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Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE PARIS
Pôle 5 – Chambre 8
ARRÊT DU 14 NOVEMBRE 2023
(n° / 2023 , pages)
Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 23/04518 – N° Portalis 35L7-V-B7H-CHH7W
Décision déférée à la Cour : Jugement du 24 février 2023 -Tribunal de commerce de PARIS – RG n° 2021042322
APPELANTE
S.A.R.L. GALERIE [Adresse 3], prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège,
Immatriculée au registre du commerce et des sociétés de PARIS sous le numéro 504 992 900,
Dont le siège social est situé [Adresse 2]
[Localité 4]
Représentée par Me Matthieu BOCCON GIBOD de la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES, avocat au barreau de PARIS, toque : C2477,
Assistée de Me Guillaume GOETZ-CHARLIER, avocat au barreau de PARIS, toque P467,
INTIMÉES
La société PIERRE SEBASTIEN FINE ART LLC, société de droit de L’État de New-York, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège,
Dont le siège social est situé [Adresse 1],
[Adresse 1]
[Localité 5]
[Localité 5] ETATS-UNIS
Représentée et assistée de Me Benjamin MAGNET de la SCP COBLENCE AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque : P0053,
S.A.R.L. GALERIE NICOLAS PLESCOFF, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège,
Immatriculée au registre du commerce et des sociétés de PARIS sous le numéro 410 801 682,
Dont le siège social est situé [Adresse 3]
[Localité 4]
Non constituée, significatuon de la déclaration d’appel à étude le 23 mars 2023,
COMPOSITION DE LA COUR :
L’affaire a été débattue le 26 septembre 2023, en audience publique, devant la cour, composée de :
Madame Marie-Christine HÉBERT-PAGEOT, présidente de chambre,
Madame Florence DUBOIS-STEVANT, conseillère,
Madame Constance LACHEZE, conseillère,
qui en ont délibéré.
Un rapport a été présenté à l’audience par Madame Marie-Christine HÉBERT-PAGEOT dans le respect des conditions prévues à l’article 804 du code de proécdure civile.
Greffier, lors des débats : Madame Liselotte FENOUIL
ARRÊT :
– rendu par défaut
– par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
– signé par Marie-Christine HÉBERT-PAGEOT, présidente de chambre et par Liselotte FENOUIL, greffière, présente lors de la mise à disposition.
*
* *
FAITS ET PROCÉDURE:
Le 20 novembre 2012, la SARL Galerie [Adresse 3], la SARL Galerie Nicolas Plescoff, deux galeries d’art, et la société de droit américain Pierre Sébastien Fine Art LLC, spécialisée dans l’achat et la revente d”uvres d’art, ont créé une société en participation, la SEP Galerie [Adresse 3], ayant pour objet la recherche, la sélection et la mise en relation d’artistes, l’achat, la revente et toutes opérations se rapprochant au commerce de l’art, et la mise en relation d’artistes avec des entreprises commerciales et industrielles en vue de l’utilisation des ‘uvres d’art comme moyen de promotion.
Une mésentente entre les associés de la SEP s’étant installée, ces derniers ont décidé lors d’une assemblée générale ordinaire et extraordinaire réunie le 27 novembre 2017, la dissolution anticipée de la SEP et sa liquidation amiable en conformité avec les dispositions statutaires.
La société Pierre Sébastien Fine Art LLC a critiqué la régularité des comptes sociaux de la SEP Galerie [Adresse 3].
Afin d’établir les comptes de répartition, la SARL Galerie [Adresse 3] et la SARL Galerie Nicolas Plescoff ont, le 30 juillet 2018, sollicité du président du tribunal de commerce de Paris la nomination d’un liquidateur amiable. Celui-ci a été désigné, en la personne de M.[M] [W], par une ordonnance de référé rendue le 7 novembre 2019.
Le 23 décembre 2019, le liquidateur amiable a déposé un rapport visant à établir des comptes entre associés, dans lequel il a examiné la répartition des frais et charges ainsi que des agios du compte débiteur de la SEP entre les associés, les apports en compte courant lors du lancement de la SEP et le sort des oeuvres en stock.
Considérant que la société Pierre Sébastien Fine Art LLC se trouvait débitrice d’une somme de 166.301, 85 euros envers la SARL Galerie [Adresse 3] et la SARL Galerie Nicolas Plescoff et refusait de verser les sommes réclamées, la SARL Galerie [Adresse 3] et la SARL Galerie Nicolas Plescoff ont obtenu, par ordonnance du 8 février 2021 du juge de l’exécution de Paris, l’autorisation de procéder à la saisie conservatoire d’un tableau de l’artiste [H] [O] appartenant à la société Pierre Sébastien Fine Art LLC et exposé dans les locaux de la Galerie [Adresse 3].
Par actes des 7 et 8 septembre 2021, la SARL Galerie [Adresse 3] a ensuite fait assigner au fond devant le tribunal de commerce de Paris la société Pierre Sébastien Fine Art LLC et la société Galerie Nicolas Plescoff pour voir essentiellement condamner les défenderesses à lui payer la somme de 207.100,04 euros TTC outre intérêts, à hauteur de 187.217,52 euros pour la première et de 19.882,52 euros pour la seconde.
Par jugement du 24 février 2023, le tribunal de commerce de Paris s’est déclaré incompétent et a renvoyé les parties à mieux se pourvoir, en saisissant le tribunal arbitral selon les modalités prévues à l’article 19 des statuts de la SEP Galerie [Adresse 3], et a condamné la SARL Galerie [Adresse 3] aux dépens et à payer à la société Pierre Sébastien Fine Art LLC la somme de 5.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, déboutant pour le surplus.
Le 13 mars 2023, la SARL Galerie [Adresse 3] du 13 mars 2023 a relevé appel de cette décision et a été autorisée à assigner à jour fixe pour l’audience du 27 juin 2023.
La SARL Galerie [Adresse 3] a fait assigner à jour fixe pour l’audience du 27 juin 2023, la société Galerie Nicola Plescoff par acte du 23 mars 2023 délivré à étude et la société Pierre Sébastien Fine Art LLC par acte du 28 mars 2023 attestant d’une transmission à l’étranger ( USA).
Dans ses conclusions n°2, déposées au greffe et notifiées le 24 juillet 2023, la SARL Galerie [Adresse 3] demande à la cour d’infirmer le jugement, statuant à nouveau, déclarer le tribunal de commerce de Paris compétent pour juger de ses demandes à l’encontre de la société Pierre Sébastien Fine Art LLC et de la société Galerie Nicolas Plescoff, renvoyer l’affaire au tribunal de commerce de Paris, initialement saisi, afin que l’instance se poursuive, en tout état de cause, condamner la société Pierre Sébastien Fine Art LLC et la société Galerie Nicolas Plescoff à lui payer la somme de 5.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens de première instance et d’appel, dire n’y avoir lieu d’écarter l’exécution provisoire de la décision à intervenir.
Par ses conclusions n°2, déposées au greffe et notifiées le 12 septembre 2023, la société Pierre Sébastien Fine Art LLC demande à la cour d’appel de Paris de confirmer en toutes ses dispositions le jugement, débouter la société Galerie [Adresse 3] de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions et la condamner à lui payer la somme de 8.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile en cause d’appel, ainsi qu’aux entiers dépens de première instance et d’appel, dont distraction au profit de la SCP Coblence Avocats, représentée par Me Benjamin Magnet, avocat au Barreau de Paris, sur le fondement de l’article 699 du code de procédure civile.
La SARL Galerie Nicolas Plescoff n’a pas constitué avocat.
SUR CE,
– Sur la compétence du tribunal de commerce de Paris
La SARL Galerie [Adresse 3], arguant que la clause compromissoire figurant dans les statuts de la SEP est inapplicable et qu’en tout état de cause la société Pierre Sébastien Fine Art LLC y a renoncé, soutient que le tribunal de commerce de Paris est compétent territorialement et matériellement, en ce qu’il connait des contestations relatives aux sociétés commerciales, et en ce que le siège social de la société Galerie Nicolas Prescoff est situé à [Localité 4].
La société Pierre Sébastien Fine Art LLC, se fondant sur la clause d’arbitrage prévue à l’article 19 des statuts de la SEP Galerie [Adresse 3], réplique que le tribunal de commerce de Paris est incompétent au profit du tribunal arbitral, qu’en effet, les deux conditions posées par la clause d’arbitrage sont réunies, puisqu’il s’agit bien d’une contestation entre associés, qui a trait à la SEP Galerie [Adresse 3].Elle ajoute qu’elle n’a aucunement renoncé à l’application de cette clause en introduisant le 25 février 2022 une autre instance devant le tribunal de commerce de Paris, son objet étant différent.
L’article 19 des statuts de la SEP Galerie [Adresse 3] comporte une clause d’arbitrage ainsi libellée: ‘ Toutes contestations qui pourraient s’élever entre les associés, relativement à la présente Société, seront soumises à la décision d’un arbitre amiable compositeur, désigné d’un commun accord entre les Associés, ou à défaut d’accord, par M.le Président du tribunal de commerce du domicile de la Société, à la requête de l’Associé le plus diligent. [….] Dans les trente ( 30) jours qui suivront la désignation de l’arbitre, les Associés devront le saisir du litige par un compromis établi d’un commun accord entre elles; à défaut l’arbitre se saisira lui-même du litige, convoquera les parties et dressera un procès-verbal signé de lui et des parties, ou de l’une ou certaines d’entre elles seulement si certains associés s’y refusent ou font défaut, lequel procès-verbal vaudra compromis./ L’arbitre aura les pouvoirs les plus étendus pour trancher, comme amiable compositeur, les questions qui lui seront soumises ou dont il sera saisi, ainsi qu’il est indiqué ci-dessus, sans avoir à observer les régles de droit ni les formes de la procédure. Il rendra sa sentence en dernier ressort.’
Le litige en cause a pour objet les comptes des associés à l’occasion de la liquidation amiable de la SEP Galerie [Adresse 3], de sorte qu’il s’agit bien d’une contestation s’élevant entre les associés de la SEP, relativement à cette société. C’est donc à juste titre que la société Pierre Sébastien Fine Art LLC soutient que les deux conditions posées par l’article 19 des statuts sont réunies.
Il résulte de l’article 1448 du code de procédure civile que ‘ Lorsqu’un litige relevant d’une convention d’arbitrage est porté devant une juridiction de l’Etat, celle-ci se déclare incompétente sauf si le tribunal arbitral n’est pas encore saisi et si la convention d’arbitrage est manifestement nulle ou manifestement inapplicable.’
Il n’est pas soutenu que cette convention d’arbitrage serait manifestement nulle.
En revanche, la SARL Galerie [Adresse 3] argue que la convention est manifestement inapplicable en ce que la dissolution de la SEP ayant fait perdre tout objet et toute efficacité juridique à ses statuts, la clause ne peut plus être invoquée par ses anciens associés, en ce que d’autre part, la présente instance intervient pour répondre aux conditions de l’article R511-7 du code des procédures civiles d’exécution imposant de saisir le juge du fond dans le délai d’un mois aux fins d’obtenir un ” titre exécutoire ” à peine de caducité de la mesure, ce qui n’aurait pas été possible devant un tribunal arbitral, puisque la clause compromissoire prévoyait que l’arbitre devait être désigné, et qu’une fois désigné, les associés devaient le saisir dans les trente jours par un compromis établi d’un accord commun.
S’agissant des effets de la dissolution votée lors de l’assemblée générale du 27 novembre 2017, la cour relève à la suite de la société Pierre Sébastien Fine Art LLC que la clôture de la liquidation de la SEP n’est pas intervenue,l’article 18 des statuts prévoyant que la décision de clôture de la liquidation n’a lieu qu’après approbation des comptes définitifs de liquidation, peu important à cet égard que la SEP ne soit pas dotée de la personnalité morale. En outre et surtout, l’article 19 des statuts, ne limitant pas l’application de la clause compromissoire, n’exclut pas de la convention d’arbitrage les litiges entre associés au sujet de la société apparus au cours de la procédure de dissolution/ liquidation de la SEP.Au demeurant, l’article 1447 du code de procédure civile dispose que la convention d’arbitrage est indépendante du contrat auquel elle se rapporte et n’est pas affectée par l’inefficacité de celui-ci. Ce moyen n’est donc pas fondé.
Le moyen pris de l’inapplicabilité de la clause compromissoire à raison des dispositions de l’article R511-7 du code des procédures civiles d’exécution n’est pas davantage pertinent. En effet, s’il résulte de cet article que dans le cas où la mesure conservatoire a été pratiquée sans titre exécutoire, le créancier doit, dans le mois qui suit l’exécution de la mesure, à peine de caducité, introduire une procédure ou accomplir les formalités nécessaires à l’obtention d’un titre exécutoire, ce texte n’impose aucunement la saisine du juge étatique, de sorte que la saisine de la juridiction arbitrale en application de la clause compromissoire permet l’obtention d’un titre exécutoire.
C’est encore vainement que la SARL Galerie [Adresse 3] invoque l’impossibilité de saisir le tribunal arbitral dans le délai d’un mois compte tenu de l’impossible communication entre les associés et de la nécessité de faire désigner l’arbitre par le président du tribunal de commerce. En effet, la saisine du président du tribunal de commerce sur le fondement de l’article 19.1 des statuts aux fins de voir désigner un arbitre à défaut d’accord des associés sur cette désignation, répond aux exigences de l’article R 511-7 du code des procédures civiles d’exécution et pouvait intervenir dans un délai d’un mois de la saisie conservatoire.
Il est dès lors sans incidence qu’ensuite de cette désignation, la clause compromissoire accorde un délai de 30 jours aux associés pour saisir l’arbitre de sa mission.
La SARL Galerie [Adresse 3] soutient pour finir qu’en tout état de cause la société Pierre Sébastien Fine Art LLC a renoncé à l’application de la convention d’arbitrage en lui faisant délivrer le 25 février 2022 une assignation devant le tribunal de commerce de Paris.
Toutefois cette assignation, qui vise à obtenir la condamnation de la SARL Galerie [Adresse 3] au paiement de diverses commissions au titre de la vente d’oeuvres d’art à des clients apportés par la société Pierre Sébastien Fine Art LLC, est distincte de l’objet de la présente instance qui concerne le règlement des comptes à l’occasion de la dissolution et de la liquidation amiable de la SEP.
Il ne peut être déduit de la saisine du tribunal de commerce par la société Pierre Sébastien Fine Art LLC, postérieurement à l’assignation dans la présente instance et pour un objet différent, sa renonciation à se prévaloir du bénéfice de la clause compromissoire. Cette renonciation est d’autant moins établie que dans l’assignation du 25 février 2022 (page 7), la société Pierre Sébastien Fine Art LLC souligne expressément à propos de l’instance introduite par la société Galerie [Adresse 3] que le tribunal de commerce est matériellement incompétent pour trancher ce différend au regard de l’existence d’une clause d’arbitrage.
Il résulte de ce qui précède qu’aucun des moyens invoqués par la SARL Galerie [Adresse 3] ne démontre que la clause compromissoire serait manifestement inapplicable.
Le jugement sera en conséquence confirmé en ce qu’il a déclaré le tribunal de commerce de Paris incompétent et a renvoyé les parties à mieux se pourvoir devant la juridiction arbitrale.
– Sur les dépens et l’article 700 du code de procédure civile
Le jugement sera également confirmé en ce qu’il a condamné la SARL Galerie [Adresse 3] aux dépens et à payer à la société Pierre Sébastien Fine Art LLC une indemnité procédurale de 5.000 euros.
La cour, y ajoutant condamnera la SARL Galerie [Adresse 3] aux dépens d’appel et au paiement d’une indemnité procédurale de 2.500 euros au titre des frais irrépétibles exposés en appel. La société Galerie [Adresse 3] sera déboutée de sa demande d’indemnité procédurale.
PAR CES MOTIFS,
Confirme le jugement en toutes ses dispositions,
Y ajoutant,
Condamne la SARL Galerie [Adresse 3] aux dépens d’appel avec distraction au profit de la SCP Coblence Avocats, représentée par Me Benjamin Magnet, avocat au Barreau de Paris, en application de l’article 699 du code de procédure civile,
Condamne la SARL Galerie [Adresse 3] à payer à la société Pierre Sébastien Fine Art LLC une indemnité procédurale de 2.500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles exposés en appel et la déboute de sa demande sur ce même fondement.
La greffière,
Liselotte FENOUIL
La présidente,
Marie-Christine HEBERT-PAGEOT