Engagement de caution : 26 novembre 2009 Cour d’appel de Versailles RG n° 08/07340

·

·

Engagement de caution : 26 novembre 2009 Cour d’appel de Versailles RG n° 08/07340
Ce point juridique est utile ?

COUR D’APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 00A

1ère chambre

1ère section

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 26 NOVEMBRE 2009

R.G. N° 08/07340

AFFAIRE :

Sté BOISTECH

C/

Société BOUYGUES BATIMENT ILE DE FRANCE

Décision déférée à la cour : sentence arbitrale rendue le 30 Mai 2008 par M. [P] [V]

Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le :

à :

SCP LEFEVRE TARDY & HONGRE BOYELDIEU

SCP LISSARRAGUE DUPUIS BOCCON GIBOD

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LE VINGT SIX NOVEMBRE DEUX MILLE NEUF,

La cour d’appel de VERSAILLES, a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre :

SOCIETE BOISTECH

société par actions simplifiées ayant son siège [Adresse 4]

[Localité 3] représentée par son Président en exercice

représentée par la SCP LEFEVRE TARDY & HONGRE BOYELDIEU – N° du dossier 280589

rep/assistant : la selarl BLANCHARD représentée par Me MORINO (avocat au barreau de LA ROCHE SUR YON)

APPELANTE

****************

Société BOUYGUES BATIMENT ILE DE FRANCE

sociéyté anonyme inscrite au RCS de VERSAILLES sous le numéro B 433.900.834 ayant son siège [Adresse 1] prise en la personne de son Président du conseil d’administration domicilié en cette qualité audit siège

représentée par la SCP LISSARRAGUE DUPUIS BOCCON GIBOD – N° du dossier 0946166

Rep/assistant : cabinet Francis BOUSQUET (avocat au barreau de PARIS)

INTIMEE

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l’article 786 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue à l’audience publique du 22 Octobre 2009 les avocats des parties ne s’y étant pas opposés, devant Madame Bernadette WALLON président chargé du rapport en présence de Madame Evelyne LOUYS conseiller

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Bernadette WALLON, président,

Madame Evelyne LOUYS, conseiller,

Mme Claire DESPLAN, conseiller,

Greffier, lors des débats : Madame Sylvie RENOULT,

Dans le cadre d’une opération de réhabilitation d’un immeuble à usage de bureaux situé [Adresse 2]), la société Bouygues Batiment Ile de France et la société Boistech ont signé un contrat de sous-traitance le 17 juillet 2005 relatif au lot ‘menuiserie intérieure – agencement’ pour un montant forfaitaire de 400.000 euros HT, deux avenants ayant porté le montant du marché à 606.478 euros.

La société Bouygues Bâtiment Ile de France et la société Boistech ne sont pas parvenues à s’entendre sur le montant des travaux supplémentaires, la première proposant, dans un projet d’avenant, de régulariser ceux-ci pour un montant de 25.666 euros HT, la seconde sollicitant un montant de 72.543 euros HT, ni sur les sommes réclamées au titre des pénalités de retard et de la levée des réserves.

Les parties ont convenu, conformément aux dispositions du contrat de sous-traitance, de soumettre le litige à l’un des arbitres contractuellement désignés, en l’espèce, M.[P] [V].

Reprochant à la société Boistech des carences dans l’achèvement du chantier et la levée des réserves, la société Bouygues Bâtiment Ile de France réclamait le versement d’une somme de 38.037,71 euros HT et entendait appliquer des pénalités de retard d’une part au titre du marché proprement dit à hauteur de 50.400 euros, et d’autre part au titre de la levée des réserves pour un montant de 118.862 euros. Elle sollicitait en outre le remboursement de diverses prestations pour un montant de 17.132 euros HT.

La société Bouygues Bâtiment Ile de France demandait ainsi à l’arbitre la condamnation de la société Boistech à lui verser le trop perçu à savoir la somme de 111.666,08 euros TTC, avec intérêts à compter du 15 mai 2007 ainsi que la somme de 2.000 euros par application de l’article 700 du code de procédure civile et les frais et honoraires d’arbitrage.

La Société Boistech sollicitait quant à elle le prononcé de la nullité du contrat de sous-traitance du 27 juillet 2005, la condamnation de la société Bouygues Bâtiment Ile de France à lui payer le montant des sommes dues au titre des prestations effectuées, sans invoquer le contrat de sous-traitance considéré comme nul, soit la somme de 177.942,30 euros HT. Elle demandait également que soient pris en compte les intérêts financiers au taux légal sur la somme de 212.818,99 euros TTC à compter du 22 janvier 2007 ainsi que la capitalisation de ces intérêts, la condamnation de la société Bouygues Bâtiment Ile de France à lui verser la somme de 15.000 euros au titre de dommages et intérêts pour résistance dolosive, abusive et vexatoire ainsi que la somme de 10.000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, au titre des frais irrépétibles.

Le 30 mai 2008, M.[P] [V], désigné en qualité d’arbitre par acte de mission du 29 octobre 2007, a prononcé une sentence arbitrale aux termes de laquelle il a :

– considéré que le sous-traitant est totalement et intégralement garanti par le cautionnement, de sorte que les exigences de l’article 14 de la loi du 31 décembre 1975 sont satisfaites et que la nullité du sous traité ne peut être soutenue,

– arrêté le montant des travaux supplémentaires à la somme de 40.095,00 euros HT,

– arrêté le montant des prestations réalisées en lieu et place de la société Boistech à 23.428,25 euros HT,

– fixé les pénalités de retard, respectivement à la somme de 50.400 euros HT au titre de l’achèvement des ouvrages, et à la somme de 58.191,57 euros HT au titre de la levée des réserves,

– arrêté le montant des refacturations de prestations à la somme de 11.207 euros HT,

– dit que le décompte des travaux fait apparaître un solde en faveur de la société Boistech de 2.267,48 HT, soit 2.711,91 euros TTC,

– dit que l’équité conduit à rejeter la demande de la société Bouygues Bâtiment Ile de France au titre de l’application de l’article 700 du code de procédure civile,

– rejeté la demande de la société Boistech relative aux dommages et intérêts, et ce compris la demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamné la société Bouygues Bâtiment Ile de France à régler à la société Boistech la somme de 2.711,91 euros TTC, majorée des intérêts financiers au taux légal à compter du 15 mai 2007,

– dit que cette sentence est immédiatement exécutoire,

– dit que les sociétés Bouygues Bâtiment Ile de France et Boistech supporteront chacune la somme de 5.000 euros HT, au titre des frais et honoraires d’arbitrage.

La S.A.S. Boistech a formé un recours en annulation de la sentence arbitrale le 23 septembre 2008. Aux termes de ses dernières écritures signifiées le 30 septembre 2009 auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé, elle demande à la cour, au visa de l’article 1484 du code de procédure civile, de :

– constater que l’arbitre a violé une règle d’ordre public,

Vu l’article 14 de la loi n° 75-1334 du 31 décembre 1975,

– constater l’absence de cautionnement complémentaire couvrant les sommes dues au titre des deux avenants et des travaux complémentaires,

– constater et dire que le contrat de sous-traitance est nul pour ce motif d’ordre public,

– annuler la sentence arbitrale du 30 mai 2008 pour ce motif,

statuant sur ses demandes,

– condamner la société Bouygues Bâtiment Ile de France à lui payer le montant des sommes dues au titre des prestations effectuées, sans invoquer le contrat de sous-traitance considéré comme nul, soit la somme de 177.942,30 euros HT ou encore 212.818,99 euros TTC,

– prendre en compte les intérêts financiers au taux légal sur la somme de 112.818,99 euros TTC à compter du 22 janvier 2007, date de la première mise en demeure de la société Boistech, ainsi que la capitalisation des intérêts,

– condamner la société Bouygues Bâtiment Ile de France à lui verser la somme de 15.000 euros au titre de dommages et intérêts pour résistance abusive et la somme de 10.000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile,

En tout état de cause,

– constater que l’arbitre sus nommé a statué sans se conformer à la mission qui lui avait été conférée,

– annuler les dispositions de la sentence arbitrale fixant les pénalités de retard à 50.191,57 euros et arrêtant à 11.207,00 euros les refacturations de prestations,

– débouter la société Bouygues Bâtiment Ile de France de ses demandes de ces derniers chefs,

– mettre à la charge de la société Bouygues Bâtiment Ile de France les dépens de l’instance en annulation.

La société Bouygues Bâtiment Ile de France, aux termes de ses conclusions signifiées en dernier lieu le 15 octobre 2009 auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé, demande à la cour, au visa de l’article 1484 du ‘code civil’, de :

– déclarer la société Boistech irrecevable et en toute hypothèse mal fondée en son recours en annulation,

– l’en débouter,

– dire et juger que l’arbitre n’a pas violé les dispositions de la loi du 31 décembre 1975 et notamment l’article 14 après avoir constaté la fourniture par le Crédit Lyonnais d’une caution garantissant le paiement de toutes sommes qui seraient dues au titre du contrat de sous-traitance,

– constater que l’arbitre s’est déterminé par des considérations d’équité et qu’il a donc statué en tant qu’amiable compositeur,

– dire n’y avoir lieu à annuler la sentence arbitrale du 30 mai 2008 de M.[V],

– dire n’y avoir lieu à statuer en l’état sur la demande de condamnation que la société Boistech a formulé devant la cour , sans attendre l’arrêt à intervenir sur son recours en annulation,

– condamner la société Boistech à payer à la société Bouygues Bâtiment Ile de France la somme de 10.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux dépens dont distraction au profit de la SCP Lissarrague Dupuis Boccon-Gibod, avoués, conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 15 octobre 2009.

MOTIFS

Si la société Bouygues Bâtiment Ile de France soulève dans le dispositif de ses conclusions l’irrecevabilité du recours en annulation, elle ne fait valoir aucun moyen au soutien de cette demande qui ne peut donc prospérer, le conseiller de la mise en état ayant justement rejeté, par ordonnance du 25 juin 2009, l’incident après avoir constaté que la société Boistech en se désistant de sa demande devant la cour d’appel de Paris n’avait pas entendu renoncer à tout recours alors qu’elle avait saisi la juridiction territorialement compétente.

Sur le recours en annulation pour violation par l’arbitre d’une règle d’ordre public

Selon l’article 1484-6° du code de procédure civile, la sentence arbitrale peut faire l’objet d’un recours en annulation si l’arbitre a violé une règle d’ordre public.

Le contrôle de la cour d’appel saisie d’un recours en annulation fondé sur ce texte doit porter non sur la qualification que l’arbitre a donné de la convention liant les parties , même s’il est prétendu que celle-ci est régie par des dispositions d’ordre public, mais sur la solution donnée au litige, l’annulation n’étant encourue que dans la mesure où cette solution heurte l’ordre public.

Ainsi la cour d’appel n’a pas à vérifier la pertinence du raisonnement juridique par lequel l’arbitre s’est prononcé.

Or il apparait qu’en l’espèce, la société Boistech en invoquant le non respect d’une règle d’ordre public édictée par l’article 14 de la loi du 31 décembre 1975 qui dispose qu’à peine de nullité du sous-traité, les paiements de toutes les sommes dues par l’entrepreneur au sous-traitant sont garantis par une caution personnelle et solidaire, laquelle selon une jurisprudence constante doit comporter le nom du sous-traitant et le montant du marché garanti, demande à la cour de vérifier la pertinence du raisonnement juridique par lequel l’arbitre a rejeté le moyen tiré de la nullité du contrat de sous-traitance et donc d’exercer un contrôle au fond de la sentence. Or, le recours en annulation ne doit pas permettre une révision de la sentence de sorte que lorsque la méconnaissance de la règle d’ordre public invoquée se situe au niveau du raisonnement de l’arbitre, aucune annulation de la sentence n’est encourue.

Dès lors qu’il n’est pas démontré que la solution adoptée par l’arbitre, à savoir la fixation des différentes créances des parties et la détermination du solde du à la société Boistech, serait contraire à l’ordre public et que les griefs invoqués tendent en réalité à une révision au fond de la sentence, interdite au juge de l’annulation, la société Boistech ne peut qu’être déboutée de sa demande sans que la cour ait à se prononcer sur l’existence ou non d’une violation par l’arbitre d’une règle d’ordre public lors de l’appréciation de la validité de la convention signée par les parties.

Le recours en annulation sera rejeté de ce chef.

Sur le recours en annulation pour non respect par l’arbitre de la mission qui lui avait été conférée

Selon l’article 1484-3 du code de procédure civile, la sentence arbitrale peut faire l’objet d’un recours en annulation si l’arbitre a statué sans se conformer à la mission qui lui avait été conférée.

Aux termes du contrat de sous-traitance, il est stipulé en page 27 des conditions spécifiques, article 30, que l’arbitre statue comme amiable compositeur et qu’une fois rendue la sentence est immédiatement exécutoire et définitive.

En outre, l’acte de mission signé par les parties rappelle que l’arbitre statuera comme amiable compositeur et en dernier ressort.

Il appartient au juge de l’annulation de s’assurer que l’arbitre a fait usage de ses pouvoirs d’amiable compositeur en vérifiant l’équité de l’application de la règle de droit et non de contrôler l’équité de la solution donnée au litige.

Il ressort de la motivation de la sentence arbitrale que si l’arbitre ne s’est affranchi ni des règles de droit ni des dispositions contractuelles, il a néanmoins vérifié si celles-ci n’étaient pas contraires à l’équité. C’est ainsi qu’il a fait partiellement droit à la demande de la société Boistech au titre du devis M34 du 3 novembre 2006 en se référant expressément à l’équité pour fixer son préjudice à la somme de 6218 euros HT, qu’il a statué également en équité sur les demandes au titre des devis M36 et M37 des 20 novembre 2006 et 7 décembre 2006 en acceptant la demande en paiement de travaux alors que les travaux ont été réalisés avant l’envoi des devis, qu’il a considéré la demande de la société Bouygues Bâtiment Ile de France au titre de la levée des réserves comme insuffisamment étayée et a retenu une somme de 23 428,25 euros HT, qu’il a admis la demande au titre des pénalités de retard sur l’achèvement des ouvrages à hauteur de 50 400 euros après avoir relevé que l’assiette de calcul a été limitée au montant initial du marché démontrant ainsi un examen en équité de la demande, qu’il a limité l’indemnité au titre du retard dans la levée des réserves en se référant expressément à l’équité.

Il est ainsi démontré que l’arbitre a bien vérifié l’équité de l’application de la règle de droit et des engagements contractuels de sorte que le grief qui lui est fait d’avoir jugé sans se conformer à sa mission d’amiable compositeur n’est pas fondé.

Le recours en annulation pour non respect de sa mission par l’arbitre doit être rejeté.

La société Boistech succombant en son recours ne peut qu’être déboutée de sa demande en dommages-intérêts pour résistance abusive.

PAR CES MOTIFS

LA COUR, statuant publiquement, contradictoirement, en dernier ressort,

DÉCLARE la demande recevable,

DÉBOUTE la société Boistech de son recours en annulation de la sentence arbitrale du 30 mai 2008,

DÉBOUTE la société Boistech de sa demande en dommages-intérêts pour procédure abusive,

DÉBOUTE les parties de leur demande sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE la société Boistech aux dépens avec droit de recouvrement direct au profit de la SCP Lissarrague Dupuis Boccon-Gibod, avoués, conformément à l’article 699 du code de procédure civile.

– prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

– signé par Madame Bernadette WALLON, président et par Madame RENOULT, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le GREFFIER,Le PRESIDENT,

 


0 0 votes
Évaluation de l'article
S’abonner
Notification pour
guest
0 Commentaires
Le plus ancien
Le plus récent Le plus populaire
Commentaires en ligne
Afficher tous les commentaires
Chat Icon
0
Nous aimerions avoir votre avis, veuillez laisser un commentaire.x