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COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE
Chambre 3-4
ARRÊT AU FOND
DU 24 NOVEMBRE 2022
N° 2022/ 287
Rôle N° RG 19/09377 – N° Portalis DBVB-V-B7D-BENEK
[R] [M]
C/
SAS LOCAM
SCP BR ASSOCIES
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
Me Sarah HABERT
Me Alain KOUYOUMDJIAN
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Tribunal de Commerce de MARSEILLE en date du 15 Mai 2019 enregistré au répertoire général sous le n° 2018F00871.
APPELANTE
Madame [R] [M]
demeurant [Adresse 3]
représentée et assistée de Me Sarah HABERT, avocat au barreau de MARSEILLE
INTIMEES
SAS LOCAM, prise en la personne de son représentant légal en exercice, dont le siège est sis [Adresse 1]
représentée et assistée de Me Alain KOUYOUMDJIAN, avocat au barreau de MARSEILLE
SCP BR ASSOCIES es qualité de mandataire liquidateur de la société SIN, en la personne de M. [E] [V], dont le siège est sis [Adresse 2]
défaillante
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
L’affaire a été débattue le 11 Octobre 2022 en audience publique. Conformément à l’article 804 du code de procédure civile, Madame Laure BOURREL, Président a fait un rapport oral de l’affaire à l’audience avant les plaidoiries.
La Cour était composée de :
Madame Laure BOURREL, Président
Madame Anne-Laurence CHALBOS, Président
Madame Françoise FILLIOUX, Conseiller
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Madame Valérie VIOLET.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 24 Novembre 2022.
ARRÊT
Réputé contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 24 Novembre 2022,
Signé par Madame Laure BOURREL, Président et Madame Valérie VIOLET, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
FAITS, PROCÉDURES, MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES
Le 27 avril 2015, Madame [R] [M], médecin généraliste, a signé avec la SAS Solution Impression Numérique (SIN) un bon de commande pour la fourniture d’un combiné photocopieur- imprimantes – fax- scanner de marque Triumph Adler, ainsi qu’un contrat de location longue durée au coût trimestriel de 1188 € TTC sur 21 trimestres avec la société Locam. Le bon de commande stipule une garantie et maintenance copie de la société SIN, ainsi que l’engagement par la société SIN de payer une somme de 6825 € HT au titre de sa participation au contrat, somme versée en 21 mensualités, et un changement de matériel au bout de 24 mois avec une nouvelle participation de 6825 euros HT.
Le matériel a été livré le 13 mai 2015.
Madame [M] soutient qu’au bout de 24 mois, la société SIN ne lui a fait aucune proposition et qu’elle s’est retrouvée à devoir payer des mensualités exorbitantes. Elle aurait alors contacté la société SIN et à cette occasion, elle aurait découvert avoir contracté avec la société Locam alors qu’aucun contrat de location financière ne lui aurait été remis.
Par exploit du 30 mars 2018, Madame [M] a fait assigner la SAS Locam et la SAS SIN afin qu’il soit dit que les contrats de fourniture de matériel et de location longue durée du 27 avril 2015 sont interdépendants, qu’il y a eu violation des dispositions du code de la consommation, que soit prononcée la nullité des contrats tant pour violation des dispositions du code de la consommation que pour dol, que la société Locam soit condamnée à lui restituer le montant des loyers échus incluant le coût de la garantie et de maintenance, ainsi que les sommes prélevées au titre de l’assurance bris machine.
À titre subsidiaire, elle a sollicité qu’il soit constaté que la société SIN avait manqué à son engagement de renouveler la gamme et à son obligation de versement d’une participation, que soit prononcée la résiliation des contrats de location au 20 mai 2017, et que la société Locam soit condamnée à lui payer la somme de 5940 € TTC correspondant au montant des loyers versés depuis le 20 mai 2017, déduction faite de la participation de la société SIN.
Enfin Madame [M] a sollicité la somme de 2500 € à titre de dommages-intérêts, et celle de 3500 € au titre de l’article 700 du CPC.
La société SIN a conclu au débouté de Madame [M], et subsidiairement en cas d’annulation des contrats, a sollicité que la demanderesse soit condamnée à la restitution du matériel et au remboursement de la somme de 6827 € HT, outre la somme de 12 540 € HT équivalent à 38 mois de loyer à titre d’indemnité de jouissance du copieur, et infiniment subsidiairement, au débouté de Madame [M] de sa demande de résolution du contrat, ainsi que la somme de 4000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
La société Locam a conclu au débouté de Madame [M], et reconventionnellement, a sollicité sa condamnation à payer les sommes dues au titre des 3 trimestres impayés et des trimestres dus jusqu’à la fin du contrat, outre une somme au titre de la clause pénale, soit une somme totale de 13 519,43 €, avec intérêts et capitalisation, à restituer le matériel sous astreinte, ainsi qu’au paiement de la somme de 1500 € titre de l’article 700 du code de procédure civile. La société Locam a aussi demandé que si par extraordinaire le tribunal faisait droit aux demandes d’annulation du contrat de location pour non-respect du code de la consommation, la société SIN soit condamnée à lui restituer le prix d’acquisition du matériel.
Par jugement du 15 mai 2019, le tribunal de commerce de Marseille a :
-débouté Madame [R] [M] de toutes ses demandes, fins et conclusions,
-condamné Madame [R] [M] à payer à la société Locam SAS la somme de 12 291,40 € au titre du contrat de location avec intérêts au taux légal à compter du 23 janvier 2019, date de la mise en demeure, et celle de 1000 € au titre des frais irrépétibles occasionnés par la présente procédure,
-conformément aux dispositions de l’article 1343-2 du Code civil, dit que les intérêts au taux légal se capitaliseront par périodes annuelles et porteront intérêt au même taux,
-condamné Madame [R] [M] à restituer le matériel, objet du contrat, dans le mois suivant la signification du présent jugement, et à défaut, sous astreinte provisoire de 50 € par jour de retard pendant le délai d’un mois,
-condamné Madame [R] [M] à payer à la société SIN SAS la somme de 1000 € au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,
-conformément aux dispositions de l’article 696 du code de procédure civile, laisser à la charge de Madame [R] [M] les dépens et toutes taxes comprises de la présente instance telles qu’énoncées par l’article 695 du code de procédure civile, étant précisé que les droits, taxes et émoluments perçus par le secrétariat-greffe de la présente juridiction seront liquidés à la somme de 100,28 € TTC,
-conformément aux dispositions de l’article 515 du code de procédure civile, ordonné pour le tout l’exécution provisoire,
-rejeté pour le surplus toutes autres demandes, fins et conclusions contraires aux dispositions du présent jugement.
En cours de délibéré, par jugement du 7 mai 2019, le tribunal de commerce de Toulon a prononcé la liquidation judiciaire de la SASU SIN et a commis la SCP BR Associés prise en la personne de Maître [E] [V] en qualité de liquidateur judiciaire.
Madame [R] [M] a relevé appel du jugement du 15 mai 2019 par déclaration du 12 septembre 2019 à l’encontre de la société Locam et de la SCP BR Associés ès qualités de liquidateur judiciaire de la société SIN.
Par conclusions récapitulatives du 12 septembre 2022, qui sont tenues pour entièrement reprises et qui ont été notifiées le 11 septembre 2022 à la SCP BR Associés à personne habilitée à recevoir l’acte, Madame [R] [M] demande à la Cour de :
« Vu les articles 1104, 1108, 1109, 1116, 1137, 1179 du Code civil,
vu la loi 2014- 344 du 17 mars 2014 entrée en vigueur le 13 juin 2014,
vu la directive 2011/83/UE,
vu les articles L. 221-3 et suivants du code de la consommation,
vu l’article L. 242-1 du code de la consommation,
vu les articles L. 341-2 7° et L. 313-7 du code monétaire et financier,
vu les pièces produites au débat,
Réformer en toutes ses dispositions le jugement rendu par le tribunal de commerce de Marseille le 15 mai 2019.
Juger recevable et bien fondée la mise en cause de Maître [E] [V] ès qualités de mandataire liquidateur de la société SIN.
Déclarer communes et opposables en sa qualité de liquidateur judiciaire de la société SIN la procédure introduite et pendante devant la Cour d’appel d’Aix-en-Provence sous le numéro RG n° 19/09377.
En conséquence,
Recevoir Madame [M] en son appel.
La dire bien fondée.
Réformer le jugement entrepris.
Statuer à nouveau.
À titre principal
Sur la nullité des contrats pour manquement au code de la consommation
Juger que les contrats ont été conclus hors établissement au sens des dispositions de l’article L. 221-3 et suivants du code de la consommation.
Juger que le contrat conclu par Madame [M] et Locam ne portent pas sur un service financier.
Sur le contrat conclu avec SIN
Juger que le contrat avec SIN ne comportait ni information sur la possibilité de se rétracter ni de bordereau de rétractation.
Juger l’absence de respect par la société SIN des dispositions des articles L. 121-16 et suivants du code de la consommation.
Prononcer la nullité du contrat conclu avec la société SIN et, en raison de l’interdépendance des contrats de fourniture de matériel et de location longue durée du 27 avril 2015, du contrat conclu avec la société Locam.
Sur le contrat conclu avec Locam
Juger que le contrat avec Locam ne comportait ni information sur la possibilité de se rétracter ni de bordereau de rétractation.
Juger l’absence de respect par la société Locam des dispositions des articles L. 121-16 et suivants du code de la consommation.
Prononcer la nullité du contrat conclu avec la société Locam et, en raison de l’interdépendance des contrats de fourniture de matériel et de location longue durée du 27 avril 2015, du contrat conclu avec la société SIN.
En conséquence,
Prononcer la disparition rétroactive des contrats.
Condamner la société Locam à restituer à Madame [M] la somme de 5329,38 € correspondant aux échéances du 20 août 2015 au 20 février 2018, sous déduction de la participation commerciale d’un montant de 6825 € HT (13 519,38 € – 8190 € TTC).
Condamner la société Locam à restituer à Madame [M] la somme de 12 291,40 € au titre de la déchéance du terme résultant le jugement rendu le 15 mai 2019 par le tribunal de commerce de Marseille.
Rembourser à Madame [M] les frais de réexpédition de la machine.
Sur la nullité pour dol
Juger que la société SIN s’est rendue coupable de pratiques commerciales trompeuses reposant sur des allégations, indications et présentations fausses ou de nature à induire en erreur Madame [M] portant sur la nature et l’objet de la participation versée et le mode de calcul du prix de la location.
Juger que le consentement de Madame [M] lors de la signature du bon de commande a été surpris par dol.
Juger que Madame [M] ne se serait jamais engagée auprès de la société Locam sans les man’uvres de la société SIN.
Juger que les man’uvres dolosives imputable à la société SIN sont opposables à la société Locam en raison de l’interdépendance des 2 contrats.
Juger que les sociétés SIN et Locam ont manqué à leur obligation d’information et de conseil.
Prononcer la nullité du contrat conclu avec la société SIN et, en raison de l’interdépendance des contrats de fourniture de matériel et de location longue durée du 27 avril 2015, du contrat conclu avec Locam.
En conséquence,
Prononcer la disparition rétroactive des contrats.
Condamner la société Locam à restituer à Madame [M] la somme de 5329,38 € correspondant aux échéances du 20 août 2015 au 20 février 2018, sous déduction de la participation commerciale d’un montant de 6825 € HT (13 519,38 € – 8190 € TTC).
Condamner la société Locam à restituer à Madame [M] la somme de 12 291,40 € au titre de la déchéance du terme résultant du jugement rendu le 15 mai 2019 par le tribunal de commerce de Marseille.
Rembourser à Madame [M] les frais de réexpédition de la machine ainsi que la somme de 30 € au titre de la demande d’un exemplaire du contrat.
Sur la nullité pour manquement aux dispositions de l’article L. 341-2 7° du code monétaire et financier
Juger que le contrat conclu avec la société SIN ne respecte pas les dispositions de l’article L. 341-2 7° du code monétaire et financier prévu à peine de nullité.
En conséquence,
Prononcer la disparition rétroactive des contrats.
Condamner la société Locam à restituer à Madame [M] la somme de 5329,38 € correspondant aux échéances du 20 août 2015 au 20 février 2018, sous déduction de la participation commerciale d’un montant de 6825 € HT (13 519,38 € – 8190 € TTC).
Condamner la société Locam à restituer à Madame [M] la somme de 12 291,40 € au titre de la déchéance du terme résultant du jugement rendu le 15 mai 2019 par le tribunal de commerce de Marseille.
Rembourser à Madame [M] les frais de réexpédition de la machine ainsi que la somme de 30 € au titre de la demande d’un exemplaire du contrat.
À titre subsidiaire
Juger que la société SIN a manqué à son obligation de renouveler la gamme tous les 24 mois et de verser une participation financière.
Prononcer la résiliation aux torts exclusifs de la société SIN du contrat conclu entre elle et Madame [M] à la date à laquelle la participation financière n’a plus été versée.
Condamner la société Locam à rembourser à Madame [M] tous les loyers versés à la date à laquelle la participation commerciale a cessé, soit à compter de l’échéance du 20 août 2017 jusqu’au terme du contrat soit la somme de 15 977,52 € (1229,04 x 13 mensualités).
Rembourser à Madame [M] les frais de restitution de la machine ainsi que la somme de 30 € au titre de la demande d’un exemplaire du contrat.
À titre infiniment subsidiaire
Juger que si par extraordinaire la résiliation devait être prononcée aux torts de Madame [M], l’indemnité de résiliation à la nature d’une clause pénale.
Réviser le montant de l’indemnité de résiliation ainsi que la clause pénale à la somme d’un euro à défaut de les ramener à de plus justes proportions.
Condamner la société Locam à restituer à Madame [M] la somme de 861,84 euros au titre de l’assurance bris machine prélevée à tort.
En tout état de cause
Condamner solidairement la société SIN et la société Locam au paiement de la somme de 4000 € en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens, en ce compris le constat d’huissier du 21 juin 2018. »
Par conclusions du 10 septembre 2022, qui sont tenues pour entièrement reprises, la SAS Locam demande à la Cour de :
« Confirmer le jugement du tribunal de commerce de Marseille.
Débouter Madame [M] de l’ensemble de ses demandes à l’encontre de la SAS Locam.
Dire et juger que Madame [M] a reçu le contrat de location longue durée.
Débouter Madame [M] de sa demande de nullité du contrat de location sur le fondement de l’article L. 341 2 7° du code monétaire et financier.
Débouter Madame [M] de sa demande de nullité sur le fondement des dispositions de l’article L 111 1, L 111 2, L 221-3, L 221-5 du code de la consommation.
À titre principal sur l’application du code de la consommation,
Dire et juger applicables les dispositions de l’article L 221 2 4° du code de la consommation et exclure le contrat de location signé de l’application des articles L 221 3 et suivants du code de la consommation.
À titre subsidiaire
Si la Cour entendait appliquer les dispositions de l’article L 221 2 4° du code de la consommation,
Dire et juger que Madame [M] s’est engagée dans le cadre de son champ d’activité principal et non à titre personnel, et quel que soit son champ de compétences professionnelles, en conséquence dire inapplicable les dispositions de l’article L 221 3 et suivants du code de la consommation.
À titre infiniment subsidiaire sur l’application du code de la consommation,
Si par extraordinaire la Cour entendait appliquer les dispositions de l’article L 221 3, L 221 5 du code de la consommation,
Débouter Madame [M] compte tenu de l’exécution volontaire du contrat de location entraînant l’impossibilité pour celle-ci de restituer le matériel dans son état initial.
En tout état de cause, débouter Madame [M] de ses demandes n’ayant jamais fait valoir une quelconque rétractation dans le cadre du délai prorogé de l’article L 221.20 du code de la consommation.
Débouter Madame [M] de sa demande visant l’annulation du contrat de location de matériel et sa demande de restitution des loyers.
Dire et juger que les engagements personnels de SIN auprès de Madame [M] tout autant qu’ils existeraient et tout autant qu’ils n’auraient pas été respectés, l’engage personnellement à l’exclusion de Locam SAS et qu’ils ne sauraient être interdépendants du contrat de location longue durée par lequel Madame [M], laquelle s’est engagée pour une durée irrévocable de 63 mois dont la qualité du matériel n’a jamais été remise en cause ainsi que les prestations de SIN au jour de la résiliation du contrat imputable à Madame [M] pour défaut de paiement des loyers (sic).
En tout état de cause sur les demandes de Madame [M], dire et juger qu’elle est toujours en possession du matériel.
Débouter Madame [M] de sa demande d’annulation pour dol.
Dire et juger que SIN et encore moins Locam SAS n’ont commis de dol.
Dire et juger que si la cour devait retenir une attitude dolosive de SIN, la dire sans conséquence à l’égard du contrat de location longue durée car n’émanant pas de la SAS Locam.
Dire et juger la résiliation du contrat de location imputable à Madame [M] pour défaut de paiement des loyers.
Vu le contrat de location et notamment l’article 12 du contrat,
vu le procès-verbal de réception,
vu la lettre de mise en demeure en date du 23 janvier 2019,
vu l’acquisition de la clause résolutoire pour défaut de paiement des loyers par application de l’article 12 du contrat de location pour une durée ferme et irrévocable de 63 mois et dont le terme contractuel était fixé au 20 août 2020,
En conséquence, en l’état des loyers impayés à compter du 20 mai 2018,
Condamner Madame [M] au paiement des sommes suivantes :
3 loyers échus du 20 mai 2018 au 20 novembre 2018 soit la somme de 3687,12 €, outre la clause pénale de 368,71 euros
7 loyers du 20 février 2019 au 20 août 2020 soit 8603,28 € outre la clause pénale de 860,32 €
soit une somme totale de 13 519,43 €,
avec intérêts de droit au 23 janvier 2019.
Ordonner la capitalisation des intérêts en vertu de l’article 1154 du Code civil.
Ordonner la restitution du matériel sous astreinte de 50 € par jour de retard au siège de la SA Locam et aux frais de Madame [M].
Condamner Madame [M] à verser une somme de 1500 € au titre de l’article 700 du CPC.
Condamner Madame [M] aux dépens. »
La SAS Locam n’a jamais fait signifier ses conclusions à la SCP BR Associés ès qualités de liquidateur judiciaire de la société SIN.
La SCP BR Associés prise en la personne de Maître [V], qui a été assignée le 20 août 2019 à personne habilitée à recevoir l’acte, n’a pas constitué avocat. Maître [V] ès qualités a écrit à la Cour le 10 septembre 2019 pour indiquer que compte tenu de l’impécuniosité de la procédure collective, il ne pouvait constituer avocat.
L’instruction de l’affaire a été close le 13 septembre 2022.
MOTIFS
Préalablement, la SCP BR Associés ayant été régulièrement appelée à la procédure, il est superfétatoire de préciser que la présente décision lui est commune et opposable.
Sur l’interdépendance des contrats
Les contrats concomitants ou successifs qui s’inscrivent dans une opération globale incluant une location financière sont interdépendants.
Lorsque des contrats sont interdépendants, la résiliation, la résolution ou l’annulation de l’un quelconque d’entre eux entraîne la caducité, par voie de conséquence, des autres, sauf pour la partie à l’origine de l’anéantissement de cet ensemble contractuel à indemniser le préjudice causé par sa faute.
Il suit de là que dès lors que les parties savent qu’elles participent à une opération pluripartite, par application de l’interdépendance des contrats, même si l’organisme financier n’a pas été informé des conditions particulières ou avantages stipulés sur le bon de commande et consentis aux clients par le fournisseur, celles-ci sont incluses dans le périmètre des contrats interdépendants, et sont ainsi opposables à toutes les parties à l’opération, tout comme leur violation ou inexécution.
Le 27 et 28 avril 2015, Madame [M] a signé avec la société SIN un bon de commande portant sur un copieur, scaner, fax TA P. 3525 MFP précisant que le fournisseur participait au contrat à hauteur de 6825 € HT par versement de 21 mensualités, et que la gamme serait renouvelée tous les 24 mois avec solde du dossier copies et une nouvelle participation d’un montant minimum de 6825 € HT.
Afin de financer ce matériel, le 27 avril 2015, Madame [M] a signé un contrat de location avec la SAS Locam pour 21 trimestres de 891 € HT ou 1069,20 € TTC.
Ces 2 contrats sont interdépendants et les conditions faites par la société SIN à Madame [M] sont opposables à la société Locam.
Toutefois, si les deux contrats sont entachés de nullité, ils seront tous les 2 déclarés nuls.
Sur la nullité des contrats au titre du code de la consommation
Madame [M] sollicite en premier lieu la nullité du bon de commande et la nullité du contrat de location sur le fondement des dispositions du code de la consommation.
Afin de faire échec à l’application des dispositions du code de la consommation, la SAS Locam invoque tout d’abord les dispositions de l’article L. 221-2 4° du code de la consommation dans sa rédaction actuelle. Cependant, compte tenu de la date de signature des contrats qui sont en litige, s’appliquent au présent litige les dispositions du code de la consommation dans leur rédaction antérieure à l’ordonnance du 14 mars 2016.
L’article L. 121-16 4° du code de la consommation dans sa rédaction applicable à l’espèce énonce que sont exclus du champ d’application de la présente section les contrats portant sur les services financiers.
Toutefois, au regard des dispositions du code monétaire et financier, la location longue durée de matériel n’est pas un service financier.
Dès lors, les dispositions du code de la consommation ne peuvent être écartées sur ce moyen.
Ensuite la société Locam soutient que les conditions émises par l’articles L. 221-3 du code de la consommation pour que ces dispositions soient applicables à un contrat signé par deux professionnels ne seraient pas remplies.
L’article L. 121- 16-1 III du code de la consommation dans sa rédaction antérieure à l’ordonnance du 14 mars 2016, applicable à l’espèce (devenu l’article L. 221-3), énonce que les dispositions des sous-sections 2, 3, 6 et 7 applicables aux relations entre consommateurs et professionnels, sont étendues aux contrats conclus hors établissement entre 2 professionnels dès lors que l’objet de ces contrats n’entre pas dans le champ de l’activité principale du professionnel sollicité et que le nombre de salariés employés par celui-ci est inférieur ou égal à 5.
La société SIN a son siège social situé à la [Localité 6], et la société Locam a son siège social situé à [Localité 5]. Or tant le bon de commande que le contrat de location ont été signés à [Localité 4] par Madame [M].
Ils sont donc tous deux signés hors établissement.
Madame [M] étant médecin, l’achat et l’utilisation d’un copieur, même s’il est utile à l’exécution administrative de sa profession, ne rentre pas dans le champ de son activité principale qui est l’exercice de la médecine.
Enfin, elle justifie qu’à la date de signature des contrats, elle n’employait aucun salarié.
Les dispositions du code de la consommation relatives aux contrats signés hors établissement sont donc applicables au présent litige.
L’article 121-17 I du code de la consommation dans sa rédaction applicable à l’espèce, édicte que préalablement à la conclusion d’un contrat de vente ou de fourniture de services, le professionnel communique au consommateur, de manière lisible et compréhensible, les informations suivantes :
‘
2° lorsque le droit de rétractation existe, les conditions, le délai et les modalités d’exercice de ce droit, ainsi que le formulaire type de rétractation, dont les conditions de présentation et les mentions qu’il contient sont fixées par décret en Conseil d’État,
‘
L’article L 121-18 du code de la consommation applicable souligne que dans le cas d’un contrat conclu hors établissement, le professionnel fournit au consommateur, sur papier ou, sous réserve de l’accord du consommateur, sur un autre support durable, les informations prévues au I de l’article 121-17. Ces informations sont rédigées de manière lisible et compréhensible.
Aux termes de l’article L 121-18-1 du code de la consommation dans sa rédaction applicable à l’espèce, le professionnel fournit aux consommateurs un exemplaire du contrat conclu hors établissement, sur papier signé par les parties ou, avec l’accord du consommateur, sur un autre support durable, confirmant l’engagement express des parties. Ce contrat comprend, à peine de nullité, toutes les informations mentionnées au I de l’article L. 121-17.
Le contrat mentionne, le cas échéant, l’extrait du consommateur pour la fourniture de contenus numériques indépendants de tout support matériel avant l’expiration du délai de rétractation et, dans cette hypothèse, le renoncement de ce dernier à l’exercice de son droit de rétractation.
Le contrat est accompagné du formulaire type de rétractation mentionné au 2e du I de l’article L. 121-17.
Ni le bon de commande signé avec la société SIN ni le contrat de location contracté auprès de la société Locam par Madame [M] ne remplissent les obligation légales d’information et ni l’un ni l’autre n’étaient accompagnés de l’imprimé de rétractation.
La société Locam ne discute ni l’absence d’information ni celle du formulaire de rétractation en ce qui concerne le contrat de location.
Pour s’opposer à la nullité encourue, la société Locam invoque les dispositions de l’article L. 121-21-1 du code de la consommation qui prévoit que lorsque les informations relatives aux droits de rétractation n’ont pas été fournies au consommateur dans les conditions prévues au 2° du I de l’article L. 121-17, le délai de rétractation est prolongé de 12 mois à compter de l’expiration du délai de rétractation initial, déterminé conformément à l’article L. 121-21.
Nonobstant, ce dernier article ne peut faire échec à la nullité encourue sur le fondement de l’article L 121-18-1 dans la mesure où aucun texte ne prévoit que la nullité n’est encourue que si le consommateur a fait usage de son droit de rétractation.
La société Locam soutient aussi que par le non-exercice de son droit de rétractation, Madame [M] y aurait renoncé et qu’elle ne pourrait plus invoquer l’absence de formulaire de rétractation.
Cependant, d’une part, le litige porte sur la nullité du contrat et non sur la rétractation, d’autre part et surtout, une renonciation à un droit doit être énoncée clairement et être non équivoque. Le fait que Madame [M] ne se soit pas rétractée ne signifie pas qu’elle a renoncé à invoquer la nullité des contrats pour ne pas être conformes aux dispositions d’ordre public du code de la consommation.
De même, c’est vainement que la société Locam invoque que la nullité des contrats ne pourrait être prononcée parce que le matériel a été utilisé et qu’il ne peut être restitué à l’état neuf. La remise en état des parties suite au prononcé de la nullité du contrat s’effectue, en cas d’impossibilité de restitution à l’identique, en une restitution en valeur du bien ou du service.
Ainsi, le bon de commande et le contrat de location sont déclarés nuls, et le jugement déféré est infirmé en toutes ses dispositions, sans qu’il y ait lieu d’examiner les autres moyens développés par les parties.
En conséquence du prononcé de la nullité, la société Locam est condamnée à restituer à Madame [M] toutes les sommes perçues en exécution du contrat de location.
Toutefois, par application des dispositions de l’article 5 du code de procédure civile, le juge ne peut octroyer plus que ce qui est demandé.
La remise en état des parties aurait dû entraîner, d’une part, la condamnation de la société Locam à restituer à Madame [M] toutes les sommes perçues de la locataire, et d’autre part, Madame [M] aurait dû être condamnée à restituer à la société SIN le montant de sa participation.
Or, alors que Madame [M] a payé au titre des loyers à la société Locam la somme de 13 519,38 €, elle ne sollicite que la somme de 5329,38 € parce que, de façon erronée, elle déduit du montant des loyers versés la somme de 8190 € TTC reçue de la société SIN au titre de sa participation au contrat.
Au regard des écritures de Madame [M], la société Locam est condamnée à lui restituer la somme de 5329,38 €.
Madame [M] sollicite aussi la restitution des sommes payées au titre de l’exécution provisoire du jugement déféré.
Cependant, le présent arrêt infirmatif constitue le titre pour Madame [M] à l’encontre de la société Locam en remboursement des sommes qu’elle a payées et pour la société Locam son obligation à restituer les sommes perçues au titre de l’exécution provisoire du jugement déféré infirmé. Il n’y a lieu de spécifier cet effet dans le dispositif de la décision.
Pour sa part, Madame [M] est condamnée à restituer le matériel à la société Locam, ce qu’elle a déjà fait en exécution à titre provisoire du jugement déféré.
Néanmoins, dans le cadre de la remise en état des parties, les frais de livraison ayant été assumés par le loueur, les frais de réexpédition sont à la charge de la société Locam. Celle-ci est condamnée à lui payer la somme de 50,69 € TTC payée à la société UPS pour la restitution du photocopieur au siège de la SAS Locam à [Localité 5] le 26 mars 2020.
Dans ses écritures, la société Locam ne sollicite aucune indemnisation au titre de la perte de la valeur du matériel loué.
Sur les autres demandes
L’équité commande de faire bénéficier Madame [M] des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.
La SAS Locam et la SAS SIN qui succombent, supporteront les entiers dépens.
Aux termes de l’article 695 du code de procédure civile, le coût du constat d’huissier du 21 juin 2018 qui n’était pas obligatoire pour engager l’action, n’entre pas dans les dépens. Il en sera toutefois tenu compte dans le montant de l’indemnisation accordée au titre des frais irrépétibles.
PAR CES MOTIFS
La Cour
Statuant publiquement, par arrêt réputé contradictoire,
Infirme le jugement déféré et statuant à nouveau,
Dit que le bon de commande des 27 et 28 avril 2015 et le contrat de location du 27 avril 2015 sont interdépendants,
Annule le bon de commande signé par Madame [R] [M] les 27 et 28 avril 2015 avec la SAS SIN,
Annule le contrat de location signé par Madame [R] [M] le 27 avril 2015 avec la SAS Locam,
Condamne la SAS Locam à payer à Madame [R] [M] la somme de 5329,38 € au titre du remboursement des loyers versés,
Condamne Madame [R] [M] à restituer le matériel objet du contrat de location, les frais de restitution étant à la charge de la SAS Locam,
Condamne la SAS Locam à payer à Madame [R] [M] la somme de 50,69 € au titre des frais de restitution du matériel,
Déboute les parties de leurs autres demandes plus amples ou contraires,
Condamne la SAS Locam à payer à Madame [R] [M] la somme de 2500 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
Met les entiers dépens à la charge de la SAS Locam et de la SCP BR Associés ès qualités de liquidateur judiciaire de la SAS SIN, les dépens à la charge de la SCP BR Associés ès qualités étant frais privilégiés de la procédure collective.
LE GREFFIER LE PRESIDENT