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SOC.
SG
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 15 septembre 2021
Rejet
M. HUGLO, conseiller doyen
faisant fonction de président
Arrêt n° 1000 FS-B sur le second moyen
Pourvoi n° T 19-15.732
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 15 SEPTEMBRE 2021
La société France télévisions, société anonyme, dont le siège est [Adresse 2], a formé le pourvoi n° T 19-15.732 contre l’arrêt rendu le 26 février 2019 par la cour d’appel de Paris (pôle 6, chambre 8), dans le litige l’opposant à M. [E] [T], domicilié [Adresse 1], défendeur à la cassation.
La demanderesse invoque, à l’appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Prieur, conseiller référendaire, les observations de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat de la société France télévisions, de la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat de M. [T], et l’avis de Mme Molina, avocat général référendaire, après débats en l’audience publique du 16 juin 2021 où étaient présents M. Huglo, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Prieur, conseiller référendaire rapporteur, M. Schamber, conseiller doyen, Mmes Cavrois, Monge, MM. Sornay, Rouchayrole, Flores, Mme Lecaplain-Morel, conseillers, Mmes Ala, Thomas-Davost, Techer, conseillers référendaires, Mme Molina, avocat général référendaire, et Mme Jouanneau, greffier de chambre,
la chambre sociale de la Cour de cassation, composée, en application de l’article R. 431-5 du code de l’organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l’arrêt attaqué (Paris, 26 février 2019), M. [T] a été engagé par plusieurs contrats à durée déterminée d’usage à compter de février 1982 par la société France 3, puis à compter de mars 1987 par la société France 2, en qualité d’assistant réalisateur. La relation de travail s’est poursuivie par contrat à durée indéterminée du 1er mai 2003, en qualité de responsable de la mise à l’antenne des bandes annonces.
2. Contestant l’avenant qui lui a été remis à la suite de l’accord collectif France télévisions du 28 mai 2013, le salarié a saisi la juridiction prud’homale de demandes aux fins notamment de constater que son employeur avait modifié sans son accord la structure de sa rémunération et en paiement de rappels de salaire et de prime d’ancienneté.
Examen des moyens
Sur le premier moyen
Enoncé du moyen
3. L’employeur fait grief à l’arrêt de dire que la structure de la rémunération du salarié a été modifiée unilatéralement à compter du 1er janvier 2013 et en conséquence de le condamner à lui payer diverses sommes à titre de rappels de salaire, de compte épargne-temps monétisé, de prime d’ancienneté, outre les congés payés afférents, entre le 1er janvier 2013 et le 31 octobre 2018, ainsi qu’à créditer deux jours de congés supplémentaires à son plan épargne-temps, alors « que lorsque la structure de la rémunération n’est pas fixée par le contrat de travail, elle peut être modifiée sans l’accord du salarié ; qu’en l’espèce seul le montant annuel brut de la rémunération de M. [T] était prévu par son contrat de travail et ses avenants ; qu’en retenant que la structure de sa rémunération brute mensuelle constituait un élément de son contrat de travail qui ne pouvait être modifié par accord collectif sans son accord, la cour d’appel a violé l’article 1103 du code civil.»
Réponse de la Cour
4. Sauf disposition légale contraire, un accord collectif ne peut permettre à un employeur de procéder à la modification du contrat de travail sans recueillir l’accord exprès du salarié.
5. Ayant constaté, d’une part, qu’il résultait du contrat de travail et de ses avenants ainsi que des bulletins de salaires produits avant application de l’accord collectif France télévisions du 28 mai 2013 que la rémunération brute mensuelle du salarié était fixée de façon forfaitaire, hors toutes primes ou indemnités et, d’autre part, qu’à compter de la transposition rétroactive au 1er janvier 2013 de cet accord, cette rémunération avait été scindée en un salaire de base dont le taux était diminué pour y intégrer une prime d’ancienneté, la cour d’appel en a exactement déduit que le mode de rémunération contractuelle de l’intéressé avait été modifié dans sa structure sans son accord.
6. Le moyen n’est donc pas fondé.
Sur le second moyen
Enoncé du moyen
7. L’employeur fait grief à l’arrêt de dire que l’ancienneté du salarié devait être augmentée au 1er janvier 2013, de trois ans quatre mois et trois jours, et en conséquence de le condamner à lui payer diverses sommes à titre de rappels de salaire au titre du compte épargne-temps monétisé et de prime d’ancienneté, outre les congés payés afférents, entre le 1er janvier 2013 et le 31 octobre 2018, ainsi qu’à créditer deux jours de congés supplémentaires au plan épargne-temps du salarié, alors :
« 1°/ que l’article 3-11 de l’accord collectif d’entreprise du 28 mai 2013 dispose que : “Les salariés sous contrat à durée indéterminée conservent, à la date d’entrée en vigueur du présent accord, le bénéfice de l’ancienneté qui leur a été reconnu à France télévisions SA et dans les sociétés absorbées par France télévisions SA en vertu de la loi n°2009-258 du 5 mars 2009 relative à la communication audiovisuelle et au nouveau service public (France 2, France 3, France 4, France 5, FTVI et RFO). Dans le cadre de la politique mobilité du groupe, les collaborations effectuées au sein d’une filiale du groupe France télévisions (on entend par groupe l’ensemble des sociétés pour lesquelles France télévisions est actionnaire majoritaire) sont prises en compte dans le calcul de l’ancienneté au prorata des périodes d’emploi. (?) Les périodes de collaboration sous contrat de travail à durée déterminée, de toute nature, effectuées pour l’entreprise sont prises en compte pour la détermination de l’ancienneté à partir de la date de première collaboration et proportionnellement aux périodes d’emploi et à la durée du travail de l’intéressé” ; qu’en jugeant que M. [T] était depuis le 1er janvier 2013 en droit de voir reconnue une ancienneté de 12 ans, 10 mois et 20 jours lors de son intégration en contrat à durée indéterminée au 1er mai 2003 au sein de la société France 2, laquelle ne la lui avait alors pas reconnue, lorsque l’accord collectif précité ne vise que la conservation de l’ancienneté déjà reconnue au salarié par les sociétés absorbées puis par France télévisions lors de son entrée en vigueur le 1er janvier 2013, la cour d’appel a violé l’article 3-11 de l’accord précité ;
2°/ que l’accord collectif n’a point d’effet rétroactif sauf stipulation expresse le prévoyant ; que l’article 3-11 de l’accord collectif du 28 mai 2013 qui dispose que : “Dans le cadre de la politique mobilité du groupe, les collaborations effectuées au sein d’une filiale du groupe France télévisions (on entend par groupe l’ensemble des sociétés pour lesquelles France télévisions est actionnaire majoritaire ) sont prises en compte dans le calcul de l’ancienneté au prorata des périodes d’emploi” et que “Les périodes de collaboration sous contrat de travail à durée déterminée, de toute nature, effectuées pour l’entreprise sont prises en compte pour la détermination de l’ancienneté à partir de la date de première collaboration et proportionnellement aux périodes d’emploi et à la durée du travail de l’intéressé”, n’est pas applicable aux collaborations effectuées au sein du groupe France télévisions avant son entrée en vigueur le 1er janvier 2013 ; qu’en jugeant que M. [T] était en droit depuis le 1er janvier 2013 de voir reconnue une ancienneté de 12 ans, 10 mois et 20 jours lors de son intégration en contrat à durée indéterminée au 1er mai 2003 au sein de la société France 2, la cour d’appel qui a conféré un effet rétroactif à l’accord collectif, a violé l’article L 2261-1 du code du travail et l’article 2 du code civil. »