Diffamation : décision du 15 octobre 2019 Cour de cassation Pourvoi n° 18-83.255

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Diffamation : décision du 15 octobre 2019 Cour de cassation Pourvoi n° 18-83.255
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N° S 18-83.255 F-P+B+I

N° 1820

CK
15 OCTOBRE 2019

CASSATION

M. SOULARD président,

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
________________________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, a rendu l’arrêt suivant :

CASSATION sur le pourvoi formé par :

– M. S… B…,

contre l’arrêt de la cour d’appel de NANCY, chambre correctionnelle, en date du 6 février 2018, qui, pour diffamation publique envers un citoyen chargé d’un mandat public, l’a condamné à 2 000 euros d’amende avec sursis et a prononcé sur les intérêts civils ;

La COUR, statuant après débats en l’audience publique du 3 septembre 2019 où étaient présents dans la formation prévue à l’article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Soulard, président, M. Bonnal, conseiller rapporteur, Mme Durin-Karsenty, conseiller de la chambre ;

Greffier de chambre : Mme Lavaud ;

Sur le rapport de M. le conseiller BONNAL, les observations de la société civile professionnelle BORÉ, SALVE DE BRUNETON et MÉGRET, avocat en la Cour, et les conclusions de Mme l’avocat général référendaire CABY ;

Vu le mémoire produit ;

Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 10 de la Convention européenne des droits de l’homme, 29 et 31 de loi du 29 juillet 1881, 591 et 593 du code de procédure pénale ;

en ce que la cour d’appel a confirmé le jugement ayant déclaré M. B… coupable de diffamation à l’encontre de M. A…, maire de […] citoyen chargé d’un mandat public et condamné M. B… à une amende de 2 000 euros avec sursis ;

1°) alors que la contestation de la légalité de l’action publique est un droit fondamental dans une société démocratique ; qu’en retenant, pour juger M. B… coupable de diffamation, que « les termes “prend chaque mois totalement illégalement” renvo[yaient] de manière précise à un acte d’appropriation indue susceptible de recevoir une qualification pénale, celle de vol, en sus aggravé par la personnalité des victimes : des personnes âgées pouvant être vulnérables ; que les termes “impôt illégal” renvoient pour leur part à un acte d’abus de pouvoir, commis par un détenteur de l’autorité publique ; qu’enfin l’expression “scandale financier” suggère un dépouillement de personnes vulnérables et un enrichissement de l’auteur de ce dépouillement » et qu’ils portaient ainsi atteinte à l’honneur du maire de […], cependant que les propos incriminés qui, s’inscrivant dans un débat politique, se bornaient à dénoncer la légalité d’un impôt, relevaient du droit de tout citoyen de contester la légalité de l’action publique et ne pouvaient être qualifiés de diffamatoires sans porter une atteinte excessive au droit à la liberté d’expression, la cour d’appel a méconnu les textes et le principe susvisés ;

2°) alors qu’en toute hypothèse, la liberté d’expression ne peut être soumise à des ingérences que dans les cas où celles-ci constituent des mesures nécessaires ; qu’en retenant, pour écarter la bonne foi de M. B… et retenir en conséquence que les faits de diffamation étaient établis, qu’aucune recherche sérieuse n’avait manifestement été menée sur le sujet dénoncé, cependant que l’article incriminé rappelait le principe de calcul des charges et était fondé, d’une part, sur des attestations des personnes âgées locataires de la résidence expliquant avoir subi des augmentations de loyers et de charges conséquentes sans explication et sans avertissement préalable, le maire s’étant par ailleurs abstenu de répondre à leurs multiples réclamations, et d’autre part, sur la reconnaissance par l’avocat de la commune d’un trop-perçu de 50 euros, ces éléments constituant une base factuelle suffisante permettant à un simple particulier, non tenu de se livrer à une enquête journalistique exhaustive, de s’interroger, dans le cadre d’un débat politique portant sur un sujet d’intérêt général, sur les conditions de perception par le maire des loyers dus par les occupants d’une résidence pour personnes âgées vulnérables, la cour d’appel a méconnu les textes et le principe susvisés” ;

Attendu qu’il résulte de l’arrêt attaqué, du jugement qu’il confirme et des pièces de la procédure que M. A…, maire de la commune de […] (Meurthe-et-Moselle), a fait citer M. B… devant le tribunal correctionnel, du chef de diffamation publique envers un citoyen chargé d’un mandat public, pour avoir mis en ligne, sur le site internet “[…]”, dont il est le directeur de la publication, un texte intitulé “Scandale financier à […]”, qui relate le litige, pendant devant le juge, opposant le maire, président du centre communal d’action sociale (CCAS) propriétaire de cette résidence pour personnes âgées, à certains résidents qui se plaignent d’augmentations selon eux indues de leurs loyers, texte poursuivi en raison de son titre et des propos “Le maire de […] prend chaque mois totalement illégalement 50 euros aux personnes âgées qu’il est supposé assister” et “L’origine de cet impôt illégal” ; que le prévenu a relevé appel du jugement qui l’a déclaré coupable de ces faits ;

Sur le moyen pris en sa première branche :

 


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