Your cart is currently empty!
SOC.
LG
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 29 septembre 2021
Rejet
M. SCHAMBER, conseiller doyen
faisant fonction de président
Arrêt n° 1058 F-D
Pourvoi n° F 19-20.482
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 29 SEPTEMBRE 2021
M. [F] [V], domicilié [Adresse 2], a formé le pourvoi n° F 19-20.482 contre l’arrêt rendu le 29 mai 2019 par la cour d’appel de Paris (pôle 6, chambre 4), dans le litige l’opposant à l’association CLAJE (Culture loisir animation jeu éducation), dont le siège est [Adresse 1], défenderesse à la cassation.
Le demandeur invoque, à l’appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Schamber, conseiller doyen, les observations de la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat de M. [V], de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de l’association CLAJE, après débats en l’audience publique du 30 juin 2021 où étaient présents M. Schamber, conseiller doyen faisant fonction de président et rapporteur, M. Flores, conseiller, Mme Ala, conseiller référendaire ayant voix délibérative, et Mme Piquot, greffier de chambre,
la chambre sociale de la Cour de cassation, composée en application de l’article L. 431-3, alinéa 2, du code de l’organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l’arrêt attaqué (Paris, 29 mai 2019), M. [V] a été engagé, du 3 février 2014 au 2 février 2015, par l’association Culture loisir animation jeu éducation, en qualité d’animateur multimédia dans le cadre d’un contrat d’accompagnement dans l’emploi. Le contrat a été renouvelé à deux reprises, du 3 février 2015 au 2 février 2016, puis du 3 février 2016 au 2 février 2017.
2. L’association ayant, au terme du dernier contrat, décidé de ne plus poursuivre la relation de travail, le salarié a saisi la juridiction prud’homale aux fins, notamment, de requalification de son contrat d’accompagnement dans l’emploi en un contrat de travail à durée indéterminée.
Examen du moyen
Enoncé du moyen
3. Le salarié grief à l’arrêt de le débouter de sa demande en requalification de ses contrats d’accompagnement dans l’emploi en un contrat de travail à durée indéterminée ainsi que de ses demandes de sommes à titre d’indemnité de requalification, d’indemnité compensatrice de préavis et des congés payés afférents, d’indemnité conventionnelle de licenciement et d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, alors :
« 1°/ qu’il résulte des articles L. 5134-20 et L. 5134-22 du code du travail que l’obligation pour l’employeur d’assurer, dans le cadre du contrat d’accompagnement dans l’emploi, des actions de formation, d’orientation professionnelle et de validation des acquis destinées à réinsérer durablement le salarié constitue un des éléments essentiels à la satisfaction de l’objet même de ce contrat de faciliter l’insertion professionnelle des personnes rencontrant des difficultés sociales et professionnelles particulières d’accès à l’emploi et l’une des conditions d’existence de ce contrat, en sorte que l’inexécution de l’obligation de formation qui incombe à l’employeur justifie à elle seule la requalification du contrat en contrat de travail à durée indéterminée ; qu’en l’espèce, la cour d’appel a constaté que l’entreprise n’avait pas été en mesure de proposer au salarié les fonctions d’animateur multimédia telles qu’il l’avait envisagé, au vu du public concerné, mais cependant lui avait procuré un emploi en vue de sa réinsertion dans la vie professionnelle avec des actions ponctuelles en multimédia ; qu’elle en a déduit que l’association avait ainsi répondu à certaines de ses attentes en termes de formation tout en ne démontrant pas avoir assuré des démarches en vue de la validation des acquis de l’expérience ; qu’elle en a conclu que cette carence partielle, qui aurait pu donner lieu à une réparation spécifique, ne permettait pas toutefois de requalifier la succession de contrats à durée déterminée en contrat à durée indéterminée ni de condamner l’association au paiement d’une indemnité de requalification ; qu’en statuant ainsi, alors qu’il résultait de ses propres constatations une carence partielle de l’employeur dans l’exécution de son obligation de formation, la cour d’appel, qui n’en a pas tiré les conséquences légales qui s’imposaient, a violé les textes susvisés ;
2°/ qu’il résulte des articles L. 5134-20 et L. 5134-22 du code du travail que l’obligation pour l’employeur d’assurer, dans le cadre du contrat d’accompagnement dans l’emploi, des actions de formation, d’orientation professionnelle et de validation des acquis de l’expérience nécessaires à la réalisation de son projet professionnel et destinées à réinsérer durablement le salarié constitue une des conditions d’existence de ce contrat, en sorte que l’inexécution de l’obligation de formation qui incombe à l’employeur justifie à elle seule la requalification du contrat en contrat de travail à durée indéterminée ; qu’en l’espèce, la cour d’appel a constaté que l’employeur n’avait pas été en mesure de proposer au salarié les fonctions d’animateur multimédia telles qu’il l’avait envisagé, au vu du public concerné, mais cependant lui avait procuré un emploi en vue de sa réinsertion dans la vie professionnelle avec des actions ponctuelles en multimédia ; qu’elle en a déduit que l’employeur avait ainsi répondu à certaines de ses attentes en termes de formation tout en ne démontrant pas avoir assuré des démarches en vue de la validation des acquis de l’expérience ; qu’elle en a conclu que cette carence partielle, qui aurait pu donner lieu à une réparation spécifique, ne permettait pas toutefois de requalifier la succession de contrats à durée déterminée en contrat à durée indéterminée ni de condamner l’association au paiement d’une indemnité de requalification ; qu’en statuant ainsi, par un motif inopérant tiré de ce que l’employeur a procuré au salarié un emploi en vue de sa réinsertion dans la vie professionnelle, alors qu’il résultait de ses propres constatations que l’employeur n’avait pas permis au salarié d’exercer les fonctions pour lesquelles il avait été engagé et autour desquelles son projet professionnel devait s’articuler, la cour d’appel, qui n’en a pas tiré les conséquences légales qui s’imposaient, a violé les textes susvisés ;
3°/ qu’il résulte des articles L. 5134-20 et L. 5134-22 du code du travail que l’obligation pour l’employeur d’assurer, dans le cadre du contrat d’accompagnement dans l’emploi, des actions de formation, d’orientation professionnelle et de validation des acquis destinées à réinsérer durablement le salarié constitue un des éléments essentiels à la satisfaction de l’objet même de ce contrat de faciliter l’insertion professionnelle des personnes rencontrant des difficultés sociales et professionnelles particulières d’accès à l’emploi et l’une des conditions d’existence de ce contrat, en sorte que l’inexécution de l’obligation de formation qui incombe à l’employeur justifie à elle seule la requalification du contrat en contrat de travail à durée indéterminée ; qu’il est constant, en l’espèce, que la relation de travail a duré, de manière continue, du 3 février 2014 au 2 février 2017, soit trois ans ; que la cour d’appel a relevé qu’il a été justifié devant la juridiction prud’homale d’actions d’accompagnement sous forme de formations qui ont été effectivement réalisées de mars 2014 à mai 2016 ; qu’elle a cependant considéré que la carence partielle de l’employeur dans l’exécution de son obligation de formation ne pouvait entraîner la requalification des contrats à durée déterminée successifs en un contrat de travail à durée indéterminée ; qu’en statuant ainsi, alors qu’il ressortait de ses constatations qu’il n’avait pas été justifié d’action d’accompagnement ni de formations pendant toute la durée de la relation de travail, la cour d’appel, qui n’a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé les textes susvisés ;
4°/ qu’il résulte des articles L. 5134-20 et L. 5134-22 du code du travail que l’obligation pour l’employeur d’assurer, dans le cadre du contrat d’accompagnement dans l’emploi, des actions de formation, d’orientation professionnelle et de validation des acquis destinées à réinsérer durablement le salarié constitue un des éléments essentiels à la satisfaction de l’objet même de ce contrat de faciliter l’insertion professionnelle des personnes rencontrant des difficultés sociales et professionnelles particulières d’accès à l’emploi et l’une des conditions d’existence de ce contrat, en sorte que l’inexécution de l’obligation de formation qui incombe à l’employeur justifie à elle seule la requalification du contrat en contrat de travail à durée indéterminée ; qu’en l’espèce, pour considérer que la carence partielle de l’employeur dans l’exécution de son obligation de formation ne pouvait entraîner la requalification des contrats à durée déterminée successifs en un contrat de travail à durée indéterminée, la cour d’appel a relevé qu’il avait été justifié devant la juridiction prud’homale d’actions d’accompagnement sous forme de formations qui ont été effectivement réalisées de mars 2014 à mai 2016 et que l’entreprise n’avait pas été en mesure de proposer au salarié les fonctions d’animateur multimédia telles qu’il l’envisageait, au vu du public concerné mais lui avait procuré un emploi en vue de sa réinsertion dans la vie professionnelle avec des actions ponctuelles en multimédia ; qu’en statuant comme elle l’a fait, sans rechercher, comme elle y était invitée, quelles avaient été précisément les actions d’accompagnement et de formation dont le salarié avait bénéficié ainsi que leur durée au cours de la relation de travail, la cour d’appel, qui n’a pas permis à la Cour de cassation d’exercer son contrôle, a privé sa décision de base légale au regard des textes susvisés ;
5°/ que tout jugement ou arrêt doit être motivé ; que le défaut de réponse à conclusions constitue un défaut de motifs ; que M. [V] faisait valoir dans ses écritures d’appel que l’employeur ne rapportait pas la preuve d’avoir fait bénéficier le salarié, pour la période du premier contrat d’accompagnement dans l’emploi conclu du 3 février 2014 au 3 février 2015, des quatre-vingts heures de formation rendues obligatoires par les articles L. 6324-5 et D. 6324-1-1 du code du travail, dans leur rédaction alors applicable ; que, ne répondant à ces conclusions, la cour d’appel a pourtant décidé qu’il n’y avait pas lieu de requalifier le contrat précité en contrat de travail à durée indéterminée ; qu’en statuant ainsi, elle a privé sa décision de motifs et violé, par conséquent, les dispositions de l’article 455 du code de procédure civile ;
6°/ que le contrat de travail, associé à l’attribution d’une aide à l’insertion professionnelle au titre d’un contrat d’accompagnement dans l’emploi, conclu pour une durée déterminée, peut être prolongé dans la limite d’une durée totale de vingt-quatre mois, ou de cinq ans pour les salariés âgés de cinquante ans et plus bénéficiaires du revenu de solidarité active, de l’allocation de solidarité spécifique, de l’allocation temporaire d’attente ou de l’allocation aux adultes handicapés, ainsi que pour les personnes reconnues travailleurs handicapés ; qu’à titre exceptionnel, lorsque des salariés âgés de cinquante ans et plus ou des personnes reconnues travailleurs handicapés embauchés dans les ateliers et chantiers d’insertion rencontrent des difficultés particulières qui font obstacle à leur insertion durable dans l’emploi, ce contrat peut être prolongé au-delà de la durée maximale prévue ; qu’en l’espèce, il est constant que la relation de travail a duré, de manière continue, du 3 février 2014 au 2 février 2017, soit trois ans ; que la cour d’appel a constaté que M. [V] était âgé de plus de cinquante ans lors de la signature des contrats et que, lors de son embauche, il était sans emploi, ne touchait aucune indemnité de chômage et ne bénéficiait pas du RSA, précisant que cette situation n’était pas contestée ; qu’elle en a déduit que les difficultés particulières faisant obstacle à l’insertion durable dans un emploi étaient donc démontrées ; qu’en statuant ainsi, par des motifs inopérants, la cour d’appel, qui n’a pas caractérisé les difficultés particulières faisant obstacle à l’insertion durable du salarié dans l’emploi et qui permettent de renouveler le contrat d’accompagnement dans l’emploi au-delà de vingt-quatre mois, a violé les dispositions de l’article L. 5134-15-1 du code du travail, dans sa rédaction en vigueur ;
7°/ que la portée de la cassation est déterminée par le dispositif de l’arrêt qui la prononce ; que la cassation s’étend également à l’ensemble des dispositions de la décision cassée ayant un lien d’indivisibilité ou de dépendance nécessaire ; qu’ainsi, la cassation à intervenir sur le chef de dispositif relatif à la requalification du contrat d’accompagnement dans l’emploi entraînera la cassation du chef de dispositif relatif à la rupture du contrat de travail. »
Réponse de la Cour
4. Appréciant souverainement les éléments de fait et de preuve qui lui étaient soumis, la cour d’appel a constaté que le salarié avait rencontré des difficultés particulières faisant obstacle à l’insertion durable dans un emploi.
5. La cour d’appel, qui a constaté que s’il n’avait pas répondu à toutes les attentes du salarié, l’employeur avait néanmoins justifié d’actions d’accompagnement sous forme de formations effectivement réalisées de mars 2014 à mai 2016, a pu décider, sans avoir à répondre au moyen inopérant tiré de la méconnaissance des dispositions de l’article D. 6324-1-1 du code du travail, que la demande de requalification en contrat à durée indéterminée devait être rejetée.
6. Le moyen, qui, pris en sa septième branche est privé de portée par le rejet des six premières branches, n’est donc pas fondé.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. [V] aux dépens ;
En application de l’article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-neuf septembre deux mille vingt et un.