Droit de rétractation : décision du 12 janvier 2023 Cour d’appel de Montpellier RG n° 20/00886
Droit de rétractation : décision du 12 janvier 2023 Cour d’appel de Montpellier RG n° 20/00886
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COUR D’APPEL DE MONTPELLIER

4e chambre civile

ARRET DU 12 JANVIER 2023

Numéro d’inscription au répertoire général :

N° RG 20/00886 – N° Portalis DBVK-V-B7E-OQOG

Décision déférée à la Cour :

Jugement du 12 NOVEMBRE 2019

TRIBUNAL D’INSTANCE DE MILLAU

N° RG 18/000123

APPELANT :

Monsieur [L] [W]

né le 04 Avril 1947 à [Localité 3] (PAYS-BAS)

[Adresse 4]

[Adresse 4]

[Adresse 4]

Représenté par Me Julien CODERCH de la SCP SAGARD – CODERCH-HERRE ET ASSOCIES, avocat au barreau de PYRENEES-ORIENTALES, avocat postulant non plaidant

INTIMEES :

SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représentée par Me Sandy RAMAHANDRIARIVELO de la SCP RAMAHANDRIARIVELO – DUBOIS, avocat au barreau de MONTPELLIER

S.A.S. PREMIUM ENERGY FRANCE représenté par son représentant légal en exercice domicilié en cette qualité au siège social

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Représentée par Me Serge MEGNIN, avocat au barreau de CARCASSONNE substituant Me Gilles ARGELLIES de la SCP GILLES ARGELLIES, EMILY APOLLIS – AVOCATS ASSOCIES, avocat au barreau de MONTPELLIER

Ordonnance de clôture du 24 Octobre 2022

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 14 NOVEMBRE 2022,en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant M. Philippe SOUBEYRAN, Président de chambre, chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

M. Philippe SOUBEYRAN, Président de chambre

M. Frédéric DENJEAN, Conseiller

Madame Marianne FEBVRE, Conseillère

Greffier lors des débats : Madame Audrey VALERO

ARRET :

– Contradictoire ;

– prononcé par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile ;

– signé par M. Philippe SOUBEYRAN, Président de chambre, et par Madame Audrey VALERO, Greffière.

*

* *

FAITS, PROCÉDURE, PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Démarché à son domicile, M. [W] a passé commande le 27 septembre 2016 auprès de la SAS Premium Energy (la société) d’une installation photovoltaïque de 2500 Wc pour le prix de 11900€, financé par un crédit affecté souscrit le même jour auprès de la société BNP Paribas Personal Finance (BNPPPF).

Le 21 octobre 2016, la société a procédé à la pose des panneaux et M. [W] a signé un procès-verbal de réception sans réserve et la demande de déblocage des fonds par BNPPPF au profit de la société.

Après avoir vainement sollicité de la société l’annulation de la commande par courrier d’avocat du 13 mars 2017, M. [W] a fait citer les sociétés Premium Energy et BNPPPF par actes d’huissier du 10 avril 2017 devant le tribunal d’instance de Millau aux fins d’entendre prononcer la nullité des contrats.

Par jugement du 12 novembre 2019, cette juridiction a :

– prononcé la nullité du contrat de vente conclu le 27 septembre 2016

– constaté la nullité de plein droit du contrat de prêt affecté

– dit que la société BNPPPF n’a pas commis de faute de nature à la priver de son droit à restitution

– condamné M. [W] à rembourser à la société BNPPPF le capital emprunté, soit la somme de 11900€ avec intérêts au taux légal à compter de la signification de la décision

– débouté la société Premium Energy et M. [W] de leurs demandes de dommages et intérêts

– dit n’y avoir lieu à application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile

– dit que chacune des parties supportera la charge de ses propres dépens.

Vu la déclaration d’appel du 13 février 2020 par M. [W].

Vu ses dernières conclusions transmises par voie électronique le 19 octobre 2022 auxquelles il est renvoyé pour de plus amples développements sur ses moyens, au terme desquelles M. [W] demande de : ‘INFIRMER le jugement seulement en ce qu’il :

‘DIT que la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE n’a pas commis de faute de nature à la priver à son droit à restitution du capital mis à disposition ;

CONDAMNE [L] [W] à rembourser à la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE le capital emprunté, soit la somme de ONZE MILLE NEUF CENT € (11 900,00 €), avec intérêts au taux légal à compter de la signification du jugement ;

DIT n’y avoir application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

DIT que chacune des parties supportera la charge de ses propres dépens.

Si l’annulation du bon de commande et du crédit affecté était infirmée, ORDONNER leur résolution.

ORDONNER à la SASU PREMIUM ENERGY, redevenue de plein droit propriétaire du matériel, d’effectuer à ses frais la remise matérielle du domicile de monsieur [L] [W] en l’état antérieur.

CONDAMNER la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE à restituer à monsieur [L] [W] l’intégralité des sommes perçues au titre du crédit affecté.

ORDONNER l’effacement de monsieur [L] [W] du fichier des incidents de remboursement des crédits aux particuliers (FICP).

PRIVER la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE de sa créance de restitution à l’encontre de monsieur [L] [W].

CONDAMNER la SASU PREMIUM ENERGY à payer directement à la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE la somme de 11.900,00 € ou, à défaut, CONDAMNER la SASU PREMIUM ENERGY à la payer à monsieur [L] [W].

DEBOUTER la SASU PREMIUM ENERGY et la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE de l’intégralité de leurs demandes portées à l’encontre de monsieur [L] [W].

DECHOIR à défaut totalement du droit aux intérêts la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE sur le crédit affecté querellé, DIRE que monsieur [L] [W] est uniquement redevable du seul capital emprunté à l’exclusion de tout intérêt, cotisation ou frais à l’égard de la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE et après déduction des sommes déjà perçues.

CONDAMNER in solidum la SASU PREMIUM ENERGY et la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE à payer à monsieur [L] [W] la somme de 5 000,00 € au titre des frais irrépétibles.

CONDAMNER in solidum la SASU PREMIUM ENERGY et la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE aux entiers dépens, tant de première instance qu’en cause d’appel, avec distraction au profit de maître Julien CODERCH, avocat, et en ce comprise l’intégralité des droits proportionnels de recouvrement et d’encaissement prévus à l’article L. 111-8 du Code des procédures civiles d’exécution.’

Vu les dernières conclusions transmises par voie électronique le 21 octobre 2022 auxquelles il est renvoyé pour de plus amples développements sur ses moyens, au terme desquelles la société Premium Energy demande :

‘Vu les articles L.221-18 et suivants du Code de la consommation,

Vu les anciens articles 1116, 1338 et suivants du Code civil,

Vu les articles 1224 suivants du Code civil,

Vu les articles L.211-4 et suivants du Code de la consommation,

Vu l’article L.312-56 du Code de la consommation,

Vu l’ensemble des éléments versés au débat,

Il est demandé à la Cour d’appel de Montpellier de :

– DECLARER la Société PREMIUM ENERGY recevable et bien fondée en son appel incident ;

Y faisant droit,

– INFIRMER jugement rendu 12 novembre 2019 par le tribunal d’instance de Millau sauf en ce qu’il a débouté la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE de sa demande de garantie à l’encontre de la société PREMIUM ENERGY ;

– REJETER toutes les prétentions et demandes formées par Monsieur [W] à l’encontre de la concluante;

– REJETER toutes les prétentions et demandes formées par la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE à l’encontre de la concluante ;

Statuant à nouveau,

A titre principal,

Sur l’infirmation du jugement déféré en ce qu’il a fait droit aux demandes de nullité du contrat conclu entre Monsieur [W] et la Société PREMIUM ENERGY

– JUGER que Monsieur [W] succombe totalement dans l’administration de la preuve de la violation des dispositions qu’il invoque ;

– JUGER que les dispositions prescrites par les dispositions du Code de la consommation ont été respectées par la Société PREMIUM ENERGY, et que les documents contractuels soumis à Monsieur et Monsieur [W] sont conformes à ces dispositions ;

– JUGER qu’en signant le bon de commande aux termes duquel était indiquées les conditions de forme des contrats conclus à distance imposées par le Code de la consommation, en ayant lu et approuvé les bons de commande (conditions générales de vente incluses), Monsieur [W] ne pouvait ignorer les prétendus vices de forme affectant le bon de commande souscrit ;

– JUGER qu’en laissant libre accès à son domicile aux techniciens, que par l’acceptation sans réserve des travaux effectués par la société PREMIUM ENERGY au bénéfice de Monsieur [W], qu’en laissant le contrat se poursuivre et en procédant au remboursement des échéances du prêt auprès de la banque, ce dernier a manifesté sa volonté de confirmer l’acte prétendument nul ;

– JUGER que par tous les actes volontaires d’exécution du contrat accomplis postérieurement à leur signature, Monsieur [W] a manifesté sa volonté de confirmer l’acte prétendument nul ;

– JUGER que Monsieur [W] succombe totalement dans l’administration de la preuve du dol qu’il invoque;

– JUGER que Monsieur [W] ne démontre pas l’existence d’un vice du consentement et notamment d’un dol imputable à la Société PREMIUM ENERGY ;

En conséquence,

– DEBOUTER Monsieur [W] de sa demande tendant à faire prononcer l’annulation du contrat conclu avec la société PREMIUM ENERGY en date du 27 septembre 2016;

A titre subsidiaire,

Sur la demande de résolution du contrat conclu entre Monsieur [W] et la Société PREMIUM ENERGY

– JUGER que Monsieur [W] succombe totalement dans l’administration de la preuve d’une inexécution contractuelle d’une gravité suffisante imputable à la Société PREMIUM ENERGY ;

– JUGER que la Société PREMIUM ENERGY a parfaitement exécuté les obligations auxquelles elle s’était engagée aux termes du contrat de vente conclu le 27 septembre 2016 avec Monsieur [W] ;

– JUGER que la Société PREMIUM ENERGY a parfaitement exécuté ses obligations contractuelles ;

En conséquence,

– DEBOUTER Monsieur [W] de sa demande de résolution du contrat conclu avec la Société PREMIUM ENERGY ;

A titre très subsidiaire,

Sur la confirmation du jugement déféré en ce qu’il a débouté la Banque BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE de ses demandes formulées à l’encontre de la société PREMIUM ENERGY

– JUGER que la Société PREMIUM ENERGY n’a commis aucune faute dans l’exécution du contrat principal ;

– JUGER que la Société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE a commis des fautes dans la vérification des documents contractuels ayant permis la validation de la demande de financement ainsi que dans la libération des fonds, notamment au regard de sa qualité de professionnel du crédit ;

– JUGER que la Société PREMIUM ENERGY ne sera pas tenue de verser à la Société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE le montant du capital emprunté par Monsieur [W] ;

– JUGER que la Société PREMIUM ENERGY ne sera pas tenue de verser à la Société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE le montant des intérêts perdus à titre de dommages et intérêts ;

– JUGER que la société PREMIUM ENERGY ne sera pas tenue de garantir la société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE ou Monsieur [W] ;

En conséquence,

– DEBOUTER la Banque BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE de toutes ses demandes formulées à l’encontre de la Société PREMIUM ENERGY ;

En tout état de cause,

– CONDAMNER Monsieur [W] à payer à la société PREMIUM ENERGY, la somme de 3.000 euros au titre de l’article 700 du Code de Procédure civile ;

– CONDAMNER Monsieur [W] aux entiers dépens ;’

Vu ses dernières conclusions transmises par voie électronique le 21 octobre 2022 auxquelles il est renvoyé pour de plus amples développements sur ses moyens, au terme desquelles la société BNPPPF demande de :

‘Vu les articles 1116, 1134 et 1147, 1184 du code civil,

Vu les articles 9 du code de procédure civile et 1315 du code civil,

Vu l’article L.123-23 du code de la consommation,

Vu l’article L.311-33 du code de la consommation,

Vu l’article L.312-55 du Code de la consommation,

Vu les pièces produites,

DIRE ET JUGER qu’il n’est rapporté la preuve d’aucune cause de nullité ou de résolution du contrat principal,

DIRE ET JUGER qu’à supposer démontrée des causes de nullité du contrat de prestation et fourniture conclu avec PREMIUM ENERGY, [L] [W] a couvert ces nullités en exécutant volontairement et spontanément le contrat de prestation de service, en réceptionnant sans réserve ni grief les travaux et prestations accomplis qu’il a déclaré comme pleinement

achevés au prêteur, puis en procédant au remboursement des échéances de prêt, sans discontinuer y compris après délivrance de l’assignation, le tout en percevant les revenus de sa production électrique,

REPARANT l’erreur affectant le dispositif du jugement, L’INFIRMER de ce chef et statuant à nouveau,

JUGER IRRECEVABLE la prétention de l’appelant tirée de la déchéance des intérêts contractuels au visa de l’article 910-4 du code de procédure civile, comme non contenue dans ses premières conclusions déposées dans le délai de l’article 908 du code de procédure civile,

DEBOUTER Monsieur [W] de l’intégralité de ses moyens et demandes,

CONDAMNER Monsieur [L] [W] à payer à la S.A BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE pour les causes sus énoncées :

1- La somme principale de 13.164,53 euros,

2 – Avec les intérêts de retard au taux contractuel de 3,83 % l’an depuis le 10/09/2018 jusqu’à parfait paiement, hors concernant l’indemnité contractuelle et légale de 8% qui portera intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure du 10/09/2018 jusqu’à parfait paiement.

A titre subsidiaire, dans l’hypothèse d’une résolution ou annulation du contrat de prêt par accessoire,

RAPPELER ET EN TANT QUE DE BESOIN DIRE ET JUGER que la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE n’est pas partie au contrat principal par application de l’article 1165 du code civil, alors qu’il lui est fait interdiction de s’immiscer dans les gestion des emprunteurs et d’apprécier l’utilité ou l’opportunité de la prestation objet du financement, pas plus qu’elle ne doit rendre compte de l’exécution par

le prestataire, ni n’est tenue d’une obligation contractuelle de contrôle des prestations accomplies, ou d’assistance du maitre d’ouvrage à la réception,

DIRE ET JUGER à tout le moins que la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE n’a commis aucune faute de nature à engager sa responsabilité civile contractuelle ou à la priver de son droit à restitution du capital mis à disposition, dès lors que Monsieur [L] [W] l’a déterminée à libérer les fonds entre les mains de la société PREMIUM ENERGY, en signant la fiche de réception des travaux attestant de leur bonne et complète exécution, et donnant ordre au prêteur de libérer les fonds,

DIRE ET JUGER qu’il n’est rapporté la preuve d’aucun préjudice en corrélation lié à la nullité du contrat principal ou au déblocage des fonds, alors que la qualité des prestations fournies par PREMIUM ENERGY est sans lien avec la faute alléguée du prêteur,

DIRE ET JUGER en toute hypothèse que tout préjudice de l’emprunteur ne résulterait que d’une perte de chance de ne pas contracter, là encore sans lien avec la faute alléguée, lequel préjudice ne pouvant correspondre au montant du capital mis à disposition, alors que Monsieur [L] [W] conserve son recours effectif contre la SAS PREMIUM ENERGY au visa de l’article L311-33 du code de la consommation,

DEBOUTER en conséquence Monsieur [L] [W] de l’intégralité de ses moyens et demandes tels que dirigés contre la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE,

CONDAMNER Monsieur [L] [W] à payer à la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE, au titre des remises en état et restitution du capital mis à disposition, la somme de 11.900€ avec déduction des échéances déjà versées,

DIRE ET JUGER que la société PREMIUM ENERGY garantira Monsieur [L] [W] de cette condamnation au profit de la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE, en application de l’article L311-3 du code de la consommation,

Très subsidiairement en cas de perte du droit à restitution du capital mis à disposition au profit de Monsieur [L] [W],

CONDAMNER la société PREMIUM ENERGY à restituer à la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE la somme de 11.900 € au titre des remises en état antérieur sur résolution ou annulation des contrats interdépendants,

En toute hypothèse,

CONDAMNER tout succombant à payer à la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE la somme de 2.000€ au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNER tout succombant aux entiers dépens.’

Pour plus ample exposé des éléments de la cause, moyens et prétentions des parties, il est fait renvoi aux écritures susvisées, conformément à l’article 455 du Code de procédure civile.

Vu l’ordonnance de clôture du 24 octobre 2022.

MOTIFS

Il doit en remarque liminaire être constaté que par l’effet de l’appel principal de M. [W] et des appels incidents des sociétés Premium Energy et BNPPPF, la cour est saisie de l’ensemble des chefs du jugement déféré.

Sur la nullité du contrat de fourniture et de pose de l’installation photovoltaïque

Le bon de commande est daté du 27 septembre 2016. Sont applicables à l’espèce les articles L.111-1 et L.111-2 suivants, L.221-5 et L.221-9, L.242-1 dans leur rédaction issue de l’ordonnance n°216-301 du 14 mars 2016.

Selon ces textes, d’ordre public, le professionnel doit communiquer au consommateur, avant la conclusion du contrat, de manière lisible et compréhensible, notamment, les caractéristiques essentielles du bien ou du service ; en l’absence d’exécution immédiate, la date ou le délai auquel le professionnel s’engage à livrer le bien ou à exécuter le service ; les informations relatives à son identité, à ses coordonnées postales, téléphoniques et électroniques et à ses activités, pour autant qu’elles ne ressortent pas du contexte ; s’il y a lieu, les informations relatives aux garanties légales, aux fonctionnalités du contenu numérique et, le cas échéant, à son interopérabilité, à l’existence et aux modalités de mise en ‘uvre des garanties et aux autres conditions contractuelles; la possibilité de recourir à un médiateur de la consommation.

Il doit fournir au consommateur un exemplaire daté du contrat conclu hors établissement contenant toutes les informations prévues à l’article L. 221-5, notamment les conditions, délais et modalités d’exercice du droit de rétractation et être accompagné du formulaire type de rétractation.

M. [W] soutient la violation de plusieurs de ces obligations :

– l’identité du professionnel : la forme juridique de la société et sa dénomination sociale ne sont pas mentionnées, ce que conteste la société Premium Energy en renvoyant aux mentions de bas de page du bon de commande.

La cour constate sur ce point que figurent ainsi la dénomination FEDERATION DE L’HABITAT ECOLOGIQUE avec précisions d’adresse, de téléphones, d’adresses mails, de capital social et de numéros SIREN et TVA.

A aucun moment ne figure donc l’indication d’une SASU PREMIUM ENERGY, assignée en première instance et intimée en appel dont la qualité à agir n’est pourtant pas déniée, de telle sorte que la nullité est encourue de ce chef ;

– les caractéristiques essentielles du bien : M. [W] fait référence à l’absence d’information sur la capacité de production du matériel en kilowattheure et d’absence de prix de vente à l’unité à la régie d’électricité, ce à quoi la société réplique qu’il ne s’agit pas de caractéristiques essentielles.

La cour constate que le bon de commande porte sur une installation photovoltaïque d’une puissance de 2500 Wc comprenant 10 panneaux solaires SOLUXTEC, d’une onduleur EATON, d’un onduleur EFFEKTA, d’un onduleur Solaredge, de 6 abergements latéraux, de 2 abergements gauche/droite, de 3 abergements centraux, de 4 abergements de jonction, de 20 mètres de WAKAFLEX, de 6 mètres de mousse expansive, de 50M d’écran sous toiture, de 150 m de cables mm², de 15 connecteurs mâle:femelle, de 5 lcips de sécurité , d’un boitier AC/DC, de l’obtention du contrat de rachat EDF GARANTI 20 ans, des démarches admnistratives (mairie, consuel, ERDF).

A défaut d’avoir fait entrer la production du matériel en kilowatt et le prix de vente à l’unité à la régie d’électricité dans les prévisions contractuelles, ce qui ne se peut dès lors que le volume d’électricité produit dépend de facteurs non maîtrisables telles les conditions météorologiques et que le prix de vente dépend de la société EDF qui fixe ses tarifs de rachat, les caractéristiques essentielles du bien sont mentionnées, même si elles sont parfois noyées dans un détail inutile et le moyen de nullité n’est pas fondé.

– le délai de livraison : M. [W] souligne que le bon de commande vise un délai de livraison maximum de quatre mois, sans précision de point de départ et selon mention préimprimée, ce à quoi la société Premium Energy réplique avoir respecté les dispositions de l’article L. 111-1 3° en choisissant de mentionner le délai de livraison maximum et non le délai d’exécution de la prestation de service.

La cour fera application de la jurisprudence désormais établie ( Civ 1 15 juin 2022 n°2111747) en constatant que l’indication d’un délai maximum de quatre mois, par mention préimprimée ne distinguant pas le délai de pose de l’installation de celui de réalisation des prestations à caractère administratif ne répond pas aux exigences de l’article précité, de telle sorte que la nullité est encourue de ce chef.

– les informations relatives aux modalités de mise en oeuvre des garanties légales et contractuelles : M. [W] souligne que la mention ‘attestation de responsabilité civile N’DEC-EDI-001862-02″ ne délivre pas d’informations relatives aux coordonnées ni même de l’identité de l’assureur, pas plus que de la couverture géographique de la garantie, ce à quoi la société ne répond rien.

La cour constate en effet avec l’appelant que la mention rapportée ci-dessus ne répond pas aux exigences de l’article R.111-2 9° de telle sorte que la nullité est encourue de ce chef.

– les conditions et les modalités du droit de rétractation : il est souligné que le bon de commande mentionne un délai de rétractation de 14 jours commençant à courir du jour de la commande alors que le délai court à compter de la réception du bien, ce à quoi la société Premium Energy réplique que le droit de rétractation ne peut s’exercer en application des exclusions des 3° et 6° de l’article L. 221-8.

La cour ne peut suivre cette dernière argumentation puisque le bien n’est pas confectionné selon les spécifications du consommateur ou nettement personnalisé, pas plus que l’installation photovoltaïque n’est par sa nature mélangée de manière indissociable avec d’autres articles.

Le délai de rétractation tel que mentionné au bon de commande ne répond pas aux exigences de l’article L. 221-18 2° et la nullité est encourue de ce chef.

– d’autres mentions sont signalées comme absentes, afférentes aux frais de renvoi du bien en cas de rétractation, à la possibilité de recourir à une procédure extrajudiciaire de règlement des litiges et de ses modalités, la législation applicable et la juridiction compétente, ce que la cour constate avec l’appelant, de telle sorte que la nullité est également encourue de ces chefs.

Sur la confirmation de l’acte nul

Tant la société Premium Energy que BNPPPF opposent à M. [W] sa ratification par exécution volontaire de l’acte nul sur le fondement de l’article 1338 ancien du code civil ; la société Premium Energy souligne qu’il était informé par reproduction des articles L. 111-1, L. 111-2 et L. 221-5 et suivants dans les conditions générales des exigences de forme du bon de commande et a manifesté son intention de les réparer en laissant se poursuivre le contrat en renonçant à exercer son droit de rétractation, en réceptionnant les travaux sans réserve, en sollicitant la banque pour le déblocage des fonds et en procédant au remboursement des échéances de crédit. BNPPPF souligne en outre qu’il perçoit les revenus de la production électrique, y compris après introduction de l’instance et en l’état du jugement rendu.

M. [W] réplique que le contrat ne reproduit pas l’intégralité des articles L. 111-1, L. 111-2, L. 111-5, L. 111-8, L. 211-2, L. 211-3, L. 211-5, L. 221-7 à L. 221-9, L. 221-29, L. 242-1, R. 111-1 et R. 111-2 du code de la consommation dans leurs versions applicables ; qu’il n’a jamais eu l’intention de réparer de quelconques vices puisqu’il a consulté une avocate en mars 2017, a assigné en avril 2017, a fait opposition aux prélèvements de la banque et que l’installation n’est pas en service.

La ratification de l’acte nul suppose tout à la fois la connaissance du vice et l’intention de le réparer.

Le bon de commande reproduit des articles du code de la consommation dans des rédactions qui n’étaient plus en vigueur au jour du contrat. Plus particulièrement, l’absence de reproduction de l’article L. 242-1 de ce code, érigeant la sanction de la nullité des dispositions de l’article L. 221-9 ne donnait pas à M. [W] la connaissance de l’intégralité des vices et de leur sanction.

S’agissant de l’intention de les réparer, M. [W] ne l’a jamais manifestée puisque les actes d’exécution du contrat ne se confondent pas avec une manifestation univoque de ratifier l’acte nul et que BNPPPF ne dément pas l’assertion de M. [W] selon laquelle l’installation n’est pas en service de telle sorte qu’il ne peut lui être reproché d’avoir perçu les revenus de la production électrique. Cette assertion est confirmée d’une part par l’imprécision du procès-verbal de réception qui ne distingue pas les opérations de fourniture et de pose de l’installation des démarches administratives à la charge de la société Premium Energy alors que s’agissant d’une opération complexe, il aurait dû le faire ; d’autre part par la déclaration préalable déposée en mairie le 17 octobre 2016 et le courrier du maire de la commune de [Localité 5] du 10 novembre 2016 faisant état de difficultés quant à la réalisation de travaux sans autorisation et de la non-conformité de ceux-ci. Il n’est donc pas établi que M. [W] bénéficie d’une installation en état de fonctionnement, le courrier officiel d’avocat du 13 mars 2017 n’en portant pas reconnaissance.

Le moyen de la ratification de l’acte nul sera écarté.

Sur les conséquences de la nullité

S’agissant du contrat principal, son anéantissement rétraoctif commande de remettre les parties en leur état antérieur. M. [W] doit restituer à la société Premium Energy l’installation, laquelle doit la récupérer à ses frais dans les termes du dispositif.

Selon l’article L.312-55 du code de la consommation, le contrat de crédit est résolu ou annulé de plein droit lorsque le contrat en vue duquel il a été conclu est lui-même judiciairement résolu ou annulé.

Les parties au contrat de crédit sont alors rétablies dans leur état antérieur, ce qui impose en principe à l’emprunteur de restituer le capital emprunté, sauf pour lui à démontrer l’existence d’une ou plusieurs fautes du prêteur de nature à priver celui-ci de sa créance de restitution.

Ainsi, le prêteur, qui a versé les fonds sans s’être assuré, comme il y était tenu, de la régularité formelle du contrat principal ou de sa complète exécution, peut être privé en tout ou partie de sa créance de restitution, dés lors que l’emprunteur justifie avoir subi un préjudice en lien direct avec cette faute.

Le prêteur conteste toute faute de nature à le priver de son droit à restitution au regard des arguments exposés dans la reprise in extenso du dispositif de ses conclusions tels que repris ci-dessus.

Toutefois, la BNPPPF, prêteur rompu aux opérations de financement à crédit des installations photovoltaïques, ne s’est pas assuré de la régularité du bon de commande, affecté de multiples causes de nullité et a débloqué les fonds sur le vu d’un procès-verbal de réception du 21 octobre 2016 qui ne mentionne que les travaux, en référence à l’installation du matériel, mais non à la bonne fin des démarches administratives figurant dans le champ contractuel. La SA BNPPPF savait ainsi qu’entre la signature du bon de commande le 27 septembre 2016 et la délivrance du procès-verbal de réception du 21 octobre 2016, les démarches administratives (mairie, consuel, ERDF) n’avaient pas été effectuées ni n’avaient pu l’être compte tenu de la briéveté du délai entre ces deux dates.

La SA BNPPPF a ainsi commis des fautes de nature à la priver de son droit à restitution du capital prêté.

Le préjudice subi par M. [W] est en lien de causalité directe avec ces fautes puisque sans celles-ci, il ne serait pas en possession d’une installation photovoltaïque non raccordée, non autorisée, totalement vaine.

La SA BNPPPF sera ainsi privée de son droit à restitution et condamnée à restituer à M. [W] l’intégralité des sommes perçues au titre du crédit affecté.

Tant la faute de la société que celle du prêteur ont contribué au préjudice subi par M.M. [W]. La demande ‘très subsidiaire’ de la SA BNPPPF à l’encontre de la société tendant à la condamnation de cette dernière, au titre des remises en état antérieur, à lui restituer la somme de 11900€ se heurte à sa propre faute qui a contribué pour moitié au préjudice subi par M. [W], de telle sorte que la société sera condamnée à payer au prêteur la somme de 5950€.

M. [W] n’étant plus débiteur envers la SA BNPPPF, il appartiendra à celle-ci de procéder dans le mois de la notification de la présente décision aux formalités d’effacement de son inscription au FICP.

Parties perdantes au sens de l’article 696 du code de procédure civile, la société et la SA BNPPPF supporteront in solidum les dépens d’appel, les droits d’encaissement prévus par le pourvoir réglementaire comme devant rester à la charge du créancier le restant.

PAR CES MOTIFS

Statuant par arrêt contradictoire, par mise à disposition au greffe,

Infirme le jugement en ce qu’il a :

– dit que la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE n’a pas commis de faute de nature à la priver de son droit à restitution,

– condamné M. [W] à rembourser à la SA BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE le capital emprunté, soit la somme de 11900€ avec intérêts au taux légal à compter de la signification de la présente décision,

– dit que chaque partie supportera la charge de ses propres dépens.

Statuant à nouveau de ces chefs,

Dit que les fautes de la SA BNP Paribas Personal Finance la privent de son droit à restitution, la déboute en conséquence de sa demande en restitution du capital prêté et la condamne à rembourser à M. [W] l’intégralité des sommes perçues au titre du crédit affecté,

Condamne in solidum les sociétés Premium Energy et BNP Paribas Personal Finance aux dépens de première instance,

Confirme le jugement pour le surplus,

Y ajoutant,

Ordonne à la société Premium Energy d’effectuer à ses frais la remise en état matérielle du domicile de M. [W] par dépose des panneaux dans le délai de deux mois suivant la notification du présent arrêt,

Enjoint à la SA BNP Paribas Personal Finance de procéder aux formalités d’effacement de M. [W] du FICP dans le mois de la notification du présent arrêt,

Condamne la société Premium Energy à payer à la SA BNP Paribas Personal Finance la somme de 5950€,

Condamne in solidum la société Premium Energy et la SA BNPPPF à payer à M. [W] à la somme de 5000€ par application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

Condamne in solidum la société Premium Energy et la SA BNPPPF aux dépens d’appel, avec application des dispositions de l’article 699 du code de procédure civile au profit de l’avocat qui affirme son droit de recouvrement.

LE GREFFIER LE PRESIDENT

 


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