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2ème Chambre
ARRÊT N°511
N° RG 21/01374
N° Portalis DBVL-V-B7F-RM25
(3)
COFIDIS
C/
M. [V] [U]
Mme [F] [L] épouse [U]
BECHERETVERONIQUE
Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
– Me LHERMITTE
– Me LE BERRE BOIVIN
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE RENNES
ARRÊT DU 10 NOVEMBRE 2023
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :
Président : Monsieur Joël CHRISTIEN, Président de Chambre,
Assesseur : Monsieur David JOBARD, Président de Chambre,
Assesseur : Monsieur Jean-François POTHIER, Conseiller,
GREFFIER :
Mme Ludivine BABIN, lors des débats et lors du prononcé
DÉBATS :
A l’audience publique du 12 Septembre 2023
ARRÊT :
Réputé contradictoire, prononcé publiquement le 10 Novembre 2023 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l’issue des débats
****
APPELANTE :
COFIDIS SA
[Adresse 7]
[Adresse 6]
[Localité 3]
Représentée par Me Christophe LHERMITTE de la SELEURL GAUVAIN, DEMIDOFF & LHERMITTE, postulant, avocat au barreau de RENNES
Représentée par Me Xavier HELAIN, plaidant, avocat au barreau de l’ESSONNE
INTIMÉS :
Monsieur [V] [U]
né le 22 Janvier 1974 à [Localité 8]
[Adresse 2]
[Localité 4]
Madame [F] [L] épouse [U]
née le 31 Janvier 1977 à [Localité 9]
[Adresse 2]
[Localité 4]
Tous deux représentés par Me Tiphaine LE BERRE BOIVIN, postulant, avocat au barreau de RENNES
Tous deux représentés par Me Samuel HABIB, plaidant, avocat au barreau de PARIS
Maître [G] [D] exerçant au sein de la SELAS ALLIANCE es qualité de mandataire liquidateur de la SARL NEO CONCEPT ET RENO
[Adresse 1]
[Localité 5]
Assignée par acte d’huissier en date du 13/04/2021, délivré à personne habilitée, n’ayant pas constitué
* * *
EXPOSE DU LITIGE
A la suite d’un démarchage à domicile, M. [V] [U] a, selon bon de commande du 14 juin 2016, commandé à la société Néo Concept & Rénovation (la société NCR), la fourniture et la pose d’une installation photovoltaïque, moyennant le prix de 26 500 euros TTC.
En vue de financer cette opération, la société Sofemo (marque de la société Cofidis) a, selon offre acceptée le même jour, consenti à M. [U] et Mme [F] [L], son épouse (les époux [U]) un prêt de 26 500 euros au taux de 5,68 % l’an, remboursable en 120 mensualités de 339,34 euros, assurance emprunteur comprise, après un différé d’amortissement de 11 mois.
Les fonds ont été versés à la société CNR au vu d’une attestation de livraison et demande de financement du 5 juillet 2016.
Prétendant que l’installation photovoltaïque n’avait jamais été mise en service, et que la revente de l’électricité produite ne permettrait pas d’obtenir le rendement promis, les époux [U] ont, par actes du 22 janvier 2020, fait assigner devant le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Brest, la SELAS Alliance, ès-qualités de liquidateur judiciaire de la société CNR, dont la liquidation judiciaire avait été prononcée par jugement du tribunal de commerce de Nanterre du 17 août 2018, en suspension des échéances du crédit affecté, et en annulation des contrats de vente et de prêt.
Par jugement du 9 février 2021, le premier juge a :
rejeté la demande de suspension du contrat de crédit,
rejeté la demande de communication de pièces,
prononcé la nullité du contrat en date du 14 juin 2016 conclu entre les époux [U] et la société NCR,
prononcé la nullité du contrat en date du 14 juin 2016 conclu entre les époux [U] et la société Cofidis,
condamné la société Cofidis à restituer les sommes déjà versées,
condamné ‘la société Cofidis’ à verser aux époux [U] la somme de 4 554 euros au titre des frais de dépose de l’installation et de remise en état de l’immeuble,
condamné ‘la société Cofidis’ à verser aux époux [U] la somme de 3 000 euros à titre de dommages et intérêts au titre du préjudice de jouissance,
condamné ‘la société Cofidis’ à verser aux époux [U] la somme de 1 000 euros à titre de dommages et intérêts au titre du préjudice moral,
condamné la société Cofidis à verser aux époux [U] la somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens,
débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires.
La société Cofidis a relevé appel de ce jugement le 1er mars 2021.
Aux termes de ses dernières conclusions du 21 mai 2021, elle demande à la cour de :
infirmer le jugement attaqué,
dire les époux [U] mal fondés en leurs demandes, fins et conclusions et les en débouter,
dire la société Cofidis recevable et bien fondée en ses demandes, fins et conclusions,
condamner solidairement les époux [U] à reprendre l’exécution du contrat de crédit, conformément aux stipulations contractuelles telles que retracées dans le tableau d’amortissement,
condamner solidairement les époux [U] à rembourser à la société Cofidis l’intégralité des sommes perçues dans le cadre de l’exécution provisoire,
condamner solidairement les époux [U] à rembourser à la société Cofidis, en une seule fois, l’arriéré des échéances impayées depuis le jugement assorti de l’exécution provisoire, au jour de l’arrêt à intervenir,
à titre subsidiaire, si la cour confirmait la nullité des conventions, condamner solidairement les époux [U] à lui rembourser le capital emprunté d’un montant de 26 500 euros, en l’absence de faute de la société Cofidis et en l’absence de préjudice et de lien de causalité,
à titre infiniment subsidiaire, condamner solidairement les époux [U] à lui rembourser une partie du capital dont le montant sera fixé souverainement par la juridiction,
en tout état de cause, condamner solidairement les époux [U] à lui payer une indemnité d’un montant de 2 500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens.
Aux termes de leurs dernières conclusions du 12 juin 2023, les époux [U] concluent à la confirmation du jugement attaqué, sauf en ce qu’il a condamné ‘la société Cofidis’ à leur verser la somme de 1 000 euros au titre de leur préjudice moral.
Formant appel incident, ils demandent à la cour de réformer le jugement sur ce chef, et de condamner la société Cofidis à leur payer la somme de 3 000 euros au titre de leur préjudice moral.
En tout état de cause, ils demandent à la cour de condamner la société Cofidis à leur payer la somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens.
Enfin, à titre infiniment subsidiaire, si la cour les déboutait de l’intégralité de leurs demandes, ils demandent de dire qu’ils reprendront le paiement mensuel des échéances du prêt.
La SELAS Alliance, à laquelle la société Cofidis et les époux [U] ont signifié leurs conclusions le 13 avril 2021 et le 3 août 2021, n’a pas constitué avocat devant la cour.
Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, ainsi que des prétentions et moyens des parties, la cour se réfère aux énonciations de la décision attaquée ainsi qu’aux dernières conclusions déposées par les parties, l’ordonnance de clôture ayant été rendue le 22 juin 2023.
EXPOSE DES MOTIFS
Les dispositions du jugement attaqué ayant rejeté les demandes de suspension du contrat de crédit et de communication de pièces, exemptes de critique devant la cour, seront confirmées.
Sur la nullité du contrat principal
Aux termes des articles L 121-18-1 et L. 121-17 devenus L. 221-9, L 221-5, L. 111-1, R. 111-1 et R. 111-2 du code de la consommation, les ventes et fournitures de services conclues à l’occasion d’une commercialisation hors établissement doivent faire l’objet d’un contrat dont un exemplaire est remis au client et notamment comporter, à peine de nullité, les mentions suivantes :
le nom du professionnel, ou la dénomination sociale et la forme juridique de l’entreprise, l’adresse géographique de son établissement et, si elle est différente, celle du siège social, son numéro de téléphone et son adresse électronique,
le cas échéant, son numéro d’inscription au registre du commerce et des sociétés ou au répertoire des métiers,
les informations relatives à ses activités, pour autant qu’elles ne ressortent pas du contexte,
son éventuelle garantie financière ou assurance de responsabilité professionnelle souscrite par lui, ainsi que les coordonnées de l’assureur ou du garant,
les caractéristiques essentielles du bien ou du service, compte tenu du bien ou service concerné,
le prix du bien ou du service,
les modalités de paiement,
en l’absence d’exécution immédiate du contrat, la date ou le délai auquel le professionnel s’engage à livrer le bien ou à exécuter le service,
les modalités prévues par le professionnel pour le traitement des réclamations,
s’il y a lieu, les informations relatives à la garantie légale de conformité, à la garantie des vices cachés de la chose vendue ainsi que, le cas échéant, à la garantie commerciale et au service après-vente,
la possibilité de recourir à un médiateur de la consommation,
lorsque le droit de rétractation existe, les conditions, le délai et les modalités d’exercice de ce droit, ainsi que le formulaire type de rétractation,
le numéro d’inscription du professionnel au registre du commerce et des sociétés ou au répertoire des métiers,
s’il est assujetti à la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) et identifié par un numéro individuel en application de l’article 286 ter du code général des impôts, son numéro individuel d’identification,
l’éventuelle garantie financière ou assurance de responsabilité professionnelle souscrite par lui, les coordonnées de l’assureur ou du garant ainsi que la couverture géographique du contrat ou de l’engagement.
En l’occurrence, les époux [U] invoquent à tort des irrégularités du bon de commande tirées de l’imprécision des informations relatives aux caractéristiques des biens vendus.
En effet, le nombre (12) et la puissance des panneaux (250 Wc) sont bien mentionnés, de même que leur marque (Soluxtec), leur dimension et leur poids, de même que leur modèle et celui de l’onduleur, n’étant en revanche pas des caractéristiques essentielles des biens livrés.
Il n’y avait pas davantage lieu d’indiquer le prix unitaire des éléments de l’installation photovoltaïque, le texte précité n’imposant au contraire, à peine de nullité, que la seule mention du prix global.
Par ailleurs, si les modalités de financement sont incomplètes sur l’original du bon de commande remis aux emprunteurs, celles-ci sont détaillées dans l’offre de crédit qui a été établie à l’occasion de la même opération de démarchage conclue le même jour, ce qui supplée à cette imperfection du bon de commande.
En revanche, il est exact que les délais de livraison et d’exécution de la prestation accessoire de pose n’ont pas été mentionnés.
A cet égard, la mention des conditions générales de vente reproduite au dos du bon de commande, selon laquelle ‘le délai de livraison figurant au recto du présent contrat est donné à titre indicatif et ne peut dépasser une limite de deux cent jours à compter de la prise d’effet du contrat’ ne saurait pallier l’absence d’indication d’un délai d’exécution des travaux d’installation exigé par le 3° de l’article L. 111-1 du code de la consommation.
Enfin, il ressort de l’examen du bon de commande que les informations relatives au droit de rétractation sont, en ce qui concerne le point de départ de ce délai, erronées.
En effet, les conditions générales du contrat ne comportent aucune information sur le point de départ de ce délai, et le formulaire de rétractation est quant à lui libellé :
‘Conditions d’annulation : compléter et signer ce formulaire, l’envoyer par lettre recommandée avec avis de réception […] au plus tard le 14ème jour à partir du jour de la commande ou, si ce délai expire normalement un samedi, un dimanche ou un jour férié ou chômé, le premier jour ouvrable suivant.’
D’autre part, le bordereau de rétractation vise des dispositions légales abrogées au moment de la conclusion du contrat.
Or, aux termes de l’article L. 121-21 du code de la consommation, dans sa rédaction en vigueur entre le 8 août 2015 et le 1er juillet 2016 applicable au contrat litigieux conclu le 14 juin 2016, le consommateur dispose, pour exercer son droit de rétractation, d’un délai de quatorze jours commençant à courir à compter du jour de la réception du bien par le consommateur pour les contrats de vente et les contrats de prestation de services incluant la livraison de biens, le consommateur pouvant, pour les contrats conclus hors établissement, exercer son droit de rétractation à compter de la conclusion du contrat.
Il en résulte que, si les époux [U] pouvaient en l’espèce exercer leur droit de rétractation dès la conclusion du contrat conclu à leur domicile à la suite d’une opération de démarchage, le délai de quatorze jours ne commençait néanmoins à courir qu’à compter de la livraison des panneaux, et non à compter du jour de la commande.
La société Cofidis soutient que ces irrégularités ne seraient sanctionnées que par une nullité relative que les époux [U] auraient renoncé à invoquer en acceptant la livraison et la pose des matériels, en signant une attestation de livraison et d’installation, en laissant l’installation être raccordée au réseau ERDF, et en payant les échéances du prêt.
Cependant, la confirmation d’une obligation entachée de nullité est subordonnée à la conclusion d’un acte révélant que son auteur a eu connaissance du vice affectant l’obligation et l’intention de le réparer, sauf exécution volontaire après l’époque à laquelle celle-ci pouvait être valablement confirmée.
A cet égard, les dispositions de l’article L. 121-23 ancien du code de la consommation relative à l’indication des caractéristiques essentielles du produit ou de la prestation fournie, dont la teneur est identique à celle de l’article L. 111-1 issu de la loi du 17 mars 2014 applicable à la cause, étaient effectivement reproduites au verso du bon de commande, portant ainsi à la connaissance des époux [U] que celui-ci devait comporter, à peine de nullité, la date ou le délai auquel le professionnel s’engage à livrer le bien ou à exécuter la prestation de service.
Dès lors, en laissant l’entreprise poser les panneaux et en signant l’attestation de livraison et d’installation, les époux [U] ont, en pleine connaissance de cause, confirmé le bon de commande en dépit de ce qu’il ne mentionnait pas les délais de livraison et d’exécution de la prestation accessoire de pose.
En revanche, ainsi qu’il a été précédemment exposé, l’exemplaire du bon de commande conclu avec la société NCR ne comportait pas la reproduction des dispositions de l’article L. 121-21 relatives au point de départ du délai de rétractation, les textes reproduits au verso du bon de commande ne correspondant pas à ceux applicables au contrat litigieux conclu le 14 juin 2016.
Dès lors, rien ne démontre que les époux [U] avaient connaissance de ce vice du bon de commande lorsqu’ils ont laissé la société NCR intervenir à leur domicile et signé l’attestation de livraison et d’installation.
Il n’est donc pas établi que les consommateurs aient, en pleine connaissance de l’irrégularité de ce contrat de vente affectant le bordereau de rétractation, entendu renoncer à la nullité en résultant et qu’ils auraient de ce fait manifesté une volonté non équivoque de couvrir les irrégularités de ce document.
Il convient donc d’écarter le moyen tiré de la confirmation du contrat irrégulier et, sans qu’il y ait lieu de statuer sur le dol allégué, de confirmer le jugement attaqué en ce qu’il a prononcé la nullité du contrat conclu le 14 juin 2016 entre les époux [U] et la société NCR.
Sur la nullité du contrat de prêt
Aux termes des dispositions de l’article L. 311-32 devenu L. 312-55 du code de la consommation, le contrat de crédit affecté est résolu ou annulé de plein droit lorsque le contrat en vue duquel il a été conclu est lui-même judiciairement résolu ou annulé.
Il n’est pas contesté que le crédit consenti par la société Cofidis est un crédit accessoire à une vente ou à une prestation de services.
En raison de l’interdépendance des deux contrats, l’annulation du contrat principal conclu avec la société NCR emporte donc annulation de plein droit du contrat accessoire de crédit conclu avec la société Cofidis.
Le jugement sera en conséquence confirmé en ce qu’il a constaté l’annulation de plein droit du contrat de prêt.
La nullité du contrat de prêt a pour conséquence de priver de fondement la demande de la société Cofidis de condamnation des époux [U] à reprendre l’exécution du contrat de crédit conformément aux stipulations contractuelles.
Cette demande sera donc rejetée.
La nullité du prêt a aussi pour conséquence de remettre les parties dans leur situation antérieure, de sorte qu’elle doit, sauf faute du prêteur, entraîner la restitution des prestations reçues de part et d’autre, c’est à dire du capital versé par le prêteur et des échéances réglées par les emprunteurs.
Au soutien de son appel, la société Cofidis fait valoir qu’elle s’est, sans commettre de faute, dessaisie des fonds sur remise d’une attestation de livraison dépourvue de toute ambiguïté, et, d’autre part, si la cour devait prononcer la nullité du bon de commande, elle ne pourrait que constater que les causes retenues n’étaient pas facilement décelables pour le prêteur lorsqu’elle a procédé à un simple contrôle conformément à la jurisprudence de la Cour de cassation.
Les époux [U] demandent à la cour de confirmer le jugement attaqué les ayant dispensés de rembourser le capital emprunté, en faisant valoir que le prêteur se serait fautivement dessaisi des fonds sans vérifier la régularité formelle du bon de commande, et, d’autre part, sans s’assurer de l’exécution complète du contrat principal, au vu d’une attestation de livraison incomplète, alors que l’installation n’avait pas été raccordée au moment de la libération des fonds.
Le prêteur, qui n’a pas à assister l’emprunteur lors de l’exécution du contrat principal, ni à vérifier le bon fonctionnement d’une installation exempte de vice ou la conformité du matériel livré aux stipulations contractuelles, ne commet pas de faute lorsqu’il libère les fonds au vu d’une attestation de livraison qui lui permet de s’assurer de l’exécution complète du contrat principal.
Or, en l’occurrence, l’attestation de livraison et d’installation signée par M. [U] le 5 juillet 2016 et revêtue des mentions manuscrites de ce dernier faisait ressortir sans ambiguïté que celui-ci , ‘(confirmait) avoir obtenu et accepté sans réserve la livraison des marchandises ; (constatait) expressément que tous les travaux et prestations qui devaient être effectués à ce titre ont été pleinement réalisées, (et) en conséquence (demandait) à Cofidis de bien vouloir procéder au décaissement de ce crédit et d’en verser le montant entre les mains de la société Neo Concept et Renovation.’
Néanmoins, il est aussi de principe que le prêteur commet une faute excluant le remboursement du capital emprunté lorsqu’il libère la totalité des fonds, alors qu’à la simple lecture du contrat de vente il aurait dû constater que sa validité était douteuse au regard des dispositions protectrices du code de la consommation relatives au démarchage à domicile.
Or, si la cause de nullité formelle tenant à l’absence d’indication des délais de livraison et d’installation avait été couverte en connaissance de cause par les époux [U], il a aussi été précédemment relevé que le bordereau de rétractation dont était doté le bon de commande conclu avec la société NCR, par l’intermédiaire de laquelle celle-ci faisait présenter ses offres de crédit, comportait des irrégularités formelles apparentes qui auraient dû conduire le prêteur, professionnel des opérations de crédit affecté, à ne pas se libérer des fonds entre les mains du fournisseur avant d’avoir à tout le moins vérifié auprès des époux [U] qu’ils entendaient confirmer l’acte irrégulier, en dépit de l’indication erronée du point de départ du délai de rétractation.
Le prêteur n’avait certes pas à assister les emprunteurs lors de la conclusion et de l’exécution du contrat principal, ni à vérifier le bon fonctionnement d’une installation exempte de vice ou la conformité du matériel livré aux stipulations contractuelles, mais il lui appartenait néanmoins de relever les anomalies apparentes du bon de commande, ce dont il résulte qu’en versant les fonds entre les mains du fournisseur, sans procéder à des vérifications complémentaires sur la régularité formelle de ce bon de commande, la société Cofidis a commis une faute susceptible de la priver du droit d’obtenir le remboursement du capital emprunté.
Toutefois, la société Cofidis fait valoir à juste titre que cette dispense de remboursement du capital emprunté est subordonnée à la démonstration par les emprunteurs de l’existence d’un préjudice en lien causal avec la faute du prêteur.
Or, les époux [U] admettent eux-mêmes que l’installation produit de l’électricité depuis le 27 décembre 2016, reconnaissant ainsi que l’installation est raccordée au réseau, alors que, du fait de la liquidation judiciaire de la société NCR, aucune demande de restitution du matériel n’a été sollicitée et accordée.
En outre, alors que l’appelante soutient expressément que les intimés disposent d’une installation raccordée au réseau et en état de services, ces derniers se bornent à alléguer qu’ils sont dans l’impossibilité de revendre leur production en raison du défaut de délivrance de la déclaration attestant de l’achèvement et de la conformité des travaux, mais ils ne produisent aucune preuve d’une impossibilité de mise en service de l’installation et de l’existence d’un lien causal avec la faute du prêteur.
Par ailleurs, à supposer même que, comme les époux [U] le prétendent, ‘la société installatrice évoquait initialement un autofinancement’ cette circonstance, au demeurant non démontrée, est sans lien causal avec la faute retenue à l’encontre du prêteur.
Les époux [U] seront donc, après réformation du jugement attaqué de ce chef, condamnés à restituer le capital emprunté de 26 500 euros, sauf à déduire l’ensemble des règlements effectués par les emprunteurs au cours de la période d’exécution du contrat de prêt.
Sur les autres demandes
Ainsi que le fait valoir à juste titre l’appelante, alors que dans les motifs du jugement, la société NCR a été condamnée, au titre de ses manquements contractuels, à payer aux emprunteurs les sommes de 4 554 euros au titre des frais de dépose de l’installation et de remise en état de la toiture, 3 000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation de leur préjudice de jouissance et 1 000 euros en réparation de leur préjudice moral, c’est la société Cofidis qui a été condamnée dans le dispositif du jugement à régler ces sommes aux époux [U].
S’il convient de rectifier ces erreurs purement matérielles, ainsi que l’a reconnu implicitement le conseil des époux [U] par courriel officiel du 5 mars 2021 en renonçant à réclamer à la société Cofidis les sommes précitées dans le cadre de l’exécution provisoire, il demeure cependant qu’aucune condamnation à paiement ne peut être prononcée à l’encontre d’une société liquidée, de sorte que le jugement sera réformé en ce qu’il a condamné la société NCR au paiement de ces sommes.
Les époux [U] ne justifiant pas avoir déclaré leurs créances au passif de la liquidation judiciaire de la société NCR, aucune déclaration de créance n’étant produite devant la cour, il y aura lieu de déclarer celles-ci inopposable à la procédure collective.
Les époux [U] demandent par ailleurs la condamnation du prêteur au paiement de la somme de 4 554 euros au titre des frais de dépose de l’installation et de remise en état de la toiture.
Mais le prêteur, tiers au contrat principal, ne saurait se voir imputer les conséquences dommageables de l’exécution de sa prestation par le fournisseur puis de l’anéantissement du contrat principal annulé.
Cette demande sera donc rejetée.
En outre, les demandes en paiement de dommages-intérêts formées contre la société Cofidis pour préjudices moral, financier et de jouissance seront rejetées, faute de preuve de l’existence de tels préjudices et de leur lien causal avec la faute du prêteur.
Il n’y a enfin pas lieu de condamner les emprunteurs à rembourser à la société Cofidis l’intégralité des sommes perçues dans le cadre de l’exécution provisoire, le présent arrêt partiellement infirmatif valant titre de restitution.
Sur les frais irrépétibles et les dépens
L’indemnité allouée par le premier juge aux époux [U] au titre de leurs frais irrépétibles de première instance a été correctement appréciée, et il n’y a pas matière à application de l’article 700 du code de procédure civile au bénéfice de quiconque en cause d’appel.
Enfin, partie principalement succombante en cause d’appel, les époux [U] supporteront seuls les dépens exposés devant la cour.
PAR CES MOTIFS, LA COUR :
Ordonne la rectification du jugement rendu le 9 février 2021 par le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Brest en remplaçant dans le dispositif la dénomination ‘société Cofidis’ par celle de ‘ société Néo Concept & Rénovation’ comme étant tenue au paiement des sommes de 4 554 euros au titre des frais de dépose de l’installation et de remise en état de la toiture, 3 000 euros à titre de dommages-intérêts pour préjudice de jouissance et 1 000 euros pour préjudice moral ;
Infirme le jugement attaqué en ce qu’il a :
condamné la société Cofidis à restituer les sommes déjà versées,
condamné la société Néo Concept & Rénovation à verser aux époux [U] la somme de 4 554 euros au titre des frais de dépose de l’installation et de remise en état de l’immeuble,
condamné la société Néo Concept & Rénovation à verser aux époux [U] la somme de 3 000 euros à titre de dommages et intérêts au titre du préjudice de jouissance,
condamné la société Néo Concept & Rénovation à verser aux époux [U] la somme de 1 000 euros à titre de dommages et intérêts au titre du préjudice moral,
Condamne solidairement M. et Mme [U] à payer à la société Cofidis la somme de 26 500 euros au titre de la restitution du capital emprunté, sauf à déduire l’ensemble des règlements effectués par les emprunteurs au prêteur au cours de la période d’exécution du contrat de prêt ;
Dit que les créances de 4 554 au titre des frais de dépose de l’installation et de remise en état de la toiture, 3 000 euros à titre de dommages-intérêts pour préjudice de jouissance et 1 000 euros pour préjudice moral sont inopposables à la procédure collective de la société Néo Concept & Rénovation ;
Déboute M. et Mme [U] de leurs demandes en paiement de dommages-intérêts à l’encontre de la société Cofidis ;
Confirme le jugement attaqué en ses autres dispositions ;
Dit n’y avoir lieu à application de l’article 700 du code de procédure civile en cause d’appel ;
Condamne solidairement M. et Mme [U] aux dépens d’appel ;
Rejette toutes autres demandes contraires ou plus amples.
LE GREFFIER LE PRESIDENT