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2ème Chambre
ARRÊT N°560
N° RG 21/01816
N° Portalis DBVL-V-B7F-RO34
(1)
Société COFIDIS
C/
M. [J] [L]
Mme [O] [Z] épouse [L]
M. [V] [G]
Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE RENNES
ARRÊT DU 08 DECEMBRE 2023
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :
Président : Monsieur Joël CHRISTIEN, Président de Chambre,
Assesseur : Monsieur David JOBARD, Président de Chambre,
Assesseur : Monsieur Jean-François POTHIER, Conseiller,
GREFFIER :
Monsieur Pierre DANTON, lors des débats, et Mme Ludivine BABIN, lors du prononcé,
DÉBATS :
A l’audience publique du 10 Octobre 2023
ARRÊT :
Rendu par défaut, prononcé publiquement le 08 Décembre 2023 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l’issue des débats
****
APPELANTE :
COFIDIS S.A. venant aux droits du GROUPE SOFEMO
[Adresse 5]
[Adresse 5]
[Localité 4]
Représentée par Me Christophe LHERMITTE de la SELEURL GAUVAIN, DEMIDOFF & LHERMITTE, postulant, avocat au barreau de RENNES
Représentée par Me Xavier HELAIN de la SELARL HAUSSMANN KAINIC HASCOET HELAIN, plaidant, avocat au barreau de l’ESSONNE
INTIMÉS :
Monsieur [J] [L]
né le 21 Octobre 1971 à [Localité 9]
[Adresse 7]
[Localité 3]
Madame [O] [Z] épouse [L] née le 07 Février 1972 à [Localité 9]
[Adresse 7]
[Localité 3]
Tous deux représentés par Me Tiphaine LE BERRE BOIVIN, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de RENNES
Monsieur [V] [G] es qualité de mandataire ad’hoc de la société SUNGOLD sous l’enseigne INSTITUT DES NOUVELLES ENERGIES SARL
[Adresse 2]
[Localité 6]
Assigné par acte d’huissier en date du 25/05/2021, délivré selon les modalité du PV 659, n’ayant pas constitué
INTERVENANT :
Maître [F] [S] ès-qualités de mandataire ad hoc de la société SUNGOLD
[Adresse 1]
[Localité 8]
Assigné par acte d’huissier en date du 23/06/2021, délivré à personne, n’ayant pas constitué
* * *
EXPOSÉ DU LITIGE
À la suite d’un démarchage à domicile, M. [J] [L] a, selon bon de commande du 21 janvier 2016, commandé à la société Sungold, exerçant sous la dénomination commerciale ‘Institut des nouvelles énergies’, la fourniture et l’installation de panneaux photovoltaïques moyennant le prix de 21 500 euros TTC.
En vue de financer cette opération, la société Cofidis, exerçant sous la dénomination commerciale ‘Sofemo Financement’, a, selon offre acceptée le même jour, consenti à M. [L] et à Mme [O] [Z] (les époux [L]) un prêt de 21 500 euros au taux de 5,68 % l’an, remboursable en 120 mensualités de 249,52 euros hors assurance emprunteur, après un différé de remboursement de 11 mois.
Le prêteur a versé les fonds au fournisseur au vu d’un certificat de livraison de bien ou de fourniture de service du 16 février 2016, les emprunteurs ayant conclu avec EDF un contrat de rachat de l’électricité produite le 14 décembre 2016.
Par jugements des 6 septembre 2016 et 28 juin 2019, le tribunal de commerce de Nanterre a prononcé la liquidation judiciaire de la société Sungold puis la clôture de la procédure pour insuffisance d’actifs.
Prétendant que le bon de commande était irrégulier, les époux [L] ont, par acte du 18 février 2020, fait assigner devant le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Nantes la société Cofidis ainsi que M. [V] [G], ès qualités de mandataire ad hoc de la société Sungold, en annulation ou résolution des contrats de vente et de prêt.
Par jugement du 8 février 2021, le juge des contentieux de la protection a :
prononcé l’annulation du contrat de vente conclu le 2 mars 2015 entre les époux [L] et la société Sungold,
prononcé l’annulation du contrat de crédit conclu entre les époux [L] et la société Cofidis,
dit que la société Sungold ou son mandataire liquidateur devra reprendre l’ensemble des matériels posés au domicile des époux [L] dans les deux mois suivant la signification du jugement, après en avoir prévenu ces derniers 15 jours à l’avance,
à défaut d’enlèvement dans le délai susvisé, autorisé les époux [L] à disposer desdits matériels comme bon leur semblera,
débouté la société Cofidis de sa demande de restitution du capital emprunté,
condamné la société Cofidis à rembourser aux époux [L] la somme de 18 300 euros, en deniers et quittances,
débouté les époux [L] de leurs demandes de dommages et intérêts,
condamné la société Cofidis aux dépens,
débouté les parties de toutes autres demandes différentes, plus amples ou contraires.
La société Cofidis a relevé appel de cette décision le 20 mars 2021.
Par acte du 23 juin 2021, elle a appelé en intervention forcée M. [F] [S], désigné, par ordonnance du président du tribunal de commerce de Nanterre en date du 4 mai 2021, mandataire ad hoc de la société Sungold pour la procédure d’appel.
La société Cofidis demande à la cour d’infirmer le jugement attaqué et de :
dire les époux [L] mal fondés en leurs demandes et les en débouter,
condamner solidairement les époux [L] à poursuivre l’exécution du contrat de prêt,
subsidiairement, en cas d’annulation des contrats, condamner les époux [L] au remboursement du capital prêté de 21 500 euros, avec intérêts au taux légal à compter de l’arrêt à intervenir, déduction faite des échéances payées,
en tout état de cause, condamner solidairement les époux [L] au paiement d’une indemnité de 2 500 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens.
Ayant formé appel incident, les époux [L] demandent quant à eux à la cour de confirmer le jugement attaqué, sauf en ce qu’il a rejeté leur demande en paiement de dommages-intérêts.
Il sollicitent la condamnation de la société Cofidis au paiement des sommes de 3 337,40 euros au titre des frais de dépose de l’installation et de remise en état de la toiture, de 3 000 euros au titre du préjudice économique et du trouble de jouissance, et de 3 000 euros au titre de leur préjudice moral, ainsi, en tout état de cause, que d’une indemnité de 3 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.
À titre subsidiaire, en cas d’infirmation, ils sollicitent la condamnation de la société Cofidis au paiement d’une somme de 12 200 euros à titre de dommages-intérêts correspondant aux deux tiers du capital emprunté, la déchéance du droit du prêteur aux intérêts et, très subsidiairement, l’autorisation de reprendre le règlement des mensualités du prêt sans préjudice tiré de l’exécution provisoire prononcée en première instance.
MM. [G] et [S], intimé et appelé en intervention forcée ès qualités de mandataires ad hoc de la société Sungold, n’ont pas constitué avocat devant la cour, la société Cofidis ayant signifié ses conclusions à M. [G] le 25 mai 2021 et fait assigner M. [S] par acte du 23 juin 2021.
Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure ainsi que des prétentions et moyens des parties, la cour se réfère aux énonciations de la décision attaquée ainsi qu’aux dernières conclusions déposées pour la société Cofidis le 14 décembre 2021 et pour les époux [L] le 12 juin 2023, l’ordonnance de clôture ayant été rendue le 22 juin 2023.
EXPOSÉ DES MOTIFS
Sur la nullité du contrat principal
Aux termes des articles L 121-18-1 et L. 121-17 devenus L. 221-9, L 221-5, L. 111-1, R. 111-1 et R. 111-2 du code de la consommation, les ventes et fournitures de services conclues à l’occasion d’une commercialisation hors établissement doivent faire l’objet d’un contrat dont un exemplaire est remis au client et notamment comporter, à peine de nullité, les mentions suivantes :
le nom du professionnel, ou la dénomination sociale et la forme juridique de l’entreprise, l’adresse géographique de son établissement et, si elle est différente, celle du siège social, son numéro de téléphone et son adresse électronique,
le cas échéant, son numéro d’inscription au registre du commerce et des sociétés ou au répertoire des métiers,
les informations relatives à ses activités, pour autant qu’elles ne ressortent pas du contexte,
son éventuelle garantie financière ou assurance de responsabilité professionnelle souscrite par lui, ainsi que les coordonnées de l’assureur ou du garant,
les caractéristiques essentielles du bien ou du service, compte tenu du bien ou service concerné,
le prix du bien ou du service,
les modalités de paiement,
en l’absence d’exécution immédiate du contrat, la date ou le délai auquel le professionnel s’engage à livrer le bien ou à exécuter le service,
les modalités prévues par le professionnel pour le traitement des réclamations,
s’il y a lieu, les informations relatives à la garantie légale de conformité, à la garantie des vices cachés de la chose vendue ainsi que, le cas échéant, à la garantie commerciale et au service après-vente,
la possibilité de recourir à un médiateur de la consommation,
lorsque le droit de rétractation existe, les conditions, le délai et les modalités d’exercice de ce droit, ainsi que le formulaire type de rétractation.
Pour annuler le contrat principal, le premier juge a relevé un manquement à l’obligation du fournisseur de préciser les caractéristiques essentielles du bien ou du service fourni, dès lors que ni la marque, ni les références de tous les produits vendus, ni la surface, le poids et la composition des panneaux photovoltaïques, ni leurs performance, rendement et capacité de production ne sont indiqués, pas plus que les détails techniques de la pose et le planning détaillé de livraison et d’installation.
Les époux [L] ajoutent que le bon de commande reproduit des dispositions abrogées du code de la consommation, que le modèle, les références et les performances de l’onduleur ne sont pas indiqués, que les panneaux posés ne pourraient être de la marque ‘Thomson’ mentionnée dans le bon de commande, que le délai de livraison mentionné n’est qu’indicatif, ce qui rendrait la clause abusive, que certaines caractéristiques du crédit seraient absentes ou erronées, que ni le détail du prix de chaque composant et de leur installation, ni le montant de la TVA ne sont indiqués, et que les conditions générales de vente ne sont pas rédigées de façon claire et compréhensible.
Cependant, l’examen du bon de commande révèle que celui-ci indique le nombre, la puissance, la technologie monocristalline et la marque des panneaux, leurs performance, rendement et capacité de production étant suffisamment déterminés par l’indication de leur nombre et de leur puissance.
En outre, rien ne démontre que le poids, la taille et l’aspect des panneaux photovoltaïques, le modèle, la puissance et les performances de l’onduleur, ou la référence des autres matériels fournis seraient entrés dans le champ contractuels et constitueraient des caractéristiques essentielles des produits fournis.
Le texte précité n’exige par ailleurs que la seule mention du prix global TTC à payer, et non des prix détaillés de chacun des équipements ou de la main d’oeuvre, étant précisé que le bon de commande litigieux mentionne le taux de la TVA appliqué.
De même, il est pallié au défaut de précision du bon de commande relativement aux caractéristiques du prêt par les mentions de l’offre de crédit régularisée au cours de la même opération de démarchage.
D’autre part, les conditions générales de vente figurant au verso du bon de commande sont parfaitement lisibles et répondent ainsi aux exigences de l’article L. 111-1 du code de la consommation.
Enfin, la circonstance que la marque des panneaux ou de l’onduleur fournis ne serait pas celle prévue au bon de commande constitue un défaut de délivrance conforme, non invoquée, mais non une cause de nullité du contrat.
En revanche, les époux [L] relèvent avec raison que le bon de commande ne mentionne ni les modalités de pose de l’installation, en applique à la couverture existante ou en intégration au bâti, ce qui constitue une caractéristique essentielle de la prestation accessoire d’installation du matériel vendu.
Il est en aussi exact qu’il ne mentionne pas correctement le délai d’exécution du contrat.
En effet, s’il est, sur ce dernier point, mentionné une ‘livraison dans un délai de trois mois maximum’, l’absence d’indication du délai d’exécution de la prestation accessoire de pose ne satisfait pas au texte précité, le délai butoir de 200 jours stipulé aux conditions générales étant trop vague et ne portant là encore que sur la livraison du matériel, et non la pose et la mise en service de l’installation.
En outre, les informations relatives aux conditions et modalités d’exercice du droit de rétractation sont erronées.
En effet, les conditions générales du contrat ne reproduisent pas les dispositions du code de la consommation applicables à la cause relativement aux modalités d’exercice du droit de rétractation, mais les dispositions des articles L. 121-23 à L. 121-26 du code de la consommation, abrogées au moment de la conclusion du contrat, prévoyant un délai de rétractation de sept jours à compter de la commande.
D’autre part, le bordereau de rétractation vise également les mêmes dispositions légales abrogées au moment de la conclusion du contrat.
En outre, s’il mentionne bien, conformément à la loi nouvelle, un délai de rétractation de 14 jours, il fait courir ce délai ‘à partir du jour de la commande ou, si ce délai expire normalement un samedi, un dimanche ou un jour férié ou chômé, le premier jour ouvrable suivant’.
Or, aux termes de l’article L. 121-21 du code de la consommation, dans sa rédaction en vigueur entre le 8 août 2015 et le 1er juillet 2016 applicable au contrat litigieux conclu le 21 janvier 2016, le consommateur dispose, pour exercer son droit de rétractation, d’un délai de quatorze jours commençant à courir à compter du jour de la réception du bien par le consommateur pour les contrats de vente et les contrats de prestation de services incluant la livraison de biens, le consommateur pouvant, pour les contrats conclus hors établissement, exercer son droit de rétractation à compter de la conclusion du contrat.
Il en résulte que, si les époux [L] pouvaient en l’espèce exercer leur droit de rétractation dès la conclusion du contrat conclu à leur domicile à la suite d’une opération de démarchage, le délai de quatorze jours ne commençait néanmoins à courir qu’à compter de la livraison des panneaux, et non à compter du jour de la commande.
En outre, il résulte de l’article L. 121-18-1 du code de la consommation, dans sa rédaction applicable à la cause, que, lorsque les informations relatives à l’exercice du droit de rétractation mentionnées à l’article L. 121-17, I , 2° dudit code ne figurent pas dans un contrat conclu hors établissement, la nullité de ce contrat est encourue, de sorte qu’une telle sanction peut être invoquée par le souscripteur du contrat, au même titre que la prolongation du délai de rétractation prévu par l’article L. 121-21-1 du même code.
La société Cofidis soutient néanmoins que ces irrégularités ne seraient sanctionnées que par une nullité relative que l’acquéreur aurait renoncé à invoquer en acceptant de régulariser le contrat de prêt et de signer l’attestation de fin de travaux caractérisant sa volonté de les recevoir.
Cependant, la confirmation d’une obligation entachée de nullité est subordonnée à la conclusion d’un acte révélant que son auteur a eu connaissance du vice affectant l’obligation et l’intention de le réparer, sauf exécution volontaire après l’époque à laquelle celle-ci pouvait être valablement confirmée.
À cet égard, la reproduction, dans les conditions générales de vente, de l’ancien article L. 121-21 du code de la consommation, qui comportait déjà en substance l’indication que les caractéristiques essentielles de la prestation accessoire de pose et le délai de livraison des biens et d’exécution des prestations de service devaient être mentionnés dans le contrat à peine de nullité de celui-ci, permettait aux époux [L] de savoir que ces vices du bon de commande entachaient le contrat de vente de nullité, de sorte que l’acceptation sans réserve de la livraison et des travaux de pose, ainsi que la mise en service de l’installation et la régularisation d’un contrat de revente à EDF de l’électricité produite caractérisent leur volonté de confirmer l’acte nul en ce qui concerne ces vices.
En revanche, ainsi qu’il a été précédemment exposé, les conditions générales de vente ne reproduisaient pas les dispositions du code de la consommation applicables à la cause relativement aux modalités d’exercice du droit de rétractation, de sorte que rien ne démontre que les époux [L] aient, lorsqu’ils ont laissé les travaux se réaliser et prononcé leur réception, eu connaissance de ce vice entachant le bon de commande.
Il n’est donc pas établi qu’ils aient, en pleine connaissance de cette irrégularité du contrat de vente relative aux modalités d’exercice du droit de rétractation, entendu renoncer à la nullité en résultant et qu’ils auraient de ce fait manifesté une volonté non équivoque de couvrir les irrégularités de ce document.
Il convient donc d’écarter le moyen tiré de la confirmation du contrat irrégulier et de confirmer le jugement attaqué en ce qu’il a prononcé la nullité du contrat conclu le 2 mars 2015 avec la société Sungold.
Sur la nullité du contrat de prêt
Aux termes des dispositions de l’article L. 311-32 devenu L. 312-55 du code de la consommation, le contrat de crédit affecté est résolu ou annulé de plein droit lorsque le contrat en vue duquel il a été conclu est lui-même judiciairement résolu ou annulé.
Il n’est pas contesté que le crédit consenti par la société Cofidis est un crédit accessoire à une vente ou à une prestation de services.
En raison de l’interdépendance des deux contrats, l’annulation du contrat principal conclu avec la société Sungold emporte donc annulation de plein droit du contrat accessoire de crédit conclu avec la société Cofidis.
Comme le rappelle à juste titre la société Cofidis, la nullité du prêt a en principe pour conséquence de remettre les parties dans leur situation antérieure, de sorte qu’elle doit, sauf faute du prêteur, entraîner la restitution des prestations reçues de part et d’autre.
La société Cofidis soutient à cet égard qu’il n’appartenait pas au prêteur de juger de la régularité du bon de commande et de contrôler l’exécution totale de la prestation du fournisseur incluant la mise en service de l’installation et la réalisation de l’ensemble des démarches administratives afférentes, alors qu’elle s’est dessaisie du capital prêté au vu d’une attestation de livraison et d’installation par laquelle les époux [L] reconnaissaient que le contrat principal avait été exécuté et lui donnaient l’ordre de débloquer les fonds.
Les époux [L] demandent de leur côté à la cour de confirmer le jugement attaqué en ce qu’ils les a dispensés de restituer les fonds empruntés, en faisant valoir que le prêteur se serait rendu complice d’un dol commis par le fournisseur, et se serait fautivement dessaisi des fonds au vu d’un bon de commande irrégulier et d’un certificat de livraison laconique établi sur un formulaire type, alors que l’installation, réalisée sans que les autorisations d’effectuer les travaux aient encore été délivrées, n’était pas achevée et le raccordement au réseau pas encore effectué.
Les époux [L] n’apportent cependant pas la preuve, qui leur incombe de manoeuvres dolosives imputables à la société Sungold, les allégations de pratique commerciale agressive et de promesses trompeuses d’autofinancement de l’installation grâce à la revente de l’électricité produite n’étant pas démontrées.
En toute hypothèse, ils apportent moins encore la preuve d’une quelconque complicité de la société Cofidis dans ces prétendues manoeuvres dolosives, alors, au surplus, qu’il est de principe que la banque dispensatrice de crédit, qui n’a pas à s’immiscer dans les affaires de ses clients pour apprécier l’opportunité des opérations auxquelles ils procèdent, n’est pas tenue, en cette seule qualité, d’une obligation de conseil envers l’emprunteur sur les risques de l’opération financée.
D’autre part, le prêteur, qui n’a pas à assister les emprunteurs lors de l’exécution du contrat principal, ni à vérifier le bon fonctionnement d’une installation exempte de vice ou la conformité du matériel livré aux stipulations contractuelles, ne commet pas de faute lorsqu’il libère les fonds au vu d’une attestation de livraison qui lui permet de s’assurer de l’exécution complète du contrat principal.
Or, en l’occurrence, le ‘certificat de livraison et d’installation-demande de financement’ signé par M. ou Mme [L] le 5 février 2016 fait ressortir sans ambiguïté que l’emprunteur a confirmé au prêteur ‘avoir obtenu et accepté sans réserve la livraison des marchandises (et) constaté expressément que tous les travaux et prestations qui devaient être effectués à ce titre ont été pleinement réalisés et que les démarches de raccordement au réseau ont bien été engagées, en conséquence (de quoi il a) demandé à Cofidis de bien vouloir procéder au décaissement (du) crédit et d’en verser le montant directement entre les mains de la société Sungold’.
La société Cofidis, qui, n’étant pas un professionnel de la pose des panneaux, n’avait pas de moyen d’évaluer le temps nécessaire à la réalisation de l’ensemble des prestations accessoires et était en droit de se fier aux déclarations figurant dans un certificat de livraison non équivoque, pouvait donc légitimement en déduire que l’ensemble des biens commandés avaient été livrés et que les prestations accessoires d’obtention des autorisations administratives de mise en service de l’installation avaient été réalisées.
En revanche, il est aussi de principe que le prêteur commet une faute excluant le remboursement du capital emprunté lorsqu’il libère la totalité des fonds, alors qu’à la simple lecture du contrat de vente il aurait dû constater que sa validité était douteuse au regard des dispositions protectrices du code de la consommation relatives au démarchage à domicile.
Or, il a été précédemment relevé que le bon de commande conclu avec la société Sungold, par l’intermédiaire de laquelle la société Cofidis faisait présenter ses offres de crédit, comportait des irrégularités formelles apparentes relativement aux modalités d’exercice de la faculté de rétractation, qui auraient dû conduire le prêteur, professionnel des opérations de crédit affecté faisant distribuer ses crédits à l’occasion d’opérations de démarchage à domicile, à ne pas libérer les fonds entre les mains du fournisseur avant d’avoir à tout le moins vérifié auprès des époux [L] qu’ils entendaient confirmer l’acte irrégulier.
Le prêteur n’avait certes pas à assister les emprunteurs lors de la conclusion du contrat principal, mais il lui appartenait néanmoins de relever les anomalies apparentes du bon de commande, ce dont il résulte qu’en versant les fonds entre les mains du fournisseur, sans procéder à des vérifications complémentaires sur la régularité formelle de ce bon de commande, la société Cofidis a commis une faute susceptible de la priver du droit d’obtenir le remboursement du capital emprunté.
Toutefois, la société Cofidis fait valoir à juste titre que la dispense de remboursement du capital emprunté est subordonnée à la démonstration par l’emprunteur de l’existence d’un préjudice en lien causal avec la faute du prêteur.
Or, les époux [L] , qui se bornent à invoquer le fait que l’opération litigieuse les a conduits à s’endetter, alors que la liquidation judiciaire de la société Sungold les prive de la possibilité d’obtenir du fournisseur la restitution du prix de vente les époux [L], ne caractérisent nullement l’existence d’un préjudice en lien causal avec la faute du prêteur.
En effet, s’ils se sont endettés, l’annulation du contrat de prêt consécutivement à celle du contrat principal les dispensent à tout le moins de payer des intérêts au prêteur, et ils bénéficient en outre d’une installation qui a été raccordée au réseau, mise en service et produit de l’électricité revendue à EDF en vertu d’un contrat d’achat d’énergie dûment régularisé, alors que la liquidation judiciaire du fournisseur rend l’exécution de leur propre obligation de restituer le matériel livré plus qu’hypothétique.
Il n’y a dès lors pas lieu de dispenser les époux [L] de rembourser le capital emprunté.
Ils seront par conséquent condamnés au paiement de la somme de 21 500 euros, outre les intérêts de retard, au titre de cette restitution, le jugement attaqué étant réformé en ce sens.
La société Cofidis étant de son côté tenue de restituer les échéances réglées au cours de l’exécution du contrat de prêt annulé, la disposition de la décision l’ayant condamnée à ce titre, non critiquée par l’appelante dans le cadre de sa demande subsidiaire, sera quant à elle confirmée.
Sur la déchéance du droit du prêteur aux intérêts
L’annulation du contrat de prêt rend, à supposer même cette mesure bien fondée, la déchéance du droit du prêteur aux intérêts pour défaut de consultation du fichier national des incidents de remboursement des crédits aux particuliers inopérante.
En effet, les intérêts payés doivent déjà être remboursés aux époux [L] au titre des restitutions de part et d’autre et que, pour le même motif, les intérêts à échoir ne sont plus dus.
Sur les dommages-intérêts
Les époux [L] demandent subsidiairement à la cour, dans le cas où ils ne seraient pas dispensés de restituer le capital emprunté, de condamner la société Cofidis au paiement de dommages-intérêts d’un montant de 12 200 euros correspondant à deux tiers du capital emprunté en réparation de leur préjudice financier.
Cependant, il vient d’être observé que, si le prêteur a effectivement commis une faute lors de la libération des fonds entre les mains du fournisseur, il n’en est résulté aucun préjudice en lien causal avec celle-ci.
Ils réclament en outre le paiement des sommes de 3 337 euros au titre des frais de désinstallation du matériel, de 3 000 euros au titre de leurs préjudice économique et trouble de jouissance résultant de l’insuffisance de rentabilité de l’opération, et de 3 000 euros en réparation de leur préjudice moral.
S’agissant du coût des travaux de dépose des panneaux et de remise en état de la toiture, il doit être observé que le prêteur est un tiers au contrat principal et ne saurait par conséquent se voir imputer les conséquences dommageables des restitutions de part et d’autre consécutives à l’annulation de ce contrat.
Le préjudice économique et le trouble de jouissance allégués sont quant à eux sans lien causal avec la faute de la société Cofidis, l’insuffisance de rentabilité de l’opération étant apparue postérieurement au déblocage des fonds, et les intimés n’apportent enfin pas de preuve de l’existence du préjudice moral qu’ils allèguent.
Ces demandes ont donc été à juste titre rejetées par le premier juge.
Sur les frais irrépétibles et les dépens
Principalement succombant devant la cour, les époux [L] supporteront les dépens d’appel.
En revanche, il n’y a pas matière à en application de l’article 700 du code de procédure civile en cause d’appel au bénéfice de constituent, à les supposer avérés, des inexécutions contractuelles, et non des vices de la formation du contrat, de sorte qu’elles ne sauraient fondées une annulation de celui-ci.
PAR CES MOTIFS, LA COUR :
Infirme le jugement rendu le 8 février 2021 par le tribunal d’instance de Nantes en ce qu’il a débouté la société Cofidis de sa demande de restitution du capital emprunté ;
Condamne solidairement M. [J] [L] et à Mme [O] [Z] épouse [L] à payer à ce titre à la société Cofidis la somme de 21 500 euros, avec intérêts au taux légal à compter du présent arrêt ;
Confirme le jugement attaqué en ses autres dispositions ;
Dit n’y avoir lieu à déchéance du droit du prêteur aux intérêts ;
Condamne M. [J] [L] et à Mme [O] [Z] épouse [L] aux dépens d’appel ;
Rejette toutes autres demandes contraires ou plus amples.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT