madame Marie-Andrée BAUMANN, Conseiller chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Marie-Andrée BAUMANN, Conseiller,
Madame Delphine BONNET, Conseiller,
Madame Véronique MULLER, magistrat honoraire,
Greffier, lors des débats : Madame Sabine NOLIN,
La SARL Apyc a souscrit le 14 février 2017 auprès de la SAS Locam-location automobiles matériels (la société Locam), un contrat de location n° 1320387 portant sur ’65 packs Platinium’, correspondant à du matériel de géolocalisation de véhicules, d’une durée de 60 mois pour un loyer mensuel de 968,50 euros HT.
Elle a également souscrit, le 29 mars 2017, un autre contrat de location n° 1333130 portant sur ‘3 packs Platinium’ d’une durée de 60 mois pour un loyer mensuel de 44,70 euros HT.
Le matériel, fourni pour les deux contrats par la société Axodel, a été livré respectivement les 20 février 2017 et 20 avril 2017.
La société Apyc a cessé de régler les loyers du premier contrat à compter de l’échéance du 20 juin 2018 et ceux du second à compter de l’échéance du 10 juin 2018.
Par lettres recommandées avec accusé de réception en date du 16 octobre 2018, la société Locam a mis en demeure la société Apyc de régler sous huit jours le montant de l’arriéré de chacun des contrats, en l’avertissant qu’à défaut sa créance deviendrait exigible en totalité conformément aux clauses contractuelles.
Par acte d’huissier en date du 6 avril 2020, la société Locam a assigné la société Apyc devant le tribunal de commerce de Versailles lequel, par jugement réputé contradictoire assorti de l’exécution provisoire du 10 février 2021, a :
– condamné la société Apyc à payer à la société Locam la somme de 32 386,71 euros assortie d’un intérêt égal au taux légal majoré de 5 points, calculé comme suit :
* sur chacun des montants de 1 194,28 euros entre le 20 juin 2018, 20 juillet 2018, 20 août 2018, 20 septembre 2018 et 20 octobre 2018 et le 14 avril 2020,
* sur chacun des montants de 54,95 euros entre les 10 juin 2018, 10 juillet 2018, 10 août 2018, 10 septembre 2018 et 10 octobre 2018 et le 14 avril 2020,
et au taux légal à compter de cette date jusqu’à parfait paiement ;
– dit que les intérêts porteront eux-mêmes intérêts à compter du 6 avril 2020 pourvu que ces intérêts soient dus au moins pour une année entière ;
– ordonné à la société Apyc la restitution à la société Locam du matériel objet des deux contrats sous astreinte de 50 euros par jour de retard à compter du 30ème jour suivant la signification de la décision et ce pour une période de trois mois à l’issue de laquelle, le cas échéant, il sera à nouveau fait droit ;
– condamné la société Apyc à payer à la société Locam la somme de 1 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
– condamné la société Apyc aux dépens.
Par déclaration en date du 25 juin 2021, la société Apyc a interjeté appel du jugement.
Dans ses dernières conclusions déposées au greffe et notifiées par RPVA le 1er mars 2022, elle demande à la cour de :
– infirmer le jugement en toutes ses dispositions ;
Statuant à nouveau des chefs infirmés :
– débouter la société Locam de toutes ses demandes ;
A titre subsidiaire,
– limiter à la somme de 6 246,15 euros le montant susceptible d’être alloué à la société Locam ;
A titre plus subsidiaire encore,
– réviser ce que de droit le montant des clauses pénales des contrats conclus les 14 février et 29 mars 2017;
En conséquence,
– limiter à la somme de 6 248,15 euros le montant susceptible d’être alloué à la société Locam ;
En tout état de cause,
– condamner la société Locam au paiement de la somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
– condamner la société Locam au paiement des entiers dépens.
La société Locam, dans ses dernières conclusions déposées au greffe et notifiées par RPVA le 23 décembre 2021, demande à la cour de :
– la déclarer recevable et bien fondée en l’ensemble de ses demandes ;
– déclarer la société Apyc tant irrecevable que mal fondée en toutes ses demandes et l’en débouter ;
En conséquence
– confirmer le jugement en ce qu’il a :
* ordonné à la société Apyc la restitution du matériel objet des deux contrats sous astreinte de 50 euros par jour de retard à compter du 30 ème jour suivant la signification de la décision et ce pour une période de trois mois à l’issue de laquelle, le cas échéant, il sera à nouveau fait droit ;
* condamné la société Apyc à lui payer la somme de 1 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
* ordonné l’exécution provisoire ;
* condamné la société Apyc aux dépens ;
– réformer le jugement en ce qu’il a :
* condamné la société Apyc à lui payer la somme de 32 386,71 euros assortie d’un intérêt égal au taux légal majoré de 5 points, calculé comme précisé par le tribunal ;
Et statuant à nouveau,
– s’agissant du contrat n°1320387 :
* condamner la société Apyc au paiement de la somme de 59 116,86 euros et ce avec intérêts égal au taux appliqué par la banque centrale européenne à son opération de refinancement la plus récente majoré de 10 points de pourcentage (article L.441-6 du code de commerce) et ce à compter de la date de la mise en demeure soit le 16 octobre 2018 ;
* ordonner l’anatocisme des intérêts en application des dispositions de l’article 1343-2 du code civil;
– s’agissant du contrat n°1333130 :
* condamner la société Apyc au paiement de la somme de 2 840,91 euros et ce avec intérêts égal au taux appliqué par la banque centrale européenne à son opération de refinancement la plus récente majoré de 10 points de pourcentage (article L441-6 du code de commerce) et ce à compter de la date de la mise en demeure, soit le 16 octobre 2018 ;
* ordonner l’anatocisme des intérêts en application des dispositions de l’article 1343-2 du code civil;
Et y ajoutant,
– condamner la société Apyc à lui payer pour le cas où elle ne pourrait restituer le matériel, la somme de 33 388,54 euros ;
En tout état de cause,
– condamner la société Apyc à lui payer la somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
– la condamner aux entiers dépens dont distraction au profit de maître Buquet-Roussel, avocat, en application des dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.
L’ordonnance de clôture a été rendue le 6 octobre 2022.
Pour un plus ample exposé des prétentions et des moyens des parties, il est renvoyé à leurs dernières écritures conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile.
SUR CE,
Sur la résiliation des contrats de location :
La société Apyc, se référant à son rappel des faits, soutient en premier lieu que les contrats de location ont été tacitement résiliés dès que la société Bien sur la route, exploitante des voitures dans lesquelles avaient été installés les capteurs GPS intégrés, objets des contrats litigieux, a été placée en liquidation judiciaire par jugement du 24 juillet 2018. Elle explique qu’en effet elle n’exploitait pas elle-même les capteurs loués, comme le savait la société Locam, évoquant une convention du 1er mars 2017 mettant à disposition de la société Bien sur la route un parc de véhicules détenus grâce à un contrat de ‘leasing’ conclu avec la société Cofibail, ceux-ci étant équipés des capteurs loués auprès de la société Locam ; elle précise qu’après s’être acquittée des échéances dues pendant ‘près de 18 mois’, elle a mis fin à son activité de location de véhicules automobiles lors de la liquidation judiciaire de sa partenaire et a cessé de payer les loyers du matériel qu’elle avait restitué avec les véhicules à la société Cofibail, considérant que les contrats conclus avec la société Locam ont été tacitement résiliés.
S’il devait être considéré qu’aucune résiliation tacite n’est intervenue, elle fait valoir en second lieu que la date de résiliation des contrats pourra être fixée au 24 octobre 2018, comme la société bailleresse en a manifesté l’intention dans ses courriers du 16 octobre 2018, peu important qu’elle les aient ou non reçus. Elle ajoute qu’à cette date les contrats étaient bien résiliés dans l’esprit des parties, précisant que cinq loyers sont restés impayés dans chacun des contrats, soit respectivement les sommes de 5 971,40 euros et 274,75 euros.
La société Locam observe en préalable que l’appelante ne produit ni le contrat de location souscrit auprès de la société Cofibail ni le contrat de mise à disposition avec la société Bien sur la route, auxquels au demeurant elle n’a jamais elle-même été partie et qu’elle ne justifie pas davantage de la résiliation de ces contrats. Elle fait valoir, après avoir rappelé les dispositions des articles 1103 et 1104 du code civil, que la notion de résiliation tacite est inopérante, que la mise en liquidation judiciaire de la société Bien sur la route ne peut avoir aucune incidence sur les contrats de location litigieux, ajoutant que le fait de faire dépendre le contrat de location de la rentabilité espérée d’un contrat de mise à disposition auprès d’un tiers n’est jamais rentré dans le champ contractuel.
Elle soutient enfin que la lettre recommandée du 16 octobre 2018, même si elle est revenue ‘NPAI’, est réputée avoir été adressée au siège social de la société Apyc dont la nouvelle adresse n’a été publiée au Bodacc que le 4 novembre 2018 et qu’elle vaut donc parfaitement mise en demeure et résiliation au 16 octobre 2018.
Le contrat de location a été conclu entre les seules sociétés Apyc et Locam et ne mentionne que le nom du fournisseur du matériel loué, la société Axodel, sans référence à aucune autre société. L’appelante ne verse aux débats aucun des contrats dont elle fait état à l’appui de sa demande de résiliation tacite, celle-ci n’alléguant pas de surcroît que la société Locam y serait partie.
S’il ressort d’un mail daté du 8 novembre 2018 que la société Apyc a informé la société Locam qu’une partie des boîtiers de géolocalisation (packs Platinium) étaient installés sur des véhicules de la société Bien sur la route dont la société Apyc était la présidente, que cette société avait fait l’objet d’une liquidation judiciaire alors qu’elle ‘assurait la rentabilité nécessaire pour le paiement de l’intégralité des dossiers’et que sa propre activité ne permettait ‘pas d’honorer les créances demandées’, elle ne peut pour autant prétendre à la résiliation tacite des contrats de location litigieux, les propres relations de la société Apyc avec une société tiers en liquidation judiciaire étant totalement indépendantes des relations contractuelles nouées en sa qualité de locataire avec la société bailleresse, lesquelles demeurent régies par la force obligatoire du contrat conclu entre elles en application de l’article 1103 du code civil.
Aucune résiliation tacite du contrat ne peut donc être admise.
Au regard du contenu du courrier de résiliation adressé par lettre recommandée du 16 octobre 2018 dans chacun des contrats de location, il convient de retenir, comme le sollicitent d’ailleurs les parties, que les contrats de location ont été résiliés, non pas à compter du 14 avril 2020 comme l’a jugé le tribunal en retenant un délai de huit jours à compter de l’assignation, mais à compter du 24 octobre 2018 faute de régularisation, dans les huit jours de ce courrier, des cinq échéances impayées et ce, conformément aux dispositions du contrat qui seront rappelées ci- dessous.
Sur l’effet de la résiliation et le quantum des sommes dues à titre principal :
Faisant état de l’article 1190 du code civil sur l’interprétation des contrats en cas de doute, la société Apyc soutient qu’une analyse attentive de la clause de résiliation rédigée à l’identique dans les deux contrats conduit à considérer que les deux séries d’indemnités qui y sont mentionnées ne sont prévues qu’en référence aux ‘cas sus-indiqués’ de résiliation automatique et de plein droit mentionnés au b) de cette clause, affirmant qu’à ‘l’évidence’ si l’obligation de payer ces indemnités était aussi applicable aux cas visés au a), la clause n’aurait pas fait référence à ces seuls cas ‘sus indiqués’.
Elle sollicite, en cas de doute sur la portée exacte de cette clause, qu’elle soit interprétée à son bénéfice de sorte qu’elle sollicite l’infirmation du jugement en ce qu’il a retenu à sa charge, pour chacun des contrats, le paiement de 23 mensualités du 20 avril 2020 au 20 février 2022 outre une clause pénale de 10 % ; subsidiairement, si les stipulations contractuelles étaient retenues, elle demande, après avoir évoqué les articles 1231-5 et 1231 du code civil et plusieurs décisions jugeant manifestement excessives les clauses prévues dans les contrats de la société Locam, que d’une part ces clauses soient qualifiées de clause pénale, observant que l’intimée ne le conteste pas au demeurant et que d’autre part, elles soient ramenées à un euro symbolique compte tenu de leur caractère manifestement excessif au regard du préjudice effectivement subi par la société Locam. Elle conteste le raisonnement de cette dernière qui invoque l’investissement qu’elle a engagé en faisant valoir que tout d’abord l’objet de ces clauses pénales ne saurait être l’indemnisation de l’investissement réalisé dans la mesure où une indemnité de non-restitution est par ailleurs prévue à l’article 15 des conditions générales de location et que la société Locam sollicite le paiement de la somme de 33 388,54 euros au titre de l’absence de restitution du matériel ; que par ailleurs et en tout état de cause, les montants exigés au titre des clauses pénales ne sont nullement justifiés par la nécessité d’indemniser l’investissement réalisé, les factures d’acquisition du matériel loué étant bien inférieures aux sommes réclamées qui excèdent de l’ordre de 63 % et de 93 % le montant des investissements réalisés ; qu’enfin le préjudice allégué par la société Locam du fait de la résiliation est nécessairement inférieur à la facture d’achat du matériel contractuel puisque leur valeur a naturellement baissé après 15 mois d’utilisation, soulignant que ce matériel est rapidement devenu obsolète aux yeux de l’intimée qui n’a jamais pris attache avec elle ou avec la société Cofibail pour le récupérer.
La société Locam conteste d’abord la lecture que fait la société Apyc de l’article 12 des conditions générales de location dans la mesure où le plan de cet article est clair et prévoit tout d’abord la différence entre la résiliation fautive et la résiliation automatique puis ensuite les conséquences de la résiliation, quelle qu’en soit la cause, de sorte que l’appelante est redevable de l’indemnité de résiliation prévue par cet article y compris en cas de non paiement des loyers.
Après avoir rappelé qu’il appartient à la société Apyc de démontrer le caractère manifestement excessif de cette clause et cité des arrêts des cours d’appel de Paris et Versailles, elle soutient qu’au regard du montant des factures d’acquisition du matériel qu’elle a réglées à la société Axodel, de l’investissement qu’elle a engagé et du fait que la société Apyc n’a réglé les loyers, respectivement pour chacun des contrats, que pendant 15 mois pour le premier et 13 mois pour le second, l’indemnité de résiliation n’est pas manifestement excessive ; elle sollicite, pour chacun des contrats, outre le paiement des cinq loyers impayés entre juin et octobre 2018, augmentés également de la clause pénale de 10 %, le règlement des loyers à échoir jusqu’à la fin du contrat et ce, à compter du mois de novembre 2018 et non du 20 avril 2020 comme l’a décidé à tort le tribunal alors que les loyers dus entre le 20 novembre 2018 et le 20 mars 2020 n’ont jamais été payés outre la clause pénale de 10 % sur ces loyers.
L’article 12 intitulé ‘Résiliation contractuelle du contrat’ est ainsi rédigé sans aucune interligne ni espace entre les différentes parties a, b, 1 et 2: ‘a) Pour défaut de respect dudit contrat, le contrat de location pourra notamment être résilié de plein droit par le loueur, sans aucune formalité judiciaire, 8 jours après une mise en demeure restée sans effet, dans les cas suivants : inobservation par le locataire de l’une des conditions générales ou particulières du présent contrat, non paiement d’un loyer ou d’une prime d’assurance à son échéance, l’arrivée du terme constituant à elle seule la mise en demeure, l’inexactitude des déclarations du locataire figurant sur la demande de location ou des pièces comptables jointes. Après mise en demeure, le loueur conserve le droit de résilier le contrat même si le locataire a proposé le paiement ou l’exécution de ses obligations ou même s’il y a procédé après le délai fixé, mais il peut y renoncer. b) Résiliation automatique et de plein droit : en cas d’incident de paiement déclaré ou de détérioration de la cotation auprès de la Banque de France, en cas de perte de plus de la moitié du capital social, en cas de (…). Les cas sus-indiqués emporteront les conséquences suivantes : 1) Le locataire sera tenu de restituer immédiatement le matériel au loueur au lieu fixé par ce dernier et de supporter tous les frais occasionnés par cette résiliation : démontage, transport du matériel au lieu désigné par le loueur, formalités administratives. En cas de refus du locataire de restituer le matériel loué, il suffira pour l’y contraindre, d’une simple ordonnance rendue par la juridiction compétente. 2) Outre la restitution du matériel, le locataire devra verser au loueur une somme égale au montant des loyers impayés au jour de la résiliation majorée d’une clause pénale de 10 % ainsi qu’une somme égale à la totalité des loyers restant à courir jusqu’à la fin du contrat telle que prévue à l’origine majorée d’une clause pénale de 10 % (sans préjudice de tous dommages et intérêts qu’il pourrait devoir). Les sommes réglées postérieurement à la résiliation du contrat seront affectées sur les sommes dues et n’emporteront pas novation de la résiliation.’
Il ressort de la lecture de cette clause, qui ne laisse pas de place au doute, que la résiliation du contrat de location peut intervenir soit à la diligence du bailleur pour sanctionner le non respect d’une obligation contractuelle, soit de façon automatique et de plein droit de sorte que lorsque la clause prévoit les conséquences de la résiliation pour ‘les cas sus-indiqués’, elle vise à l’évidence les cas énoncés aux a) et b) de la clause ; par conséquent, y compris lorsque la résiliation a été décidée par la société bailleresse faute de paiement par la société locataire des loyers contractuellement fixés, cette dernière est tenue, en plus de la restitution du matériel et du paiement des loyers impayés au jour de la résiliation, des loyers à échoir jusqu’à la fin du contrat, les loyers échus comme à échoir étant majorés d’une clause pénale de 10 %.
La société Locam ne contestant pas la qualification de clause pénale de l’indemnité de résiliation prévoyant le paiement des loyers à échoir, celle-ci citant notamment des arrêts d’appel qui l’ont retenue, il appartient à la cour d’apprécier si cette clause ainsi que la pénalité de 10 % portant sur les loyers échus impayés et les loyers à échoir sont ou non manifestement excessives, au regard notamment du préjudice subi par la société Locam et le cas échéant de les modérer conformément aux dispositions de l’article 1231-5 du code civil dans sa rédaction applicable aux contrats.
La société Locam, d’après les factures que la société Axodel a établies à son nom et qu’elle verse aux débats, a investi la somme de 26 729,53 euros HT, soit 32 075,44 euros TTC, pour l’achat du matériel objet du premier contrat de location et celle de 1 094,25 euros HT, soit 1 313,10 euros TTC, pour le second contrat.
En outre, le montant des 60 loyers prévus au contrat représentait un total de 58 110 euros HT, soit 69 732 euros TTC pour le premier contrat et de 2 682 euros HT, soit 3 218,40 euros pour le second.
Il n’est pas discuté par la société Apyc qu’elle a réglé 15 loyers de 968,50 euros HT ou 1162,20 euros TTC pour le premier contrat, soit la somme de 14 527,50 euros HT (17 433 euros TTC) et 13 loyers de 44,70 euros HT ou 53,64 euros TTC pour le second, soit la somme de 581,10 euros HT (697,32 euros TTC) puis qu’elle a laissé 5 loyers impayés sur chacun des contrats pour un total non discuté par l’appelante de 5 970,40 euros TTC pour le premier contrat et de 274,75 euros TTC pour le second et qu’elle n’a plus ensuite réglé aucun loyer.
La taxe à la valeur ajoutée prévue au code général des impôts ne s’applique qu’aux livraisons de biens et prestations de service de sorte que les indemnités et pénalités qui ne constituent pas la contrepartie d’une prestation de services n’y sont pas soumises. L’indemnité de résiliation correspondant aux loyers à échoir doit donc être appréciée au regard des seuls loyers hors taxes comme déjà décidé par le tribunal, sans prise en compte des sommes supplémentaires de 32,08 et de 1,31 euros intégrées dans les décomptes de la société Locam, cette indemnité étant cependant appréciée à compter de la résiliation fixée par la cour au 24 octobre 2018 et non au au 14 avril 2020 comme décidé à tort par le tribunal.
Le préjudice économique et financier de la société bailleresse n’est pas constitué de la seule somme investie pour l’achat du matériel loué mais également de l’absence de la rémunération contractuellement espérée et dont elle a été privée du fait de la non poursuite de chacun des contrats jusqu’au terme convenu.
Au regard du montant HT des loyers payés et restés impayés par la société Apyc, à savoir 19 370 euros HT pour le premier contrat et 804,60 euros HT pour le second contrat et du montant total des loyers contractuellement fixés et dont la société Locam comptait être rémunérée ( 58 110 et 2 682 euros euros HT), l’indemnité de résiliation, calculée par la cour sur la base des seuls loyers HT à échoir, soit 38 740 euros HT et 1 877,40 euros HT pour le second contrat, et non 47 771,20 euros et 2 307,90 euros comme calculée par la société Locam, n’apparaît pas manifestement excessive au regard de la rémunération espérée par la société intimée à laquelle le matériel loué n’a pas été restitué.
Cependant, au regard de cette indemnité de résiliation permettant à la société Locam d’être indemnisée de son préjudice financier, conformément au montant du loyer contractuellement prévu et au delà de la valeur du matériel loué, la pénalité supplémentaire de 10 %, contractuellement prévue tant sur les loyers échus, en application de l’article 4 des conditions générales, que sur les loyers à échoir et restés impayés, appparaît manifestement excessive et sera réduite à la somme de 1 euro pour chacun des contrats.
Le décompte s’établit par conséquent comme suit :
Contrat 1320387 conclu le 14 février 2017 :
5 loyers échus impayés 5 970,40 euros TTC
+ pénalité réduite à 1 euro,
+ indemnité de résiliation 38 740 euros,
+ pénalité réduite à 1 euro,
de sorte que pour ce contrat la société Apyc sera condamnée au paiement de la somme de 5 970,40 euros TTC outre celle de 38 742 euros.
Contrat 1333130 conclu le 29 mars 2017
5 loyers échus impayés : 274,75 euros TTC
+ pénalité réduite à 1 euro
+ indemnité de résiliation 1 877,40 euros
+ pénalité réduite à 1 euro
La société Apyc sera par conséquent condamnée au paiement de la somme de 274,75 euros TTC outre celle de 1 879,40 euros.
Les conditions générales de chacun des contrats de location ont prévu en leur article 4 que ‘sans préjudice de la résiliation, tout loyer impayé entraînera le versement d’un intérêt de retard calculé au taux d’intérêt légal applicable en France, majoré de cinq points plus taxes’.
En l’absence d’autres dispositions sur le taux d’intérêt applicable notamment sur les indemnités de résiliation et les pénalités de retard, portées à la connaissance de la société Apyc conformément aux dispositions de l’article L.441-6 du code de commerce, allégué par l’intimée, dans sa rédaction applicable à la date des contrats, il convient, infirmant le jugement, de prévoir que les intérêts au taux légal majoré de 5 points porteront sur chacune des mensualités impayées, d’un montant respectif de 1 194,28 euros et de 54,95 euros à compter de leur échéance et jusqu’à leur paiement et que le surplus de la condamnation sera assortie des intérêts au taux légal à compter de chacune des mise en demeure du 16 octobre 2018 ; la société intimée dont la demande au titre de la capitalisation des intérêts est accueillie pour les intérêts échus depuis une année entière conformément à l’article 1343-2 du code civil, est déboutée du surplus de ses demandes au titre des intérêts.
Sur la restitution des objets loués et l’indemnité sollicitée par l’intimée :
La société Apyc explique que ‘dès que la résiliation tacite du contrat est intervenue’, elle a informé la société Locam qu’elle pouvait prendre attache avec elle pour organiser la restitution du matériel mais que celle-ci n’a pas réagi ; elle précise que lorsqu’elle a restitué les véhicules loués à la société Cofibail, les capteurs GPS se trouvaient toujours à l’intérieur des véhicules mais qu’elle se trouve désormais dans l’impossibilité matérielle de les restituer de sorte qu’il ne peut être ordonnée la restitution sous astreinte du ‘matériel contractuel’.
Elle conteste la demande en paiement formulée pour la première fois par la société Locam au regard notamment des dispositions de l’article 15 des conditions générales de location en soulignant que le contrat exige, comme condition de paiement d’une indemnité pour non restitution du matériel contractuel, que la société débitrice de cette obligation ait été mise en demeure, soutenant que l’intimée n’a jamais procédé à une telle demande.
Elle ajoute que le montant de cette indemnité, si elle avait été mise en demeure, ne pourrait être supérieure, en application de l’article précité, à huit mois de loyers pour chacun des contrats.
La société Locam qui sollicite la confirmation du jugement en ce qu’il a ordonné la restitution du matériel loué, expose que la remise à un tiers, comme la société Apyc l’a reconnue, est une violation de son droit de propriété puisqu’elle était seule propriétaire du matériel loué et que la société Apyc, gardien de ce matériel, ne pouvait le remettre à un tiers ; elle fait valoir qu’elle doit être indemnisée de cette perte, soulignant qu’elle n’avait pas à faire les démarches pour récupérer ce matériel auprès d’un tiers ; elle sollicite la condamnation de la société Apyc à lui régler une somme correspondant au montant des factures de la société Axodel.
L’article 15 des conditions générales de location, intitulé ‘Restitution du bien’ stipule :
‘A la fin de la location ou en cas de résiliation du contrat, le bien devra se trouver en parfait état de marche et d’entretien, (…). La restitution aura lieu à l’adresse indiquée par le loueur ou à défaut au siège social de ce dernier, les frais et charges de restitution étant supportés par le locataire. En cas de non restitution du matériel au terme du contrat de location, le locataire sera redevable d’une indemnité mensuelle de privation de jouissance égale au dernier loyer facturé. L’indemnité sera portée à 8 mois de loyers à défaut de restitution effective 30 jours après mise en demeure.
Dans le cas où le matériel ne serait pas restitué en parfait état de fonctionnement, sans préjudice de cette indemnité, le locataire sera tenu au règlement de la facture de remise en état dudit matériel adressée par le loueur et dont le montant sera déterminé à hauteur d’un devis sollicité par ce dernier auprès du fournisseur, du distributeur dudit matériel ou à défaut d’un professionnel du secteur.’
La société Apyc n’allègue pas avoir restitué le matériel, objet des deux contrats de location, celle-ci justifiant simplement avoir échangé des courriers avec le service chargé du recouvrement contentieux des sommes dues à la société Locam à propos de la restitution d’une partie du matériel loué équipant certains véhicules en possession notamment de la société Bien sur la route ; dans un mail daté du 8 novembre 2018, elle indique cependant qu’elle-même avait à sa disposition 18 véhicules et 18 packs Platinium sans s’expliquer sur le défaut de restitution de ce matériel.
Il appartient en tout état de cause à la société locataire de restituer le matériel loué, la société propriétaire n’ayant pas à faire de démarche particulière dans la mesure où le contrat prévoit que la restitution, à défaut d’adresse indiquée par le loueur, s’effectue au siège social de ce dernier, cette restitution, compte tenu de la nature des matériels loués, ne présentant pas en l’espèce de difficulté particulière.
Dans ces circonstances, le jugement doit être confirmé en ses dispositions concernant la restitution des équipements loués.
S’agissant de la demande complémentaire présentée en appel par la société Local, à hauteur du montant TTC des factures portant sur le matériel loué, en date des 21 février 2017 et 19 avril 2017, lesquelles ne correspondent pas à l’indemnité mensuelle de privation de jouissance prévue à l’article 15 précité au contrat, celle-ci, qui n’a pas été précédée d’une mise en demeure, ne saurait être accueillie alors même qu’il n’est pas justifié de la valeur du materiel loué après son utilisation pendant près de six ans depuis la signature du contrat de location.
Il convient, ajoutant au jugement, de débouter la société Locam de cette demande.
PAR CES MOTIFS
Statuant par arrêt contradictoire,
Confirme le jugement du 10 février 2021 sauf sur le quantum des condamnations prononcées à titre principal et les modalités du taux d’intérêt légal ;
Statuant à nouveau de ces chefs,
Condamne la société Apyc à payer à la société Locam location automobiles matériels les sommes suivantes :
– au titre du contrat 1320387,
* 5 970,40 euros TTC au titre des loyers impayés avec intérêts au taux légal majoré de 5 points portant sur chacune des mensualités impayées, d’un montant de 1 194,28 euros TTC, à compter de l’échéance de chacune et jusqu’à leur paiement,
* 38 742 euros avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 16 octobre 2018 ;
– au titre du contrat 1333130,
* 274,75 euros TTC au titre des loyers impayés avec intérêts au taux légal majoré de 5 points portant sur chacune des mensualités impayées, d’un montant de 54,95 euros TTC, à compter de l’échéance de chacune et jusqu’à leur paiement,
* 1 879,40 euros avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 16 octobre 2018 ;
Ordonne la capitalisation des intérêts échus depuis une année entière ;
Ajoutant au jugement,
Déboute la société Locam location automobiles matériels de sa demande à hauteur de la somme de 33 388,54 euros ;
Condamne la société Apyc à verser à la société Locam location automobiles matériels la somme de 1 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
Condamne la société Apyc aux dépens de la procédure d’appel qui pourront être recouvrés, pour ceux dont elle a fait l’avance, par maître Buquet-Roussel, conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.
Prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
Signé par Madame Marie-Andrée BAUMANN, Conseiller faisant fonction de Président, et par Madame Sabine NOLIN, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le greffier, Le conseiller faisant fonction de président,