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2ème Chambre
ARRÊT N°550
N° RG 21/01790
N° Portalis DBVL-V-B7F-ROZW
(3)
S.A.S. HOME PLUS
C/
M. [J] [E]
S.A. BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE
Infirme partiellement, réforme ou modifie certaines dispositions de la décision déférée
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
– Me BONTE
– Me MERCIER
– Me CASTRES
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE RENNES
ARRÊT DU 01 DECEMBRE 2023
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :
Président : Monsieur Joël CHRISTIEN, Président de Chambre,
Assesseur : Monsieur David JOBARD, Président de Chambre,
Assesseur : Monsieur Jean-François POTHIER, Conseiller,
GREFFIER :
Mme Ludivine BABIN, lors des débats et lors du prononcé
DÉBATS :
A l’audience publique du 12 Septembre 2023
ARRÊT :
Contradictoire, prononcé publiquement le 01 Décembre 2023 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l’issue des débats
****
APPELANTE :
S.A.S. HOME PLUS
[Adresse 2]
[Localité 6]
Représentée par Me Mikaël BONTE, postulant, avocat au barreau de RENNES
Représentée par Me Elise BENSIMON, plaidant, avocat au barreau de PARIS
INTIMÉS :
Monsieur [J] [E]
né le 26 Avril 1964 à [Localité 7]
[Adresse 4]
[Localité 3]
Représenté par Me Matthieu MERCIER de la SELARL CARCREFF CONTENTIEUX D’AFFAIRES, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de RENNES
S.A. BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE exerçant sous enseigne CETELEM,
[Adresse 1]
[Localité 6]
Représentée par Me Hugo CASTRES de la SCP HUGO CASTRES, postulant, avocat au barreau de RENNES
Représentée par Me Laure REINHARD du CABINET RD AVOCATS, plaidant, avoca au barreau de NIMES
EXPOSE DU LITIGE :
Par acte sous seing privé en date du 15 décembre 2016, M. [E] a conclu suivant démarchage à domicile un contrat avec la société Home Plus ayant pour objet la fourniture et la pose de panneaux aérovoltaïques, pour un prix de 28 400 euros.
Le même jour, la société BNP Paribas Personal Finance a consenti à M. [E] un crédit accessoire à la réalisation de la prestation de la société Home Plus d’un montant de 28 400 euros remboursable en 132 mensualités à un taux d’intérêt s’élevant à 3,83%.
Le 6 janvier 2018, M. [E] a personnellement régularisé auprès d’EDF un contrat d’achat de l’énergie électrique.
Le 13 septembre 2018, M. [E] a remboursé le prêt par anticipation.
Par actes des 27 et 30 décembre 2019, M. [E] a assigné la société Home Plus et la société BNP Paribas Personal Finance devant le tribunal d’instance de Nantes en annulation des contrats.
Par jugement du 23 février 2021, le tribunal a :
Prononcé l’annulation du contrat conclu le 15 décembre 2016 entre M. [J] [E] et la société Home Plus
Prononcé l’annulation du contrat de crédit conclu le même jour entre M. [J] [E] et la société Cetelem aux droits de laquelle vient la société BNP Paribas Personal Finance
Condamné la société Home Plus au démontage, à la reprise du matériel et à la remise en état de la toiture, à ses frais, ce dans les deux mois suivant la signification du présent jugement et après en avoir prévenu M. [E] au moins 15 jours à l’avance
Condamné la société Home Plus à restituer à M. [E] la somme de 28 400 euros
Condamné la BNP Paribas Personal Finance à payer à M. [E] la somme de 1 000 euros à titre de dommages et intérêts
Condamné la société BNP Paribas Personal Finance et la société Home Plus in solidum aux dépens
Condamné la société BNP Paribas Personal Finance et la société Home Plus in solidum à payer à M. [E] une somme de 350 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile
Débouté les parties de toute autres demandes différentes, plus amples ou contraires au présent dispositif.
La société Home Plus a formé appel du jugement suivant déclaration du 21 mars 2021.
Par dernières conclusions notifiées le 20 juin 2021 la société Home Plus demande de :
Infirmer le jugement du Juge des contentieux de la protection du Tribunal judiciaire de Nantes rendu le 23 février 2021 en toutes ses dispositions ;
Et, statuant à nouveau, de :
Débouter M. [J] [E] de toutes ses demandes, fins et conclusions à quelques fins qu’elles tendent à l’encontre de la société Home Plus ;
Débouter la société BNP Paribas Personal Finance de toutes ses demandes, fins et conclusions à quelques fins qu’elles tendent à l’encontre de la société Home Plus ;
A titre subsidiaire,
Limiter le montant des condamnations qui pourraient être prononcées à l’encontre de la société Home Plus en cas d’annulation du contrat du 15 décembre 2016 à la somme de 11 257,55 euros TTC ;
Condamner M. [J] [E] à verser à la société Home Plus la somme de 4 000 euros sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile ;
Condamner M. [J] [E] aux entiers dépens de première instance et d’appel, dont recouvrement par Maître Elise Bensimon, avocat aux offres de droit, sur le fondement de l’article 699 du Code de procédure civile ;
Par dernières conclusions notifiées le 16 mars 2023, la société BNP Paribas Personal Finance demande de :
Déclarer recevable l’appel formé par la société Home Plus
Accueillir l’appel incident formulé par BNP Paribas Personal Finance à l’encontre du jugement rendu le 23 février 2021, par le Juge des Contentieux de la Protection de Nantes
Réformer la décision entreprise en ce que le Tribunal a prononcé l’annulation des contrats, retenu une faute à l’encontre du prêteur et condamné celui-ci à porter et payer à M. [E] la somme de 1 000 euros à titre de dommages et intérêts
Statuant à nouveau
Dire n’y avoir lieu à prononcer l’annulation du contrat principal de vente
Rejeter la demande l’annulation du contrat de crédit
Par conséquent,
Débouter M. [E] de l’intégralité de ses demandes
Subsidiairement, en cas d’annulation des contrats
Juger que la société BNP Paribas Personal Finance n’a commis aucune faute
Juger que M. [E] ne démontre pas l’existence d’un préjudice et d’un lien de causalité à l’égard du prêteur
Par conséquent
Débouter M. [E] de sa demande visant à voir condamné le prêteur à la restitution d’une partie du capital prêté
En tout état de cause,
Condamner M. [J] [E] à porter et payer à BNP Paribas Personal Finance une indemnité à hauteur de 2500 euros, sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, outre les dépens de première instance et d’appel
Par dernières conclusions notifiées le 21 juin 2023, M. [E] demande de :
Déclarer la société Home Plus mal fondée en son appel et la débouter de toutes ses demandes, fins et conclusions,
Déclarer la société BNP Paribas Personal Finance mal fondée en son appel incident et la débouter de toutes ses demandes, fins et conclusions,
Confirmer le jugement rendu par le Juge des contentieux de la protection du Tribunal judiciaire de Nantes le 23 février 2021 sauf en ce qu’il a condamné la société BNP Paribas Personal Finance à verser à M. [E] la somme de 1 000 euros ;
Statuant à nouveau,
Condamner la société BNP Paribas Personal Finance à verser à M. [E] la somme de 2 258,38 euros
Condamner la société Home Plus ainsi que la société BNP Paribas Personal Finance à verser à M. [E], chacune, la somme de 5 000 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile,
Condamner solidairement les sociétés Home Plus et BNP Paribas Personal Finance aux entiers dépens.
Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure ainsi que des prétentions et moyens des parties, la cour se réfère aux énonciations de la décision attaquée ainsi qu’aux dernières conclusions visées.
L’ordonnance de clôture a été rendue le 20 juillet 2023.
MOTIFS DE LA DÉCISION :
Sur le contrat de vente :
La société Home Plus fait grief au jugement d’avoir annulé le contrat de vente en retenant que M. [E] n’avait pas été régulièrement informé des modalités d’exercice de son droit de rétractation.
Il sera constaté que le bordereau de rétractation joint au bon de commande est ainsi rédigé :
‘Annulation de commande : Code de la consommation articles L. 121-21
Conditions : Compléter et signer ce formulaire – l’envoyer par lettre recommandée avec avis de réception – Utiliser l’adresse figurant au dos, SARL Home Plus [Adresse 5] – l’expédier au plus tard le quatorzième jour de la commande ou, si ce délai expire normalement un samedi, un dimanche ou un jour férie ou chôme, le premier jour ouvrable suivant.
Je soussigné (..)
Déclare annuler la commande ci-après (…) Nature du bien ou service commandé (…) date de la commande :(…) Nom du client : (…) signature client.’
La société Home Plus fait valoir à juste titre que la régularité du bon de commande ne saurait être affectée par l’indication de références de textes antérieures à la recodification pour autant que le contenu du bon de commande soit conforme aux dispositions applicables des articles L. 221-9, L 221-5, L. 111-1, R. 111-1 et R. 111-2 du code de la consommation.
Il convient de constater que le bordereau ne répond pas aux prescriptions légales et réglementaires de l’article R. 121-1 devenu R. 221-1 exigé par l’article L. 221-5 en stipulant que le consommateur devait formaliser sa rétractation par lettre recommandée avec accusé de réception alors que si par application de l’article L. 221-22 la charge de la preuve de l’exercice du droit de rétractation lui incombe, il demeure par application de ce même article libre de la formalisation de la déclaration par laquelle il entend exprimer sa volonté de se rétracter soit en usant du bordereau détachable soit par tout autre moyen pour autant que sa volonté soit exprimée de manière dénuée d’ambiguïté.
C’est également à tort que le bordereau stipule que délai de 14 jours d’exercice du droit de rétractation commençait à courir à compter de la commande. En effet, le bon de commande ne portait pas seulement sur la livraison du matériel mais comprenait également une prestation de service de pose de sorte que par application des dispositions de l’article L. 221-1 le contrat ayant pour objet à la fois la livraison de biens et la fourniture de prestation de services est assimilé à un contrat de vente et que le délai de rétractation prévu à l’article L. 221-18 commençait en conséquence à courir à compter de la livraison et non de la commande.
Si par application de l’article L. 221-20 le délai de rétractation offert à M. [E] a été prorogé de 12 mois à compter de la livraison du bien, cette circonstance ne fait pas obstacle à l’exercice de l’action en nullité que les consommateurs demeurent habiles à engager lorsque, comme en l’espèce, le bordereau ne respecte pas les dispositions de l’article R. 221-1 du code de la consommation conformément aux dispositions de l’article L. 221-5 et L. 221-9 , et ce à peine de nullité prévue à l’article L. 242-1 du même code.
Si la société Home plus et la société BNP Paribas Personal Finance soutiennent que la nullité ainsi encourue pourrait avoir été couverte par M. [E] dès lors que celui-ci a accepté les travaux d’installation des biens fournis, il sera rappelé que la confirmation d’une obligation entachée de nullité est subordonnée à la conclusion d’un acte révélant que son auteur a eu connaissance du vice affectant l’obligation et l’intention de le réparer, sauf exécution volontaire après l’époque à laquelle celle-ci pouvait être valablement confirmée.
Or, en l’occurrence, aucun acte ne révèle qu’entre la conclusion et l’exécution du contrat, M. [E] ait eu connaissance de la violation du formalisme imposé par le code de la consommation, étant à cet égard observé que les dispositions de l’article R. 221-1 du code de la consommation qui fixent les mentions obligatoires du bordereau de rétractation et celles de l’article L. 221-1 n’étaient pas reproduites dans les conditions générales de vente annexées au bon de commande. La société Home plus ne saurait utilement se prévaloir de ne pas avoir déféré à la mise en demeure adressée par l’association de consommateur mandatée par M. [E] qui se prévalait de ces irrégularités pour solliciter l’annulation du contrat pour soutenir que M. [E] aurait entendu confirmer le contrat.
Il convient donc d’écarter le moyen tiré de la confirmation du contrat irrégulier, et de confirmer le jugement attaqué en ce qu’il a annulé le contrat conclu le 15 décembre 2016 entre M. [E] et la société Home Plus.
Au titre de la remise en état des parties consécutivement à l’annulation du contrat, le premier juge a à juste titre condamné la société Home Plus à procéder à la dépose des panneaux et à la remise en état de la toiture.
La société Home Plus est quant à elle tenue de procéder à la restitution du prix et c’est à juste titre que le premier juge a condamné la société Home Plus à procéder au remboursement des sommes perçues en exécution du contrat annulé soit la somme de 28 400 euros.
Le vendeur sollicite que de la somme qu’elle est tenue de restituer soient déduites les sommes suivantes :
– la somme de 3 662,45 euros correspondant au montant de la TVA récupérée par M. [E] sur le prix d’achat,
– la somme de 4 800 euros correspondant au crédit d’impôt transition énergétique auquel il pouvait prétendre.
– la somme de 5 680 euros correspondant à la valeur de la jouissance de la centrale pendant 5 ans
– la somme de 3 000 euros correspondant au montant des redevances versées par EDF pour l’achat de l’énergie pendant 5 ans.
Si par suite de la conclusion du contrat M. [E] a pu se voir accorder des avantages par l’administration fiscale, ces derniers relèvent de rapports qui leurs sont propres comme résultant de la qualité de contribuable de M. [E] et qui sont étrangers au contrat de vente annulé. Le vendeur ne saurait en conséquence s’en prévaloir pour s’exonérer de son obligation à restitution du prix payé par M. [E] et qui résulte de l’annulation du contrat.
La société Home Plus ne saurait en conséquence prétendre à imputation sur le montant des sommes correspondant à une restitution de TVA et ou au crédit d’impôt dont M. [E] a pu bénéficier.
Il est de principe qu’hors le cas de dégradation, en cas de résolution de la vente, le vendeur est tenu de restituer le prix sans pouvoir prétendre à une diminution au titre de l’utilisation de la chose vendue ou à l’usure qui en résulte.
Conformément aux dispositions de l’article 1352-3 du code civil, le vendeur est cependant fondé à réclamer non seulement la restitution du matériel vendu mais également celle des fruits et la valeur de jouissance procurée par la chose.
Il en résulte que le vendeur ne justifiant ni n’alléguant de dégradations imputables à l’acquéreur de la chose vendue, ne peut prétendre à imputer la somme de 5 680 euros au titre de la dépréciation de l’installation.
La société Home Plus est en revanche fondée à réclamer la restitution des fruits de l’installation et qui correspond aux redevances versées par EDF à M. [E] au titre de la revente d’énergie.
Au vu de la facture de revente d’énergie du 14 juin 2019, d’un montant de 792,39 euros la réclamation de la société Home Plus à hauteur de la somme de 3 000 euros sur la base d’un prix de revente annuel de 600 euros en moyenne apparaît justifié et il sera fait droit à sa demande.
Le jugement sera réformé en ce qu’il sera fait droit aux demandes de la société Home Plus dans cette limite et confirmé pour le surplus des dispositions relatives à l’annulation du contrat principal.
Sur le contrat de crédit :
Aux termes des dispositions de l’article L. 311-32 devenu L. 312-55 du code de la consommation, le contrat de crédit affecté est résolu ou annulé de plein droit lorsque le contrat en vue duquel il a été conclu est lui-même judiciairement résolu ou annulé.
Il n’est pas contesté que le crédit consenti par la société BNP Paribas Personal Finance est un crédit accessoire à une vente ou à une prestation de service.
En raison de l’interdépendance des deux contrats, l’annulation du contrat principal conclu avec la société Home Plus emporte annulation de plein droit du contrat accessoire de crédit conclu avec la société BNP Paribas Personal Finance.
Le jugement sera en conséquence confirmé en ce qu’il a constaté l’annulation de plein droit du contrat de prêt.
En suite de l’annulation du contrat de prêt, M. [E] n’est pas tenu envers le prêteur d’autre obligation que celle de lui rembourser le montant du capital emprunté versé à la société Home Plus soit la somme de 28 400 euros.
Il n’est pas contesté que M. [E] a payer au prêteur 8 échéances pour un total de 2 424,26 euros et a versé la somme de 28 234,12 euros lors du remboursement anticipé du prêt soit la somme totale de 30 658,38 euros.
Il est ainsi fondé à solliciter la condamnation du prêteur à lui rembourser la somme de 2 258,38 euros correspondant au montant des sommes versées au delà du capital emprunté le jugement étant réformé en ce qu’il a limité la condamnation au paiement de la somme de 1 000 euros.
Parties succombantes devant le premier juge les sociétés Home Plus et BNP Paribas Personal Finance ont été à juste titre condamnées in solidum aux dépens de première instance et, au paiement à M. [E] d’une indemnité de 350 euros au titre de ses frais irrépétibles de première instance.
Il serait en outre inéquitable de laisser à la charge de M. [E] l’intégralité des frais exposés par lui à l’occasion de la procédure d’appel, et les sociétés Home Plus et BNP Paribas Personal Finance seront condamnées in solidum à lui payer une indemnité complémentaire de 2 500 euros, sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS, LA COUR :
Confirme le jugement rendu le 23 février 2021 par le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Nantes sauf en ce qu’il a condamné la société BNP Paribas Personal Finance à payer à M. [E] la somme de 1 000 euros
Statuant à nouveau sur le chef infirmé
Condamne la société BNP Paribas Personal Finance à payer à M. [J] [E] la somme de 2 258,38 euros
y ajoutant,
Condamne M. [J] [E] à restituer à la société Home Plus la somme de 3 000 euros au titre de la restitution des fruits perçus de l’installation vendue.
Condamne la société BNP Paribas Personal Finance et la société Home Plus in solidum aux dépens d’appel et à payer à M. [J] [E] une somme de 2 500 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile
Rejette toutes autres demandes plus amples ou contraires.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT