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La société espagnole Schweppes ne peut pas s’opposer à l’importation de bouteilles d’eau tonique revêtues de la marque « Schweppes » en provenance du Royaume-Uni dès lors que, dans le cadre d‘une cession de marque à Coca Cola en 1999 et qu’elle a elle-même donné l’impression qu’il s’agissait d’une marque unique et globale. Peu importe que les bouteilles d’eau tonique ont été fabriquées et mises sur le marché non pas par la société Schweppes mais par Coca-Cola, laquelle ne présente pas de lien avec le groupe Orangina Schweppes.
Le principe de l’épuisement du droit de marque vise à concilier les intérêts fondamentaux de la protection des droits de marque, d’une part, et ceux de la libre circulation des marchandises dans le marché intérieur, d’autre part (arrêt du 11 juillet 1996, Bristol-Myers Squibb e.a., C‑427/93, C‑429/93 et C‑436/93, EU:C:1996:282, point 40).
En application de l’article 15 de la directive (UE) 2015/2436 du 16 décembre 2015, le droit conféré par la marque ne permet pas à son titulaire d’interdire l’usage de celle-ci pour des produits qui ont été mis dans le commerce dans la Communauté sous cette marque par le titulaire ou avec son consentement. L’épuisement des droits n’est pas applicable lorsque des motifs légitimes justifient que le titulaire s’oppose à la commercialisation ultérieure des produits, notamment lorsque l’état des produits est modifié ou altéré après leur mise dans le commerce.
Le principe de l’épuisement des droits joue notamment lorsqu’une marque a été, en tout ou partie, transmise à un tiers et lorsque l’un ou plusieurs des éléments suivants sont présents : i) le titulaire a favorisé une image de marque globale et associée à l’État membre de provenance des produits dont il entend faire interdire l’importation ; ii) le titulaire et le tiers coordonnent leur stratégie de marque pour favoriser délibérément, dans l’ensemble de l’EEE, l’apparence ou l’image d’une marque unique et globale ; iii) l’image de marque unique et globale ainsi donnée crée une confusion aux yeux du consommateur moyen quant à l’origine commerciale des produits revêtus de cette marque ; iv) le titulaire et le tiers ont des rapports commerciaux et économiques étroits, même si, à proprement parler, ils ne dépendent pas l’un de l’autre pour l’exploitation commune de la marque ; v) le titulaire a expressément ou implicitement consenti que les mêmes produits que ceux dont il entend faire interdire l’importation soient importés dans un ou plusieurs autres États membres dans lesquels il détient encore les droits de marque.
S’agissant du droit de marque, la CJUE a itérativement jugé que ce droit constitue un élément essentiel du système de concurrence non faussé que le droit de l’Union entend établir et maintenir. Dans un tel système, les entreprises doivent être en mesure de s’attacher la clientèle par la qualité de leurs produits ou de leurs services, ce qui n’est possible que grâce à l’existence de signes distinctifs permettant d’identifier ces produits et ces services. Pour que la marque puisse jouer ce rôle, elle doit constituer la garantie que tous les produits qui en sont revêtus ont été fabriqués sous le contrôle d’une entreprise unique à laquelle peut être attribuée la responsabilité de leur qualité (arrêts du 17 octobre 1990, HAG GF, C‑10/89, EU:C:1990:359, point 13, ainsi que du 11 juillet 1996, Bristol-Myers Squibb e.a., C‑427/93, C‑429/93 et C‑436/93, EU:C:1996:282, point 43 et jurisprudence citée).
L’objet spécifique du droit de marque est notamment d’assurer au titulaire le droit d’utiliser la marque pour la première mise en circulation d’un produit et de le protéger ainsi contre les concurrents qui voudraient abuser de la position et de la réputation de la marque en vendant des produits indûment pourvus de cette marque.
En vue de déterminer la portée exacte de ce droit exclusif reconnu au titulaire de la marque, il faut tenir compte de la fonction essentielle de la marque, qui est de garantir au consommateur ou à l’utilisateur final l’identité d’origine du produit marqué, en lui permettant de distinguer sans confusion possible ce produit de ceux qui ont une autre provenance, Or, la fonction essentielle de la marque serait compromise si, en l’absence de tout élément de consentement de la part du titulaire, celui-ci ne pouvait pas s’opposer à l’importation d’un produit identique ou similaire revêtu d’une marque identique ou prêtant à confusion, qui a été fabriqué et mis en circulation dans un autre État membre par un tiers n’ayant aucun lien économique avec ce titulaire.
L’élément déterminant pour autoriser l’importation de marchandises sous une marque cédée à un tiers, est la possibilité d’un contrôle sur la qualité des produits et non l’exercice effectif de ce contrôle. A titre d’exemple, si le donneur de licence tolère la fabrication de produits de mauvaise qualité par le licencié alors qu’il a les moyens contractuels de l’empêcher, il doit en assumer la responsabilité. De même, si la fabrication des produits est décentralisée au sein d’un même groupe de sociétés et que les filiales établies dans chacun des États membres fabriquent des produits dont la qualité est adaptée aux particularités de chaque marché national, ces différences de qualité ne sauraient être invoquées pour s’opposer à l’importation de produits fabriqués par une société-sœur, le groupe devant subir les conséquences de son choix (voir, en ce sens, arrêt du 22 juin 1994, IHT Internationale Heiztechnik et Danzinger, C‑9/93).
Il en résulte que la notion de « lien économique » renvoie à un critère non pas formel, mais substantiel, qui est également satisfait lorsque, après le fractionnement de marques parallèles nationales dû à une cession territorialement limitée, les titulaires de ces marques coordonnent leurs politiques commerciales ou s’accordent afin de contrôler conjointement l’utilisation desdites marques, de telle sorte qu’ils ont la possibilité de déterminer directement ou indirectement les produits sur lesquels la marque est apposée et d’en contrôler la qualité.
En effet, permettre à de tels titulaires de protéger leurs territoires respectifs contre l’importation parallèle de ces produits aboutirait à un cloisonnement des marchés nationaux qui n’est pas justifié par l’objet du droit de marque et qui n’est notamment pas nécessaire pour préserver la fonction essentielle des marques concernées.
En conclusion, les produits Schweppes ont été mis dans le commerce dans l’État membre d’exportation avec le consentement du titulaire du droit de marque protégé par l’État membre d’importation, lu à la lumière de l’article 36 TFUE.
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