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REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D’APPEL DE PARIS
PÔLE 5 – CHAMBRE 16
Chambre commerciale internationale
ARRET DU 06 SEPTEMBRE 2022
RECOURS EN ANNULATION
(n° 73 /2022 , 7 pages)
Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 21/04655 – N° Portalis 35L7-V-B7F-CDIKO
Décision déférée à la Cour :
Sentence arbitrale rendue à Paris le 08 février 2021 par la CCI (N°25088/DDA)
DEMANDERESSE AU RECOURS :
Société NANTONG DEEP SEA FISHERIES CO. LTD
Société de droit chinois, immatriculée au registre du commerce sous le n°9132060013829470XB,
ayant son siège social : [Adresse 1]
su (RÉPUBLIQUE POPULAIRE DE CHINE)
prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés audit siège,
Représentée par Me Frédérique ETEVENARD, avocat postulant du barreau de PARIS, toque : K0065 et assistée par Me Saadia BHATTY, avocat plaidant du barreau de PARIS,
DÉFENDERESSE AU RECOURS :
Société CRISTAL FISH SA
société de droit mauritanien immatriculée au registre du commerce de Mauritanie sous le n°10515,
ayant son siège social : [Adresse 2])
prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés audit siège,
Représentée par Me Matthieu BOCCON GIBOD de la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES, avocat postulant du barreau de PARIS, toque : C2477
Assistée par Me Laurent SABLE, de la SCP UGGC AVOCATS, avocat plaidant du barreau de PARIS et Me Yarba OULD AHMED SALED, avocat plaidant du barreau de MAURITANIE
COMPOSITION DE LA COUR :
L’affaire a été débattue le 14 Juin 2022, en audience publique, devant la Cour composée de :
M. François ANCEL, Président
Mme Fabienne SCHALLER, Conseillère
Mme Laure ALDEBERT, Conseillère
qui en ont délibéré, un rapport a été présenté à l’audience par Mme Fabienne SCHALLER dans les conditions prévues par l’article 804 du code de procédure civile.
Greffier, lors des débats : Mme Najma EL FARISSI
ARRÊT :
– contradictoire
– par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
– signé par Fabienne SCHALLER, conseillère faisant fonction de Présidente et par Najma EL FARISSI, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
I/ FAITS ET PROCÉDURE
1- La société NANTONG DEEP SEA FISHERIES CO. LTD (ci-après désignée la société « Nantong ») est une société de droit chinois spécialisée dans la construction de navires de pêche.
2- La société CRISTAL FISH SA (ci-après désignée la société « Cristal ») est une société de droit mauritanien intervenant dans le secteur de la pêche.
3- Elles ont conclu le 21 septembre 2018 une convention de partenariat (ci-après désignée la « Convention ») qui prévoyait la vente par la société Nantong à la société Cristal de six navires de pêche.
4- La Convention était soumise au droit mauritanien et contenait une clause de résolution des différends aux termes de laquelle les parties devaient tenter préalablement de trouver une solution amiable avant de recourir à l’arbitrage.
5- Des difficultés sont survenues concernant la transmission des « documents liés au droit d’exercer la pêche en Mauritanie », la société Cristal reprochant à la société Nantong de ne pas avoir livré les navires dans le délai convenu, et le 30 mai 2019, la société Nantong a notifié à la société Cristal la résiliation de la Convention.
6- Aucune solution amiable n’ayant été trouvée, la société Cristal a introduit une procédure d’arbitrage le 24 janvier 2020 devant la CCI à Paris.
7- La procédure s’est déroulée devant un arbitre unique désigné par la CCI, qui a rendu sa sentence le 8 février 2021 aux termes de laquelle il a considéré que la résiliation de la Convention était « due à l’inexécution fautive de ses obligations par la société Défenderesse Nantong » et l’a condamnée à payer la somme de 3.8 millions USD dans un délai de 14 jours à compter de la notification de la sentence.
8- Le 9 mars 2021, la société Nantong a saisi la cour d’un recours en annulation contre cette sentence.
9- Les parties ont accepté l’application du Protocole de procédure applicable devant la chambre commerciale internationale.
10- La clôture a été prononcée le 31 mai 2022.
II/ PRÉTENTIONS DES PARTIES
11- Aux termes de ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 15 février 2022, la société Nantong demande à la Cour, au visa des articles 1520 3°, 699 et 700 CPC, de bien vouloir :
– ANNULER la Sentence du 8 février 2021 rendue à Paris dans l’affaire CCI n° 25088/DDA ;
– DEBOUTER la société CRISTAL FISCH de l’ensemble de ses demandes, fins et prétentions ;
– CONDAMNER la société Cristal Fish au paiement de la somme de 100.000 euros à la société Nantong sur le fondement de l’article 700 CPC ;
– CONDAMNER la société Cristal Fish aux entiers dépens.
12- Aux termes de ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 9 mai 2022, la société Cristal demande à la cour, au visa des de l’article 1520 CPC, de bien vouloir :
– DEBOUTER la société NANTONG DEEP SEA FISHERIES CO. LTD de l’ensemble de ses demandes, fins et prétentions ;
– REJETER le recours en annulation formé par la société NANTONG DEEP SEA FISHERIES CO. LTD à l’encontre de la sentence arbitrale finale de la Cour Internationale d’Arbitrage de la Chambre de Commerce Internationale (Arbitrage n°25088/DDA ‘ Siège de l’arbitrage : Paris, France), rendue le 8 février 2021 ;
– CONDAMNER la société NANTONG DEEP SEA FISHERIES CO. LTD à verser à la société CRISTAL FISH la somme de 100.000 euros en application des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile ;
– CONDAMNER la société NANTONG DEEP SEA FISHERIES CO. LTD aux entiers dépens dont distraction au profit de la Selarl Lexavoue Paris-Versailles.
III/ MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur le moyen unique d’annulation tiré de ce que le tribunal arbitral ne s’est pas conformé à la mission qui lui était confiée (article 1520 3° CPC)
13- La société Nantong soutient que le tribunal arbitral a omis d’appliquer le droit mauritanien, pourtant applicable au fond du litige, que ce faisant, il ne s’est pas conformé à sa mission et que la sentence encourt dès lors l’annulation.
14- Elle précise que son recours ne tend pas à une révision de la sentence ni à contrôler la bonne application du droit mauritanien par l’arbitre, mais à contrôler la manière dont l’arbitre est parvenu à sa décision.
15- Elle fait tout d’abord valoir que le tribunal arbitral n’a pas appliqué le droit mauritanien régulant l’exercice de la pêche en Mauritanie concernant l’obligation de la société Cristal de remettre les « documents liés à l’obtention du droit d’exercer la pêche en Mauritanie » et que la sentence ne fait pas référence à cette obligation ni à ce droit.
16- Elle reproche à l’arbitre d’avoir défini cette obligation uniquement en considération de la Convention et d’avoir estimé qu’un simple courrier du 28 septembre 2018 suffisait à considérer que l’obligation avait été exécutée et que le régime d’autorisation avait une nature simplement contractuelle, alors qu’au regard du droit mauritanien de la pêche et notamment des textes règlementant l’importation de navires de pêches en Mauritanie, une autorisation d’importation prévue à l’article 8 du code des Pêches devait être délivrée par le ministre des Pêches et de l’Économie Maritime pour laquelle des formalités spécifiques étaient à remplir. Elle précise que ce courrier, qui a été transmis lors des négociations de la Convention, précisait lui-même que des formalités complémentaires devaient être accomplies. Elle soutient qu’en décidant de statuer selon des motifs différents de ceux tirés des règles de droit, l’arbitre a « usurpé » les pouvoirs d’amiable compositeur qui ne lui avaient pas été conférés, caractérisant ainsi une violation de la volonté exprimée des parties par l’arbitre et donc de sa mission.
17- Elle fait ensuite valoir que le tribunal arbitral n’a pas appliqué le droit mauritanien de la responsabilité contractuelle consécutive à la résiliation de la Convention, qu’il n’a jamais cité le droit mauritanien pour décider que la résiliation de la Convention était due à l’inexécution fautive de ses obligations par Nantong, ce qu’elle contestait au regard de l’article 252 du code des obligations et des contrats mauritanien, qu’en agissant ainsi, l’arbitre a statué en amiable compositeur malgré l’absence de clause d’amiable composition.
18- Elle fait enfin valoir que le tribunal arbitral n’a pas appliqué le droit mauritanien relatif à l’évaluation du préjudice suite à la résiliation de la Convention et qu’il a retenu que le préjudice devait s’évaluer à hauteur du manque à gagner en fonction du montant des primes de quotas que la société Cristal devait distribuer à ses actionnaires mauritaniens alors qu’au regard du droit mauritanien, le préjudice d’une société ne peut pas être assimilé au préjudice de ses actionnaires de sorte que ces primes ne pouvaient être assimilées à un manque à gagner pour la société Cristal. Elle soutient que là encore, l’arbitre a violé sa mission en se comportant en amiable compositeur en ayant écarté les dispositions impératives d’une loi applicable pour évaluer le préjudice.
19- En réponse, la société Cristal rappelle que le contrôle du juge de l’annulation ne permet pas de réviser au fond la sentence attaquée ni de contrôler la mise en ‘uvre de la loi applicable. Elle indique que l’arbitre n’a appliqué que le droit mauritanien et n’a pas rendu sa sentence en amiable composition.
20- S’agissant tout d’abord des dispositions mauritaniennes en matière d’importation de navires, elle fait valoir que la société Nantong crée une confusion entre le « droit d’exercer la pêche » et le « droit d’importer des navires » et se contente de contester le bien-fondé de la motivation adoptée par l’arbitre, en reprochant au tribunal d’avoir ignoré les dispositions mauritaniennes en matière d’importation de navires, alors que l’arbitre a décidé que les dispositions relatives à l’importation de navires n’étaient pas pertinentes pour le litige sans écarter le droit mauritanien.
21- S’agissant ensuite de la responsabilité consécutive à la résiliation de la Convention, elle indique que l’arbitre a bien fait application de l’article 252 du code des obligations invoqué au regard de l’ordre chronologique régissant l’exécution des obligations des parties, cet ordre devant être respecté. Elle estime que la société Nantong tente là encore de contrôler la motivation et la mise en ‘uvre de la loi choisie par les parties et appliquée par l’arbitre.
22- Elle fait valoir enfin, s’agissant de l’évaluation du préjudice, que la société Nantong ne cite aucune disposition du droit mauritanien qui aurait dû être appliquée et qui ne l’aurait pas été. Elle indique que l’arbitre a repris la position de la société Nantong et a appliqué les articles 278 et suivants du code mauritanien des obligations et des contrats (COC), dont l’application n’était pas contestée. Elle ajoute que l’arbitre a procédé à une motivation très détaillée (§§ 100 à 183) et qu’il ne peut pas lui être opposé un défaut de motivation. Elle souligne également que l’arbitre a précisé que le seul préjudice subi par la société Cristal elle-même serait réparé et a rejeté sa demande d’assimiler le préjudice des actionnaires mauritanien au sien.
Sur ce,
23- En application de l’article 1520, 3° du code de procédure civile, le recours en annulation est ouvert si le tribunal arbitral a statué sans se conformer à la mission qui lui avait été confiée. La mission de l’arbitre est définie notamment dans l’acte de mission, l’arbitre se voyant confier l’obligation de trancher le litige en application du droit choisi par les parties ou en amiable compositeur.
24- En l’espèce, l’arbitre rappelle l’acte de mission qui a été établi et fait référence, au §30 de la sentence, au droit choisi par les parties, rappelant l’article XVI de la convention de partenariat aux termes duquel « la loi applicable est le droit mauritanien », et rappelant à diverses reprises dans sa sentence le contenu des mémoires des parties visant de part et d’autres les articles du code mauritanien invoqués.
25- La société Nantong soutient que l’arbitre aurait omis d’appliquer le droit mauritanien choisi par les parties, sur plusieurs aspects de la sentence.
26- S’agissant tout d’abord du droit régulant l’exercice de la pêche en Mauritanie, il résulte du litige portant sur la résiliation de la Convention de Partenariat qu’il n’est fait référence au droit régulant l’exercice de la pêche en Mauritanie que par renvoi des obligations contractuelles des parties prévues par la Convention et non de façon autonome et qu’à aucun moment l’arbitre n’a écarté ou omis d’appliquer le droit mauritanien relatif à l’exercice de la pêche, mais qu’il y a au contraire fait référence dans le cadre de l’appréciation de l’inexécution des obligations contractuelles, au titre desquelles figurait l’obtention desdits droits relevant de l’appréciation au fond des causes de la résiliation, ce que l’arbitre a rappelé dans sa sentence (cf. §41 et s. de la sentence résumant les positions des parties et faisant un renvoi détaillé aux § des mémoires échangés rappelant les dispositions du code des obligations et des contrats mauritanien sur les conditions de la résiliation et de l’indemnisation du préjudice subi, et sur les documents requis pour l’obtention du droit d’exercer la pêche en Mauritanie).
27- La contestation portant sur la validité des autorisations transmises par le courrier du 28 septembre 2018 du Ministère des Pêches et de l’Economie Maritime de Mauritanie porte en outre sur une appréciation au fond du litige et non sur l’application du droit mauritanien par l’arbitre et ne relève pas du contrôle du juge de l’annulation.
28- S’agissant ensuite de l’application du droit mauritanien à la responsabilité contractuelle, au regard notamment du respect de l’obligation relative aux droits régulant l’exercice de la pêche, l’arbitre a indiqué dans sa sentence (§63 et s.) : « afin de cerner les responsabilités relatives à la résiliation de la Convention, il convient de reprendre les obligations des Parties, dans leur ordre chronologique, c’est-à-dire dans l’ordre qui était celui prévu par la Convention elle-même », l’obligation relative à l’obtention du droit d’exercer la pêche, faisant partie de la chaîne des obligations, qu’il a appréciées selon les éléments de fait qui lui ont été présentés. L’arbitre en a tiré les éléments de sa décision et de sa motivation, au regard notamment de l’exception d’inexécution prévue par le droit mauritanien, sans qu’à aucun moment il ne résulte des motifs de la sentence qu’il se soit écarté des dispositions légales et réglementaires applicables à la Convention, que ce soient les dispositions du droit mauritanien des contrats ou les dispositions régulant le droit de pêche.
29- Le fait que les parties s’opposent sur l’interprétation desdits textes ou sur la validité des documents administratifs transmis, relève de l’appréciation au fond du litige, qu’il n’appartient pas au juge saisi du recours de contrôler. Ainsi, l’arbitre a indiqué aux §90 et suivants de la sentence que « Nantong se fonde sur les règles d’interprétation du droit mauritanien et invoque à cet égard (Réplique, §10 et s. et dans sa plaidoirie à l’audience) les dispositions du code mauritanien des obligations et des contrats (« COC »), notamment ses articles 474, 476, 485 (RL-1, RL-2, RL-3) » articles qu’il cite in extenso en note de bas de page n°3, pour considérer, appliqués aux faits de l’espèce, que « Cristal Fish a adressé en temps utile le document attestant de ce qu’elle était titulaire du quota et le fait qu’elle ait eu en main ce document avant même la conclusion de la Convention est dénué de pertinence. Son obligation a été remplie par l’exécution du devoir que la Convention mettait à sa charge, c’est-à-dire par l’envoi de ce document à Nantong pour que cette dernière puisse ensuite l’utiliser afin d’effectuer ses propres démarches ». L’arbitre a ensuite appliqué ces mêmes règles d’interprétation aux faits de l’espèce pour retenir l’inexécution fautive par Nantong de ses obligations, appliquant ainsi le droit mauritanien à la Convention litigieuse et à l’ensemble des éléments du litige en découlant.
30- Le fait par conséquent que l’arbitre ait fait application desdites dispositions mauritaniennes sans les viser expressément à chaque fois dans les motifs de sa sentence, ne permet pas d’en inférer que l’arbitre aurait écarté ledit droit.
31- S’agissant de l’amiable composition qui résulterait de l’omission par l’arbitre, d’appliquer le droit mauritanien, il n’est pas contesté que les parties n’ont pas renoncé au bénéfice de la règle de droit choisie par les parties, à savoir le droit mauritanien, l’arbitre n’ayant à aucun moment indiqué qu’il s’écartait dudit droit ou se serait vu confier la possibilité de statuer en amiable compositeur, et les motifs de la sentence ne faisant pas référence à une telle possibilité. C’est uniquement de façon implicite que la société Nantong soutient que l’arbitre se serait prononcé en équité en écartant la règle de droit, en faisant référence à la bonne foi.
32- Or, l’arbitre a indiqué au §94 de la sentence que « Cristal Fish a fondé pour sa part nombre de ses arguments (Réplique, §84 et s.) sur la violation du devoir de bonne foi de la part de Nantong, devoir reconnu notamment par la Convention (article XXIV) et par le droit mauritanien : art.16 bis COC (CL-3) » article qu’il cite in extenso en note de bas de page n°5, relatif au principe de bonne foi applicable dans les contrats en droit mauritanien, pour en conclure que Nantong ne s’est pas toujours conduite de bonne foi. Il ne s’agit en aucune manière d’un traitement du litige en équité, mais de l’application du droit mauritanien.
33- Il ressort de ces motifs que non seulement le tribunal arbitral a, pour retenir la responsabilité de la société Nantong, motivé sa sentence au regard du droit mauritanien et n’a pas statué en amiable compositeur, ni à aucun moment n’a exclu implicitement ou expressément l’application de ce droit.
34- Enfin, et en tout état de cause, si le tribunal arbitral a cru pouvoir interpréter les dispositions du droit mauritanien sur la réparation intégrale et sur les méthodes de calcul de l’indemnisation, il ne s’écarte pas de sa mission en se livrant à une interprétation de celui-ci, quand bien même la société Nantong en contesterait la valeur.
35- Ainsi, l’arbitre a expressément apprécié le préjudice alloué en faisant application des dispositions légales mises par les parties dans le débat (§100 et s. de la sentence se rapportant aux articles 278 et s. du COC relatifs au principe de réparation intégrale en droit mauritanien et §112 de la sentence se rapportant au préjudice subi par les actionnaires mauritaniens, soulevé à titre subsidiaire par Cristal Fish fondé sur l’article 281 du COC), en retenant l’appréciation de la réparation sur la base des gains manqués, ce qui relève de son pouvoir d’interprétation.
36- Il résulte de l’ensemble de ces éléments que la non-application du droit mauritanien ou la violation manifeste de celui-ci par l’arbitre n’est pas établie. Il ne résulte pas plus implicitement de la sentence que l’arbitre aurait statué en amiable compositeur, que ce soit sur la résiliation de la Convention ou sur les sommes allouées au titre de l’indemnisation en retenant l’un des deux scenarii proposés par la demanderesse, ce qui ne permet pas de justifier qu’il aurait statué en équité.
37- Enfin, le fait que l’arbitre a écarté la demande subsidiaire d’indemnisation de Cristal Fish pour le compte de ses actionnaires qu’il a estimée sans objet, démontre précisément qu’il a appliqué le droit mauritanien et non qu’il a statué en équité, étant observé, en tout état de cause, qu’il n’appartient pas à la présente Cour de porter une appréciation sur l’application dudit droit, sauf à s’engager dans un processus de révision au fond de la sentence qui ne relève pas de son office.
38- Ce moyen sera en conséquence rejeté, et ensemble la demande de voir prononcer l’annulation de la sentence.
Sur les frais et dépens
39- Il y a lieu de condamner la société Nantong, partie perdante, aux dépens.
40- En outre, elle doit être condamnée à verser à la société Cristal Fish, qui a dû exposer des frais irrépétibles pour faire valoir ses droits, une indemnité au titre de l’article 700 du code de procédure civile qu’il est équitable de fixer à la somme de 100 000 euros.
IV/ DISPOSITIF
La cour,
par ces motifs,
1- Rejette le recours en annulation contre la sentence rendue à Paris le 8 février 2021 (Arbitrage n°25088/DDA) ;
2- Condamne la société Nantong Deep Sea Fisheries Co Ltd à payer à la société Cristal Fish SA la somme de 100 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
3- Condamne la société Nantong Deep Sea Fisheries Co Ltd aux dépens qui seront recouvrés conformément à l’article 699 du code de procédure civile.
La greffière P/ Le Président empêché
Najma EL FARISSI Fabienne SCHALLER