Droit audiovisuel : 11 mai 2022 Cour d’appel de Montpellier RG n° 18/00856

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Droit audiovisuel : 11 mai 2022 Cour d’appel de Montpellier RG n° 18/00856
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délivrées le

à

COUR D’APPEL DE MONTPELLIER

2e chambre sociale

ARRET DU 11 MAI 2022

Numéro d’inscription au répertoire général :

N° RG 18/00856 – N° Portalis DBVK-V-B7C-NYWX

Décision déférée à la Cour : Jugement du 29 JUIN 2018

CONSEIL DE PRUD’HOMMES – FORMATION PARITAIRE DE MONTPELLIER – N° RG F 17/00935

ARRÊT N°

APPELANTE :

Société [Localité 2] EVENTS SAEM

[Adresse 3]

[Adresse 3]

[Adresse 3]

[Localité 2]

Représentée par Me Olivier BONIJOLY de la SELARL CAPSTAN – PYTHEAS, avocat au barreau de MONTPELLIER

substitué par Me Mathilde JOYES, avocat au barreau de MONTPELLIER

INTIME :

Monsieur [U] [T]

né le 20 Juillet 1981 à [Localité 4]

de nationalité Française

[Adresse 1]

[Localité 2]

Représenté par Me Guilhem DEPLAIX, substitué par Me Léa DI PLACIDO, avocats au barreau de MONTPELLIER

Ordonnance de clôture du 20 Décembre 2021

Renvoi contradictoire au 07 mars 2022

COMPOSITION DE LA COUR :

En application de l’article 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 07 MARS 2022, en audience publique, le magistrat chargé du rapport ayant fait le rapport prescrit par l’article 804 du même code, devant la cour composée de :

Monsieur Jean-Pierre MASIA, Président

Madame Caroline CHICLET, Conseiller

Madame Isabelle MARTINEZ, Conseiller

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Madame Marie-Lydia VIGINIER

ARRET :

– contradictoire ;

– prononcé par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile ;

– signé par M. Jean-Pierre MASIA, Président, et par Mme Marie-Lydia VIGINIER, Greffier.

*

**

EXPOSE DU LITIGE :

[U] [T] a été engagé entre le 9 janvier 2006 et le 26 février 2017 par la société anonyme d’économie mixte Le Corum devenue d’abord la Saem Enjoy [Localité 2] puis la Saem [Localité 2] Events (ci-après la société), employant habituellement au moins onze salariés, en qualité de technicien électricien dans le cadre de 235 contrats à durée déterminée régis par la convention collective nationale SYNTEC.

Le dernier contrat signé entre les parties le 17 février 2017 a pris fin le 26 février 2017.

Reprochant à l’employeur divers manquements à ses obligations, [U] [T] a saisi le conseil des prud’hommes de Montpellier le 4 septembre 2017 pour voir requalifier les contrats à durée déterminée à temps partiel en contrat à durée indéterminée à temps complet, voir juger que la rupture doit s’analyser en un licenciement sans cause réelle et sérieuse et obtenir la réparation de ses préjudices ainsi que l’application de ses droits.

Par jugement du 29 juin 2018, ce conseil a :

– requalifié les contrats à durée déterminée de [U] [T] en contrat unique de travail à durée indéterminée à effet du 9 janvier 2006 à temps complet ;

– dit que la rupture de ce contrat en date du 26 février 2017 doit s’analyser en un licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

– dit que le salaire moyen mensuel brut de référence est égal à 2.051,13 € ;

– condamné la Saem [Localité 2] Events à verser à [U] [T] les sommes suivantes :

> 29.431,14 € bruts à titre de rappel de salaire de février 2014 à février 2017,

> 2.943,11 € bruts au titre des congés payés y afférents,

> 5.763,34 € bruts à titre de rappel de prime de 13ème mois pour la période de février 2014 à février 2017,

> 576,33 € bruts au titre des congés payés y afférents,

> 2.500 € à titre d’indemnité de requalification,

> 40.000 € à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

> 4.120,26 € bruts au titre de l’indemnité compensatrice de préavis,

> 410,23 € bruts au titre des congés payés y afférents,

> 11.415,11 € à titre d’indemnité conventionnelle de licenciement,

– ordonné à l’employeur la remise des documents sociaux sous astreinte de 30 € par jour de retard courant à compter du 30ème jour suivant la notification du présent jugement ;

-ordonné à l’employeur de régulariser la situation du salarié à l’égard des organismes sociaux sous astreinte de 30 € par jour de retard courant à compter du 30ème jour suivant la notification du présent jugement ;

– débouté [U] [T] de sa demande de dommages-intérêts pour exécution déloyale du contrat ;

– condamné la Saem [Localité 2] Events aux dépens et à payer à [U] [T] la somme de 960 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile;

– débouté la Saem [Localité 2] Events de toutes ses demandes.

Le 1er août 2018, la société [Localité 2] Events Saem a relevé appel de tous les chefs du jugement à l’exception de ceux ayant débouté [U] [T] de ses prétentions.

Vu les conclusions de l’appelante remises au greffe le 16 octobre 2018 ;

Vu les dernières conclusions de [U] [T], appelant à titre incident, remises au greffe le 13 décembre 2021 ;

Vu l’ordonnance de clôture en date du 20 décembre 2021 ;

MOTIFS :

Sur la demande de requalification en contrat à durée indéterminée :

L’appelante conclut à l’infirmation du jugement en ce qu’il a requalifié les contrats à durée déterminée en contrat à durée indéterminée. Elle demande à la cour de dire prescrite la demande de requalification pour les contrats conclus antérieurement à février 2015, la relation de travail ayant été discontinue et entrecoupée de périodes interstitielles, et de rejeter la demande pour le surplus, les motifs de recours au contrat à durée déterminée étant précis et justifiés par l’usage dans les entreprises de spectacles, congrès, séminaires, salons et expositions touristiques et culturelles.

[U] [T] conclut au rejet de la fin de non-recevoir et à la confirmation du jugement en ce qu’il a requalifié les contrats successifs à durée déterminée en un contrat à durée indéterminée.

La demande de requalification formée par l’intimé est fondée sur les motifs du recours au contrat à durée déterminée d’usage puisqu’il dénonce la coexistence de motifs équivalant à une absence de motif ainsi que l’absence de raison objective établissant le caractère par nature temporaire de l’emploi de technicien électricien.

Selon l’article L.1471-1 du code du travail, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l’ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017, toute action portant sur l’exécution du contrat de travail se prescrit par deux ans à compter du jour où celui qui l’exerce a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant d’exercer son droit.

En application de l’article L.1245-1 du même code, dans sa rédaction antérieure à celle issue de l’ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017, par l’effet de la requalification des contrats à durée déterminée, le salarié est réputé avoir occupé un emploi à durée indéterminée depuis le jour de son engagement par un contrat à durée déterminée irrégulier.

Il résulte de ces textes que le délai de prescription d’une action en requalification d’un contrat à durée déterminée en contrat à durée indéterminée fondée sur le motif du recours au contrat à durée déterminée énoncé au contrat a pour point de départ le terme du contrat ou, en cas de succession de contrats à durée déterminée, le terme du dernier contrat et que le salarié est en droit, lorsque la demande en requalification est reconnue fondée, de se prévaloir d’une ancienneté remontant au premier contrat irrégulier.

En l’espèce, il y a bien une succession de contrats à durée déterminée, contrairement à ce que soutient l’appelante, puisque [U] [T] a été engagé durant plusieurs jours ou semaines tous les mois de chaque année entre janvier 2006 et février 2017, à l’exception de coupures de quelques semaines durant l’été (d’une durée variable entre début juin et fin août/début septembre) et les fêtes de noël (d’une durée variable entre mi décembre et courant janvier).

Le point de départ de la prescription a commencé à courir, par conséquent, à compter du terme du dernier contrat signé le 17 février 2017 et arrivé à échéance le 26 février 2017.

[U] [T] ayant saisi le conseil des prud’hommes le 4 septembre 2017, son action en requalification n’était pas prescrite au moment de l’introduction de l’instance et la fin de non-recevoir opposée par l’appelante sera rejetée.

Selon l’ancien article D121-2 du code du travail devenu l’article D1242-1 depuis le 1er mai 2008, le contrat à durée déterminée d’usage est autorisé dans les secteurs d’activité dans lesquels il est d’usage constant de ne pas recourir au contrat à durée indéterminée en raison de la nature de l’activité exercée et du caractère par nature temporaire de ces emplois.

Pour justifier le recours répété au contrat à durée déterminée d’usage afin de confier à [U] [T] l’emploi de technicien électricien pendant 11 ans, l’appelante invoque le caractère ‘nécessairement temporaire’ et la nature ‘par essence fluctuante’ de son activité consistant en l’organisation ‘d’activités de nature privée à vocation de spectacles, congrès, séminaires, salons, expositions touristiques ou culturelles, événements sportifs’ et produit, au soutien de son moyen, les témoignages de trois régisseurs d’exploitation technique et d’un responsable d’audiovisuel ainsi que les résultats financiers des années 2011 à 2016.

Mais le caractère par nature temporaire de l’emploi confié à [U] [T] au moyen de contrat à durée déterminée d’usage, qui doit être justifié par des éléments concrets, ne peut se déduire de la seule activité exercée par la société [Localité 2] Events ni de la fluctuation d’une année sur l’autre de ses résultats financiers.

Et dès lors que la société [Localité 2] Events emploie en son sein des techniciens électriciens permanents, ainsi que cela résulte des témoignages de [W] [Y], responsable audiovisuel, et de [X] [S], régisseur technique (pièces 9 et10 de l’appelante), il s’en évince que cet emploi n’est pas temporaire par nature.

D’ailleurs, les deux témoins précités expliquent bien qu’ils n’avaient recours aux salariés temporaires qu’en cas d’insuffisance du personnel permanent pour faire face aux commandes des clients et non en raison du caractère par nature temporaire de l’emploi de technicien électricien.

La société [Localité 2] Events, qui a engagé [U] [T] pour pourvoir un emploi qui n’est pas temporaire par nature dans le but de faire face à un simple surcroît d’activité ne pouvait pas recourir au contrat à durée déterminée d’usage ainsi qu’elle l’a fait pendant 11 ans.

Enfin, c’est en vain que l’appelante invoque des propositions d’embauche à durée indéterminée que [U] [T] aurait refusées en 2013 et 2014 puisque les courriers produits en pièce 5 sont tous adressés à un certain [B] [H] et non à [U] [T] et qu’il n’est justifié d’aucun refus du salarié.

C’est donc à bon droit que le conseil des prud’hommes a requalifié les contrats à durée déterminée successifs en un contrat à durée indéterminée à compter du 9 janvier 2006 et le jugement sera confirmé sur ce point.

Sur la demande de rappel de salaire au titre de la requalification en temps complet :

[U] [T], formant appel incident, conclut à l’infirmation du jugement en ce qu’il a limité sa demande de rappel de salaire à la somme de 29.431,14 € bruts par l’effet de la prescription triennale et demande à la cour de condamner l’employeur à lui payer la somme de 112.931,29 € bruts outre les congés payés y afférents au titre de la requalification à temps complet et au titre des périodes interstitielles non travaillées pour lesquelles il soutient être resté à la disposition permanente de l’employeur. Il conteste également la prescription opposée par les premiers juges à sa demande de rappel de salaire au titre de la prime de 13ème mois et demande à la cour de condamner la société [Localité 2] Events à lui payer la somme de 20.499,28 € bruts de ce chef outre les congés payés y afférents.

La société [Localité 2] Events conclut à la confirmation du jugement sur la prescription mais à son infirmation en ce que le conseil a fait droit, partiellement, aux demandes de rappel de salaire fondées sur la requalification du contrat en temps complet et sur le maintien permanent du salarié à la disposition de l’employeur et demande à la cour de débouter [U] [T] de toutes ses prétentions.

La demande de rappel de salaire fondée sur l’action en requalification du contrat de travail à temps partiel en contrat à temps complet est soumise au délai de prescription prévu par l’article L.3245-1 du code du travail.

Selon cet article, dans sa rédaction issue de la loi n°2013-504 du 14 juin 2013, ‘l’action en paiement ou en répétition du salaire se prescrit par trois ans à compter du jour où celui qui l’exerce a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l’exercer. La demande peut porter sur les sommes dues au titre des trois dernières années à compter de ce jour ou, lorsque le contrat de travail est rompu, sur les sommes dues au titre des trois années précédant la rupture du contrat’.

L’article 21 V de la loi du 14 juin 2013 prévoit que ‘les dispositions du nouvel article L. 3245-1 du Code du travail s’appliquent aux prescriptions en cours à compter du 16 juin 2013, sans que la durée totale de la prescription puisse excéder la durée prévue par la loi antérieure, soit cinq ans’.

En outre, et contrairement aux affirmations contraires de [U] [T], la requalification d’un contrat de travail à durée déterminée en contrat à durée indéterminée ne porte que sur le terme du contrat et laisse inchangées les stipulations contractuelles relatives à la durée du travail de sorte qu’il n’y a pas de lien entre la requalification du contrat à durée déterminée en contrat à durée indéterminée opérée dans les motifs qui précèdent et la demande de requalification du contrat à temps partiel en contrat à temps complet.

Le salarié ayant saisi la juridiction prud’homale le 4 septembre 2017 et la rupture du contrat à durée indéterminée étant survenue le 26 février 2017, c’est à bon droit que le conseil des prud’hommes a dit que [U] [T] était recevable en son action pour les créances salariales postérieures au 26 février 2014, tous les salaires antérieurs étant prescrits, contrairement à ce que soutient ce dernier, et le jugement sera confirmé sur ce point.

C’est à bon droit que le conseil des prud’hommes a dit que l’absence de mention, dans les contrats à temps partiel successifs signés depuis le 9 janvier 2006, relative aux horaires de travail et à la répartition des heures entre les jours de la semaine ou les semaines du mois durant les périodes travaillées devait entraîner la requalification du temps partiel en temps complet depuis l’origine et le jugement sera confirmé sur ce point.

S’agissant des périodes interstitielles, [U] [T] démontre, en pages 23 à 30 de ses conclusions, que 152 contrats édités entre le 23 janvier 2006 et le 13 février 2017 ont été signés le vendredi pour le lundi suivant, que 7 contrats, dont celui du 9 janvier 2006, ont été signés et exécutés le jour-même, que deux contrats ont été signés après le début de sa mission et qu’il a travaillé, durant de nombreuses périodes rémunérées sans contrat écrit, ainsi qu’en attestent les bulletins de paie correspondants.

En outre, les coupures estivales ou de noël se sont chaque fois intercalées de manière imprévisible (dates et durées variables).

Il se déduit de ce qui précède que, pendant 11 années, [U] [T] s’est trouvé dans l’impossibilité d’anticiper les périodes travaillées avec la société [Localité 2] Events et que, pour honorer ses innombrables engagements pris le plus souvent le vendredi pour le lundi (152 contrats) ou pour le jour-même (contrats signés le jour de la mission ou périodes travaillées sans contrat écrit), le salarié n’a pu faire autrement que de se tenir, de manière permanente, à la disposition de l’employeur.

C’est en vain que l’appelante invoque des propositions d’embauche à durée indéterminée que [U] [T] aurait refusées en 2013 et 2014 puisque les courriers produits en pièce 5 sont tous adressés à [B] [H] et non à [U] [T] et qu’il n’est justifié d’aucun refus du salarié.

Le jugement sera par conséquent confirmé en ce qu’il a condamné la société [Localité 2] Events à payer la somme de 29.431,14 € bruts à titre de rappel de salaire de février 2014 à février 2017 outre celle de 2.943,11 € bruts au titre des congés payés y afférents.

C’est par des motifs que la cour adopte que le conseil des prud’hommes a condamné la société [Localité 2] Events à payer à [U] [T] la somme de 5.763,34 € bruts au titre de la prime de 13ème mois due entre février 2014 et février 2017 outre celle de 576,33 € bruts au titre des congés payés y afférents sur le fondement de l’article 8 de l’accord d’entreprise du 15 janvier 1999 et le jugement sera confirmé sur ce point.

Sur les conséquences de la requalification en contrat à durée indéterminée :

[U] [T], formant appel incident, conclut à l’infirmation du jugement en ce qu’il a limité les condamnations de la société [Localité 2] Events et demande à la cour de condamner cette dernière à lui payer :

> 10.000 € à titre d’indemnité de requalification,

> 4.130,73 € bruts au titre de l’indemnité compensatrice de préavis,

> 413,07 € bruts au titre des congés payés y afférents,

> 11.445,59 € au titre de l’indemnité de licenciement,

> 60.000 € à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

La société [Localité 2] Events demande à la cour de ramener les prétentions du salarié à de plus justes proportions, le salarié ne rapportant pas la preuve des préjudices qu’il invoque.

Ainsi que le fait justement valoir [U] [T], son salaire de base à temps plein, incluant la prime de 13ème mois, aurait dû être de 2.065,37 € bruts par mois [(12,57 € bruts x 151,67 heures x 13)/12] et non de 2.051,13 € bruts comme l’a décidé à tort le conseil des prud’hommes qui sera infirmé sur ce point.

[U] [T] a droit à une indemnité de requalification que la cour évalue à la somme de 2.500 € en application de l’article L.1245-2 du code du travail. Le salarié sera débouté du surplus de sa demande et le jugement sera confirmé sur ce point.

La rupture, survenue à l’échéance du terme du dernier contrat, s’analyse en un licenciement sans cause réelle et sérieuse, ainsi que l’a justement dit le conseil des prud’hommes.

[U] [T], qui avait une ancienneté de 11 ans, un mois et 17 jours au jour de la rupture, a droit à une indemnité compensatrice de préavis de deux mois d’un montant de 4.130,73 € bruts outre les congés payés y afférents pour 413,07 € bruts et le jugement sera infirmé sur ce quantum.

Il a également droit à l’indemnité conventionnelle de licenciement de l’article 5 de l’accord d’entreprise du 15 janvier 1999 qui prévoit l’allocation, après cinq ans d’ancienneté, d’un demi mois de salaire par année d’ancienneté avec un maximum de douze mois soit la somme de 11.455,59 € (2065,37 x 50% x 11 ans et 1 mois).

S’agissant du préjudice résultant de la perte de l’emploi, compte tenu des circonstances de la rupture, du montant de la rémunération versée (2.064,37 € bruts), de l’âge de l’intéressé (35 ans), de son ancienneté dans l’entreprise (11 ans, 1 mois et 17 jours), de sa capacité à retrouver un emploi eu égard à sa formation et à son expérience professionnelle et des conséquences du licenciement à son égard tel que cela résulte des pièces communiquées et des explications fournies à la cour (allocations de retour à l’emploi pendant une année à compter du 28 février 2017), la société [Localité 2] Events sera condamnée à lui verser la somme de 25.000 € à titre d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et le jugement sera infirmé sur ce point.

Lorsque le licenciement est indemnisé en application de l’article L.1235-3 du code du travail, comme c’est le cas en l’espèce, la juridiction ordonne d’office, même en l’absence de Pôle emploi à l’audience et sur le fondement des dispositions de l’article L.1235-4 du même code, le remboursement par l’employeur de toute ou partie des indemnités de chômage payées au salarié par les organismes concernés, du jour du licenciement au jour du jugement, et ce dans la limite de six mois. En l’espèce au vu des circonstances de la cause il convient de condamner l’employeur à rembourser les indemnités à concurrence de 6 mois.

Le jugement sera complété en ce sens.

Sur la demande au titre de l’exécution déloyale du contrat :

[U] [T], formant appel incident, conclut à l’infirmation du jugement en ce qu’il a rejeté sa demande de dommages-intérêts d’un montant de 10.000 € pour exécution déloyale du contrat.

La société [Localité 2] Events conclut à la confirmation du jugement sur ce point.

L’employeur, durant plus de 11 années, a méconnu gravement les règles relatives au contrat à durée déterminée d’usage en confiant à [U] [T] un emploi non temporaire par nature devant permettre à l’entreprise de faire face à des surcroîts d’activité et en contraignant le salarié, auquel elle a fait appel 235 fois au moins (sans tenir compte des missions rémunérées mais non contractualisées par écrit), à se tenir de manière permanente à sa disposition puisqu’elle ne lui permettait pas de connaître à l’avance les dates de ses interventions.

Ce faisant, la société [Localité 2] Events a manqué à son devoir de loyauté envers [U] [T] ce qui a causé à ce dernier un préjudice, distinct de celui né de la perte d’emploi, puisqu’il s’est trouvé maintenu dans un état de précarité totale pendant plus de 11 ans.

Ce manquement justifie l’allocation d’une indemnité de 8.000 € à titre de dommages-intérêts et le jugement sera infirmé sur ce point.

Sur les autres demandes :

Les créances de nature salariale produisent des intérêts au taux légal à compter du jour où l’employeur a eu connaissance de la demande (soit à compter de la date de réception de sa convocation devant le bureau de conciliation), et les sommes à caractère indemnitaire à compter et dans la proportion de la décision qui les a prononcées / du présent arrêt

Il sera fait droit à la demande de remise des documents sociaux et de régularisation de la situation auprès des organismes sociaux, sans que l’astreinte soit nécessaire et [U] [T] sera débouté de sa demande de ce chef, le jugement étant infirmé sur ce point.

La société [Localité 2] Events qui succombe, sera condamnée aux dépens d’appel et à payer à [U] [T] la somme de 1.500 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile pour ses frais exposés en cause d’appel.

PAR CES MOTIFS :

La cour, statuant publiquement et contradictoirement :

Confirme le jugement entrepris sauf en ce qu’il a dit que le salaire moyen mensuel brut de référence est égal à 2.051,13 € et condamné la Saem [Localité 2] Events à verser à [U] [T] les sommes suivantes :

> 40.000 € à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

> 4.120,26 € bruts au titre de l’indemnité compensatrice de préavis,

> 410,23 € bruts au titre des congés payés y afférents,

> 11.415,11 € à titre d’indemnité conventionnelle de licenciement,

et sauf en ce qu’il a débouté [U] [T] de sa demande de dommages-intérêts pour exécution déloyale du contrat et en ce qu’il a assorti d’une astreinte les injonctions de remettre les documents sociaux et de régulariser la situation du salarié à l’égard des organismes sociaux ;

Statuant à nouveau sur les seuls chefs infirmés, le complétant et y ajoutant ;

Rejette la prescription de l’action en requalification des contrats à durée déterminée en contrat à durée indéterminée opposée par la société [Localité 2] Events ;

Dit que les créances salariales antérieures au 26 février 2014 sont prescrites ;

Dit que le salaire de référence est de 2.065,37 € bruts incluant la prime de 13ème mois ;

Dit que la société [Localité 2] Events a engagé sa responsabilité envers [U] [T] pour manquement à l’obligation de loyauté ;

Condamne la société [Localité 2] Events à payer à [U] [T] les sommes suivantes :

> 4.130,73 € bruts au titre de l’indemnité compensatrice de préavis,

> 413,07 € bruts au titre des congés payés y afférents,

> 11.455,59 € au titre de l’indemnité conventionnelle de licenciement,

> 25.000 € à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

> 8.000 € à titre de dommages-intérêts pour exécution déloyale du contrat,

Dit que les sommes à caractère salarial porteront intérêts au taux légal à compter du jour où l’employeur a eu connaissance de leur demande et les sommes à caractère indemnitaire à compter du présent arrêt ;

Déboute [U] [T] du surplus de ses prétentions et de ses demandes d’astreinte ;

Ordonne le remboursement par la société [Localité 2] Events au Pôle Emploi des indemnités de chômage versées à [U] [T] du jour de son licenciement à ce jour, à concurrence de 6 mois ;

Dit que le greffe adressera à la direction générale de Pôle Emploi une copie certifiée conforme de l’arrêt, en application de l’article R.1235-2 du code du travail ;

Condamne la société [Localité 2] Events aux dépens d’appel et à payer à [U] [T] la somme de 1.500 € en vertu de l’article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles exposés en cause d’appel.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT

 


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