Droit de rétractation : décision du 16 novembre 2023 Cour d’appel de Paris RG n° 22/00261
Droit de rétractation : décision du 16 novembre 2023 Cour d’appel de Paris RG n° 22/00261
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Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 4 – Chambre 9 – A

ARRÊT DU 16 NOVEMBRE 2023

(n° , 11 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 22/00261 – N° Portalis 35L7-V-B7G-CE5IB

Décision déférée à la Cour : Jugement du 18 novembre 2021 – Juge des contentieux de la protection de PARIS – RG n° 11-20-004000

APPELANTE

La société COFIDIS, société à directoire et conseil de surveillance agissant poursuites et diligences de son représentant légal domicilié audit siège

N° SIRET : 325 307 106 00097

[Adresse 4]

[Adresse 4]

[Localité 3]

représentée par Me Olivier HASCOET de la SELARL HKH AVOCATS, avocat au barreau de l’ESSONNE

INTIMÉE

Madame [G] [I] épouse [K]

née le [Date naissance 2] 1972 à [Localité 6] (92)

[Adresse 1]

[Adresse 1]

[Localité 5]

représentée par Me Maude HUPIN, avocat au barreau de PARIS, toque : G0625

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 19 septembre 2023, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Mme Muriel DURAND, Présidente de chambre, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme Muriel DURAND, Présidente de chambre

Mme Laurence ARBELLOT, Conseillère

Mme Sophie COULIBEUF, Conseillère

Greffière, lors des débats : Mme Camille LEPAGE

ARRÊT :

– CONTRADICTOIRE

– par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

– signé par Mme Muriel DURAND, Présidente et par Mme Camille LEPAGE, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Selon offre préalable acceptée le 8 décembre 2015, la société Cofidis a consenti à Mme [G] [K] née [I] un crédit personnel destiné au rachat de crédits d’un montant en capital de 34 600 euros remboursable en 120 mensualités de 441,61 euros hors assurance incluant les intérêts au taux nominal de 7,55 %, soit une mensualité avec assurance de 491,19 euros et un TAEG de 7,54 %.

Plusieurs échéances n’ayant pas été honorées, la société Cofidis a entendu se prévaloir de la déchéance du terme.

Par acte du 14 février 2020, la société Cofidis a fait assigner Mme [I] devant le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Paris en paiement du solde du prêt lequel, par jugement contradictoire du 18 novembre 2021 :

– a déclaré la société Cofidis recevable en son action,

– l’a déchue de son droit aux intérêts contractuels,

– a condamné Mme [I] au paiement de la somme de 19 242,14 euros avec intérêts au taux légal à compter du 18 septembre 2019 sans majoration,

– a autorisé Mme [I] à s’acquitter de cette somme en 12 mensualités de 1 603,51 euros, la dernière correspondant au solde avec une clause de déchéance du terme,

– a débouté la société Cofidis de ses demandes d’indemnité au titre de la clause pénale et de capitalisation des intérêts et de toute autre demande,

– a débouté Mme [I] de sa demande d’injonction de production des décomptes, de nullité de la stipulation d’intérêts, de substitution du taux légal en vigueur l’année de conclusion de l’offre du prêt au taux d’intérêt conventionnel et de computation des intérêts indûment perçus jusqu’à la date du jugement à intervenir, de dommages et intérêts, de compensation, de limitation de la clause pénale, d’imputation des paiements sur le capital, de report des paiements et d’indemnité au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– a condamné Mme [I] à payer à la société Cofidis la somme de 500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile et aux dépens,

– a rappelé que l’exécution provisoire était de droit.

Après avoir contrôlé la recevabilité de la demande au regard de la forclusion, il a relevé que la déchéance du terme avait été valablement prononcée et que la date de déblocage des fonds était postérieure au délai de 7 jours de l’article L. 311-17 du code de la consommation si bien que le contrat ne pouvait être nul pour ce motif.

Pour prononcer la déchéance du droit aux intérêts contractuels, il a retenu s’agissant du TAEG mentionné sur l’offre de crédit, que ne figuraient ni la durée de la période ni le taux de période et que de plus, il était inférieur au taux contractuel ce qui démontrait qu’il était nécessairement erroné et que le tableau d’amortissement lui-même mentionnait un TAEG de 7,59 %. Il a dès lors considéré que l’encadré ne mentionnait pas un TAEG exact et que le contrat ne satisfaisait pas aux dispositions de l’article L. 311-18 du code de la consommation. Il a ajouté que l’offre produite par la société Cofidis ne comportait pas de bordereau de rétractation détachable.

Il a considéré que la créance pouvait être déterminée sans que soit ordonnée la production de nouveaux décomptes et au seul vu de l’historique et il a déduit les sommes versées soit 15 357,86 euros du capital emprunté de 34 600 euros. Il a relevé que pour assurer l’effectivité de la sanction il fallait écarter l’application des dispositions relatives à la majoration de plein droit du taux légal de 5 points.

Il a enfin octroyé des délais en considération de la situation de Mme [I].

Par déclaration réalisée par voie électronique le 23 décembre 2021, la société Cofidis a interjeté appel de cette décision.

Aux termes de ses dernières conclusions déposées par voie électronique le 24 août 2022, la société Cofidis demande à la cour :

– de la déclarer recevable et bien fondée en ses demandes, fins et conclusions,

– de déclarer Mme [I] mal fondée en ses demandes, fins et conclusions et de l’en débouter,

– d’infirmer le jugement,

– de condamner Mme [I] à lui payer la somme de 33 813,69 euros avec intérêts au taux contractuel de 7,55 % l’an à compter du jour de la mise en demeure du 18 septembre 2019,

– subsidiairement en cas de confirmation de la déchéance du droit aux intérêts, de condamner Mme [I] à lui payer la somme de 19 242,14 euros, avec intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 18 septembre 2019, sans suppression de la majoration de 5 points,

– en tout état de cause de condamner Mme [I] à lui payer la somme de 1 200 euros sur le fondement de l’article sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile et les dépens.

Elle fait valoir qu’il n’appartient pas au prêteur de formuler plusieurs hypothèses de calcul du TAEG puisque celui qui figure dans l’encadré a été calculé sur l’hypothèse d’un déblocage intégral du crédit, ce qui a été le cas en l’espèce. Elle ajoute que le taux débiteur fixe est de 7,55 %, le TAEG fixe est de 7,54 %, pour un montant total dû de 49 392,59 euros et que l’offre de prêt précise que “le montant des intérêts, le montant des échéances et la durée indiquée ci-dessus sont calculés pour le paiement de la première échéance 30 jours après la date de mise à disposition des fonds” et que ceci est repris dans la FIPEN. Elle soutient avoir respecté les mentions obligatoires.

Elle rappelle que le bordereau détachable de rétractation n’est à joindre qu’à l’exemplaire du contrat de prêt de l’emprunteur, qu’il n’a pas à figurer sur l’exemplaire du prêteur, que Mme [I] a reconnu demeurer en possession d’un exemplaire du contrat doté d’un bordereau de rétractation et qu’elle verse aux débats une liasse contractuelle identique qui démontre la présence d’un tel bordereau.

Elle indique produire la FIPEN et la notice d’assurance et se prévaut des clauses de reconnaissance signées par Mme [I] à cet égard, puis souligne que le code n’impose pas que ces documents soient signés par l’emprunteur.

Elle ajoute que la déchéance du terme a été valablement prononcée après mise en demeure restée infructueuse.

Elle conteste toute méconnaissance de ses obligations, soutient qu’un prétendu manquement à une information quant aux risques encourus en cas de non-paiement n’est pas sanctionné par une déchéance du droit aux intérêts contractuels, que le contrat de prêt informe l’emprunteur des risques de résiliation en cas de non-paiement, comme du risque de surendettement, que compte tenu des revenus de Mme [I], elle ne présentait aucun risque d’endettement et qu’il s’agissait en outre de regroupement de crédits de nature à alléger la charge des remboursements.

Elle souligne ne pas avoir présenté de demande d’anatocisme en appel mais insiste sur son droit à percevoir une clause pénale de 8 %, arguant de ce que tout règlement a été interrompu à compter du mois d’avril 2018.

Elle s’oppose à tout délai de paiement.

A titre subsidiaire, elle considère que la suppression de la majoration de l’article L. 313-3 du code monétaire et financier ne peut être prononcée que par le juge de l’exécution.

Aux termes de ses conclusions déposées par voie électronique le 14 mai 2022, Mme [I] demande à la cour :

– de la juger recevable et bien fondée en ses demandes, fins et conclusions,

– de débouter la société Cofidis de toutes ses demandes, fins et prétentions,

– de confirmer le jugement en ce qu’il a prononcé la déchéance totale des intérêts conventionnels et fait droit partiellement à sa demande de délais,

– d’infirmer le jugement en ce qu’il a rejeté ses autres demandes,

– et statuant à nouveau, de dire que la société Cofidis n’a pas valablement prononcé la déchéance du terme et de juger sans effet l’exigibilité immédiate du crédit prononcée à tort par le prêteur,

– de prononcer la déchéance du droit aux intérêts, de juger que les intérêts indûment versés par elle seront imputés sur le capital restant dû,

– d’enjoindre à la banque de produire un décompte conforme,

– de prononcer la nullité des stipulations relatives aux intérêts conventionnels du prêt litigieux,

– de prononcer la substitution du taux légal en vigueur l’année de conclusion de l’offre de prêt au taux d’intérêt conventionnel et d’ordonner l’imputation des intérêts indûment perçus jusqu’à la date du jugement à intervenir, déduction faite des intérêts légaux alors échus, sur le capital restant dû ainsi que la réduction de la dette alléguée par la banque du montant de la différence entre les intérêts conventionnels et le taux légal applicable,

– d’enjoindre sous astreinte de 200 euros par jour de retard à compter du 8ème jour suivant la signification du jugement à intervenir, à la banque de produire un nouveau décompte de sa créance prenant en compte la substitution du taux d’intérêt légal au taux conventionnel et cette imputation sur le capital restant dû,

– de condamner la banque à lui payer la somme de 10 000 euros en raison des manquements à ses obligations de conseil et de mise en garde, et en raison de la déchéance du terme prononcée à tort,

– d’ordonner la compensation de cette somme de 10 000 euros avec celles restant dues par elle,

– de limiter l’indemnité de 8 % à la somme de 1 euro,

– de juger sur la demande de délais de paiement que le taux d’intérêt applicable aux sommes réclamées sera le taux légal, que les règlements à intervenir s’imputeront en priorité sur le capital restant dû, et de lui accorder un moratoire de deux ans ou les plus larges délais de paiement,

– de condamner la société Cofidis au paiement de la somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.

Elle fait valoir que le contrat de prêt ne mentionne ni le taux de période ni la durée de la période en violation des dispositions de l’ancien article R. 313-1 du code de la consommation et qu’à défaut de mention du taux de période et de la périodicité du taux de période par le contrat de prêt, le débiteur est fondé à obtenir la substitution du taux légal au taux contractuel. Elle ajoute que le TAEG mentionné de 7,54 % est inférieur au taux conventionnel de 7,55 %, ce qui démontre bien et indiscutablement une erreur de calcul. Elle en déduit la nullité de la stipulation d’intérêts et à défaut la déchéance du droit aux intérêts.

Elle fait valoir que la déchéance du droit aux intérêts est aussi encourue du fait de l’absence du bordereau de rétractation et soutient que la banque ne démontre pas lui avoir remis un contrat pourvu d’un tel bordereau, la clause de reconnaissance étant insuffisante.

Elle conteste la régularité de la déchéance du terme faisant valoir qu’il n’est pas possible d’apprécier le respect des modalités de la déchéance du terme compte tenu de la communication parcellaire de l’offre, que certaines pages sont manquantes ou non paraphées par elle et donc ne lui sont pas opposables. Elle ajoute que faire droit à la demande de résolution reviendrait à autoriser une banque à prononcer abusivement la déchéance du terme.

Elle soutient que la notice d’assurance ne lui a pas été remise non plus que la FIPEN et que la société Cofidis ne démontre pas le contraire, si bien que la déchéance du droit aux intérêts est aussi encourue de ces chefs comme en l’absence d’alerte suite au premier impayé.

Elle ajoute avoir payé 32 échéances de 491,19 euros et ne doit plus en cas de déchéance du droit aux intérêts que la somme de 18 881,92 euros et non celle de 19 242,14 euros retenue par le tribunal.

Elle soutient qu’en lui accordant ce crédit la société Cofidis a aggravé son endettement même si elle a réduit le montant des échéances mensuelles et ce sans vérifier suffisamment sa situation ni l’avertir des risques d’endettement excessif et qu’elle n’a pas respecté son devoir de conseil et de mise en garde ce qui lui a causé un préjudice qu’elle estime à 10 000 euros.

Elle rappelle que la banque ne peut en matière de crédit à la consommation réclamer la capitalisation des intérêts et demande à la cour de réduire la clause pénale excessive à 1 euro.

Elle sollicite des délais de paiement avec imputation prioritaire sur le capital et limitation des intérêts au taux légal en raison des difficultés financières importantes qu’elle rencontre.

Pour un plus ample exposé des faits, moyens et prétentions des parties, il est renvoyé aux écritures de celle-ci conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 23 mai 2023 et l’affaire a été appelée à l’audience le 19 septembre 2023.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la demande en paiement

Le présent litige est relatif à un crédit souscrit le 8 décembre 2015 soumis aux dispositions de la loi n° 2010-737 du 1er juillet 2010 de sorte qu’il doit être fait application des articles du code de la consommation dans leur rédaction en vigueur après le 1er mai 2011 et leur numérotation antérieure à l’ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016 et au décret n° 2016-884 du 29 juin 2016.

Sur la forclusion

La recevabilité de l’action de la société Cofidis au regard de la forclusion, vérifiée par le premier juge, n’est pas remise en cause à hauteur d’appel.

Sur la déchéance du terme

La cour observe que Mme [I] ne produit aux termes de son bordereau que les “pièces adverses”.

Le contrat produit par la société Cofidis mentionne bien une clause de déchéance du terme en page 1 de l’offre. Il importe peu que la signature de Mme [I] portant acceptation de l’offre ne figure qu’en page 2 à la fin de la reproduction des conditions générales du prêt. Aucune disposition n’oblige à ce que l’emprunteur paraphe ou signe chaque paragraphe.

La société Cofidis verse aux débats la mise en demeure avant déchéance du terme du 7 septembre 2019 enjoignant à Mme [I] de régler l’arriéré de 3 634,78 euros sous 11 jours à peine de déchéance du terme.

Mme [I] n’a pas régularisé ni dans ce délai ni ensuite. Il en résulte que la société Cofidis se prévaut de manière légitime de la déchéance du terme du contrat et de l’exigibilité des sommes dues et le jugement doit donc être confirmé en ce qu’il a retenu que la déchéance du terme avait été régulièrement prononcée.

Sur la déchéance du droit aux intérêts

Le taux effectif global

L’article L. 311-18 (devenu L. 312-28) du code de la consommation dispose qu’un encadré, inséré au début du contrat, informe l’emprunteur des caractéristiques essentielles du crédit.

Il résulte de l’article L. 311-48 al.1 (devenu L. 341-1) du code de la consommation que lorsque le prêteur n’a pas respecté les obligations fixées à l’article L. 311-18 (devenu L. 312-28), il est déchu du droit aux intérêts.

L’article R. 311-5 (devenu R. 312-10) précise que l’encadré mentionné à l’article L. 311-18 (devenu L. 312-28) indique en caractères plus apparents que le reste du contrat, dans l’ordre choisi par le prêteur [‘]

f) Le taux annuel effectif global et le montant total dû par l’emprunteur, calculés au moment de la conclusion du contrat de crédit. Toutes les hypothèses utilisées pour calculer ce taux sont mentionnées.

Le TAEG est défini par les articles L. 313-1 et suivants du code de la consommation dans sa version applicable au litige et son calcul est présenté à l’article R. 313-1 dans sa version applicable au litige pour ce qui concerne les crédits à la consommation qui ne sont pas destinés à financer les besoins d’une activité professionnelle et ne sont pas destinés à des personnes morales de droit public. Il prévoit expressément que seule la durée de la période doit être expressément communiquée à l’emprunteur. L’exigence de communication à l’emprunteur du taux de période et de la durée de la période n’est posée par l’article R. 313-1 que pour ce qui concerne les crédits destinés à financer les besoins d’une activité professionnelle ou qui sont destinés à des personnes morales de droit public.

Dès lors, la durée de période (mensuelle) figurant au contrat, ces dispositions sont respectées.

Le contrat précise que le taux nominal est de 7,55 % et que le TAEG est de 7,54 % et qu’il a été calculé “dans l’hypothèse d’un financement le 7 décembre 2015 et d’une première échéance le 5 mars 2016. Il est calculé selon la méthode d’équivalence selon une périodicité mensuelle sur la base du taux débiteur pour le montant et la durée indiqués ci-dessus”.

Il n’y a aucun frais de dossier et le coût de l’assurance n’étant pas obligatoire ne rentre pas dans le calcul du TAEG. Le taux nominal et le TAEG pourraient donc en théorie être le même mais la différence ne dépassant pas une décimale, aucune déchéance du droit aux intérêts n’est encourue de ce chef. Il est indifférent que le tableau d’amortissement mentionne un taux erroné, ceci n’étant pas sanctionné par la déchéance du droit aux intérêts.

Le contrat n’encourt pas non plus de nullité de la stipulation d’intérêts pour ce motif et Mme [I] doit être déboutée de cette demande, le jugement étant confirmé en ce qu’il l’a déboutée de cette demande de nullité.

Le bordereau de rétractation

Il résulte de l’article L. 311-12 du code de la consommation devenu L. 312-21 qu’afin de faciliter l’exercice par l’emprunteur de son droit de rétractation, “un formulaire détachable est joint à son exemplaire du contrat de crédit”, lequel doit aux termes de l’article R. 311-4 du même code (devenu R. 312-9) être établi conformément à un modèle type et ne peut comporter au verso aucune mention autre que le nom et l’adresse du prêteur.

Il résulte de l’article L. 311-48 al.1 du code de la consommation (devenu L. 341-4) que lorsque le prêteur n’a pas respecté les obligations fixées à l’article L. 311-12, il est déchu du droit aux intérêts.

Il incombe au prêteur de rapporter la preuve de ce qu’il a satisfait à ses obligations et la signature par l’emprunteur de l’offre préalable de crédit comportant une clause selon laquelle il reconnaît que le prêteur lui a remis le bordereau de rétractation constitue seulement un indice qu’il incombe à celui-ci de corroborer par un ou plusieurs éléments complémentaires

En l’espèce, il ressort de l’exemplaire de contrat en possession de la société Cofidis, que par une mention pré-imprimée au verso de l’offre préalable acceptée le 8 décembre 2015 par Mme [I] que cette dernière a reconnu rester en possession d’un exemplaire du contrat doté d’un formulaire détachable de rétractation. L’exemplaire “prêteur” produit est dépourvu de bordereau de rétractation.

A hauteur d’appel, la société Cofidis produit en sa pièce n° 17, un exemple de liasse contractuelle constituée de 17 pages, dont un exemplaire “contrat à renvoyer” et un exemplaire “à conserver”, ce dernier exemplaire étant bien pourvu d’un bordereau détachable de rétractation.

Cette liasse démontre suffisamment que l’exemplaire de contrat soumis à validation de l’emprunteur était d’un bordereau détachable de rétractation et les critiques émises par l’intimée qui se garde de produire l’exemplaire du contrat dont elle est entrée en possession doivent être écartées. Aucune déchéance du droit aux intérêts n’est encourue de ce chef

L’alerte en cas d’impayés

L’article L. 311-22-2 du code de la consommation dans sa version applicable au litige prévoit que “Dès le premier manquement de l’emprunteur à son obligation de rembourser, le prêteur est tenu d’informer celui-ci des risques qu’il encourt au titre des articles L. 311-24 et L. 311-25 du présent code ainsi que, le cas échéant, au titre de l’article L. 141-3 du code des assurances”.

Pour autant cette obligation n’est pas sanctionnée par la déchéance du droit aux intérêts et ne peut donner lieu qu’à des dommages et intérêts en cas de préjudice démontré. Or il n’est pas justifié d’un préjudice subi par Mme [I] du fait que cette alerte n’ait pas été envoyée suite à un impayé ponctuel. Il ne sera donc tiré aucune conséquence de ce manquement.

La FIPEN

Il résulte de l’article L. 311-6 du code de la consommation applicable au cas d’espèce que préalablement à la conclusion du contrat de crédit, le prêteur ou l’intermédiaire de crédit donne à l’emprunteur, par écrit ou sur un autre support durable, les informations nécessaires à la comparaison de différentes offres et permettant à l’emprunteur, compte tenu de ses préférences, d’appréhender clairement l’étendue de son engagement.

Cette fiche d’informations précontractuelles -FIPEN- est exigée à peine de déchéance totale du droit aux intérêts par l’article L. 311-48 du même code, étant précisé qu’il incombe au prêteur de rapporter la preuve de ce qu’il a satisfait à son obligation d’information.

A cet égard, la clause type, figurant au contrat de prêt, selon laquelle l’emprunteur reconnaît avoir reçu la fiche d’informations précontractuelles normalisées européennes, n’est qu’un indice qu’il incombe au prêteur de corroborer par un ou plusieurs éléments complémentaires.

Il a toutefois été jugé qu’un document qui émane du seul prêteur ne peut utilement corroborer les mentions de cette clause type de l’offre de prêt. (Cass. civ. 1, 7 juin 2023, n° 22-15.552).

Dès lors que Mme [I] conteste avoir reçu cette fiche, ni la production de la FIPEN remplie par le prêteur, ni la production d’une liasse vierge comportant par principe une FIPEN ne saurait suffire à corroborer cette clause.

Il doit dès lors être considéré que la société Cofidis ne rapporte pas la preuve d’avoir respecté l’obligation d’information et la déchéance du droit aux intérêts est encourue de ce seul fait sans qu’il soit besoin d’examiner les nouveaux moyens développés à l’appui de cette demande.

Le jugement doit donc être confirmé en ce qu’il a prononcé une déchéance du droit aux intérêts.

Sur les sommes dues et l’exigence de décomptes

Aux termes de l’article L. 311-48 du code de la consommation dans sa version applicable au litige, lorsque le prêteur est déchu du droit aux intérêts, l’emprunteur n’est tenu qu’au seul remboursement du capital suivant l’échéancier prévu, ainsi que, le cas échéant, au paiement des intérêts dont le prêteur n’a pas été déchu. Les sommes déjà perçues par le prêteur au titre des intérêts, qui sont productives d’intérêts au taux de l’intérêt légal à compter du jour de leur versement, sont restituées par le prêteur ou imputées sur le capital restant dû.

Il y a donc lieu de déduire de la totalité des sommes empruntées soit 34 600 euros la totalité des sommes payées telles qu’elles résultent de l’historique de compte sans qu’il soit besoin d’exiger de nouveaux décomptes, soit 15 357,86 euros, étant observé que les règlements de Mme [I] n’ont pas été réguliers et qu’elle n’a pas réglé 32 échéances de 491,19 euros.

Le jugement déféré doit donc être confirmé en ce qu’il a condamné Mme [I] à payer à la société Cofidis la somme de 19 242,14 euros. Il doit également être confirmé en ce qu’il l’a déboutée de ses demandes d’injonction de production des décomptes, de substitution du taux légal en vigueur l’année de conclusion de l’offre du prêt au taux d’intérêt conventionnel et de computation des intérêts indûment perçus jusqu’à la date du jugement à intervenir, de report des paiements.

La limitation légale de la créance du préteur exclut qu’il puisse prétendre au paiement de toute autre somme et notamment de la clause pénale prévue par l’article L. 311-24 devenu L. 312-39 du code de la consommation. Le jugement doit donc également être confirmé sur ce point.

Le prêteur, bien que déchu de son droit aux intérêts, demeure fondé à solliciter le paiement des intérêts au taux légal, en vertu de l’article 1153 devenu 1231-6 du code civil, sur le capital restant dû, majoré de plein-droit deux mois après le caractère exécutoire de la décision de justice en application de l’article L. 313-3 du code monétaire et financier.

Ces dispositions légales doivent cependant être écartées s’il en résulte pour le prêteur la perception de montants équivalents ou proches de ceux qu’il aurait perçus si la déchéance du droit aux intérêts n’avait pas été prononcée, sauf à faire perdre à cette sanction ses caractères de dissuasion et d’efficacité (CJUE 27 mars 2014, affaire C-565/12, Le Crédit Lyonnais SA / Fesih Kalhan).

En l’espèce, le crédit personnel a été accordé à un taux d’intérêt annuel fixe de 7,55 %. Dès lors, les montants susceptibles d’être effectivement perçus par le prêteur au titre des intérêts au taux légal apparaissent significativement inférieurs à celui résultant du taux légal sauf en cas de majoration de cinq points. Il convient en conséquence de ne pas faire application de l’article 1153 devenu 1231-6 du code civil dans son intégralité et de n’écarter que l’application de l’article L. 313-3 du code monétaire et financier. La somme restant due en capital au titre de ce crédit portera intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure de payer effectuée simultanément au prononcé de la déchéance du terme soit le 18 septembre 2019 sans majoration de retard, le jugement étant confirmé sur ce point.

Aucune demande n’est formée à hauteur d’appel au titre de la capitalisation des intérêts et le jugement sera donc confirmé en ce qu’il a débouté la banque de cette demande.

Sur le devoir de conseil et de mise en garde

Mme [I] soutient que la banque a manqué à ses obligations de conseil et de mise en garde.

Il convient de rappeler que si le banquier n’est tenu que d’un devoir de mise en garde par rapport au risque d’endettement généré par le crédit contracté au regard des capacités financières de l’emprunteur. Il est admis qu’en l’absence de risque d’endettement, le banquier n’est pas tenu à ce devoir de mise en garde.

La fiche de dialogue signée par Mme [I] mentionne qu’elle perçoit 3 064 euros de salaire plus 800 euros de pension alimentaire par mois soit un revenu mensuel de 3 864 euros. Ses crédits en cours totalisent 610,15 euros par mois (309,15 + 169 chez Cetelem et 132 dans une autre banque), qu’elle a une dette fiscale de 780 euros et un découvert bancaire de 3 000 euros.

Le crédit devait rembourser la dette fiscale, le découvert bancaire et les crédits Cetelem qui représentaient 309,15 + 169 = 478,15 euros par mois. Dès lors ses mensualités de crédit allaient atteindre un total de 132 + 491,19 = 623,19 euros soit un taux d’endettement de 16,13 %.

Ainsi il ne saurait être reproché à la banque de n’avoir pas satisfait une obligation générale de mise en garde à laquelle elle n’était pas tenue dès lors que le crédit ne faisait pas naître un risque d’endettement excessif. Il n’appartenait pas au demeurant à la banque de s’immiscer dans les choix de sa cliente dont il sera en outre observé qu’elle occupe un emploi d’analyste risque chez Natexis.

Mme [I] doit être déboutée de sa demande de dommages et intérêts et le jugement confirmé sur ce point. Il doit également être confirmé en ce qu’il a débouté Mme [I] de sa demande de dommages et intérêts et de compensation.

Sur la demande de délais de paiement

Mme [I] ne produit aucune pièce quant à sa situation financière et ne justifie pas du moindre règlement depuis le jugement. Dès lors le jugement doit être infirmé en ce qu’il a accordé des délais et Mme [I] doit être déboutée de cette demande. Le jugement doit être confirmé en ce qu’il a débouté Mme [I] de sa demande d’imputation des paiements sur le capital et de report des paiements.

Sur les autres demandes

Les développements qui précèdent doivent conduire à rejeter les autres demandes de Mme [I].

Le jugement doit être confirmé en ce qu’il a condamné Mme [I] aux dépens de première instance et au paiement d’une somme de 500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

La société Cofidis qui succombe en grande partie en son appel doit conserver la charge de ses dépens d’appel et de ses frais irrépétibles et il apparaît équitable de laisser supporter à Mme [I] la charge de ses propres frais irrépétibles.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Statuant par arrêt contradictoire et en dernier ressort,

Confirme le jugement sauf en ce qu’il a octroyé des délais de paiement à Mme [G] [K] née [I] ;

Statuant à nouveau,

Déboute Mme [G] [K] née [I] de sa demande de délais de paiement ;

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Laisse les dépens d’appel à la charge de la société Cofidis ;

Rejette toute demande plus ample ou contraire.

La greffière La présidente

 


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