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3 mars 2023
Cour d’appel de Saint-Denis de la Réunion
RG n°
21/00180
ARRÊT N°23/15
PC
N° RG 21/00180 – N° Portalis DBWB-V-B7F-FP6D
[I]
C/
[I]
[I]
[I]
[I]
COUR D’APPEL DE SAINT – DENIS
ARRÊT DU 03 FEVRIER 2023
Chambre civile TGI
Appel d’une décision rendue par le TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE SAINT-PIERRE en date du 08 novembre 2019 suivant déclaration d’appel en date du 11 février 2021 RG n° 18/02885
APPELANTE :
Madame [A] [G] [I]
[Adresse 4]
[Localité 11]
Représentant : Me Amel KHLIFI ETHEVE de la SELARL AMEL KHLIFI-ETHEVE ET ASSOCIES, avocat au barreau de SAINT-PIERRE-DE-LA-REUNION
(bénéficie d’une aide juridictionnelle Totale numéro 2021/776 du 01/03/2021 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de Saint-Denis)
INTIMÉS :
Monsieur [S] [U] [V] [I]
[Adresse 7]
[Localité 12]
Représentant : Me Guillaume ALBON, avocat au barreau de SAINT-PIERRE-DE-LA-REUNION
Madame [A] [D] [I]
[Adresse 1]
[Localité 12]
Représentant : Me Guillaume ALBON, avocat au barreau de SAINT-PIERRE-DE-LA-REUNION
Monsieur [T] [O] [I]
[Adresse 10]
[Localité 12]
Représentant : Me Stéphanie SAINT-BERTIN de la SELARL CAZAL – SAINT-BERTIN, avocat au barreau de SAINT-PIERRE-DE-LA-REUNION
Madame [A] [J] [I]
[Adresse 9]
[Localité 12]
DATE DE CLÔTURE : 23 juin 2021
DÉBATS : en application des dispositions des articles 804 et 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue à l’audience publique du 04 Novembre 2022 devant Monsieur CHEVRIER Patrick, Président de chambre, qui en a fait un rapport, assisté de Mme Véronique FONTAINE, Greffier, les parties ne s’y étant pas opposées.
Ce magistrat a indiqué, à l’issue des débats, que l’arrêt sera prononcé, par sa mise à disposition au greffe le 03 Février 2023.
Il a été rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Président : Monsieur Patrick CHEVRIER, Président de chambre
Conseiller : Madame Pauline FLAUSS, Conseillère
Conseiller : Madame Magali ISSAD, Conseillère
Qui en ont délibéré
greffier present lors des debats : Véronique FONTAINE, Greffier
greffier present lors du prononce : Marina BOYER, Greffier
Arrêt : prononcé publiquement par sa mise à disposition des parties le 03 Février 2023.
* * * * *
LA COUR :
Exposé du litige :
Monsieur [M] [B] [I] est décédé à [Localité 12], le 1er octobre 2012. Il a laissé pour recueillir sa succession ses cinq enfants :
1. Monsieur [I] [S] [U] [V]
2. Madame [I] [A] [D]
3. Madame [I] [A] [G]
4. Madame [I] [A] [J]
5. Monsieur [I] [Z].
Alléguant que Monsieur [M] [B] [I] aurait consenti des donations à certains de ses héritiers, M. [I] [S] et Madame [A] [D] [I] ont fait assigner leurs frère et s’urs aux fins d’ouverture des opérations de compte liquidation partage de la succession de leur père, et de l’institution d’une expertise destinée à évaluer le montant des rapports dus par les deux donataires, Madame [A] [G] [I] et Monsieur [Z] [I].
Par jugement réputé contradictoire, de nature mixte, du 8 novembre 2019, le tribunal de grande instance de Saint-Pierre de la Réunion, a notamment :
Déclaré recevable l’action de [I] [S] et [A] [D] ;
Ordonné l’ouverture des opérations de compte, liquidation et partage de l’indivision consécutive au décès de Mr [I] [M] [B], décédé le 01/10/2012 au [Localité 12] ;
Désigné pour y procéder M. le président de la chambre départementale des notaires de la Réunion, avec faculté de délégation et M. B. LATASTE, juge commis à la surveillance de ces opérations;
Dit que l’acte de vente passé le 12/02/2004 devant Me [E], notaire au [Localité 12], portant vente par Mr [I] [M] [B] au profit de Mme [I] [A] [G] de la parcelle BN [Cadastre 6], sise au [Localité 12], au [Adresse 8], est une donation déguisée ;
Rejeté la demande reconventionnelle en attribution préférentielle de cette parcelle;
Ordonné à M. [I] [T] [O] de faire rapport à la succession des biens cadastrés BN [Cadastre 2] et BN [Cadastre 5] au [Localité 12] ;
Ordonné à Mme [I] [A] [G] de faire rapport à la succession des parcelles cadastrées BN [Cadastre 3] et BN [Cadastre 6] au [Localité 12] ;
Ordonné une expertise et désigné pour y procéder Mr [X] [Y] avec mission de :
(‘) – évaluer les biens composant l’indivision à la date la plus proche du dépôt du rapport d’expertise, en tenant compte de leur consistance à la date de la donation, comme dit à l’alinéa 1 de l’article 860 du code civil ; (‘)
Condamné Mme [I] [A] [G] à payer aux demandeurs la somme de 3 000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;
Rejeté la demande formée contre M. [I] [T] [O] au titre des frais irrépétibles ;
Ordonné l’exécution provisoire ;
Réservé les autres demandes et les dépens.
Madame [A] [G] [I] a interjeté appel de ce jugement selon déclaration remise au greffe de la cour le 11 février 2021, enregistrée sous les références RG-21-180.
Une ordonnance de renvoi à la mise en état a été rendue le 11 février 2021.
Madame [A] [G] [I] a déposé ses premières conclusions d’appelante le 6 avril 2021, signifiant la déclaration d’appel et celles-ci aux intimés le 8 avril 2021.
Monsieur [S] [U] [V] [I] et Madame [A] [D] [I] ont déposé leurs premières conclusions d’intimée par RPVA le 11 juin 2021.
Monsieur [T] [I] a déposé ses premières conclusions d’intimé par RPVA le 18 juin 2021.
* * * * *
Par jugement en date du 30 avril 2021, le tribunal judiciaire de Saint-Pierre de la Réunion a statué en ces termes dans la même instance :
Fixe à 56.000 euros la somme qui devra être rapportée à la succession de M. [M] [I] par Monsieur [T] [O] [I], au titre des parcelles cadastrées BN [Cadastre 5] et [Cadastre 2], et le condamne à rapporter cette somme ;
Fixe à 54.000 euros la somme qui devra être rapportée à la succession de M. [M] [I] par Madame [A] [G] [I], au titre des parcelles BN [Cadastre 3] et [Cadastre 6], et la condamne à rapporter cette somme ;
Ordonne l’exécution provisoire du présent jugement ;
Déboute les parties du surplus de leurs prétentions ;
Emploie en frais privilégiés de partage les dépens de l’instance, qui comprendront le coût de l’expertise judiciaire, et seront recouvrés conformément à la loi sur l’aide juridictionnelle.
Madame [A] [G] [I] a interjeté appel selon déclaration remise au greffe de la cour le 18 mai 2021, enregistrée sous les références RG-21-886.
Une ordonnance de renvoi à la mise en état a été rendue le 19 mai 2021.
Madame [A] [G] [I] a déposé ses premières conclusions d’appelante le 27 juillet 2021.
Monsieur [S] [U] [V] [I] et Madame [A] [D] [I] ont déposé leurs premières conclusions d’intimée par RPVA le 26 octobre 2021.
Monsieur [T] [I] a déposé ses premières conclusions d’intimé par RPVA le 9 novembre 2021.
Par ordonnance d’incident du 5 avril 2022, la jonction des deux instances a été ordonnée, la procédure devant se poursuivre sous les références RG-21-180.
L’ordonnance de clôture est intervenue le 23 juin 2022.
* * * * *
Par conclusions N° 3 du dossier RG-21-180, remises par RPVA le 4 janvier 2022, Madame [F] [I] demande à la cour de :
INFIRMER le jugement rendu par le Tribunal de Grande Instance de SAINT-PIERRE (aujourd’hui Tribunal judiciaire) le 8 novembre 2019 (cf pièce 5) en ce qu’il a :
Dit que l’acte de vente passé le 12/02/2004 devant Me [E], notaire au [Localité 12], portant vente par Mr [I] [M] [B] au profit de Mme [I] [A] [G] de la parcelle BN [Cadastre 6], sise au [Localité 12], au [Adresse 8], est une donation déguisée ;
Rejeté la demande reconventionnelle en attribution préférentielle de cette parcelle;
Ordonné à M. [I] [T] [O] de faire rapport à la succession des biens cadastrés BN [Cadastre 2] et BN [Cadastre 5] au [Localité 12] ;
Ordonné à Mme [I] [A] [G] de faire rapport à la succession des parcelles cadastrées BN [Cadastre 3] et BN [Cadastre 6] au [Localité 12] ;
Ordonné une expertise et désigné pour y procéder Mr [X] [Y] avec mission de :
(‘) – évaluer les biens composant l’indivision à la date la plus proche du dépôt du rapport d’expertise, en tenant compte de leur consistance à la date de la donation, comme dit à l’alinéa 1 de l’article 860 du code civil ; (‘)
Condamné Mme [I] [A] [G] à payer aux demandeurs la somme de 3 000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;
En conséquence,
DIRE que l’acte de vente du 12 février 2004 n’est pas une donation déguisée ;
DIRE n’y avoir lieu à rapport à succession des parcelles BN [Cadastre 3] et BN [Cadastre 6] ;
DIRE n’y avoir lieu à la condamnation de Madame [A] [G] [I] au versement de la somme 3.000 euros sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile, celle-ci bénéficiant de l’aide juridictionnelle totale en première instance et en cause d’appel et INFIRMER la décision de première instance sur ce point ;
DEBOUTER les intimés (Monsieur [S] [U] [V] [I] et Madame [A] [D] [I]) de leurs demandes reconventionnelles relatives aux dommages et intérêts pour appel abusif et au titre de l’article 700 du Code de procédure civile ;
DEBOUTER les intimés (Madame [A] [J] [I], Monsieur [S] [U] [V] [I], Monsieur [T] [O] [I] et Madame [A] [D] [I]) de l’ensemble de leurs demandes, fins et conclusions ;
DEBOUTER les intimés (Madame [A] [J] [I], Monsieur [S] [U] [V] [I], Monsieur [T] [O] [I] et Madame [A] [D] [I]) de toutes demandes plus amples ou contraires ;
CONDAMNER solidairement Madame [A] [J] [I], Monsieur [S] [U] [V] [I], Monsieur [T] [O] [I] et Madame [A] [D] [I] à payer à Madame [A] [G] [I] la somme de 3.500 euros en application de l’article 700 du Code de procédure civile ;
CONDAMNER solidairement Madame [A] [J] [I], Monsieur [S] [U] [V] [I], Monsieur [T] [O] [I] et Madame [A] [D] [I] aux entiers dépens ;
A tout le moins, si la Cour devait décider du rapport de la valeur de la parcelle BN[Cadastre 3] et BN[Cadastre 6] :
JUGER que le rapport de la parcelle BN[Cadastre 3] se fera sur la base de la somme de 19 710 € ;
JUGER que le rapport de la parcelle BN[Cadastre 6] se fera sur la base de la somme de 19 322 €.
* * * * *
Par conclusions N° 1 déposées le 11 juin 2021 dans le dossier RG-21-180, Monsieur [S] [U] [V] [I] et Madame [A] [D] [I] demandent à la cour de :
Confirmer le jugement dont appel en toutes ses dispositions, y compris concernant l’article 700 du code de procédure civile ;
A titre reconventionnel,
Condamner Madame [I] [A] [G] à verser à Monsieur [I] [S] [U] [V] et Madame [I] [A] [D] la somme de 2000 euros chacun, soit la somme de 4000 € à titre de dommage et intérêt pour appel abusif ;
Condamner Madame [I] [A] [G] à verser à Monsieur [I] [S] [U] [V] et Madame [I] [A] [D] la somme de 1500 euros chacun, soit la somme de 3000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
Condamner Madame [I] [A] [G] aux entiers dépens.
* * * * *
Par conclusions N° 2, déposées par RPVA le 7 septembre 2021 dans le dossier RG-21-180, Monsieur [T] [O] [I] demande à la cour de :
CONFIRMER le jugement attaqué rendu par le Tribunal de Grande Instance de Saint-Pierre (devenu Tribunal Judiciaire) en date du 08 novembre 2019 en ses dispositions et :
QUALIFIER la cession de la parcelle BN [Cadastre 6] sise commune du [Localité 12] intervenue le 12 février 2004 entre Monsieur [I] [M] [B] et sa fille Madame [I] [A] [G] de donation déguisée ;
REJETER la demande d’attribution préférentielle de Madame [I] [A] [G] de la parcelle BN [Cadastre 6] ;
ORDONNER le rapport à la succession par Madame [I] [A] [G] des parcelles BN [Cadastre 3] et [Cadastre 6], sise commune du [Localité 12] ;
CONDAMNER Madame [I] [A] [G] à payer la somme de 3000 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure Civile ;
Y ajoutant,
CONDAMNER Madame [I] [A] [G] à payer à Monsieur [T] [O] [I] la somme de 3500 euros au titre de l’article 700 du Code de Procédure civile pour sa défense en cause d’appel ;
DEBOUTER Madame [I] [A] [G] de l’intégralité de ses demandes fins et conclusions ;
CONDAMNER Madame [I] [A] [G] aux entiers dépens.
* * * * *
Par conclusions N° 3 du dossier RG-21-886, remises par RPVA le 4 janvier 2022, Madame [F] [I] demande à la cour de :
INFIRMER le jugement rendu par le Tribunal Judiciaire de SAINT-PIERRE le 30 avril 2021 en ce qu’il a :
« Fixé à 54 000 euros la somme qui devra être rapportée à la succession de M. [M] [I] par Madame [A] [G] [I] au titre des parcelles BN [Cadastre 3] et [Cadastre 6], et la condamne à rapporter cette somme ;
o Ordonne l’exécution provisoire du présent jugement ;
o Déboute les parties du surplus de leurs prétentions. »
En conséquence,
DIRE que l’acte de vente du 12 février 2004 n’est pas une donation déguisée ;
DIRE n’y avoir lieu à rapport à succession des parcelles BN [Cadastre 3] et BN [Cadastre 6] ;
DEBOUTER les intimés (Madame [A] [J] [I], Monsieur [S] [U] [V] [I], Monsieur [T] [O] [I] et Madame [A] [D] [I]) de l’ensemble de leurs demandes, fins et conclusions ;
DEBOUTER les intimés (Madame [A] [J] [I], Monsieur [S] [U] [V] [I], Monsieur [T] [O] [I] et Madame [A] [D] [I]) de toutes demandes plus amples ou contraires ;
CONDAMNER solidairement Madame [A] [J] [I], Monsieur [S] [U] [V] [I], Monsieur [T] [O] [I] et Madame [A] [D] [I] à payer à Madame [A] [G] [I] la somme de 3.500 euros en application de l’article 700 du Code de procédure civile ;
CONDAMNER solidairement Madame [A] [J] [I], Monsieur [S] [U] [V] [I], Monsieur [T] [O] [I] et Madame [A] [D] [I] aux entiers dépens.
A tout le moins, si la Cour devait décider du rapport de la valeur de la parcelle BN[Cadastre 3] et BN[Cadastre 6],
JUGER que le rapport de la parcelle BN[Cadastre 3] se fera sur la base de la somme de 19 710 € ;
JUGER que le rapport de la parcelle BN[Cadastre 6] se fera sur la base de la somme de 19 322 €.
* * * * *
Par conclusions N° 1 déposées le 26 octobre 2021 dans le dossier RG-21-886, Monsieur [S] [U] [V] [I] et Madame [A] [D] [I] demandent à la cour de :
Confirmer le jugement dont appel en toutes ses dispositions ;
A titre reconventionnel,
Condamner Madame [I] [A] [G] à verser à Monsieur [I] [S] [U] [V] et Madame [I] [A] [D] la somme de 2000 euros chacun, soit la somme de 4000 € à titre de dommage et intérêt pour appel abusif ;
Condamner Madame [I] [A] [G] à verser à Monsieur [I] [S] [U] [V] et Madame [I] [A] [D] la somme de 1500 euros chacun, soit la somme de 3000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
Condamner Madame [I] [A] [G] aux entiers dépens
* * * * *
Par conclusions N° 2, déposées par RPVA le 3 septembre 2021 dans le dossier RG-21-886, Monsieur [T] [O] [I] demande à la cour de :
CONFIRMER le jugement attaqué rendu par le Tribunal de Grande Instance de Saint-Pierre (devenu Tribunal Judiciaire) en date du 30 avril 2021 en ses dispositions et :
QUALIFIER la cession de la parcelle BN [Cadastre 6] sise commune du [Localité 12] intervenue le 12 février 2004 entre Monsieur [I] [M] [B] et sa fille Madame [I] [A] [G] de donation déguisée ;
ORDONNER le rapport à la succession par Madame [I] [A] [G] des parcelles BN [Cadastre 3] et [Cadastre 6], sise commune du [Localité 12] ;
FIXER à 54 000 euros la somme qui devra être rapportée à la succession par madame [I] [A] [G] au titre des parcelles BN [Cadastre 3] et BN [Cadastre 6] ;
FIXER à 56 000 euros la somme devant être rapportée à la succession par Monsieur [I] [T] [O] au titre des parcelles cadastrées BN [Cadastre 5] et BN [Cadastre 2]
CONDAMNER Madame [I] [A] [G] à payer la somme de 3000 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure Civile ;
Y ajoutant,
CONDAMNER Madame [I] [A] [G] à payer à Monsieur [T] [O] [I] la somme de 3500 euros au titre de l’article 700 du Code de Procédure civile pour sa défense en cause d’appel ;
DEBOUTER Madame [I] [A] [G] de l’intégralité de ses demandes fins et conclusions ;
CONDAMNER Madame [I] [A] [G] aux entiers dépens.
* * * * *
Conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, il est fait expressément référence aux conclusions des parties, visées ci-dessus, pour l’exposé de leurs prétentions et moyens.
MOTIFS
A titre liminaire, la cour rappelle qu’en application des dispositions de l’article 954 du code de procédure civile, elle ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif des conclusions et n’examine que les moyens développés dans la partie discussion des conclusions présentés au soutien de ces prétentions.
Elle n’est pas tenue de statuer sur les demandes de « constatations » ou de « dire et juger » qui ne sont pas, hors les cas prévus par la loi, des prétentions en ce qu’elles ne sont pas susceptibles d’emporter des conséquences juridiques mais constituent, en réalité, les moyens invoqués par les parties au soutien de leurs demandes.
Malgré la jonction des deux procédures, il est nécessaire d’examiner les appels distincts de deux jugements séparés, même s’ils concernent la même succession.
En effet, le jugement du 8 novembre 2019 n’est pas contesté en ce qu’il a ordonné l’ouverture des opérations de compte, liquidation et partage de l’indivision consécutive au décès de Mr [I] [M] [B]. Mais, Madame [A] [G] [I] a saisi la cour d’appel le 18 mai 2021 de la disposition relative au rapport de sommes résultant d’une donation déguisée de la parcelle BN [Cadastre 6], par un acte de vente passé le 12 février 2004 à son profit, à sa demande d’attribution préférentielle formulée en première instance sans la renouveler en appel en ce qui concerne la parcelle BN [Cadastre 3], sans contester la mesure d’expertise.
Monsieur [Z] [I] acquiesce au jugement querellé ayant ordonné le rapport à succession le concernant.
Ainsi, les seuls points à examiner au titre de la déclaration d’appel et des dernières conclusions de Madame [A] [G] [I] portent sur la nature de la vente régularisée le 12 février 2004 pour la parcelle BN [Cadastre 6] et sur le rapport à succession de la seconde parcelle BN [Cadastre 3].
Enfin, aucune des parties n’a remis en cause la recevabilité de l’appel au visa de l’article 538 du code de procédure civile.
Le second jugement en date du 30 avril 2021 résulte de l’analyse du rapport d’expertise judiciaire ordonnée par le premier jugement. Il ne contient que les dispositions relatives au montant du rapport décidé par le jugement du 8 novembre 2019.
Sur le rapport à succession dû par Madame [A] [G] [I] :
L’appelante expose qu’elle a acquis de son père la parcelle BN [Cadastre 6] de 249 m2 sise [Adresse 8] au [Localité 12], par l’acte dressé le 12 février 2004 pour un montant de 7.622 euros, payé comptant. Cette parcelle a de nouveau fait l’objet d’une mutation le 4 juin 2015 au profit de Monsieur [C] [U] [L], au même prix sans faire de bénéfice. L’appelante conteste le fait soutenu par ses frères et s’urs selon lequel Monsieur [C] était le compagnon et le père des enfants de Madame [A] [G] [I]. Elle affirme que les fonds ayant servi au paiement de la parcelle en cause proviennent de ses ressources professionnelles de l’époque dont elle justifie par des certificats de travail et des attestations.
Selon l’appelante, la parcelle BN[Cadastre 3] qui a fait l’objet d’un rapport par les premiers juges est une donation en avancement d’hoirie faite par le défunt à l’appelante en 1993 qui ne saurait être rapportée. Elle devra au contraire faire l’objet d’une attribution préférentielle au profit de l’appelante en raison de son investissement auprès du défunt. Si par impossible, la cour devait considérer que cette donation en avancement d’hoirie devait être rapportée, elle le sera selon les conditions de l’art. 860 du code civil.
Monsieur [Z] [I] soutient que les pièces produites par l’appelante laissent apparaitre que les paiements faits à l’étude notariale émanent de Monsieur [C], à qui elle revendra la parcelle BN [Cadastre 6] en 2015 après le décès de son père au prix pour lequel elle l’avait prétendument achetée. Ce faisant, elle espérait vivement faire sortir cette parcelle de son patrimoine afin d’échapper au rapport à la succession qui avait été évoqué par le Notaire dès février 2013 lorsqu’il avait procédé à la convocation des héritiers pour procéder au règlement successoral de Monsieur [I] [M] [B]. En outre, le prix de vente au M2 de la parcelle BN [Cadastre 6] en 2004 comme celui de revente en 2015 est anormalement bas compte tenu du caractère constructible du terrain, à savoir moins de 31 euros le M2. Ce bien a été évalué à la somme de 27 000 euros par Monsieur [X] dans son rapport d’expertise du 17 septembre 2020. La lecture de l’acte de vente de 2015 de Madame [I] [A] [G] à Monsieur [C], démontre que ce dernier avait déjà construit sur cette parcelle.
Selon l’intimé, Madame [I] [A] [G] soutient faussement que Monsieur [C] n’est et n’a jamais été son concubin et qu’ils n’ont pas d’enfants commun alors que, dans le cadre d’une procédure judicaire de 2014 initiée par Madame [I] [A] [G], dans les écritures prises pour la défense de ses intérêts il était clairement indiqué le contraire, soit que « Madame [I] [A] [G], mais également son concubin [C] [U] [L] et leur fille [C] [K] (..) » Les autres pièces produites établissent aussi la réalité d’une vie commune entre l’appelante et l’acquéreur de la parcelle en 2015. Monsieur [Z] [I] soutient aussi que les contrats de travail relatifs aux certificats de travail de Madame [F] [I], au moment de l’acquisition de la parcelle BN [Cadastre 6], laissent apparaitre des contrats de 20 heures par semaine pour une rémunération brute de 594 euros, insuffisants pour payer le prix du terrain litigieux. Selon le concluant, la preuve de l’intention libérale est donc rapportée et l’acte de cession du 12 février 2004 de la parcelle BN [Cadastre 6] intervenue entre Monsieur [I] [M] [B] et sa fille Madame [I] [A] [G] s’analyse donc en donation déguisée.
S’agissant du rapport de la valeur de la parcelle BN [Cadastre 3], reçue en avancement d’hoirie par Madame [A] [G] [I], Monsieur [Z] plaide qu’il y a bien lieu au rapport à la succession par Madame [I] [A] [G] selon l’évaluation raisonnable de l’expert judiciaire à la somme de 27.000 euros.
Monsieur [S] [U] [V] [I] et Madame [A] [D] [I] soutiennent que le prix de vente de la parcelle BN [Cadastre 6] en 2004 était dérisoire au regard de l’estimation actuelle du bien par l’expert judiciaire, d’autant que Madame [A] [G] [I] était bien la compagne de Monsieur [C] qui demeurait à la même adresse que l’appelante. Ils ajoutent que la situation économique de Madame [F] [I] ne lui permettait pas de payer comptant la somme de 7.622,00 euros en 2004 sans recourir à un prêt qu’elle n’évoque pas et alors qu’elle est dans l’impossibilité d’expliquer l’origine des fonds.
Ceci étant exposé :
Les textes applicables sont ceux en vigueur à l’ouverture de la succession, soit au jour du décès de Feu [M] [B] [I], le 1er octobre 2012.
Sur le rapport de la parcelle BN [Cadastre 3] :
Cette parcelle a été reçue par Madame [A] [G] [I] en avancement d’hoirie, ce qu’aucune des parties ne conteste.
Aux termes de l’article 843 du code civil, tout héritier, même ayant accepté à concurrence de l’actif, venant à une succession, doit rapporter à ses cohéritiers tout ce qu’il a reçu du défunt, par donations entre vifs, directement ou indirectement ; il ne peut retenir les dons à lui faits par le défunt, à moins qu’ils ne lui aient été faits expressément hors part successorale.
Les legs faits à un héritier sont réputés faits hors part successorale, à moins que le testateur n’ait exprimé la volonté contraire, auquel cas le légataire ne peut réclamer son legs qu’en moins prenant.
L’acte de donation dressé le 14 décembre 1993 mentionne qu’est édifiée une maison de trois pièces sur la parcelle donnée à Madame [A] [G] [I], qui l’a construite elle-même.
Il y est clairement stipulé que les parties n’entendent apporter aucune dérogation aux règles légales relatives au rapport à faire par le donataire à raison de la présente donation.
Ainsi, contrairement à ce que prétend Madame [A] [G] [I], la parcelle BN [Cadastre 3] dont elle ne conteste pas la nature de donation en avancement d’hoirie, doit être rapportée à la succession.
Le jugement querellé en date du 8 novembre 2019 sera confirmé de ce chef.
La question de la valeur du rapport relève de l’examen du second appel.
Sur le rapport de la parcelle BN [Cadastre 6] :
En application de l’article 1315 du code civil, devenu 1353, c’est à celui qui invoque l’existence d’une donation d’établir l’intention libérale du donateur (Civ. 1, 4 mars 2015, pourvoi N° 13-27.701).
La reconnaissance d’une donation suppose la réunion des deux éléments constitutifs suivants : l’appauvrissement du disposant et son intention libérale. L’intention libérale peut résulter d’un faisceau d’éléments constituant des présomptions graves, précises et concordantes, souverainement appréciés par les juges du fond. Mais l’intention libérale ne peut pas être déduite du seul déséquilibre entre les prestations ni du seul fait que l’acquéreur n’a pas payé le prix.
En l’espèce, pour établir l’existence d’une donation déguisée, les cohéritiers de Madame [F] [I] ne produisent aucun élément permettant de démontrer que la cession de la parcelle BN [Cadastre 6], d’une surface de 249 m², vendue au prix de 7.622,00 euros, somme payée au comptant devant le notaire, autre que l’argument tiré du vil prix et de l’impossibilité pour l’appelante de payer cette somme à l’époque.
Cependant, la question du paiement et des moyens de financement utilisés par Madame [G] [I] pour régler le prix de la vente est sans incidence sur la nature libérale alléguée de la vente, puisque, l’éventuel financement de l’acquisition du bien pour le compte de Madame [A] [G] [I] par un tiers n’emporte aucune conséquence sur le caractère de libéralité ou non de l’acte litigieux.
Il reste à vérifier si le prix de la cession correspondait à la valeur normale du bien à l’époque de la vente, étant souligné que le premier juge a décidé du caractère libéral de celle-ci avant d’ordonner une expertise, laquelle ne peut démontrer l’existence ou non d’une donation déguisée en 2004 puisque l’expert a été saisi en considération de la décision du premier juge sur ce point.
Néanmoins, cette expertise constitue un élément soumis contradictoirement à la discussion en appel dès lors que Monsieur [Z] [I] a choisi de la communiquer au soutien de ses prétentions dans le cadre de la procédure RG-21-180 relative au premier jugement.
Or, le rapport d’expertise, répondant à la mission fixée par le jugement, se limite à proposer une estimation de la valeur vénale actuelle de la parcelle BN [Cadastre 6].
La lecture de l’acte de vente dressé le 9 mars 2004 stipule que la cession concernait une parcelle de terrain nu, destinée à agrandir la parcelle de l’acquéreur en la retirant d’une parcelle plus vaste cadastrée BN [Cadastre 5] appartenant au donateur.
Le prix de la vente est confirmé par l’acte authentique et a été versé le jour de l’acte dans la comptabilité du notaire.
Les intimés n’apportent donc aucun élément permettant de démontrer que le prix d’acquisition de 7.220,00 euros de la parcelle BN [Cadastre 6], en 2004, constituait un prix sans rapport avec sa valeur réelle.
Echouant à établir l’intention libérale de Feu [M] [B] [I] en faveur de Madame [A] [G] [I], celle-ci est bien fondée à conclure au rejet de la demande de rapport pour cette parcelle.
Le jugement doit être infirmé de ce chef.
Cependant, en l’absence de demande de rejet de l’expertise par conclusions en appel, il n’y a pas lieu de statuer sur ce point, d’autant que la valeur actualisée de la parcelle BN [Cadastre 3] doit être examinée plus bas.
Enfin, il est équitable d’infirmer le jugement ayant statué sur les frais irrépétibles et condamné Madame [I] à payer une indemnité de 3.000,00 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
En effet, la nature du litige et la succombance partielle de toutes les parties au litige justifie qu’elles conservent leurs frais irrépétibles de cette première instance comme leurs propres dépens.
Jugement du 30 avril 2021 et valeur actualisée des parcelles :
Le dispositif du jugement du 30 avril 2021 statue sur la valeur actualisée du rapport à succession dû par Monsieur [T] [O] [I], au titre des parcelles cadastrées BN [Cadastre 5] et [Cadastre 2], qui ne fait l’objet d’aucune contestation en appel.
S’agissant de la condamnation de Madame [A] [G] [I], le dispositif du jugement ne distingue pas entre le rapport au titre des parcelles BN [Cadastre 3] et BN [Cadastre 6].
Or, la somme de 54.000 euros fixée par le premier juge intègre la valeur de la parcelle BN [Cadastre 6] qui ne fait plus l’objet d’un rapport à la succession en l’absence de preuve de l’existence d’une donation déguisée.
Ainsi, il reste à fixer la valeur du rapport à la succession de la donation en avancement d’hoirie de la parcelle BN [Cadastre 3].
Madame [A] [G] [I] sollicite subsidiairement que soit retenue la valeur de 19.710,00 euros pour la parcelle BN [Cadastre 3].
Les intimés concluent à la confirmation du jugement de ce chef.
Ceci étant exposé,
Aux termes de l’article 860 du code civil, le rapport est dû de la valeur du bien donné à l’époque du partage, d’après son état à l’époque de la donation.
Si le bien a été aliéné avant le partage, on tient compte de la valeur qu’il avait à l’époque de l’aliénation. Si un nouveau bien a été subrogé au bien aliéné, on tient compte de la valeur de ce nouveau bien à l’époque du partage, d’après son état à l’époque de l’acquisition.
Toutefois, si la dépréciation du nouveau bien était, en raison de sa nature, inéluctable au jour de son acquisition, il n’est pas tenu compte de la subrogation.
La valeur du bien au jour du partage est constituée par le prix qui pourrait être obtenu par le jeu de l’offre et de la demande, dans un marché réel, compte tenu de l’état du bien avant la donation et des clauses de l’acte le constatant.
En l’espèce, le rapport d’expertise judiciaire contient une analyse de la valeur vénale actuelle de la parcelle BN [Cadastre 3]. D’une surface de 254 m², sa valeur vénale actuelle est estimée à 27.000 euros selon l’expert qui a utilisé une méthode comparative avec diverses pondérations et ajustements au prix du marché pour retenir un prix moyen local de 133,75 euros le m².
L’acte de donation dressé le 14 décembre 1993 mentionne qu’est édifiée une maison de trois pièces sur la parcelle donnée à Madame [A] [G] [I], qui l’a construite elle-même.
L’acte prévoit que pour la perception des droits d’enregistrement, les parties déclarent que le bien donné est d’une valeur en pleine propriété de 20.000 Francs, soit environ 3.000,00 euros.
Ainsi compte tenu de sa valeur au moment de la donation, de la valeur moyenne retenue par l’Expert après une analyse contradictoire sérieuse, il convient de fixer à la somme de 27.000,00 euros le montant de la valeur du rapport à succession pour la parcelle BN [Cadastre 3].
Le jugement sera donc partiellement infirmé de ce seul chef.
Il n’y a pas lieu de statuer sur une demande d’attribution préférentielle des deux parcelles dès lors qu’elles appartiennent en pleine propriété à Madame [A] [G] [I] qui ne le demande plus en appel.
Sur les demandes de dommages et intérêts :
L’examen des points en litige établit que les parties étaient partiellement fondées à faire valoir leurs droits.
Monsieur [S] [U] [V] [I] et Madame [A] [D] [I] ne démontrent nullement le caractère abusif de l’appel de Madame [A] [G] [I].
Leur demande de dommages et intérêts doit être rejetée.
Sur les autres demandes :
La nature familiale du litige et la nécessité d’assurer le règlement rapide de la succession justifient que soient rejetées les demandes fondées sur l’article 700 du code de procédure civile, en considération de l’équité.
Les parties supporteront leurs propres dépens de l’appel même si les dépens de première instance peuvent être pris en frais privilégiés de succession comme l’a précisé le premier juge.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement, réputé contradictoire et en dernier ressort, en matière civile, par sa mise à disposition au greffe conformément à l’article 451 alinéa 2 du code de procédure civile ;
Sur le jugement du 8 novembre 2019 :
INFIRME le jugement du 8 novembre 2019 en ce qu’il a ordonné le rapport à succession par Madame [F] [I] de la valeur de la parcelle cadastrée BN [Cadastre 6], acquise le 9 mars 2014 et condamné Madame [A] [G] [I] à payer une indemnité de 3.000 euros à Monsieur [S] [U] [V] [I] et Madame [A] [D] [I] au titre de leurs frais irrépétibles ;
LE CONFIRME pour le surplus ;
Statuant à nouveau sur les chefs infirmés :
DEBOUTE Monsieur [S] [U] [V] [I] et Madame [A] [D] [I], ainsi que Monsieur [Z] [I] de leur demande de rapport à la succession de la valeur de la parcelle BN [Cadastre 6] par Madame [A] [G] [I] ;
DEBOUTE toutes les parties de leurs demandes fondées sur l’article 700 du code de procédure civil en, en première instance et en appel ;
LES LAISSE supporter leurs propres dépens ;
Sur le jugement du 30 avril 2021 :
INFIRME le jugement du 30 avril 2021 en ce qu’il a fixé à 54.000 euros la somme qui devra être rapportée à la succession de M. [M] [I] par Madame [A] [G] [I] au titre des parcelles BN [Cadastre 3] et [Cadastre 6], et l’a condamnée à rapporter cette somme ;
LE CONFIRME pour le surplus ;
Statuant sur le chef infirmé :
DIT n’y avoir lieu à rapport pour la parcelle BN [Cadastre 6] ;
FIXE à la somme de 27.000,00 euros le montant du rapport de la donation de la parcelle BN [Cadastre 3] au profit de Madame [F] [I] ;
ORDONNE le rapport à la succession de cette somme par Madame [F] [I] ;
Y AJOUTANT,
DEBOUTE Monsieur [S] [U] [V] [I] et Madame [A] [D] [I] de leur demande de dommages et intérêts ;
DEBOUTE les parties de leurs demandes fondées sur l’article 700 du code de procédure civile en appel ;
LAISSE les parties supporter leurs propres dépens de l’appel.
Le présent arrêt a été signé par Monsieur Patrick CHEVRIER, Président de chambre, et par Mme Marina BOYER, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
LA GREFFIÈRE signé LE PRÉSIDENT