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23 mars 2023
Cour d’appel de Montpellier
RG n°
21/00651
Grosse + copie
délivrées le
à
COUR D’APPEL DE MONTPELLIER
3e chambre civile
ARRET DU 23 MARS 2023
Numéro d’inscription au répertoire général :
N° RG 21/00651 – N° Portalis DBVK-V-B7F-O3JF
sur réinscription du N°RG 13/04338 dont avaient été joints les N°RG 13/04667 et 13/04862
Décision déférée à la cour :
Jugement du 30 avril 2013
TRIBUNAL DE GRANDE INSTANCE DE MONTPELLIER
N° RG 04/04536
APPELANTS :
Monsieur [C] [E]
né le 29 Mai 1977 à [Localité 37]
de nationalité Française
[Adresse 14]
[Localité 30]
Représenté par Me Emily APOLLIS de la SCP GILLES ARGELLIES, EMILY APOLLIS – AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de MONTPELLIER,
et assisté à l’instance par Me Antoine CHATAIN de l’AARPI Chatain & Associés, avocat au barreau de PARIS, substitué à l’audience par Me Jean-Yves DEMAY de l’AARPI Chatain & Associés, avocat au barreau de PARIS
Appelant dans les n°RG 13/04862 et 13/04667 (fond)
Intimé dans le n°RG 13/04338 (fond)
Monsieur [AD] [J]
né le 17 Avril 1967 à [Localité 22]
de nationalité Française
[Adresse 33]
[Adresse 33]
[Localité 36]
Représenté par Me Cyrille CAMILLERAPP, avocat au barreau de MONTPELLIER
Appelant dans le n°RG 13/04338 (fond)
Intimé dans les n°RG 13/04862 et 13/04667 (fond)
INTIMES :
Madame [Z] [V] veuve [E]
née le 08 Avril 1953 à [Localité 22]
de nationalité Française
[Adresse 35]
[Adresse 35]
[Localité 38]
Représentée par Me Jean-Marc NGUYEN-PHUNG de la SELARL SELARL PHUNG 3P, avocat au barreau de MONTPELLIER, substitué à l’audience par Me Mehdi BENAMEUR, avocat au barreau de MONTPELLIER
Intimée dans les n°RG13/04862, 13/04338 et le 13/04667 (fond)
Monsieur [F] [E]
né le 04 Mai 1948 à [Localité 22]
de nationalité Française
[Adresse 6]
[Localité 36]
et
Madame [Z] [TX] épouse [E]
née le 21 Décembre 1952 à [Localité 32]
de nationalité Française
[Adresse 6]
[Localité 36]
Représentés par Me Christel DAUDE de la SCP D’AVOCATS COSTE, DAUDE, VALLET, LAMBERT, avocat au barreau de MONTPELLIER
Intimés dans les n°RG13/04862, 13/04667 et 13/04338 (fond)
Monsieur [B] [E]
né le 1er novembre 1943 à [Localité 22]
de nationalité Française
[Adresse 31]
[Adresse 31]
[Localité 22]
Non représenté
Intimé dans les n°RG13/04862, 13/04667 et 13/04338 (fond)
Ordonnance du 10 janvier 2022 de révocation de clôture du 21 décembre 2021 et prononçant une nouvelle clôture
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 11 janvier 2022, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant M. Thierry CARLIER, Conseiller et M. Fabrice DURAND, Conseiller, chargé du rapport.
Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
M. Thierry CARLIER, Conseiller faisant fonction de président de chambre
M. Fabrice DURAND, Conseiller
Mme Marie-Claude SIMON, Vice-présidente placée par ordonnance du premier président du 1er décembre 2021
en présence de Mme [K] [GK], stagiaire avocat
Greffier, lors des débats : Mme Camille MOLINA
ARRET :
– rendu par défaut ;
– prononcé par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour fixée au 10 mars 2022 prorogée au 16 juin 2022, au 22 septembre 2022, au 15 décembre 2022, au 16 février 2023 puis au 23 mars 2023, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile ;
– signé par M. Thierry CARLIER, Conseiller faisant fonction de Président de chambre et par Mme Camille MOLINA, Greffière.
*
* *
EXPOSE DU LITIGE
[P] [E], né le 11 décembre 1941 à [Localité 22] (34), est décédé le 3 avril 2002 en laissant pour lui succéder :
– son épouse, Mme [V], avec laquelle il s’est marié le 9 septembre 1986 sous le régime de la communauté légale avant d’adopter celui de la séparation de biens par acte authentique du 16 septembre 1997 homologué par jugement du 27 novembre 1997 du tribunal de grande instance de Montpellier ;
– ses deux enfants issus de deux unions précédentes :
* M. [AD] [J], né le 17 avril 1967 à [Localité 22] (34) ;
* M. [C] [E], né le 29 mai 1977 à [Localité 37] (93).
Suivant acte reçu le 10 septembre 1993 par Me [A] [BR], notaire à [Localité 34], [P] [E] a fait donation à son épouse Mme [V] des quotités disponibles permises entre époux au jour de son décès.
Par testament olographe daté du 10 juillet 2001 et déposé le 22 octobre 2002 en l’étude de Me [BR], [P] [E] a institué son épouse Mme [V] légataire à titre particulier des biens mobiliers et immobiliers suivantes :
– appartement du [Adresse 40] [Adresse 40] à [Localité 38] ;
– appartement [Adresse 35] à [Localité 38] ;
– appartement du [Adresse 10] à [Localité 22] ;
– appartement de la [Adresse 18] à [Localité 22] ;
– murs commerciaux de la [Adresse 1] (détenus en indivision avec son frère M. [F] [E] et son épouse Mme [TX]) ;
– meubles meublants, le matériel ou le commercial, le camping-car, le véhicule 206 et les comptes bancaires personnels.
Le 25 octobre 2002, Mme [V] a déclaré opter pour le quart de la succession en pleine propriété et les trois quarts en usufruit.
L’inventaire de la succession a été réalisé le 28 octobre 2022 par Me [S] [MI], notaire à [Localité 22].
Le 30 octobre 2002, les héritiers ont signé un protocole d’accord qui a servi à Me [MI] pour établir un projet d’acte de partage qui n’a cependant pas reçu l’assentiment des héritiers.
Par ailleurs, la succession de [P] [E] comprend un tiers de la propriété indivise de biens immobiliers issus de la succession de son père [U] [E] décédé le 22 octobre 1991. Ces biens sont indivis avec ses deux frères MM. [F] et [B] [E].
Enfin, [P] [E] et son frère M. [F] [E] étaient propriétaires indivis d’un fonds de commerce de vente et de réparation de motocyclettes à l’enseigne Yamaha situé [Adresse 41] à [Localité 36] (34).
Par acte d’huissier du 5 août 2004, Mme [V] et M. [J] ont fait assigner M. [C] [E] devant le tribunal de grande instance de Montpellier aux fins d’ouverture des opérations de comptes, liquidation et partage de la succession de [P] [E].
Par jugement du 28 août 2008, le tribunal a :
– ordonné l’ouverture des opérations de comptes, liquidation et partage de la succession de [P] [E] ;
– ordonné une mesure d’expertise immobilière confiée à M. [DD] [JJ] [X] avec mission d’évaluer les cinq biens dépendant de cette succession :
* appartement T1 [Adresse 18] située [Adresse 18] ;
* appartement [Adresse 10] située [Adresse 10] ;
* appartement situé [Adresse 40] ;
* appartement [Adresse 26] située [Adresse 26] ;
* appartement situé [Adresse 5] à [Localité 38] ;
– ordonné une mesure d’expertise comptable confiée à M. [O] [PY], avec pour mission de déterminer la valeur des parts sociales du défunt au sein de la SARL Yam Sud et de la SARL Neptune Loisir.
M. [JJ] [X] a déposé son rapport le 20 octobre 2009.
M. [PY] n’a pu conduire sa mission à terme, faute de versement de la consignation complémentaire mise à la charge de M. [J]. Il a donc déposé son rapport en l’état le 2 juillet 2010.
Par acte du 7 avril 2006, Mme [V] a fait assigner M. [F] [E] afin que soient ouvertes les opérations de partage de l’indivision ayant existé entre celui-ci et le défunt.
Mme [Z] [TX] épouse [E], est intervenue volontairement à l’instance.
Par actes d’huissier respectivement signifiés les 24, 25 et 20 avril 2007, M. [F] [E] a appelé en cause son frère M. [B] [E] et ses neveux M. [AD] [J] et M. [C] [E] aux fins de voir ordonner le partage de l’indivision successorale de leurs parents [U] [E] décédé le 22 octobre 1991 et [D] [L] veuve [E] décédée le 31 octobre 1993.
Seul M. [B] [E] n’a pas constitué avocat.
Par ordonnance du 21 janvier 2008, le juge de la mise en état a ordonné une mesure d’expertise confiée à M. [DD] [JJ] [X] aux fins d’évaluer :
– les biens acquis par [P] [E], M. [F] [E] et Mme [TX] par acte notarié du 10 juillet 1980 des époux [Y] consistant en un immeuble situé à [Localité 36] ;
– le fonds de commerce exploité dans l’immeuble ;
– les lots 308, 309, 1 et 2 d’un ensemble immobilier situé à [Localité 38] acquis par [P] [E] et M. [F] [E] de la SARL Les Marines du Prevost suivant acte notarié du 26 novembre 1979 ;
– les biens immobiliers dépendant de la succession de [U] [E] et d'[D] [L], son épouse, parents de MM. [P], [F] et [B] [E].
L’expert judiciaire a déposé son rapport le 21 octobre 2009.
Le juge de la mise en état a joint toutes les procédures par ordonnance du 9 novembre 2011 sous le n°RG 04/04536.
Par jugement du 30 avril 2013, le tribunal de grande instance de Montpellier a :
– rappelé que l’ouverture des opération de comptes, liquidation, partage de la succession de [E] [P], décédé à [Localité 22] le 3 avril 2002, avait été ordonnée par jugement du 28 août 2008 ;
– ordonné l’ouverture des opérations de comptes, liquidation, partage de la succession d'[E] [P], décédé à [Localité 22] le 3 avril 2002 ;
– commis le président de la chambre des notaires de l’Hérault ou son délégataire afin de procéder à ces opérations ;
– dit que le protocole d’accord du 30 octobre 2002 conclu entre les héritiers de [P] [E] n’aura pas la valeur d’une transaction ;
– dit que les parts de la SCI La Ferrière détenues par le défunt sont à réintégrer dans l’actif successoral ;
– fixé comme suit, au vu des deux rapports d’expertise de M. [JJ] [X] des 20 et 21 octobre 2009, la valeur des biens indivis :
-appartement [Adresse 5], [Adresse 5] à [Localité 38] lot n° 180 et son garage, lot n°210 : 234 700 euros ;
– appartement situé [Adresse 18], [Adresse 18] (lots n° 226 et 262) : 73 900 euros ;
– appartement, cellier et parking (lots n°2074, 2055 et 5094) situés [Adresse 10], [Adresse 10] : 80 300 euros ;
– appartement résidence [Adresse 40], [Adresse 40] (lot n° 10) : 120 700 euros ;
– cellier et garage situés [Adresse 26] (lots n° 128 et 101) : 15 800 euros ;
– bien immobilier situé à [Localité 36] en bordure de la RN 586, composé de plusieurs parcelles de terrain d’une contenance cadastrale de 6 012 m2, avec un bâtiment à usage d’habitation et un autre à usage d’atelier et d’entrepôt : 656 300 euros ;
– local au rez-de-chaussée sans affectation particulière, local à usage commercial en rez-de-chaussée, lots n° 308 et 309 (parkings) au sein d’un ensemble immobilier situé à [Localité 38], [Adresse 1] et [Adresse 20]/ [Adresse 42], dit [Adresse 1] : 334 000 euros ;
– parcelles de terre cadastrées section F n° [Cadastre 17], [Cadastre 27], [Cadastre 28] et [Cadastre 29] sur la commune de [Localité 43] (12) : 1 100 euros ;
– attribué à Mme [V] :
– l’appartement du [Adresse 5] à [Localité 38] ;
– les biens situés [Adresse 25] ;
– le bien dit [Adresse 1] situé à [Localité 38] ;
– les terres de [Localité 43] ;
– attribué à M. [F] [E] et Mme [TX] le bien immobilier situé à [Localité 36] en bordure de la RN 586 ;
– condamné M. [J] à payer à Mme [V] la somme de 55 385,47 euros au titre de sa quote-part des droits de succession, avec intérêts au taux légal à compter du 26 avril 2012 ;
– condamné M. [C] [E] à payer à Mme [V] la somme de 55 385, 47 euros au titre de sa quote part des droits de succession, avec intérêts au taux légal à compter du 26 avril 2012 ;
– condamné in solidum M. [J] et M. [C] [E] à payer à Mme [V] la somme de 59 820,36 euros au titre des frais bancaires qu’elle a exposés pour régler les droits de succession, avec intérêts au taux légal à compter du 26 avril 2012 ;
– ordonné la capitalisation annuelle des intérêts conformément aux dispositions de l’article 1154 du code civil ;
– dit que ces dettes pourront, par compensation, être prélevées sur la part des débiteurs résultant des opérations de partage ;
– débouté M. [C] [E] de ses demandes à l’encontre de Mme [V] aux fins de rapport à la succession et de recel;
– ordonné la licitation du fonds de commerce de vente et réparation de motocyclettes, exploité [Adresse 41] à [Localité 36], donné en location gérance à la SARL Yam Sud, indivis entre M. [F] [E] et la succession de [P] [E], par les soins du notaire commis pour procéder aux opérations de partage, commis pour dresser le cahier des charges ;
– dit que la mise à prix sera fixée à 50 000 euros, avec faculté de baisse de moitié puis des ¿ en cas de carence d’enchères et que la publicité sera faite conformément aux dispositions de l’article L. 143-6 du code de commerce ;
– débouté M. [C] [E] de sa demande en fixation d’une indemnité à la charge de M. [F] [E] au titre de la perte de valeur du fonds de commerce ;
– dit que M. [C] [E] est débiteur envers l’indivision d’une indemnité au titre de la perte de valeur du fonds, qui sera égale à la différence entre 650 000 euros et le prix de vente du fonds de commerce ;
– passé les dépens en frais privilégiés de partage.
M. [AD] [J] a relevé appel de ce jugement le 10 juin 2013, enrôlé sous le n°RG 13/04338.
M. [C] [E] en a également relevé appel les 20 et 26 juin 2013, enrôlés sous les n°RG 13/04667 et 13/04862.
L’appel enregistré sous le n°RG 13/04667 a été joint sous le n°RG 13/04338 par ordonnance du conseiller de la mis en état du 25 septembre 2014 et l’appel enregistré sous le n°RG 13/04862 par mention au dossier.
Par ordonnance rendue le 24 janvier 2018, le conseiller de la mise en état, saisi par M. [AD] [J] et M. [C] [E] d’une demande de sursis à statuer en raison d’une plainte avec constitution de partie civile déposée le 12 novembre 2015 devant le doyen des juges d’instruction du tribunal de grande instance de Montpellier des chefs d’abus de biens sociaux et d’abus de pouvoirs, a rejeté cette demande.
Par arrêt du 13 septembre 2018 la cour a :
– ordonné la production par Mme [V], avant le 30 novembre 2018, des actes suivants:
– acte d’acquisition de l’appartement situé [Adresse 5] à [Localité 38], lot n° 180 et son garage, lot n° 210 ;
– acte d’acquisition de l’appartement situé [Adresse 40] (lot n° 10) ;
– acte d’acquisition du cellier et du garage situés [Adresse 26] (lot n° 128 et 101) ;
– acte d’acquisition de l’appartement situé [Adresse 18], [Adresse 18] (lots n° 226 et 262) ;
– acte d’acquisition de l’appartement, du cellier et du parking au sein de la [Adresse 10], [Adresse 10] (lots n° 2074, 2055 et 5094) ;
– contrat de mariage du 16 septembre 1997;
– jugement d’homologation rendu par le tribunal de grande instance de Montpellier le 27 novembre 1997 ;
– ordonné la réouverture des débats à l’audience du 13 mars 2019 afin de permettre à M. [AD] [J] et à M. [C] [E] de conclure sur ces pièces.
Mme [V] a satisfait à cette demande mais M. [AD] [J] a soutenu qu’elle ne pouvait revendiquer de droit sur certains immeubles et que le partage de la succession de son père [P] [E] ne pouvait avoir lieu sans liquidation préalable de la communauté de biens ayant existé avec Mme [V] et dissoute par jugement du 27 novembre 1997 ayant homologué le changement de régime matrimonial.
Par arrêt du 23 mai 2019, la cour d’appel de Montpellier a :
– ordonné le sursis à statuer sur la liquidation de la succession de [P] [E] décédé le 3 avril 2002 et renvoyé les parties devant le conseiller de la mise en état ;
– ordonné la production par les parties de l’acte portant liquidation du régime de communauté légale intervenue lors du changement de régime matrimonial homologué le 27 novembre 1997 et dit que les parties déposeront de nouvelles conclusions au vu de ce document.
– à défaut, dit qu’il leur appartiendrait de faire procéder à la liquidation du régime de communauté légale adopté par les époux [E]-[V] du mois de septembre 1986 au mois de novembre 1997 ;
– dit qu’au vu de cette liquidation les parties devraient déposer de nouvelles conclusions ;
– réservé les dépens.
Par ordonnance du 28 novembre 2019, le conseiller chargé de la mise en état a ordonné la radiation du rôle du dossier n°RG 13/04338.
Par courriel du 25 septembre 2019, Me [I] [HX], successeur de Me [BR], a adressé à M. [C] [E] l’acte de changement de régime matrimonial reçu le 16 septembre 1997 en l’informant naturellement que « compte tenu du temps écoulé (le changement date de 1997) et du décès survenu de M. [E], il me paraît difficile d’établir un acte liquidatif tenant compte du patrimoine des époux à cette date ».
Mme [V] versait aux débats un projet d’acte de liquidation du régime matrimonial qui était contesté par M. [C] [E] faisant valoir plusieurs erreurs et omissions de biens.
En conséquence, M. [C] [E] a déposé le 2 février 2021 une demande de réinscription du dossier qui a été ré-enrôlé sous le n°RG 21/00651.
Le dossier a été fixé à l’audience du 18 janvier 2022 dans le même état que lors de l’audience du 13 mars 2019.
Vu les dernières conclusions de M. [C] [E] remises au greffe le 20 décembre 2021 ;
Vu les dernières conclusions de M. [AD] [J] remises au greffe le 12 novembre 2021 ;
Vu les dernières conclusions de Mme [Z] [V] veuve [E] remises au greffe le 31 mars 2021 ;
Vu les dernières conclusions de M. [F] [E] et Mme [Z] [TX] épouse [E] remises au greffe le 22 décembre 2021 ;
M. [B] [E] n’a pas constitué avocat.
M. [C] [E] a régulièrement signifié par acte du 23 juin 2021 ses conclusions du 2 février 2021 à M. [B] [E].
M. [F] [E] et Mme [TX] épouse [E] ont régulièrement signifié par acte du 16 juillet 2021 leurs conclusions du 4 juin 2021 à M. [B] [E].
Mme [Z] [E] a régulièrement signifié par acte du 6 août 2021 ses conclusions du 31 mars 2021 à M. [B] [E].
L’ordonnance de clôture a été rendue le 10 janvier 2022.
MOTIFS DE L’ARRÊT
A titre liminaire, il convient de rappeler que, conformément aux dispositions du troisième alinéa de l’article 954 du code de procédure civile, les demandes tendant simplement à voir « réserver », « donner acte », « constater », « rappeler » ou « dire et juger » ne constituent pas des demandes en justice visant à ce qu’i1 soit tranché sur un point litigieux mais des moyens, de sorte que la cour n’y répondra pas dans le dispositif du présent arrêt.
Ces demandes ne saisiront la cour qu’à condition d’être énoncées au dispositif des dernières conclusions.
I – Sur les modalités générales du partage judiciaire,
A) Sur le périmètre du partage judiciaire,
1) L’indivision successorale de [P] [E]
Le jugement du 28 août 2008 a ordonné les opérations de compte, liquidation et partage de la succession de [P] [E] décédé le 3 avril 2002.
Conformément à l’option exercée par Mme [V], ses droits théoriques sur la succession de son mari [P] [E] s’élèvent à un quart en pleine propriété et à trois quarts en usufruit.
S’agissant d’un testament daté du 10 juillet 2001 et d’une succession ouverte le 3 avril 2002 (antérieurement au 1er juillet 2002, date d’entrée en vigueur de la loi n° 2001-1135 du 3 décembre 2001 ayant abrogé la règle de l’imputation prescrite par l’article 767 alinéa 6 ancien du code civil), Mme [V] ne peut pas cumuler ses droits successoraux prévus aux articles 757, 757-1 et 757-2 du code civil avec la libéralité qui lui a été consentie.
Il convient par ailleurs d’étendre ces opérations de partage aux trois indivisions suivantes :
– l’indivision de la succession de [U] [E] ;
– l’indivision post-communautaire de [P] [E] et de Mme [V] ;
– l’indivision conventionnelle existant entre [P] [E], M. [F] [E] et Mme [Z] [TX] épouse [E].
2) L’indivision post-communautaire de [P] [E] et de Mme [V]
En application de l’article 1441 du code civil, la transformation du régime matrimonial communautaire de [P] [E] et de Mme [V] en régime de séparation de biens par jugement d’homologation du 27 novembre 1997 a entraîné la dissolution de la communauté existant entre les époux.
Suite à l’arrêt du 23 mai 2019, les parties ne sont pas parvenues à s’entendre sur la liquidation du régime de communauté légale ayant existé entre [P] [E] et Mme [V].
Me [I] [HX], successeur de Me [A] [BR], confirmait le 25 septembre 2019 que son étude ne conservait aucun acte de liquidation du régime de communauté et ajoutait qu’elle n’était pas en mesure d’établir un tel acte en raison du temps écoulé depuis 1997.
Cependant, à la demande de Mme [V], Me [HX] finissait par établir un projet d’état liquidatif adressé le 6 mars 2020 par le notaire à M. [C] [E] qui refusait de le signer.
Cette indivision post-communautaire n’a donc jamais été partagée de sorte que les opérations de comptes, liquidation et partage de la succession de [P] [E] devront être précédées des opérations de liquidation de la communauté ayant existé entre le défunt et Mme [V].
Les biens acquis par [P] [E] et Mme [V] pendant le mariage et jusqu’au 16 septembre 1997 sont des biens de communauté, tandis que les biens acquis avant le mariage célébré le 9 septembre 1986 ou pendant le mariage par succession, donation ou legs demeurent des biens propres.
Les biens propres de [P] [E] (outre ceux déjà énumérés détenus en propriété indivise avec son frère [F] et ceux issus de la succession de son père [U]) sont les suivants :
– 245 parts sociales de la SARL Yam Sud ;
– 260 parts de la SARL Neptune Loisirs constituée par acte sous seing privé du 1er mai 1980 ;
– 5000 parts de la SCI Ferrière constituée par acte notariée du 25 novembre 1976.
Les biens immobiliers suivants sont tous des biens communs pour avoir été acquis par [P] [E] et son épouse Mme [V] entre la date du mariage du 9 septembre 1986 et la dissolution de la communauté le 16 septembre 1997 :
– l’appartement T3 formant le lot n°10 de l’immeuble [Adresse 40] [Adresse 40] et [Adresse 23] cadastré BI n°[Cadastre 8] sur la commune de [Localité 38] qui a été acheté par les époux [E] le 23 juillet 1990 ;
– l’appartement T1 formant le lot n°2074 avec cellier lot n°2055 et parking lot n°5094 de l’immeuble [Adresse 10] cadastré BO n°[Cadastre 3] à [Localité 22] qui a été acheté par les époux [E] le 19 mai 1995, et non en 1988 comme le soutient à tort M. [C] [E] dans ses écritures ;
– l’appartement T1 [Adresse 18] lot n°226 et cellier lot n°262 située [Adresse 18] cadastré HX n°[Cadastre 21] à [Localité 22] qui a été acheté par les époux [E] le 28 novembre 1995 et non en 1978 comme le soutient à tort M. [C] [E] dans ses écritures ;
– deux lots n°101 cellier et 128 garage de la [Adresse 26] [Adresse 26] cadastré BI n°[Cadastre 7] à [Localité 38] qui a été achetés par les époux [E] le 7 décembre 1995.
Tous ces immeubles ont été achetés alors que les époux vivaient sous le régime de la communauté. Ces trois immeubles constituent donc des biens de communauté contrairement à la position soutenue par M. [C] [E] dans ses écritures.
M. [C] [E], sur qui repose le fardeau de cette preuve, n’apporte pas la preuve d’un emploi ou d’un remploi de fonds propres par [P] [E] pour financer ces quatre acquisitions, ce qui en aurait fait des biens propres de celui-ci.
La preuve n’est pas davantage apportée par M. [C] [E] de ce que l’acquisition de ces biens communs se serait faite au moyen de biens ou de deniers propres à [P] [E], ce qui aurait généré un droit à récompense due par la communauté.
Contrairement à la position soutenue par M. [C] [E] dans ses écritures, le seul fait que Mme [V] n’exerçait aucune activité professionnelle n’apporte pas la preuve d’un financement des biens immobiliers achetés par fonds propres de son époux.
Il n’existe donc aucune récompense à liquider suite à la dissolution de la communauté ayant existé entre les époux.
Un dernier appartement T3 au sein de la [Adresse 5] située [Adresse 5] cadastré BH n°[Cadastre 16] à [Localité 38] formant le lot n°180 et garage lot n°210 a été acheté en indivision par les époux [E] le 1er octobre 1999, et non en 1987 comme le soutient à tort M. [C] [E] dans ses écritures.
S’agissant de cet achat en indivision, l’acte authentique du 1er octobre 1999 stipule simplement que « le prix a été payé comptant ce jour à l’ancien propriétaire qui le reconnaît et en donne quittance ».
M. [C] [E] n’apporte pas la preuve de l’existence d’une créance à liquider entre indivisaires concernant cet immeuble.
Enfin, l’immeuble acheté par [P] [E] et Mme [V] situé [Adresse 15] cadastré BI n°[Cadastre 9] à [Localité 38] a été revendu par les époux le 24 septembre 1999.
3) L’indivision successorale de [U] [E]
Le partage de la succession de [U] [E] décédé le 22 octobre 1991 n’a jamais été effectué.
En conséquence, la cour ordonnera le partage de cette indivision successorale dévolue à hauteur d’un tiers à chacun des trois enfants de [U] [E] : MM. [P], [F] et [B] [E].
L’actif successoral est constitué des parcelles de terre cadastrées section F n°[Cadastre 17], [Cadastre 27], [Cadastre 28] et [Cadastre 29] à [Localité 43] (12) dont l’évaluation à hauteur de 1 100 euros par l’expert judiciaire n’est pas contestée par les parties.
4) L’indivision conventionnelle existant entre [P] [E], M. [F] [E] et Mme [Z] [TX] épouse [E]
Cette indivision a été créée sous forme de société de fait immatriculée au RCS de Montpellier n°315 984 815.
Il convient de préciser que M. [F] [E] s’est marié le 5 août 1972 avec Mme [Z] [TX] sans contrat, c’est-à-dire sous le régime de la communauté de biens réduite aux acquêts.
[P] [E] d’une part, et M. et Mme [F] [E] d’autre part, étaient propriétaires indivis à parts égales des biens suivants :
– un bâtiment commercial avec atelier et garage cadastré BW n°[Cadastre 4], [Cadastre 11], [Cadastre 12], [Cadastre 13] et CY n°[Cadastre 24] d’une contenance cadastrale de 6 012 m² situé [Adresse 41] sur la commune de [Localité 36] dans lequel était exploité ce fonds de commerce, acheté le 10 juillet 1980 moitié [P] [E] et l’autre moitié par la communauté des époux [E]-[TX], immeuble évalué à 656 300 euros par l’expert judiciaire dans son rapport d’octobre 2009 ;
– un fonds de commerce de vente et de réparation de motocyclettes sous concession Yamaha ouvert et exploité dans le bâtment précité ;
– deux lots commerciaux n°1 et 2 avec deux parkings lots n°308 et 309 dans l’immeuble dénommé [Adresse 1] situé [Adresse 1] cadastré BI n°[Cadastre 19] sur la commune de [Localité 38], acheté le 26 novembre 1979 moitié [P] et moitié [F] [E]. L’expert judiciaire avait évalué le 20 octobre 2009 cet immeuble à hauteur de 334 000 euros.
Ce dernier bien immobilier dénommé [Adresse 1] a été vendu le 18 octobre 2019 par les indivisaires au prix de 560 000 euros.
Les deux frères étaient par ailleurs associés à hauteur de 245 parts pour [P] et 255 parts pour [F] de la SARL Yam Sud ayant pour activité la vente et la réparation de motocyclettes sous concession Yamaha.
Par contrat de location-gérance conclu le 1er avril 2005 pour une durée de trois ans et successivement renouvelé depuis lors, la SARL Yam Sud a exploité le fonds de commerce appartenant à [P] et [F] [E].
Le montant annuel de la redevance de location-gérance payée par la SARL Yam Sud à la société de fait propriétaire du fonds s’élevait lors de l’exercice 2012 à la somme de 93 812 euros.
B) Sur la portée du protocole du 30 octobre 2002,
Mme [V], M. [C] [E] et M. [AD] [J] ont conclu le 30 octobre 2002 un « protocole d’accord pour le partage successoral [E] » aux termes duquel les héritiers se répartissaient l’actif successoral et prévoyaient la prise en charge total du passif par Mme [V].
Ce protocole précisait que les héritiers avaient « par ces présentes, procédé amiablement à un protocole d’accord préalable à la rédaction et signature définitive d’un acte de liquidation et de partage de la succession de M. [P] [E] ».
Ainsi que l’a exactement relevé le jugement déféré, ce protocole ne s’inscrit pas dans le cadre d’un litige alors inexistant et ne révèle pas de concessions réciproques. Il ne s’analyse donc pas en une transaction au sens de l’article 2044 du code civil mais en une simple convention préparatoire au partage qui seul met fin à l’indivision. Ce protocole lie les parties en vertu de l’article 1134 du code civil mais n’est pas applicable par lui-même à défaut de voir ses termes repris dans un acte de partage définitif et complet.
En conséquence, le jugement déféré sera confirmé en ce qu’il a dit que le protocole du 30 octobre 2002 n’avait pas valeur de transaction.
C) Sur la désignation du notaire chargée de la liquidation,
Les parties ne s’accordant pas sur le choix du notaire, il convient de confirmer le jugement déféré en ce qu’il a désigné le président de la chambre des notaires de l’Hérault avec faculté de déléguer cette mission à un autre notaire.
Il conviendra d’éviter la désignation de tout notaire déjà intervenu au service d’un ou plusieurs des héritiers copartageants.
Le notaire liquidateur dressera un premier état liquidatif concernant l’indivision ayant existé entre [P] [E] et M. [F] [E] et son épouse Mme [Z] [TX].
Le notaire procédera ensuite aux opérations de comptes, liquidation et partage de la succession de [U] [E], de la communauté des époux et enfin de la succession de [P] [E].
II – Sur les demandes de rapport dirigées contre Mme [V],
Aux termes de ses dernières conclusions déposées le 20 décembre 2021, M. [C] [E] a abandonné certaines de ses demandes formées en première instance contre Mme [V].
M. [C] [E] demande désormais le rapport à la succession des seuls biens suivants :
– la somme de 75 378 euros ;
– les parts de la SARL Neptune Loisirs ;
– les reports à nouveau de la société Yam Sud perçus par Mme [V] ;
– 50 parts de la SCI Ferrière.
Il est par ailleurs rappelé que les demandes formées par M. [C] [E] concernant les « biens dont Madame [V] s’est attribuée la propriété indivise par moitié » ont été examinées et rejetées dans le cadre de la liquidation du régime matrimonial des époux [E].
A) La somme de 75 378 euros,
Mme [V] n’a pas fait figurer cette somme dans la déclaration de succession.
L’existence de cette créance a été révélée par le contrôle fiscal de la déclaration de succession déposée le 30 octobre 2002. L’administration fiscale a établi une omission d’actifs issus de la société de fait ayant existé entre [P] [E] et M. [F] [E] égale au surplus des créances omises sur les dettes. La différence représente une créance nette de 75 378 euros.
Mme [V] n’a jamais contesté l’existence de cette créance détenue sur la société de fait et mise en évidence par la proposition de rectification fiscale du 11 décembre 2008.
Cette somme de 75 378 euros doit donc être rapportée à l’actif de la succession de [P] [E].
B) Les parts de la SARL Neptune Loisirs
L’examen des statuts de la SARL Neptune Loisirs montre que [P] [E] détenait 260 parts sociales, les autres parts étant détenues par M. [N] [SK].
La déclaration de succession a mentionné 104 parts au lieu de 260 parts, omettant ainsi d’y faire figurer les 156 parts complémentaires.
S’agissant des griefs soulevés par M. [C] [E] quant à la vente des actifs de la SARL Neptune Loisirs, ils ne relèvent pas de la présence instance en partage mais concernent le fonctionnement de cette société et l’exercice d’éventuels recours contentieux entre associés.
C) Les reports à nouveau de la SARL Yam Sud
L’examen des comptes annuels de l’exercice clos au 31 décembre 2012 montre que le report à nouveau est passé de 2 612 098 euros à 284 536 euros entre les exercice 2011 et 2012, traduisant une distribution effectuée à hauteur de 2 327 564 euros par décisions de l’assemblée générale des associés dont MM. [C] [E] et M. [AD] [J] n’ont pas été préalablement informés.
Les associés de la SARL Yam Sud ont ainsi distribué 1 827 564 euros lors de l’assemblée générales du 25 juin 2012 et 500 000 euros lors de l’assemblée générale du 17 décembre 2012 de la SARL Yam Sud, soit une somme totale de 2 327 564 euros prélevée sur le report à nouveau figurant au bilan.
Cette somme de 2 327 564 euros a été distribuée à hauteur de 1 140 506,36 euros sur le compte de l’indivision successorale de [P] [E] (49%) et de 1 187 057,64 euros à M. [F] [E] (51%).
Par ordonnance du 10 janvier 2013, le juge des référés du tribunal de commerce de Montpellier a ordonné à la SARL Yam Sud de verser à Mme [V] la somme de 895 550,46 euros distribuée et initialement affectée au compte courant de l’indivision déduction faite des taxes et impôts dont Mme [V] avait déjà perçue le montant de 193 653,25 euros net de CSG et de prélèvements sociaux.
Par actes d’huissier signifiés le 19 juin 2013 à la SARL Yam Sud et à Mme [V], M. [C] [E] et M. [AD] [J] ont formé tierce opposition à l’ordonnance du 10 janvier 2013.
Par assignations signifiées les 22 et 24 janvier 2014, M. [C] [E] et M. [AD] [J] ont également attrait la SARL Yam Sud, M. [F] [E], M. [H] [TX] et Mme [V] devant le tribunal de commerce aux fins d’obtenir l’annulation des décisions de l’assemblée générale de la SARL Yam Sud ayant porté atteinte à leurs droits d’associés et l’indemnisation par M. [F] [E] et M. [TX] de la société pour le préjudice ayant résulté de leurs fautes de gestion.
Cette dernière instance demeure pendante devant le tribunal de commerce qui a par ailleurs sursis à statuer par jugement du 25 juin 2014 rendu dans une seconde instance introduite par M. [C] [E] et M. [AD] [J] aux fins d’annulation des délibérations litigieuses prises par l’assemblée générale de la SARL Yam Sud.
La cour n’est pas saisie de la régularité des décisions prises par l’assemblée générale de la SARL Yam Sud qui relèvent de la juridiction du tribunal de commerce.
Mais la cour est compétente, étant saisie du règlement de la succession de [P] [E], pour déterminer si Mme [V] a détourné des sommes au préjudice de ses cohéritiers qu’il conviendrait de rapporter à cette succession.
En présence d’un démembrement de propriété de parts sociales, la distribution de réserves ne revient pas à l’usufruitier mais au nu-propriétaire dans la mesure où les bénéfices des exercices antérieurs mis en réserve ont perdu leur nature de fruits et constituent un accroissement de l’actif social, revenant par conséquent au nu-propriétaire.
Il en est de même des sommes figurant en report à nouveau, même lorsqu’aucune affectation en réserves n’a été formellement opérée dans les comptes de la société, dans la mesure où ces sommes correspondent à des bénéfices des exercices antérieurs qui n’ont pas été distribuées en temps utile aux associés sous forme de dividendes à l’issue de chaque exercice concerné.
Contrairement aux motifs du jugement déféré, les associés ne peuvent pas faire échec à la nature de réserve de tels fonds simplement en prenant chaque année « une décision d’attente différant leur affectation définitive jusqu’aux exercices suivants et les maintenant dans la trésorerie de la société », une telle pratique conduisant à une spoliation de fait des droits des nus-propriétaires de parts sociales.
Il en résulte que Mme [V] ne disposait pas d’un droit exclusif sur la somme de 1 140 506,36 euros qui revenait en partie à M. [C] [E] et à M. [AD] [J] nu-propriétaires à hauteur des trois quarts de la succession de leur père.
Le jugement déféré sera donc infirmé en ce qu’il a rejeté la demande rapport de cette somme à la succession formée par M. [C] [E].
D) Les 5 000 parts de la SCI Ferrière
Cette SCI a été constituée par statuts notariés du 25 novembre 1976 entre [P] [E] et son frère M. [F] [E] qui en étaient associés égalitaires, et ce antérieurement au mariage de [P] [E] avec Mme [V].
Le jugement déféré qui a ordonné la réintégration à la succession des 5 000 parts sociales propriété de [P] [E] sera donc confirmé conformément à la demande en ce sens de M. [C] [E].
III – Sur le recel successoral reproché à Mme [V],
M. [C] [E] soutient que Mme [V] a recelé 75 378 euros de liquidités, 156 parts de la SARL Neptune Loisirs et la somme de 1 140 506,36 euros issue des réserves de la SARL Yam Sud.
S’agissant de la demande de M. [C] [E] portant sur les immeubles issus de la communauté ou indivis entre [P] [E] et Mme [V]de, elle ne peut qu’être rejetée dans la mesure où il résulte du présent arrêt que Mme [V] n’a pas détourné ces biens immobiliers.
L’article 778 du code civil dispose :
« Sans préjudice de dommages et intérêts, l’héritier qui a recelé des biens ou des droits d’une succession ou dissimulé l’existence d’un cohéritier est réputé accepter purement et simplement la succession, nonobstant toute renonciation ou acceptation à concurrence de l’actif net, sans pouvoir prétendre à aucune part dans les biens ou les droits détournés ou recelés. Les droits revenant à l’héritier dissimulé et qui ont ou auraient pu augmenter ceux de l’auteur de la dissimulation sont réputés avoir été recelés par ce dernier.
Lorsque le recel a porté sur une donation rapportable ou réductible, l’héritier doit le rapport ou la réduction de cette donation sans pouvoir y prétendre à aucune part.
L’héritier receleur est tenu de rendre tous les fruits et revenus produits par les biens recelés dont il a eu la jouissance depuis l’ouverture de la succession. »
Le recel successoral recouvre toutes les manoeuvres de fraude ou de dissimulation des effets de la succession au moyen desquelles un héritier a cherché à rompre l’égalité du partage au détriment de ses cohéritiers.
A) Le recel de la somme de 75 378 euros
Mme [V] a omis de déclarer cette somme à ses cohéritiers ainsi qu’au notaire chargé de la succession.
M. [C] [E] n’apporte cependant pas la preuve de l’intention de Mme [V] de dissimuler l’existence de cette créance mise en évidence lors du contrôle opéré par l’administration fiscale des comptes de la société de fait ayant existé entre [P] [E] et M. [F] [E].
Le recel successoral de cette somme de 75 378 euros n’est donc pas établi à l’encontre de Mme [V], ce en quoi le jugement déféré sera confirmé.
B) Le recel de 156 parts de la SARL Neptune Loisirs
Mme [V] étant gérante de la SARL Neptune Loisirs, elle ne pouvait pas ignorer que son époux détenait en réalité 260 parts sociales de cette société.
En omettant de déclarer 156 parts sociales dont son époux était propriétaire et en dissimulant l’existence de ces parts au notaire et à ses cohéritiers, Mme [V] a commis une fraude destinée à priver M. [C] [E] et M. [AD] [J] de leurs droits sur ces parts sociales.
La cour ordonne donc à Mme [V] de restituer ces 156 parts à la succession assorties des fruits correspondant aux revenus perçus de ces parts sociales depuis la date d’appropriation injustifiée qui correspond en l’espèce à la date d’ouverture de la succession.
Les autres demandes formées par M. [C] [E] concernant les actifs de cette société relèvent du droit des société et sont étrangères au règlement successoral.
C) Le recel du report à nouveau de la SARL Yam Sud
Il ressort des pièces versées aux débats, et notamment des procès-verbaux des assemblées générales de la SARL Yam Sud du 25 juin et du 17 décembre 2012, que la somme de 2 327 564 euros correspondant au report à nouveau de la société a été distribuée à hauteur de 1 140 506,36 euros sur le compte de l’indivision successorale de [P] [E] et de 1 187 057,64 euros à M. [F] [E].
Mme [V], agissant de concert avec M. [F] [E], a ainsi appréhendé la quasi-totalité des fonds propres de la SARL Yam Sud à hauteur de 2 327 564 euros. A l’issue de ces deux assemblées générales, Mme [V] a ainsi perçu la somme de 1 140 506,36 euros en fraude des droits de ses cohéritiers.
L’élément matériel du recel successoral est ainsi caractérisé.
M. [AD] [J] et de M. [C] [E] n’ont pas été prélablement informés de l’inscription de ces résolutions à l’ordre du jour des assemblées générales de la SARL Yam Sud du 25 juin et du 17 décembre 2012.
De surcroît, les documents afférents aux comptes de l’exercice 2011 versés au greffe du tribunal de commerce ne mentionnent que la quatrième résolution de l’assemblée générale du 25 juin 2012 autorisant la distribution du bénéfice de 172 436 euros. Toutes les autres résolutions, et tout particulièrement celle afférent à la distribution du report à nouveau de 2 612 098 euros n’ont pas été régulièrement publiées.
Cette opération financière a ainsi été volontairement dissimulée à MM. [C] [E] et M. [AD] [J], nu-propriétaires indivis des parts sociales, qui n’ont été informés ni des modalités de vote de l’indivision successorale de [P] [E] (obligation rappelée par l’article 3-1 des statuts de la société) ni du résultat de vote des résolutions de l’assemblée générale.
Cette volonté manifeste de dissimulation de ces mouvements financiers matérialise l’élément intentionnel du recel successoral commis par Mme [V] à hauteur de 1 140 506,36 euros.
Cette somme devra donc être restituée à la succession par Mme [V] assortie des intérêts au taux légal à compter du 17 décembre 2012, date de l’assemblée générale au cours de laquelle le détournement a été réalisé.
D) Les conséquences du recel successoral
Mme [V] doit donc restituer à M. [C] [E] et à M. [AD] [J] 156 parts de la SARL Neptune Loisirs et 1 140 506,36 euros issue des réserves de la SARL Yam Sud ainsi que les intérêts et fruits de ces biens ainsi qu’il a été dit.
Le jugement déféré sera infirmé en ce qu’il n’a pas fait droit à ces demandes.
En application de l’article 778 du code civil, Mme [V] ne pourra prétendre à aucune part sur l’ensemble de ces biens.
M. [C] [E] n’est pas pour autant fondé à soutenir que cette faute civile de Mme [V] justifie de la priver du remboursement des droits de succession qu’elle a réglés en lieu et place de ses cohéritiers à titre de dommages-intérêts.
IV – Sur les demandes indemnitaires formées entre les cohéritiers,
A) Le paiement des droits de succession par Mme [V]
1) Sur les droits de succession,
L’article 1709 du code général des impôts, dans sa rédaction alors en vigueur, dispose :
« Les droits des déclarations des mutations par décès sont payés par les héritiers, donataires ou légataires.
Les cohéritiers sont solidaires ».
Ainsi que l’a exactement relevé le jugement déféré par des motifs adoptés par la cour, les droits de succession constituent une dette personnelle de chaque héritier pour laquelle l’administration fiscale dispose, dans son seul intérêt, de la garantie de solidarité des héritiers entre eux.
Ainsi, et contrairement à la position soutenue par M. [C] [E] dans ses écritures, le seul fait que l’administration fiscale bénéficie de cette solidarité entre cohéritiers et dispose de voies d’exécution sur les biens indivis n’enlève pas à cette dette fiscale son caractère personnel à l’égard de chaque héritier.
Cette dette fiscale n’est donc pas incluse dans le passif de la succession que le protocole d’accord signé le 30 octobre 2020 met intégralement à la charge de Mme [V].
Mme [V] a payé l’intégralité des droits de succession :
– droits initialement calculés (déclaration du 30 octobre 2001) : 221 613 euros (126 981 euros pour Mme [V] et 47 316 euros pour chacun des deux enfants) ;
– droits complémentaires (rectification fiscale) :
19 221 euros (12 437 euros pour Mme [V] et 3 392 euros pour chacun des deux enfants).
Chaque enfant doit donc rembourser la quote-part de droits de succession payée par Mme [V] à leur place, soit la somme totale de 50 708 euros.
La cour relève que M. [AD] [J] se reconnaît lui-même débiteur envers Mme [V] de la somme de 50 708 euros au titre de ces droits.
S’agissant des pénalités et intérêts de retard payés à l’administration fiscale, Mme [V] n’est pas fondée à les imputer à ses cohéritiers.
En effet, il ressort des pièces versées aux débats que Mme [V], veuve du défunt avec qui elle cohabitait, disposait de tous les documents et de toutes les informations pour procéder seule à la déclaration de succession.
Tout retard dans le dépôt de la déclaration de succession lui est donc personnellement imputable. Mme [V] n’apporte pas la preuve d’un quelconque agissement de ses cohéritiers l’ayant placée dans l’impossibilité de procéder à la déclaration de succession dans le délai requis par la loi fiscale.
De surcroît, les pénalités afférentes au paiement des droits complémentaires résultent de la faute personnelle de Mme [V] qui a omis de déclarer la somme de 75 378 euros à l’administration fiscale.
S’agissant des pénalités pour retard de paiement, elles sont imputables à Mme [V] en sa qualité d’héritière et il lui appartenait de régler les sommes dues dans les délais requis par la loi, avant de se retourner le cas échéant contre ses cohéritiers pour en obtenir le remboursement.
En particulier, Mme [V] ne produit aucune information sur sa situation patrimoniale de l’époque établissant l’impossibilité pour elle de régler ces sommes.
M. [C] [E] et M. [AD] [J] ne sont donc pas tenus de rembourser ses frais et pénalités de retard à Mme [V].
Le jugement déféré sera donc confirmé seulement en ce qu’il a condamné M. [C] [E] et M. [J] à payer chacun à Mme [V] les droits dus de 50 708 euros de droits.
Le jugement sera cependant infirmé en ce qu’il a condamné M. [C] [E] et M. [AD] [J] à payer chacun à Mme [V] 4 501 euros de pénalités et 176,47 euros de pénalités sur rappel de droits.
2) Sur les demandes afférentes à l’emprunt contracté par Mme [V],
Mme [V] soutient avoir dû emprunter la somme de 240 000 euros le 14 décembre 2015 pour payer les droits de ses cohéritiers d’un montant total de 101 416 euros (= 50 708 euros x 2).
La cour ne partage pas l’analyse du jugement déféré qui a conclu à l’existence d’une créance de 59 820,36 euros de Mme [V] sur MM. [C] [E] et [AD] [J].
En effet, Mme [V] ne verse aux débats aucune pièce établissant qu’elle se trouvait dans l’obligation de contracter l’emprunt dont elle produit le tableau d’amortissement (pièce n°44) et dont elle demande le remboursement des intérêts payés par ses cohéritiers.
Mme [V] est cependant fondée à demander à M. [C] [E] et à M. [AD] [J] de lui payer les intérêts au taux légal :
– à compter du 30 octobre 2002 sur la somme de 47 316 euros chacun ;
– à compter du 11 décembre 2008 sur la comme de 3 392 euros chacun.
Le jugement déféré sera donc infirmé en ce sens.
B) Sur les indemnités pour dévalorisation des biens indivis,
L’article 815-13 du code civil dispose :
« Lorsqu’un indivisaire a amélioré à ses frais l’état d’un bien indivis, il doit lui en être tenu compte selon l’équité, eu égard à ce dont la valeur du bien se trouve augmentée au temps du partage ou de l’aliénation. Il doit lui être pareillement tenu compte des impenses nécessaires qu’il a faites de ses deniers personnels pour la conservation desdits biens, encore qu’elles ne les aient point améliorés.
Inversement, l’indivisaire répond des dégradations et détériorations qui ont diminué la valeur des biens indivis par son fait ou par sa faute. »
1) Concernant l’immeuble [Adresse 1],
M. [C] [E] et M. [AD] [J] sollicitent la condamnation de M. [F] [E] à rapporter à l’indivision la somme de 28 365 euros/an de perte locative annuelle depuis le départ du locataire SARL Palawai en août 2005.
Contrairement à la position soutenue par M. et Mme [F] [E], cette demande n’est pas irrecevable sur le fondement de l’article 564 du code de procédure civile pour avoir été formée la première fois en cause d’appel. En effet, en matière de succession, les parties étant respectivement demanderesses et défenderesses quant à l’établissement de l’actif et du passif, toute demande doit être considérée comme une défense à une prétention adverse.
MM. [C] [E] et [AD] [J], propriétaires indivis de l’immeuble, n’apportent pas la preuve de ce qu’ils auraient cherché à remettre en location ce bien indivis et qu’ils se seraient heurtés au refus de M. [F] [E] d’y procéder à partir d’août 2005.
Ils ne sont pas fondés à reprocher à M. [F] [E] une attitude passive dans la gestion du bien alors qu’eux-mêmes n’ont pris aucune initiative positive pour gérer cet immeuble indivis. Leur demande d’indemnisation sera donc rejetée.
La demande formée contre M. [F] [E] par M. [AD] [J] de payer une indemnité complémentaire de 40 000 euros pour la « dégradation accélérée des locaux vacants » n’est pas davantage justifiée et sera donc rejetée.
2) Concernant la perte de valeur du fonds de commerce Yam Sud,
Le jugement déféré a fait droit à la demande formée par Mme [V] et M. [F] [E] et a condamné M. [C] [E] à leur payer la somme égale à la différence entre 650 000 euros et le prix de vente aux enchères après licitation.
C’est à tort que Mme [V] soutient dans ses écritures que M. [C] [E] et M. [AD] [J], appelants principaux, n’ont pas formé appel contre cette disposition du jugement.
M. [C] [E] conclut à l’infirmation du jugement de ce chef et sollicite la condamnation de Mme [V] et de M. [F] [E] à lui payer la somme égale la somme de 1 523 000 euros correspondant à la perte totale du fonds de commerce Yam Sud.
Il convient en premier lieu de rappeler que l’expert judiciaire M. [JJ]-[X] a évalué la valeur du fonds de commerce à la somme de 1 523 000 euros à la date du 21 octobre 2009.
Cette évaluation par l’expert a pris en compte tous les éléments comptables relatifs à l’exploitation commerciale du fonds, et notamment le chiffre d’affaires moyen entre 2002 et 2007 égal à 7 870 458 euros TTC. L’expert a également appliqué le coefficient habituellement utilisé par les spécialistes de l’évaluation des fonds de garage et de concessions de vente de véhicules selon les pratiques usuelles d’évaluation de ce secteur d’activité.
La démarche et le calcul de l’expert, qui a parfaitement pris en compte les dires des parties lors des échanges contradictoires, sont parfaitement explicitées dans son rapport dont l’analyse et les conclusions sur la valeur du fond de 1 523 000 euros sont adoptées par la cour.
La cour relève en outre que Mme [V] elle-même faisait valoir devant l’expert judiciaire un rapport d’expertise concluant à une valeur du fonds de 1 843 000 euros et une valeur de la SARL Yan Sud de 1 817 000 euros (rapport d’expertise du 21 octobre 2009 page 10).
Le simple fait qu’un cabinet d’expertise comptable intervenant à titre privé à la demande de M. [F] [E] ait proposé une valeur vénale de 1 052 000 euros par courrier du 10 septembre 2009 ne suffit pas à contredire les conclusions d’un expert judiciaire qui a calculé cette valeur vénale de manière contradictoire, impartiale et parfaitement documentée.
La comparaison faite par M. [F] [E] avec le prix de vente de la concession Yamaha de [Localité 39] n’est absolument pas pertinente au regard de la différence de bénéfice annuel entre les deux sociétés qui constitue le seul facteur pertinent de valeur, indépendamment de la valeur du chiffre d’affaires qui peut être élevée tout en générant un bénéfice faible ou nul.
De même, l’allégation selon laquelle « sur cette période le marché des deux roues avait baissé, en règle générale, entre 2006 et 2013 de 38% » n’est pas démontrée et ne saurait contredire les conclusions de l’expert judiciaire qui s’est fondé sur les données comptables réelles de l’activité du fonds qui sont seules pertinentes pour en établir la valeur.
A défaut d’élément contraire produit susceptible de la remettre en cause, la cour fixe donc la valeur du fonds de commerce Yam Sud à 1 523 000 euros à la date du 21 octobre 2009.
M. [F] [E] et Mme [V] ne justifient aucunement avoir tenté de vendre ce fonds de commerce ancien et florissant, disposant d’un contrat de concession Yamaha extrêmement valorisant, à son prix de marché établi par l’expert à hauteur de 1 523 000 euros.
La cour observe en outre que le refus de vendre le fonds à la SARL Yam Sud entre 2004 et 2007 s’explique par le refus de Mme [V] manifesté lors du vote en assemblée générale.
Entre 2008 et 2010, l’assemblée générale de la SARL Yam Sud n’a plus été saisie de ce projet de vente du fonds.
Par courrier recommandé avec avis de réception du 24 octobre 2011, la SARL Yam Sud a proposé à Mme [V], à M. [C] [E] et à M. [AD] [J] d’acquérir le fonds de commerce au prix de 1 523 000 euros.
M. et Mme [F] [E] soutiennent dans leurs écritures que l’achat de ce fonds par la SARL Yam Sud « nécessitait que les porteurs de parts sociales empruntent 800 000 euros ; ils l’ont refusé ».
Outre que cette assertion n’est nullement démontrée par les pièces versées au dossier, il ressort bien au contraire des pièce comptables de la SARL Yam Sud que cette société disposait bien des fonds propres nécessaires à cette acquisition avant que ces fonds ne soient intégralement distribués aux associés le 25 juin et le 17 décembre 2012.
L’existence d’un désaccord entre héritiers empêchant la cession du fonds de commerce à la SARL Yam Sud n’autorisait pas pour autant M. [F] [E] à en transférer frauduleusement la valeur à une nouvelle société spécialement créée à cette fin.
Le fait de ne pas avoir essayé de vendre ce fonds à un prix proche de sa valeur de marché constitue une première faute grave de gestion du bien indivis que M. [C] [E] est fondé à reprocher à ses cohéritiers ainsi qu’il l’a clairement notifié à M. [F] [E] dans son courrier du 14 février 2012.
Outre le fait qu’ils n’ont jamais recherché d’acquéreur en dehors de leur cercle familial et amical, MM. [F] [E] et [H] [TX] n’ont jamais donné une quelconque explication au fait étrange que la valeur vénale à dire d’expert judiciaire de 1 523 000 euros soit brutalement rabaissée à celle de 650 000 euros.
Au lieu de mettre à profit sa longue expérience dans cette activité et son réseau professionnel ancien et étoffé, M. [F] [E] a préféré se désengager précipitamment de ses affaires au moment même où le fonds de commerce et la société exigeaient de sa part qu’il prenne un soin particulier à transmettre le fonds dans les meilleures conditions.
Au même moment, alors que M. [F] [E] manifestait sa volonté d’interrompre son activité professionnelle et de partir en retraite, son beau-frère M. [H] [TX], gérant salarié de la SARL Yam Sud, remettait sa démission lors de l’assemblée générale du 25 juin 2012 avec effet différé au 31 décembre 2012.
Tout en se préparant de concert à quitter la SARL Yam Sud, MM. [F] [E] et [H] [TX] ont sciemment organisé la cession à vil prix du fonds de commerce.
Ce dernier projet a d’abord pris la forme d’une proposition de rachat du fonds de commerce au prix de 650 000 euros et des parts sociales de la SARL Yam Sud par M. [H] [TX] et M. [R] [T] au prix de 504 000 euros, à laquelle s’ajoutait la distribution de 2 500 000 euros de capitaux propres aux associés.
Au regard de la valeur proposée de cession du fonds Yam Sud limitée à 650 000 euros sans aucune explication à une telle réfaction de la valeur fixée par l’expert, M. [C] [E] était parfaitement fondée à s’opposer à la cession envisagée.
Contrairement à l’argument opposé par M. [F] [E] et retenu par le jugement déféré, aucune preuve n’est apportée par ce dernier que cet abaissement du prix était le seul moyen de conserver la concession de la marque Yamaha.
En effet, le maintien de l’agrément Yamaha est sans aucun lien avec la fixation de prix de cession du fonds de commerce.
Il apparaît que M. [F] [E] s’est livré à une forme de chantage envers ses coindivisaires en leur imposant le choix entre une cession à vil prix de 650 000 euros et une perte totale du fonds.
Contrairement au motif erroné du jugement déféré sur ce point, M. [F] [E] n’a pas commis cette faute en qualité de gérant de la SARL Yam Sud mais en qualité de propriétaire indivis du fonds de commerce dont il assumait la gestion et dont il a organisé les modalités de cession.
Les élément du dossier démontrent que suite au refus de M. [C] [E] de céder le fonds au prix proposé, MM. [H] [TX] et [F] [E] ont organisé la cessation d’activité de la SARL Yam Sud et informé la société Yamaha Motor France d’une situation qui ne pouvait qu’entraîner la rupture du contrat de concession constituant l’élément essentiel de la valeur du fonds de commerce.
MM. [F] [E] et [H] [TX] avaient pris soin d’informer la société Yamaha Motor France de leurs décisions de retrait afin de préparer l’attribution de la concession Yamaha à la nouvelle SARL Saga exerçant sous le nom commercial Yam 34 et créée pour développer une activité commerciale strictement identique à celle de la SARL Yam Sud.
Le courrier adressé le 30 juillet 2012 par la SA Yamaha Motor France à la SARL Yam Sud confirme que M. [F] [E] a agi bien en amont de l’opération de manière à obtenir de la part de Yamaha le transfert de la concession à la nouvelle société créée par M. [H] [TX] et M. [R] [T].
Leur manoeuvre a été rapidement couronnée de succès avec le courrier de M. [M] [W] du 18 décembre 2012 confirmant que la SA Yamaha Motor Home accordait sa confiance à la nouvelle entité et transférerait la concession de la SARL Yam Sud à la nouvelle société à l’expiration du contrat le 31 décembre 2013.
L’assemblée générale de la SARL Yam Sud a alors logiquement voté le 24 juin 2013 la résiliation du contrat de location-gérance du fonds de commerce et la cessation de son activité devenue impossible.
En continuité directe de la cessation d’activité de la SARL Yam Sud et de la disparition de fait du fonds de commerce de vente et réparation de motocyclettes sous concession Yamaha, M. [H] [TX] (beau-frère de M. [F] [E]) a créé avec M. [R] [T] une nouvelle SARL Saga qui a été immatriculée au RCS le 13 novembre 2013 et exerce sous l’enseigne commerciale Yam 34.
L’ensemble de ces éléments démontrent que M. [F] [E] et Mme [V] ont sciemment dépouillé la SARL Yam Sud de tous ses actifs et qu’ils ont délibérément laissé le fonds de commerce perdre toute valeur, notamment en lui faisant perdre la concession Yamaha.
La SARL Saga nouvellement créée a ainsi pu démarrer une activité commerciale strictement identique à celle antérieurement développée auparavant à seulement quelques kilomètres de distance par la SARL Yam Sud grâce au transfert de la concession Yamaha et de l’intégralité du personnel de la SARL Yam Sud.
Contrairement aux motifs erronés du jugement déféré sur ce point, il ressort des précédents développements que M. [E] [C] était légitime à refuser la cession par l’indivision du fonds de commerce au prix de 650 000 euros alors que l’expert judiciaire avait évalué ce fonds à hauteur de 1 523 000 euros.
En effet, la perte du contrat de concession Yamaha n’est nullement imputable au refus légitime de M. [C] [E] de vendre le fonds à vil prix.
Cette perte du contrat de concession Yamaha a été organisée par M. [F] [E] pour transférer le bénéfice de la concession à la SARL Saga créée pour la circonstance qui a poursuivi les mêmes activités que la SARL Yam Sud sans jamais payer le fonds de commerce dont elle s’est accaparée de fait.
Le chiffre d’affaire de l’exercice 2020 de la SARL Saga s’est élevé à 6 569 686 euros, le bénéfice étant de 184 987 euros avec des disponibilités de 1 432 829 euros. Ces résultats confirment le transfert clandestin de la valeur commerciale du fonds de commerce de la SARL Yam Sud au profit de la SARL Saga.
Il résulte de ces développement que M. [C] [E] était parfaitement légitime à s’opposer à un projet de cession qui était fortement préjudiciable à l’indivision. Le jugement déféré sera donc infirmé en sa disposition ayant condamné M. [C] [E] à indemniser l’indivision à hauteur de 650 000 euros et Mme [V] déboutée de ce chef de demande.
Il ressort bien au contraire des éléments du dossier que M. [C] [E] a défendu les intérêts de l’indivision et que c’est son cohéritier M. [F] [E] qui a délibérément détruit le fonds de commerce indivis en transférant ses éléments de valeur et son activité économique au sein d’une nouvelle société Saga.
Au regard de l’absence d’activité depuis 2012 de la SARL Yam Sud et du développement d’une activité commerciale strictement identique par la SARL Saga installée à quelques kilomètres sous le nom Yam 34, avec le bénéfice de la concession Yamaha, la valeur du fonds de commerce indivis est devenue nulle.
L’indivision issue de la société de fait existant entre [P] [E] et M. [F] [E] a donc subi un préjudice égal à la valeur du fonds de commerce réduite à néant en conséquence directe des agissements frauduleux de M. [F] [E] qui a organisé la disparition de ce fonds.
M. [F] [E] devra donc réparer le préjudice subi par la société de fait à hauteur de 1 523 000 euros.
Le fonds de commerce n’ayant plus aucune valeur, il convient d’infirmer le jugement en sa disposition en ayant ordonné la licitation.
3) Les demandes formées contre Mme [V] en sa qualité d’usufruitière,
M. [C] [E] reproche à Mme [V] de ne pas avoir assumé les « réparations d’entretien » des biens dont elle est usufruitière conformément aux articles 605 et 606 du code civil.
Ses conclusions ne précisent cependant pas la nature précise des « réparations d’entretien » qu’il reproche à Mme [V] d’avoir omis de réaliser :
– sur les parts sociales de la SARL Yam Sud ;
– sur le fonds de commerce indivis ;
– sur la « société de fait [E] [G] ».
En l’absence de démonstration d’un manquement commis par Mme [V], les demandes dirigées contre elle sur le fondement des articles 605 et 606 du code civil ne peuvent qu’être rejetées.
4) Concernant les parts de la SARL Yam Sud,
M. [AD] [J] sollicite la condamnation de M. [F] [E] à payer « une indemnité correspondant à la valeur de la société Yam Sud avant résiliation du contrat avec Yamaha Motor France ».
Le montant de l’indemnité sollicitée n’est pas précisé par M. [AD] [J] et les éléments versés aux débats ne mettent pas d’établir que la SARL Yam Sud conserve une valeur patrimoinile à ce jour au regard des péripéties économiques précédemment évoquées.
La cour rejette donc cette demande.
5) Sur la demande d’indemnité formée par M. [F] [E] et Mme [Z] [TX] épouse [E] contre M. [C] [E] et M. [AD] [J],
En cause d’appel, M. [F] [E] et Mme [Z] [TX] épouse [E] forment la demande nouvelle de condamnation solidaire de M. [C] [E] et de M. [AD] [J] « à leur payer la moitié (puisqu’ils détiennent 50% de l’immeuble) de la différence entre le prix de licitation qui sera obtenu et la somme de 705 000 euros correspondant à la vente amiable qui aurait pu être concrétisée. »
En matière de partage de succession, les parties étant respectivement demanderesses et défenderesses quant à l’établissement de l’actif et du passif, toute demande doit être considérée comme une défense à une prétention adverse. En conséquence, cette demande nouvelle formée par M. et Mme [E] est recevable conformément à l’article 564 du code de procédure civile.
Les intimés prétendent rapporter la preuve de ce que M. [C] [E] et M. [AD] [J] auraient commis une faute délictuelle en empêchant la vente amiable du bien par l’indivision qui aurait subi un préjudice financier du fait de cette faute.
La cour relève en premier lieu que la vente d’un bien indivis requiert le consentement de tous les indivisaires et que sauf circonstances particulières à démontrer, aucun indivisaire n’est tenu de consentir à la vente d’un bien indivis avant l’issue du partage.
En l’espèce, M. [F] [E] et Mme [Z] [TX] épouse [E] ne produisent aucune expertise immobilière de la valeur du bien qui leur aurait permis, ainsi qu’aux autres co-indivisaire, d’envisager la vente de ce bien en disposant des éléments nécessaires pour en apprécier l’opportunité.
M. [C] [E] a accepté l’offre d’achat à 1 500 000 euros par lettres officielles adressées à ses cohéritiers par son conseil le 27 novembre 2018, le 31 janvier et le 19 février 2019.
M. [AD] [J] a transmis un courrier de son conseil du 4 décembre 2018 qui a permis la signature d’un compromis le 13 mai 2019 par tous les indivisaires avec la SARL Les Jardins de l’Hort au prix de 1 500 000 euros.
L’acceptation de cette offre par M. [C] [E] et par M. [AD] [J] démontre à elle seule que ces derniers n’ont opposé aucun refus de principe à une vente à laquelle ils n’étaient nullement obligés de consentir.
Aucune faute ne peut leur être reprochée pour avoir refusé de vendre le même bien (évalué par l’expert judiciaire en octobre 2009 à 656 300 euros) sans connaître sa valeur vénale actualisée à une valeur bien moindre que le prix accepté le 13 mai 2019 à hauteur de 1 500 000 euros.
Ainsi, aucune circonstance particulière en l’espèce ne permet de qualifier de fautif l’exercice par M. [C] [E] et M. [AD] [J] de leur liberté de ne pas accepter de vendre un bien indivis s’ils estimaient que le prix proposé n’en reflétait pas la vraie valeur.
Cette faute est d’autant moins caractérisée que M. [F] [E] et Mme [Z] [TX] épouse [E] n’ont fait procéder à aucune évaluation du bien immobilier permettant d’éclairer les autres indivisaires sur sa valeur vénale.
La demande de dommages-intérêts formée par M. [F] [E] et Mme [Z] [TX] épouse [E] contre M. [C] [E] et M. [AD] [J] sera donc rejetée en l’absence de toute faute imputable à ces derniers.
V ‘ Les demandes concernant le partage des actifs indivis
A ‘ Sur les demandes de licitation,
L’article 1377 du code de procédure civile, issu du décret n°2006-1805 du 23 décembre 2006 et applicable aux successions ouvertes non encore partagées au 1er janvier 2007, dispose :
« Le tribunal ordonne, dans les conditions qu’il détermine, la vente par adjudication des biens qui ne peuvent être facilement partagés ou attribués. »
Il appartient aux demandeurs M. [F] [E], Mme [Z] [TX] épouse [E] et Mme [V] de démontrer que les biens ne peuvent pas être commodément partagés en nature en raison principalement de leur consistance particulière, c’est-à-dire de leur nombre, de leurs valeurs respectives et de la nature plus ou moins divisible de chacun d’eux permettant ou non la constitution d’autant de lots que le tirage au sort l’exige.
Sur la demande de licitation de l’immeuble de [Localité 36],
M. [F] [E], Mme [Z] [TX] épouse [E] et Mme [V] ne démontrent pas que les biens formant l’actif successoral ne peuvent pas être facilement partagés ou attribués au sens de l’article 1377 du code de procédure civile précité.
Bien au contraire, l’existence de plusieurs immeubles indivis et le nombre réduit d’héritiers rend parfaitement possible le partage en nature par tirage au sort de lots homogènes.
Les faits rapportés tels que la dégradation des locaux et les péripéties liées au séjour de gens du voyage sont inopérants pour soutenir juridiquement la demande de licitation.
Les arguments développés relatifs à l’impossibilité de vendre l’immeuble indivis en raison de la mésentente entre les indivisaires quant aux modalités de vente sont inopérants pour motiver une demande de licitation de l’immeuble qui ne peut être fondée que sur les dispositions de l’article 1377 du code de procédure civile.
L’immeuble de [Localité 36] doit donc être englobé dans les actifs à partager et le jugement sera confirmé en ce qu’il a fixé sa valeur à 656 300 euros qu’aucune partie ne remet en cause dans ses conclusions d’appel.
En conséquence, la licitation demandée par M. [F] [E] ne sera pas ordonnée.
Sur la demande de licitation des biens situés à [Localité 43],
M. [F] [E], Mme [Z] [TX] épouse [E] et Mme [V] ne démontrent pas que ces biens formant l’actif successoral de la succession de [U] [E] ne peuvent pas être facilement partagés ou attribués au sens de l’article 1377 du code de procédure civile précité
Il ressort au contraire de leur description par l’expert judiciaire que ces biens sont partageables en nature et peuvent être aisément répartis en lots en vue du tirage au sort.
Cette demande de licitation sera donc rejetée.
B ‘ Sur les demandes d’attribution préférentielle
Aux termes de l’article 832 alinéa 6 et suivants dans sa rédaction applicable à la date d’ouverture de la succession :
« Le conjoint survivant ou tout héritier copropriétaire peut également demander l’attribution préférentielle :
‘ de la propriété ou du droit au bail du local qui lui sert effectivement d’habitation, s’il y avait sa résidence principale à l’époque du décès et du mobilier le garnissant ;
‘ de la propriété ou du droit au bail du local à usage professionnel servant effectivement à l’exercice de sa profession et des objets mobiliers à usage professionnels garnissant ce local ;
‘ (‘)
L’attribution préférentielle peut être demandée conjointement par plusieurs successibles. L’attribution préférentielle de la propriété du local et du mobilier le garnissant visée au septième alinéa est de droit pour le conjoint survivant.
(‘)
A défaut d’accord amiable, la demande d’attribution préférentielle est portée devant le tribunal, qui se prononce en fonction des intérêts en présence. »
1) Les demandes d’attribution formées par Mme [V]
En l’espèce, il n’est pas contesté qu’à la date du décès de son époux, Mme [V] avait sa résidence principale dans l’appartement [Adresse 5] à [Localité 38]. L’attribution préférentielle de ce bien à l’époux survivant est donc de droit.
Le jugement déféré sera donc confirmé en sa disposition ayant attribué ce bien à Mme [V].
La demande d’attribution préférentielle du bien immobilier [Adresse 1] [Adresse 25] (et [Adresse 2]) à [Localité 38] est devenue sans objet en raison de la vente de ce bien par les héritiers intervenue le 18 octobre 2019.
Mme [V] renonce en cause d’appel à l’attribution préférentielle des parcelles de terres situées à [Localité 43] ordonnée par le tribunal.
En conséquence, le jugement déféré sera infirmé en ses dispositions ayant attribué à Mme [V] les biens immobilier dénommés [Adresse 1] situés [Adresse 25] à [Localité 38] et les terres de [Localité 43].
2) Les demandes d’attribution formées par M. [C] [E]
Le principe d’égalité entre héritiers invoqué par M. [C] [E] au soutien de sa demande commande au contraire de ne pas ordonner de licitation en l’espèce. Le risque d’évolution de la valeur de l’immeuble ne constitue pas davantage un motif prévu par l’article 832 du code civil.
A défaut de respecter les conditions à remplir prévues par l’article 832 du code civil, M. [C] [E] sera débouté de sa demande d’attribution préférentielle de l’immeuble de [Localité 36].
Il est enfin rappelé que sa demande portant sur l’immeuble [Adresse 1] à [Localité 38] est devenue sans objet suite à la vente de ce bien.
3) Les demandes d’attribution formées par M. et Mme [F] [E]
La cour constate que M. et Mme [F] [E] renoncent en cause d’appel à l’attribution préférentielle du bien immobilier [Adresse 41] à laquelle avait fait droit le tribunal. Le jugement déféré sera donc infirmé de ce chef.
4) Les demandes d’attribution formées par M. [J]
M. [AD] [J] sollicite l’attribution préférentielle des terrains de [Localité 43], l’appartement [Adresse 18] à [Localité 22] et l’appartement des [Adresse 10] à [Localité 22].
En matière de partage de succession, les parties étant respectivement demanderesses et défenderesses quant à l’établissement de l’actif et du passif, toute demande doit être considérée comme une défense à une prétention adverse. Cette demande nouvelle de M. [AD] [J] est donc recevable.
Toutefois, la cour constate que ces demandes d’attribution préférentielle par M. [AD] [J] ne sont motivées par aucun moyen de fait ou de droit susceptible d’y faire droit. Elles seront donc rejetées.
V ‘ Les demandes accessoires
Le jugement déféré sera infirmé en ses dispositions ayant prononcé des condamnation contre M. [C] [E] sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
Toutes les parties à l’instance en partage succombent partiellement en appel.
Les dépens de première instance et d’appel seront donc déclarés frais privilégiés de partage.
L’équité commande en outre de ne pas faire application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS,
La cour,
Infirme partiellement le jugement déféré ;
Statuant à nouveau sur les chefs infirmés tout en reprenant les dispositions confirmées du jugement pour une meilleure compréhension du dispositif du présent arrêt,
Rappelle que l’ouverture des opérations de comptes, liquidation et partage de la succession de [P] [E] décédé le 3 avril 2002 a été ordonnée par jugement du tribunal de grande instance de Montpellier du 28 août 2008 ;
Ordonne, préalablement aux opérations de comptes, liquidation et partage de la succession de [P] [E], qu’il soit procédé au partage judiciaire :
– de l’indivision successorale de [U] [E] décédé le 22 octobre 1991 ;
– de l’indivision conventionnelle existante entre [P] [E], M. [F] [E] et Mme [Z] [TX] épouse [E] ;
Dit que les opérations de liquidation de l’indivision post-communautaire de [P] [E] et de Mme [Z] [V] veuve [E] suite au changement de régime matrimonial du 27 novembre 1997 seront réalisées par le notaire liquidateur désigné conformément aux dispositions du présent arrêt ;
Commet le président de la chambre des notaires de l’Hérault ou tout notaire délégataire pour procéder à ces opérations ;
Nomme le juge de la mise en état de la chambre civile du tribunal judiciaire de Montpellier en qualité de juge commissaire pour surveiller ces opérations et faire rapport en cas de difficulté ;
Dit qu’en cas d’empêchement des juge et notaire commis, il sera procédé à leur remplacement par ordonnance du président rendue sur simple requête ;
Dit que les droits successoraux de Mme [Z] [V] veuve [E] sur la succession de [P] [E] sont d’un quart en pleine propriété et de trois quarts en usufruit et les droits de M. [C] [E] et de M. [AD] [J] de trois huitièmes en nue-propriété pour chacun ;
Dit que Mme [Z] [V] veuve [E] ne peut pas cumuler ses droits successoraux définis par les articles 757, 757-1 et 757-2 du code civil avec la libéralité qui lui a été consentie par [P] [E] ;
Dit que les droits de [P] [E], de M. [F] [E] et de M. [B] [E] dans la succession de leur père [U] [E] seront d’un tiers chacun en pleine propriété ;
Dit que le protocole signé par les héritiers le 30 octobre 2002 n’a pas la valeur d’une transaction ;
Constate que les biens suivants sont des biens de la communauté ayant existé entre [P] [E] et Mme [Z] [V] veuve [E] :
– appartement T3 formant le lot n°10 de l’immeuble [Adresse 40] [Adresse 40] et [Adresse 23] cadastré BI n°[Cadastre 8] sur la commune de [Localité 38] ;
– appartement T1 formant le lot n°2074 avec cellier lot n°2055 et parking lot n°5094 de l’immeuble [Adresse 10] » cadastré BO n°[Cadastre 3] à [Localité 22] ;
– appartement T1 [Adresse 18] lot n°226 et cellier lot n°262 située [Adresse 18] cadastré HX n°[Cadastre 21] à [Localité 22] ;
– deux lots n°101 cellier et 128 garage de la [Adresse 26] [Adresse 26] cadastré BI n°[Cadastre 7] à [Localité 38] ;
Constate qu’il n’existe aucune créance ni récompense à liquider entre cette communauté et [P] [E] ou Mme [Z] [V] veuve [E] ;
Constate que l’appartement T3 [Adresse 5] au [Adresse 5] cadastré BH n°[Cadastre 16] à [Localité 38] formant le lot n°180 et garage lot n°210 constituait un bien indivis à [P] [E] (50%) et à Mme [Z] [V] (50%) ;
Fixe la valeur des biens immobiliers à partager à hauteur des sommes suivantes :
– appartement de l’immeuble [Adresse 40] à [Localité 38] (34) : 120 700 euros ;
– appartement de la [Adresse 10] à [Localité 22] (34) : 80 300 euros ;
– appartement de la [Adresse 18] à [Localité 22] (34) : 73 900 euros ;
– deux lots n°101 et 128 de la [Adresse 26] à [Localité 38] (34) : 15 800 euros ;
– appartement de la [Adresse 5] à [Localité 38] (34) : 234 700 euros ;
– bâtiment avec atelier et garage cadastré BW n°[Cadastre 4], [Cadastre 11], [Cadastre 12] et [Cadastre 13] et CY n°[Cadastre 24] sur la commune de [Localité 36] (34) : 656 300 euros ;
– parcelles de terre cadastrées section F n°[Cadastre 17], [Cadastre 27], [Cadastre 28] et [Cadastre 29] à [Localité 43] (12) : 1 100 euros ;
Fixe la date de jouissance divise des biens partagés à la date du présent arrêt ;
Ordonne le rapport par Mme [Z] [V] veuve [E] à l’actif de la succession de [P] [E] des biens suivants :
– 5 000 parts de la SCI Ferrière ;
– 75 378 euros représentant la créance de [P] [E] sur la société de fait ;
– 156 parts sociales de la SARL Neptune Loisirs (soit 260 parts au total) ;
– 1 140 506,36 euros correspondant au report à nouveau de la SARL Yam Sud qui lui a été distribué ;
Constate que Mme [Z] [V] veuve [E] a recelé 156 parts sociales de la SARL Neptune Loisir ainsi que la somme de 1 140 506,36 euros au préjudice de M. [C] [E] et de M. [AD] [J] ;
Dit que Mme [Z] [V] veuve [E] devra rapporter ces biens à la succession de [P] [E] assortis :
– des dividendes et revenus perçus des 156 parts de la SARL Neptune Loisir depuis le 3 avril 2002 ;
– des intérêts au taux légal sur la somme de 1 140 506,36 euros à compter du 17 décembre 2012 ;
Dit que Mme [Z] [V] veuve [E] ne pourra prétendre à aucune part sur ces 156 parts sociales de la SARL Neptune Loisir de même que sur la somme de 1 140 506,36 euros qu’elle a recelées ;
Condamne M. [C] [E] et M. [AD] [J] à payer chacun à Mme [Z] [V] veuve [E] la somme de 50 708 euros (soit 101 408 euros au total) en remboursement des droits de succession assortie des intérêts au taux légal qui seront capitalisés en application de l’article 1154 ancien du code civil :
– sur la somme de 47 316 euros chacun à compter du 30 octobre 2002 ;
– sur la somme de 3 392 euros chacun à compter du 11 décembre 2008 ;
Condamne M. [F] [E] à payer la somme de 1 523 000 euros de dommages-intérêts à la société de fait ayant existé entre [P] [E] (50%) et M. [F] [E] et Mme [Z] [TX] épouse [E] (50%) ;
Dit n’y avoir lieu à licitation du fonds de commerce de vente et réparation de motocyclettes exploité [Adresse 41] à [Localité 36] ;
Déboute M. [F] [E] et Mme [Z] [TX] épouse [E] de leur demande de dommages-intérêts contre M. [C] [E] et contre M. [AD] [J] ;
Rejette toutes les demandes de licitation de biens indivis formées par les parties ;
Attribue à Mme [Z] [V] veuve [E] l’appartement [Adresse 5] à [Localité 38] ;
Déboute les parties de toutes leurs autres demandes d’attribution préférentielles ;
Dit que les dettes résultant du présent arrêt pourront, par compensation, être imputées sur la part des débiteurs lors des opérations de partage ;
Dit que les dépens de première instance et d’appel, en ce compris les frais d’expertise judiciaire, entreront en frais privilégiés de partage ;
Dit n’y avoir lieu à application de l’article 700 du code de procédure civile ;
Déboute les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.
La greffière, Le conseiller faisant fonction de président de chambre,