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Le droit de préemption permet à un coproducteur d’acquérir en priorité les droits sur une œuvre audiovisuelle auprès d’un autre coproducteur. Dans cette affaire, un coproducteur estimait que l’un de ses partenaires avait cédé ses droits en paralysant son droit de préemption (ce qui n’a pas été retenu par les juges).
La société RENE CHATEAU a procédé à l’acquisition de l’intégralité des actions de la société FILMEL, puis huit ans après, est devenue bénéficiaire du patrimoine de celle qui était sa filiale, opération qui était contestée par la société PATHE. La société PATHE contestait cette « cession» intervenue au bénéfice de la société RENE CHATEAU. Elle considérait en effet que le « montage imaginé par Monsieur René CHATEAU » a abouti à la cession par la société FILMEL de la totalité de ses participations dans la coproduction à un tiers, la société RENE CHATEAU, sans qu’elle-même ait été informée et donc en mesure de faire jouer ce droit de préemption.
Elle précisait n’avoir découvert qu’à la suite d’une assemblée générale de la société FILMEL, et de la décision de dissolution sans liquidation, que la société RENE CHATEAU avait acquis les actifs de la société FILMEL, parmi lesquels les parts de la coproduction du film Le Samouraï opération aurait été « effectuée dans le plus grand anonymat » et qui avait selon elle pour but de passer outre le droit de préemption.
La société RENE CHATEAU soutenait pour sa part que le droit de préemption au profit des coproducteurs était limité au cas de cession des parts de coproduction et ne s’appliquait donc pas à la situation de l’espèce, c’est-à-dire le transfert universel du patrimoine de l’un des coproducteurs, de sorte qu’on ne pouvait faire grief à la société FILMEL de ne pas avoir informé directement la société PATHE de son intention, puisque le contrat n’imposait pas à l’un des producteurs d’aviser les autres des situations de prise de contrôle de leur capital par des tiers.
L’article 1844-5 du Code civil dispose que « la réunion de toutes les parts sociales en une seule main n’entraîne pas la dissolution de plein droit de la société. Tout intéressé peut demander cette dissolution si la situation n’a pas été régularisée dans un délai d’un an ».
En application de ce texte, qui contrairement à ce que soutient la société PATHE était applicable immédiatement à toute dissolution pour cette cause opérée à compter de sa publication en janvier 1988, la société RENE CHATEAU, devenue actionnaire unique de la société FILMEL à la suite du rachat de l’intégralité de ses actions en mars 2001, a décidé, aux termes d’un procès-verbal de délibération de son assemblée générale – et non de l’assemblée générale de la société FILMEL,— du 31 octobre 2009, « de procéder à la dissolution, sans liquidation, de sa filiale, la société FILMEL », et de donner à cette fin les pouvoirs les plus étendus à Monsieur René CHATEAU. A la suite de cette dissolution, le patrimoine de la société FILMEL a été transmis à son associé unique la société RENE CHATEAU, en vertu de l’alinéa suivant du même texte selon lequel « En cas de dissolution, celle-ci entraîne la transmission universelle du patrimoine de la société à l’associé unique, sans qu’il y ait lieu à liquidation », ce qui a eu pour effet, que l’ensemble de la participation de la société FILMEL à la coproduction du film Le Samouraï a bien été transmis à la société RENE CHATEAU.
Le caractère universel de la transmission du patrimoine s’est donc opéré par le seul effet de la loi, cette transmission ne pouvait être limitée à une partie de l’actif de la société dissoute, et aucun acte de cession n’avait à être régularisé, ce qui a notamment pour effet qu’aucun prix n’a pu être convenu en contrepartie de cette transmission.
Par ailleurs, cette opération ne s’est pas déroulée en catimini et en fraude de ses droits, puisque elle a fait l’objet d’une publication dans le journal « Les Annonces de la Seine » et que mention en a été portée au Registre du Commerce, la mention de la dissolution sans liquidation de la société FILMEL et de sa radiation au RCS ayant été publiée au BODACC.
Il en résulte que cette transmission ne peut être assimilée à une cession, au sens de l’article 16 du contrat de 1967, et qu’elle n’autorisait donc pas la mise en œuvre d’un droit de préemption au profit des autres coproducteurs.
En conséquence, c’est de façon valable que, par suite de cette transmission, la société RENE CHATEAU est devenue l’un des coproducteurs du film Le Samourai; qu’elle exploite depuis de manière licite.