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COUR D’APPEL
D’ANGERS
CHAMBRE A – CIVILE
CM/IM
ARRET N°:
AFFAIRE N° RG 18/02347 – N° Portalis DBVP-V-B7C-ENEW
Jugement du 22 Juin 2018
Tribunal d’Instance de CHOLET
n° d’inscription au RG de première instance 1117000260
ARRET DU 16 MAI 2023
APPELANTE :
SARL […] agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
[Adresse 5]
[Localité 3]
Représentée par Me Inès RUBINEL, avocat postulant au barreau d’ANGERS, en qualité d’administratrice provisoire de Me Benoît GEORGE, associé de la SELARL LEXAVOUE RENNES ANGERS, avocat au barreau d’ANGERS, et Me Amel MAUGIN, avocat plaidant au barreau de NANTES
INTIMES :
Madame [E] [W] épouse [P]
née le 25 Septembre 1943 à LAVAL (53)
[Adresse 2]
[Localité 4]
Monsieur [L] [P]
né le 29 Mai 1941 à CHOLET (49)
[Adresse 2]
[Localité 4]
Représentés par Me Elisabeth ROULEAU substituant Me Régine GAUDRE de la SELARL CAPPATO GAUDRE, avocat au barreau d’ANGERS
SOCIÉTÉ […] agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux, domiciliés en cette qualité audit siège
[Adresse 6]
[Localité 1]
Représentée par Me Vanina LAURIEN de la SELARL DELAGE BEDON LAURIEN HAMON, avocat postulant au barreau d’ANGERS, et Me Séverine LECLET, avocat plaidant au barreau de BREST
COMPOSITION DE LA COUR
L’affaire a été débattue publiquement à l’audience du 30 Mai 2022 à 14 H 00, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Madame MULLER, conseillère faisant fonction de présidente, qui a été préalablement entendue en son rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Mme MULLER, conseilère faisant fonction de présidente
M. BRISQUET, conseiller
Mme ELYAHYIOUI, vice-présidente placée
Greffière lors des débats : Mme LEVEUF
ARRET : contradictoire
Prononcé publiquement le 16 mai 2023 par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions de l’article 450 du code de procédure civile ;
Signé par Catherine MULLER, conseillère faisant fonction de présidente, et par Christine LEVEUF, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
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Exposé sur litige
Le 24 mars 2015, M. [P] et son épouse Mme [W] (ci-après les clients) ont commandé à la SARL […] exerçant une activité de rénovation et d’amélioration de l’habitat (ci-après l’entreprise) la fourniture, la livraison et la pose d’une ventilation mécanique insufflée dite VMI, gamme Prestige, de Ventilairsec au prix de 4 400 euros TTC financé par un crédit du même montant souscrit pour une durée de 89 mois auprès de la SA […] (ci-après le prêteur).
La prise d’air ayant été installée en combles perdus, avec un point d’insufflation unique au plafond du palier de l’escalier au 2ème étage, un procès-verbal de réception de travaux a été signé sans réserve le 25 juin 2015 et la facture émise le même jour a été intégralement acquittée.
Les clients, qui se sont plaints que l’installation ne répondait pas à leurs attentes et était source de nuisances, notamment sonores, ont obtenu en référé le 5 février 2016 une expertise confiée à M. [Y] et la suspension de leurs obligations envers le prêteur jusqu’au dépôt du rapport d’expertise.
Au vu du rapport déposé le 15 décembre 2016 par l’expert judiciaire, préconisant la dépose complète de l’installation de renouvellement d’air qui est inopérante et affectée de non-conformités, ils ont fait assigner les 7 et 10 juillet 2017 l’entreprise et le prêteur devant le tribunal d’instance de Cholet afin d’obtenir au principal, en l’état de leurs dernières conclusions, la résolution du bon de commande et du crédit affecté, la garantie de l’entreprise pour toutes condamnations susceptibles d’être prononcées à leur encontre au profit du prêteur, le paiement par elle des sommes de 203,50 euros au titre de la remise en état des lieux, de 120 euros au titre des honoraires de M. [G], expert amiable, et de 3 000 euros à titre de dommages et intérêts pour préjudice de jouissance et la restitution par le prêteur de la somme de 70,02 euros correspondant à la première mensualité prélevée en décembre 2015.
Par jugement en date du 22 juin 2018, le tribunal a :
– prononcé la résolution du contrat du 24 mars 2015 conclu entre M. et Mme [P] et la SARL […]
– constaté la résolution de plein droit du contrat de crédit conclu Ie 24 mars 2015 entre M. et Mme [P] et la société […]
– condamné la SARL […] à verser à M. et Mme [P] les sommes de 203,50 euros au titre de la remise en état des lieux et de 120 euros au titre des honoraires de M. [G]
– condamné la société […] à restituer à M. et Mme [P] la somme de 70,02 euros correspondant à la 1ère mensualité prélevée
– condamné M. et Mme [P] solidairement à restituer à la société […] la somme de 4 400 euros
– ordonné la compensation entre ces deux sommes
– condamné la SARL […] à garantir M. et Mme [P] de la condamnation prononcée à I’égard de la société […] à hauteur de la somme de 4 329,98 euros
– condamné la SARL […] à verser à M. et Mme [P] la somme de 1 500 euros sur Ie fondement de l’article 700 du code de procédure civile
– ordonné l’exécution provisoire
– rejeté Ies autres demandes
– condamné la SARL […] aux dépens comprenant ceux de la procédure de référé et les honoraires et frais de l’expert judiclaire.
Suivant déclaration en date du 22 novembre 2018, l’entreprise a relevé appel de ce jugement en toutes ses dispositions, listées dans l’acte d’appel, intimant les clients et le prêteur.
L’ordonnance de clôture a été rendue le 27 avril 2022.
Dans ses dernières conclusions d’appelant responsives n°2 en date du 7 janvier 2022, la SARL […] demande à la cour, au visa de l’article 1184 du code civil, de :
– dire l’appel recevable et fondé
– confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a rejeté la demande de dommages et intérêts présentée par les époux [P] [W]
– l’infirmer en ce qu’il :
a prononcé la résolution du contrat du 24 mars 2015 conclu entre M. et Mme [P] et elle
a constaté la résolution de plein droit du contrat de crédit conclu Ie 24 mars 2015 entre M. et Mme [P] et la société […]
l’a condamnée à verser à M. et Mme [P] Ies sommes de 203,50 euros au titre de la remise en état des lieux et de 120 euros au titre des honoraires de M. [G]
a condamné la société […] à restituer à M. et Mme [P] la somme de 70,02 euros correspondant à la 1ère mensualité prélevée
a condamné M. et Mme [P] solidairement à restituer à la société […] la somme de 4 400 euros
a ordonné la compensation entre ces deux sommes
l’a condamnée à garantir M. et Mme [P] de la condamnation prononcée à I’égard de la société […] à hauteur de la somme de 4 329,98 euros
l’a condamnée à verser à M. et Mme [P] la somme de 1 500 euros sur Ie fondement de l’article 700 du code de procédure civile
a ordonné l’exécution provisoire
a rejeté ses autres demandes
l’a condamnée aux dépens comprenant ceux de la procédure de référé et les honoraires et frais de l’expert judiciaire
– en conséquence, débouter M. et Mme [P] et la SA […] de l’ensemble de leurs demandes dirigées contre elle
– la décharger de toutes condamnations prononcées contre elle et de toutes dispositions du jugement lui portant grief
– en tout état de cause, condamner M. et Mme [P] au paiement de la somme de 3 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens de première instance, en ce compris les frais de référé et d’expertise, et d’appel, recouvrés dans les conditions de l’article 699 du même code.
L’entreprise fait valoir qu’aucun manquement à ses obligations contractuelles ne peut lui être reproché dès lors que :
– l’arrêt volontaire de la VMI par les clients un peu plus d’un mois après la pose, de nombreux mois, arrêt dont la rapidité interroge sur les motivations réelles de ceux-ci, a rendu impossible sa remise en fonction qui aurait permis de constater l’absence des désordres et nuisances allégués et l’expert judiciaire a opéré « sur pièces », sans constat objectif, en s’appuyant sur le rapport de M. [G] qui ne fait que reprendre les doléances des clients
– la présence d’une seule bouche d’insufflation à l’étage, expressément prévue au contrat et classique en matière de VMI compte tenu de la configuration et du volume de l’habitation des clients, ne nuit aucunement à l’efficacité de la VMI qui agit en « surpression », au contraire d’une VMC impliquant une bouche par étage, d’autant que son emplacement sur le palier, dans une pièce centrale, est conforme aux préconisations du fabricant Ventilairsec concernant les VMI 3V2002 du type de celle installée au domicile des clients
– il en va de même de la prise d’air directe dans les combles qui sont parfaitement sains et aérés et dont le sol est isolé, la VMI disposant d’un système de tempérance de l’air insufflé qui évite une chaleur excessive et l’absence d’une sortie en toiture, non nécessaire pour le logement des clients, étant conforme aux directives du fabricant
– l’absence de dispositifs d’extraction de l’air vicié (grilles de sorties d’air dans les menuiseries) et de circulation de l’air (détalonnage des portes), à laquelle elle a proposé maintes fois de remédier depuis le déplacement de son technicien sur les lieux le 30 septembre 2015, ce que les clients ont toujours refusé, relève d’une reprise mineure qui ne saurait justifier la résolution du contrat
– les conclusions de l’expert judiciaire sur l’absence de certification par avis technique et de référence au DTU sont erronées car, comme l’explique le fabricant, la VMI dispose d’une certification CE, l’avis technique n’est pas une obligation et le DTU 68.3 sur la ventilation ne prend en compte ni la VMI ni la VMC double flux qui sont des procédés innovants
– à supposer réelles ses « promesses commerciales » d’économie d’énergie et de lutte contre l’humidité, l’expert judiciaire ne pouvait conclure à la carence de l’installation sans la moindre pièce lui permettant de vérifier ces points
– en dehors des épisodes de bruit et d’air chaud décrits par les deux fils des clients, épisodes dont rien n’indique qu’ils ne sont pas restés isolés, aucune nuisance liée à la VMI n’a été constatée alors qu’il aurait suffi de mandater un huissier ou un expert lorsque la VMI était encore allumée.
Dans leurs dernières conclusions d’intimés et en réponse n°3 en date du 9 avril 2020, M. [P] et son épouse Mme [W] demandent à la cour, au visa des articles 1224 (1184 ancien) du code civil, L. 311-20 à L. 311-28, L. 312-55 (L. 311-32 ancien) et L. 312-56 (L. 311-33 ancien) du code de la consommation, de :
– débouter la SARL […] de l’intégralité de ses demandes, tant irrecevables que mal fondées, et ce faisant confirmer le jugement entrepris en ce qu’il :
a prononcé la résolution du contrat du 24 mars 2015 conclu entre eux et la SARL […]
a constaté la résolution de plein droit du contrat de crédit conclu Ie 24 mars 2015 entre eux et la société […]
a condamné la SARL […] à leur verser les sommes de 203,50 euros au titre de la remise en état des lieux et de 120 euros au titre des honoraires de M. [G]
a condamné la société […] à leur restituer la somme de 70,02 euros correspondant à la 1ère mensualité prélevée
les a condamnés solidairement à restituer à la société […] la somme de 4 400 euros
a ordonné la compensation entre ces deux sommes
a condamné la SARL […] à les garantir de la condamnation prononcée à I’égard de la société […] à hauteur de la somme de 4 329,98 euros
a condamné la SARL […] à leur verser la somme de 1 500 euros sur Ie fondement de l’article 700 du code de procédure civile
a ordonné l’exécution provisoire
a condamné la SARL […] aux dépens comprenant ceux de Ia procédure de référé et les honoraires et frais de l’expert judiciaire
– condamner la SARL […] à leur verser en cause d’appel une indemnité de 3 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens de première instance et d’appel comprenant ceux du référé expertise et les frais et honoraires de l’expert judiciaire.
Les clients soutiennent que :
– les non-conformités de l’installation relevées par l’expert judiciaire, à savoir l’absence totale de renouvellement de l’air au rez-de-chaussée et au 1er étage du fait de la mise en place d’une seule bouche d’insufflation sur le palier haut du 2ème étage, une prise d’air directement dans les combles perdus, et non depuis l’extérieur suivant les recommandations techniques, donc d’air vicié et chaud en période estivale, l’absence de dispositifs d’extraction de l’air vicié (bouches en faux plafond et grilles de sortie d’air dans les menuiseries extérieures) et de circulation d’air (détalonnage des portes) et l’absence de certification en France de l’installation, conjuguées à l’incapacité de l’installation à lutter contre l’humidité et à apporter une économie d’énergie justifient la résiliation du contrat dès lors que l’entreprise n’a pas satisfait à ses engagements en posant une VMI qui ne remplit aucunement la fonction escomptée de renouvellement de l’air de l’ensemble de leur habitation
– même s’ils n’ont réglé que la 1ère mensualité du prêt arrivée à échéance le 24 décembre 2015, ils ont disposé du temps nécessaire pour comprendre l’inutilité de la VMI dont l’arrêt justifié par les nuisances acoustiques n’a, par ailleurs, pas empêché l’expert judiciaire d’étudier sa conception et sa localisation
– à supposer que la VMI installée soit du modèle 3V2002, ce qui ne ressort pas des documents contractuels, les prescriptions techniques du fabricant, que l’entreprise communique pour la première fois en appel, ne suffisent pas à démontrer que la surface de leur maison édifiée sur trois niveaux ne nécessitait la pose que d’une seule bouche centrale contrairement à ce qu’indique la notice d’installation de la VMI Ventilairsec qu’a pu se procurer l’expert judiciaire dans une affaire similaire, d’autant que cette bouche n’est pas installée dans une pièce centrale
– la notice d’installation du fabricant qu’ils versent aux débats montre que la prise d’air doit se faire depuis la toiture ou en façade, et non dans les combles, les combles de leur maison n’étant d’ailleurs pas ‘dans un état sanitaire parfait’ avec une isolation ‘correcte’ du plancher permettant d’y aspirer de l’air frais
– ils ne sauraient se satisfaire de la proposition de l’entreprise de détalonner les portes et poser des grilles de sortie d’air conformément à son devis du 21 janvier 2019 car elle ne permet aucunement de remédier à l’ensemble des désordres et non-conformités et de redonner une utilité à l’installation ainsi que l’a indiqué l’expert judiciaire
– l’expert judiciaire n’a pas fait erreur en notant que, s’il existe une certification CE, il n’existe ni certification par avis technique ni référence au DTU français
– la résolution du contrat de vente entraîne de plein droit la résolution du contrat de prêt et oblige l’entreprise à les garantir du montant du remboursement dû au prêteur ainsi qu’à les indemniser de l’intégralité de leurs préjudices correspondant au coût des travaux de remise en état de leur maison et des honoraires de l’expert amiable.
Dans ses dernières conclusions d’intimée (n°1) en date du 17 mai 2019, la SA […] demande à la cour de :
– accueillir la SARL […] en son appel
– constater qu’elle s’en rapporte à justice sur la résolution du contrat de vente passé entre la SARL […] et M. et Mme [P] le 24 mars 2015 et par voie de conséquence sur la résolution de plein droit du contrat de prêt consenti par elle le 24 mars 2015
– à défaut de résolution des contrats, dire et juger que M. et Mme [P] restent tenus de leurs obligations envers elle au titre de l’offre de prêt acceptée le 24 mars 2015 et qu’ils devront reprendre le règlement des échéances du prêt à compter du mois faisant suite à l’arrêt, les échéances impayées étant reportées en fin d’amortissement
– en cas de résolution du contrat principal et du contrat de crédit, confirmer le jugement entrepris en ce qu’il :
a condamné M. et Mme [P] solidairement à lui restituer la somme de 4 400 euros
l’a condamnée à restituer à M. et Mme [P] la somme de 70,02 euros correspondant à la 1ère mensualité prélevée
a ordonné la compensation entre ces deux sommes
a condamné la SARL […] à garantir M. et Mme [P] de la condamnation prononcée à son égard à hauteur de la somme de 4 329,98 euros
– dans tous les cas, par confirmation du jugement sur ce point, dire et juger qu’elle ne saurait être tenue au paiement de quelconques frais irrépétibles et des dépens de première instance et d’appel, en ce compris les frais et honoraires de l’expertise judiciaire.
Le prêteur souligne que les clients n’ont pas repris le règlement des échéances du prêt depuis le dépôt du rapport d’expertise.
Sur ce,
Les contrats litigieux ayant été conclus en 2015, il y a lieu de faire application du code de la consommation dans sa rédaction antérieure à l’entrée en vigueur au 1er juillet 2016 de l’ordonnance 2016-301 du 14 mars 2016 et du code civil dans sa rédaction antérieure à l’entrée en vigueur au 1er octobre 2016 de l’ordonnance n°2016-131 du 10 février 2016.
En droit, l’article 1184 du code civil dispose que la condition résolutoire est toujours sous-entendue dans les contrats synallagmatiques, pour le cas où l’une des parties ne satisfera point à son engagement, que, dans ce cas, le contrat n’est point résolu de plein droit, que la partie envers laquelle l’engagement n’a point été exécuté a le choix ou de forcer l’autre à l’exécution de la convention lorsqu’elle est possible, ou d’en demander la résolution avec dommages et intérêts, que la résolution doit être demandée en justice et qu’il peut être accordé au défendeur un délai selon les circonstances.
En l’espèce, les non-conformités et autres anomalies dont l’expert judiciaire conclut, approuvé en cela par les clients, que l’installation de renouvellement d’air de leur habitation est dépourvue de toute efficacité et utilité concernent les points suivants :
La prise d’air
Il est constant que la prise d’air s’effectue directement dans les combles perdus sous toiture en ardoises où a été installé le caisson de la VMI, suspendu à la charpente.
Toutefois, l’avis de l’expert judiciaire estimant qu’elle devrait s’effectuer ‘depuis l’extérieur avec un chapeau en toiture suivant recommandations techniques’ ne peut être suivi.
En effet, il ne précise pas à quelles recommandations techniques il se réfère alors que rien de tel ne ressort de la notice d’installation des VMI Pulse’r Prestige de Ventilairsec, remise par l’entreprise aux clients qui la versent aux débats, cette notice commune à plusieurs types de caissons, posés ou suspendus, mentionnant tout au plus en page 18 le ‘terminal de toiture’ comme élément susceptible d’être mis en oeuvre ‘conformément à la notice d’installation et d’utilisation propre et en fonction du type de toiture’ et intégrant en page 20 un ‘résumé global de l’installation’, où figure ce terminal, mais à simple valeur d”illustration schématique non-contractuelle’.
En outre, l’entreprise communique en appel un cahier des prescriptions techniques des VMI de type 2002 de Ventilairsec qui se rapporte à des VMI, si ce n’est identiques au modèle à caisson galbé installé chez les clients, ce que la cour d’appel n’est pas en mesure de vérifier car les références du matériel n’ont pas été portées sur les documents contractuels ni relevées par l’expert judiciaire, du moins comparables dans leurs caractéristiques, et qui détaille en page 12, avec schémas à l’appui en page 13, les conditions d’installation des VMI 3V2002 et 4V2002 en comble perdu, sans sortie en toiture, en prévoyant que ‘les conditions d’une bonne ventilation du comble doivent être vérifiées ou rétablies. Il doit être individuel, dans un état sanitaire parfait’ et qu’il faut ‘vérifier que l’isolation sur le plancher du comble est correcte’, de sorte qu’il ne peut être considéré que les recommandations techniques du fabricant imposeraient toujours une prise d’air extérieur en toiture.
Or, en l’absence de toute constatation effectuée sur l’état des combles perdus de l’immeuble, pourtant accessibles par une trappe, que ce soit par l’expert judiciaire lors de l’unique réunion d’expertise du 18 mai 2016 ou par l’expert privé, M. [G], lors de sa visite des lieux du 7 novembre 2015, rien n’indique que cet état aurait rendu impossible la ‘prise d’air en comble, indiduel, sain et ventilé’ prévue au récapitulatif des caractéristiques de la commande adressé le 8 avril 2015 par l’entreprise aux clients.
Si l’expert judiciaire judiciaire note que la prise d’air directement dans les combles perdus a ‘pour conséquence une prise d’air vicié et chaud en période estivale’, il ne l’a nullement constaté lui-même puisque l’installation n’a pu être remise en marche lors de ses opérations en raison de son arrêt prolongé.
L’expert privé s’est, pour sa part, contenté de rapporter les dires des clients selon lesquels ‘dans le courant du mois de juin 2015 (mois d’été) la VMI soufflait de l’air à la température du volume des combles à savoir très chaud’, alors même que les deux fils de ceux-ci, qui ont témoigné de l’inconfort que leur a causé le fonctionnement en continu de la VMI lors de leur passage au domicile parental, l’un les 18/19 juillet 2015, l’autre les 25/26 juillet 2015, ont seulement fait état à cet égard, le premier de ‘chaleur’, le second, architecte de profession, d’une ‘douche d’air à température ambiante plutôt désagréable sur le palier du second étage’.
Ce désordre n’est donc pas caractérisé.
L’insufflation d’air
Il est constant qu’une seule bouche d’insufflation d’air a été prévue au bon de commande et installée au plafond du palier haut de l’escalier d’accès au 2ème étage de la maison des clients qui comporte trois niveaux.
Néanmoins, l’expert judiciaire ne précise nullement en quoi cette disposition, dont il déduit qu”aucun apport d’air neuf n’est possible dans les pièces de l’habitation notamment au rez-de-chaussée et au première étage’, serait contraire aux recommandations du fabricant.
Si, dans un autre rapport d’expertise déposé le 6 décembre 2018 dans une affaire similaire, il s’appuie sur la notice d’installation des VMI de Ventilairsec, produite par ses soins, prévoyant en page 15 que ‘les bouches d’insufflation doivent être placées dans les pièces à ventiler’ pour en conclure qu”une seule bouche ne suffit pas à ventiler une maison avec trois niveaux’, son avis sur ce point n’emporte pas la conviction car la notice des VMI Pulse’r Prestige de Ventilairsec recommande en page 15 de ‘placer les bouches d’insufflation dans le local à ventiler’, et non dans les pièces à ventiler, ce qui, en soi, n’interdit pas le recours à une seule bouche d’insufflation pour ventiler l’ensemble du local ni même n’impose l’installation d’une bouche d’insufflation par niveau.
En outre, il est noté en page 2, puis à nouveau en page 15, du cahier des prescriptions techniques des VMI de type 2002 de Ventilairsec que ‘la V.M.I. équipée d’un diffuseur d’air est efficace pour un volume habitable limité à 350 m3, et 450 m3 si la V.M.I. est équipée de 2 diffuseurs’ et, ‘concernant les logements de grandes dimensions : de plus de 8 mètres de côté ou avec ces pièces en enfilade ou en L’, qu”il est conseillé de prévoir 2 diffuseurs pour une meilleure répartition du flux d’air insufflé ; ce qui permet de ne pas générer d’inconfort par un débit d’air trop important sur un seul diffuseur’.
Or la maison des clients présente une surface non contestée de 105 m² telle que portée sur la fiche technique établie par l’entreprise, répartie en trois niveaux exactement superposés, donc compatible avec une seule bouche d’insufflation comme figuré sur les schémas d’installation des VMI 3V2002 et 5V2002 ‘en maison avec ou sans étage’ en pages 13 et 14 du même cahier.
Par ailleurs, au regard de la notice d’installation recommandant en page 15 de ‘placer les bouches préférentiellement dans les pièces centrales (couloir, atrium, palier, …) et non génératrices d’humidité ou d’odeurs’, il n’est pas justifié que l’emplacement de la bouche d’insufflation serait inadéquat.
Ce désordre n’est donc pas davantage établi.
L’extraction et la circulation d’air
Il est constant que l’installation réalisée ne comporte aucun dispositif d’extraction de l’air vicié (bouches en faux plafond ou grilles de sorties d’air dans les menuiseries extérieures) ni de circulation de l’air (détalonnage des portes).
Or le récapitulatif des caractéristiques de la commande prévoyait, si besoin, un détalonnage des portes intérieures de 15 mm et la pose de réglettes de 15 mm3, et de 30 mm3 dans les pièces d’eau, ce conformément à la notice d’installation des VMI Pulse’r de Ventilairsec qui précise, en page 21 concernant les ‘points d’évacuation d’air’, que ‘toutes les pièces du local, qu’elles soient borgnes ou non vis-à-vis de l’extérieur, doivent être équipées d’un point d’évacuation naturelle (réglette de menuiserie, traversée de paroi). Si tel n’est pas le cas, ces extractions devront être créées dans les règles de l’art’ et, en page 22 concernant le ‘détalonnage des portes’, que ‘toutes les portes du local doivent être détalonnées. Les espaces à créer sont rappelés ci-dessous :
– 1 cm pour toutes les portes y compris celles de la cuisine si elle comporte au moins 2 accès
– 2 cm pour la porte de la cuisine si celle-ci ne comporte qu’un seul accès ainsi que les pièces équipées d’un appareil à gaz raccordé’.
L’absence de ces dispositifs indispensables au bon fonctionnement de l’installation de traitement de l’air par VMI caractérise donc un manquement de l’entreprise à ses obligations, ainsi qu’elle en convient.
La certification de l’installation
Il est constant que la VMI ne dispose d’aucune certification en France par avis technique ou DTU (document technique unifié), le DTU 68.3 sur la ventilation ne prenant pas en compte la VMI ni la VMC double flux qui sont considérées comme des procédés innovants, mais seulement d’une certification CE attestant de sa conformité à la réglementation européenne en matière de champs électromagnétiques et de sécurité électrique comme expliqué par le fabricant Ventilairsec dans son mail annexé au dire adressé par l’entreprise à l’expert judiciaire le 29 septembre 2016.
Toutefois, une telle certification en France ne revêt aucun caractère obligatoire et n’est pas davantage imposée contractuellement.
Aucune non-conformité n’existe donc à cet égard.
L’efficacité et les nuisances de l’installation
A supposer qu’au-delà du renouvellement de l’air dans l’habitation, fonction normalement attendue de la VMI susceptible de contribuer ainsi à la lutte contre l’humidité, l’entreprise ait promis que l’installation permettrait de réaliser des économies d’énergie, notamment de chauffage pendant la saison hivernale, ce qui ne ressort d’aucun des documents contractuels et pré-contractuels versés aux débats, les clients, qui admettent avoir rapidement arrêté le fonctionnement de l’installation, n’ont jamais produit d’éléments permettant de constater d’éventuelles surconsommations d’électricité et de chauffage comme l’a noté l’expert judiciaire en page 7 de son rapport.
Par ailleurs, s’agissant du désagrément dont ont souffert les deux fils des clients en juillet 2015, causé par le débit d’air chaud important ci-dessus décrit et par les nuisances sonores de l’installation sous forme de ‘bruit de soufflage’ selon le premier ou de ‘bruit sourd mêlé à la sensation d’une vibration continue dans la chambre où (il a) passé la nuit’ selon le second, il n’a pu être constaté par l’expert judiciaire du fait de l’arrêt prolongé de la VMI ayant empêché sa remise en marche et ne l’a pas été davantage par l’expert privé qui s’est contenté de rapporter les dires des clients selon lesquels ‘les chambres aménagées au second étage se sont avérées inutilisables compte tenu du bruit produit par la ventilation au cours des nuits’.
Il n’est donc pas possible d’en connaître l’ampleur ni de le rapporter à un réel dysfonctionnement de l’installation plutôt qu’à un simple défaut de réglage, notamment du débit d’air insufflé, d’autant que les clients se sont plaints dans leur premier courrier de réclamation du 4 août 2015 de n’avoir pas été suffisamment informés sur la gestion de la VMI, en particulier la consigne de température et le débit de soufflage, et sur l’utilisation de la télécommande.
En définitive, les seuls désordres nuisibles à l’efficacité de l’installation consistent en l’absence de dispositifs d’extraction de l’air vicié (grilles de sorties d’air dans les menuiseries extérieures) et de circulation de l’air (détalonnage des portes), à laquelle l’entreprise a proposé de remédier, si ce n’est lors du déplacement d’un de ses techniciens sur les lieux le 30 septembre 2015 puisque cette visite évoquée par les deux parties n’a donné lieu à aucun compte-rendu, du moins en cours d’expertise judiciaire par dire déposé le 29 septembre 2016, ce pour un coût modique chiffré à 300 euros TTC dans son devis émis le 21 janvier 2019 et non critiqué en lui-même.
Ces désordres ne sont pas d’une gravité suffisante pour justifier la résolution du contrat.
En conséquence, les clients ne peuvent qu’être déboutés de leur demande de résolution du contrat de fourniture et pose de VMI conclu le 24 mars 2015 avec l’entreprise et de résolution subséquente de plein droit, par application de l’article L. 311-32 du code de la consommation, du contrat de crédit affecté conclu le même jour avec le prêteur, le jugement étant infirmé.
Il n’y a donc pas lieu de statuer sur les conditions des restitutions réciproques, les demandes y afférentes étant sans objet.
Conformément à la demande du prêteur, les clients seront invités à reprendre le règlement des échéances du prêt à compter du mois suivant le prononcé du présent arrêt, les échéances impayées étant reportées en fin d’amortissement.
Parties perdantes, les clients supporteront les entiers dépens de référé, de première instance et d’appel, comprenant de droit la rémunération de l’expert judiciaire en vertu de l’article 695 4° du code de procédure civile, sans pouvoir obtenir remboursement des honoraires de leur expert privé ni bénéficier de l’article 700 du même code dont il n’y a pas lieu, en considération de l’équité et de la situation respective des parties, de faire application à leur encontre au profit de l’entreprise.
Par ces motifs,
La cour,
Infirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions.
Satuant à nouveau et y ajoutant,
Déboute M. [P] et son épouse Mme [W] de leur demande de résolution du contrat de fourniture et pose de VMI conclu le 24 mars 2015 avec la SARL […] et du contrat de crédit affecté conclu le même jour avec la SA […].
Dit n’y avoir lieu de statuer sur les conditions des restitutions réciproques.
Dit que M. [P] et son épouse Mme [W] devront reprendre le règlement des échéances du prêt à compter du mois suivant le prononcé du présent arrêt, les échéances impayées étant reportées en fin d’amortissement.
Dit n’y avoir lieu à application de l’article 700 du code de procédure civile.
Condamne M. [P] et son épouse Mme [W] aux entiers dépens de référé, de première instance et d’appel, en ce compris les frais d’expertise judiciaire, qui seront recouvrés dans les conditions de l’article 699 du même code.
LA GREFFIERE LA PRESIDENTE
C. LEVEUF C. MULLER