Designer : 7 février 2023 Cour d’appel de Nancy RG n° 22/01828

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Designer : 7 février 2023 Cour d’appel de Nancy RG n° 22/01828
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ARRÊT N° /2023

SS

DU 07 FEVRIER 2023

N° RG 22/01828 – N° Portalis DBVR-V-B7G-FAYH

Pole social du TJ de NANCY

19/573

26 juillet 2022

COUR D’APPEL DE NANCY

CHAMBRE SOCIALE

SECTION 1

APPELANTE :

Société [7] (concernant M. [N] [E]) prise en la personne de son représentant légal pour ce domicilié au siège social

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représentée par Me Anne-Sophie DISPANS, avocat au barreau de PARIS

INTIMÉES :

CAISSE PRIMAIRE D’ASSURANCE MALADIE DE MEURTHE ET MOSELLE prise en la personne de son représentant légal pour ce domicilié au siège social

[Adresse 5]

[Localité 3]

Représentée par Mme [Z] [F], régulièrement munie d’un pouvoir de représentation

FIVA prise en la personne de son représentant légal pour ce domicilié au siège social

[Adresse 2]

[Adresse 2]

[Localité 6]

Représenté par Me Julien TSOUDEROS, avocat au barreau de PARIS

COMPOSITION DE LA COUR :

Lors des débats, sans opposition des parties

Président : M. HENON

Siégeant en conseiller rapporteur

Greffier : Madame TRICHOT-BURTE (lors des débats)

Lors du délibéré,

En application des dispositions de l’article 945-1 du Code de Procédure Civile, l’affaire a été débattue en audience publique du 03 Janvier 2023 tenue par M. HENON, magistrat chargé d’instruire l’affaire, qui a entendu les plaidoiries, les avocats ne s’y étant pas opposés, et en a rendu compte à la Cour composée de Guerric HENON, président, Dominique BRUNEAU et Catherine BUCHSER-MARTIN, conseillers, dans leur délibéré pour l’arrêt être rendu le 07 Février 2023 ;

Le 07 Février 2023, la Cour après en avoir délibéré conformément à la Loi, a rendu l’arrêt dont la teneur suit :

Faits, procédure, prétentions et moyens :

Par décision du 13 mars 2017, la caisse primaire d’assurance maladie de Meurthe-et-Moselle (ci-après dénommée la caisse) a pris en charge au titre de la législation professionnelle le « cancer poumon » déclarée par M. [N] [E], retraité, ancien salarié de la société [7] (ci-après dénommée la société), selon formulaire du 19 septembre 2016, accompagné d’un certificat médical initial du 20 juin 2016 du docteur [T] [M] objectivant un « adénocarcinome bronchique primitif » renvoyant au tableau 30 bis des maladies professionnelles relatif à une exposition à l’amiante.

Le 4 avril 2017, M. [N] [E] a accepté l’offre indemnitaire du Fonds d’indemnisation des victimes de l’amiante (ci-après dénommé le FIVA) à hauteur de :

‘ réparation du préjudice moral : 27 900 euros

‘ réparation du préjudice physique : 14 100 euros

‘ réparation du préjudice d’agrément : 14 100 euros

‘ réparation du préjudice esthétique : 1 000 euros,

soit un montant total de 57 100 euros.

Par décision du 12 mai 2017, la caisse a fixé son taux d’IPP à 67 % au 14 mars 2017, lendemain de la date de consolidation de son état de santé, pour un « Carcinome broncho-pulmonaire primitif pT1aN0Mx ».

Le 27 décembre 2019, le FIVA, subrogé dans les droits de M. [N] [E], a saisi, après échec de la procédure de conciliation, le pôle social du tribunal de grande instance ‘ devenu tribunal judiciaire – de Nancy aux fins de reconnaissance de la faute inexcusable de la société.

Par jugement du 26 mai 2021, le tribunal a :

‘ sursis à statuer sur l’ensemble des demandes,

‘ ordonné la saisine du CRRMP Hauts de France, qui devra donner son avis sur la reconnaissance de la maladie « cancer broncho-pulmonaire primitif » du 20 juin 2016 dont souffre M. [N] [E] au titre de la législation professionnelle, et dire s’il existe un lien direct de causalité entre la maladie et le travail habituel de la victime,

‘ renvoyé l’affaire à une audience ultérieure dès réception du second avis du CRRMP,

‘ réservé les dépens,

‘ ordonné l’exécution provisoire du présent jugement.

Le 5 octobre 2021, le CRRMP de Hauts de France a émis un avis favorable.

Par jugement du 26 juillet 2022, le tribunal a :

– consacré le caractère professionnel de la maladie de Monsieur [N] [E] du 20 juin 2016 (MP 30 bis/ cancer broncho-pulmonaire),

– dit que la [7] ([7]) a commis une faute inexcusable à l’origine de ladite maladie professionnelle,

– fixé à son maximum la majoration de la rente due à Monsieur [E] et dit que la CPAM de MEURTHE et MOSELLE devra lui verser cette rente majorée (le cas échéant après réévaluation en cas d’aggravation de son état de santé), au besoin l’y a condamné,

– dit que la CPAM de MEURTHE et MOSELLE devra justifier à la SOCIETE [7] des modalités de calcul de cette rente,

– fixé l’indemnisation des préjudices personnels de Monsieur [N] [E] comme suit :

Souffrances morales : 27 900 euros

Souffrances physiques : 14 100 euros

Préjudice d’agrément : 14 100 euros

Préjudice esthétique : 1000 euros

TOTAL : 57 100 euros

– dit que la CPAM de MEURTHE et MOSELLE devra verser ces sommes au FIVA, créancier subrogé, en application de l’article L 452-3 alinéa 3 du Code de la Sécurité Sociale,

– condamné la société [7] à rembourser à la CPAM de Meurthe et Moselle l’ensemble des sommes dont elle aura été amenée à faire l’avance au titre du présent jugement en vertu de l’article L.452-3-1 du code de la sécurité sociale,

– condamné la société [7] à payer au Fonds d’Indemnisation des Victimes de l’Amiante la somme de 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– débouté la SOCIETE [7] et la CPAM de MEURTHE et MOSELLE de leurs demandes de ce chef,

– condamné la société [7] aux entiers dépens.

Par acte du 1er août 2022, la société a relevé appel de la totalité des dispositions de ce jugement.

L’affaire a été appelée à l’audience du 3 janvier 2023.

*

Suivant conclusions reçues au greffe le 28 décembre 2022, la société demande à la Cour de :

‘ annuler toutes les dispositions du jugement du tribunal judiciaire de Nancy du 26 juillet 2022,

A titre principal

‘ dire que la preuve du caractère professionnel de la maladie n’est pas rapportée,

‘ rejeter les demandes du FIVA,

A titre subsidiaire

‘ dire que le FIVA ne rapporte pas la preuve de sa faute inexcusable,

‘ rejeter les demandes du FIVA,

A titre infiniment subsidiaire

Sur la demande de majoration de rente

‘ demander à la CPAM de verser aux débats les calculs de cette majoration,

Sur la demande de réparation des préjudices de M. [E],

‘ rejeter la demande du FIVA au titre du préjudices d’agrément,

‘ réduire à de plus justes proportions les demandes,

En tout état de cause

‘ condamner le FIVA à lui payer la somme de 2 000 euros au titre de l’article 700 du CPC.

Selon conclusions déposées à l’audience du 3 janvier 2023, le FIVA demande de’:

– DECLARER l’appel recevable, mais mal fondé,

– CONFIRMER le jugement entrepris, sauf en ce qu’il a omis de se prononcer sur la demande du FIVA de juger qu’en cas de décès de la victime résultant des conséquences de sa maladie professionnelle due à l’amiante, le principe de la majoration de rente restera acquis pour le calcul de la rente de conjoint survivant.

Et, statuant à nouveau sur ce point.

– RECTIFIER le jugement, et JUGER qu’en cas de décès de la victime, résultant des conséquences de sa maladie professionnelle due à l’amiante, le principe de la majoration de rente restera acquis pour le calcul de la rente de conjoint survivant.

‘ Subsidiairement si la Cour devait estimer que le caractère professionnel de la maladie de Monsieur [E] n’était pas établi. il est demandé à la juridiction de céans de :

– DESIGNER un second comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles, selon les règles en vigueur, avec pour mission :

‘ de prendre connaissance du dossier de l’assuré, composé des pièces visées à l’article D 461-29 du Code de la sécurité sociale, et des conclusions et pièces des parties à l’instance, qui seront annexées à ce dossier par la CPAM de [Localité 3], en application du même article,

‘ de dire, par un avis motivé, si la pathologie présentée par monsieur [E], objet du certificat médical du 20/06/2016, figurant au tableau n°30 bis des maladies professionnelles. a été directement causée par son travail habituel au sein de la [7] ([7]),

– RENVOYER l’examen des demandes à la première audience utile après réception de l’avis du comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles.

Y ajoutant,

– CONDAMNER la SAM [7] ([7]) à payer au FIVA une somme de 3.000,00 € en application de l’article 700 du Code de Procédure Civile.

Selon conclusions déposées à l’audience du 3 janvier 2023, la caisse demande de’:

De dire si la maladie professionnelle de M. [E] résulte ou non d’une faute inexcusable de son ancien employeur, la société [7];

Dans l’affirmative’;

De condamner cette société à lui rembourser toutes les sommes revenant à M. [E] ou au FIVA du fait de cette faute inexcusable’;

De condamner la société [7] à lui payer la somme de 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Pour l’exposé des moyens des parties, il convient de faire référence aux conclusions sus mentionnées, reprises oralement à l’audience.

Motifs :

1/ Sur le caractère professionnel de la maladie’:

Il résulte des articles L. 452-1 et L. 461-1 du code de la sécurité sociale que, pour engager la responsabilité de l’employeur, la faute inexcusable doit être la cause nécessaire de la maladie professionnelle dont est atteint le salarié (civ.2e 4 avril 2013 pourvoi n°12-13.600 Bull II n° 69). A cet égard, l’employeur reste fondé à contester, pour défendre à l’action en reconnaissance de la faute inexcusable, le caractère professionnel de l’accident ou de la maladie (civ.2e 5 novembre 2015, pourvoi n° 13-28.373, Bull. 2015, II, n° 247 ; dans le même sens civ.2e., 8 novembre 2018, pourvoi n° 17-25.843).

La société [7] conteste le caractère professionnel de la maladie présentée par l’intéressé en soutenant que les conditions prévues au tableau n° 30 bis des maladies professionnelles ne sont pas remplies. Cette société après rappel de la carrière de l’intéressé soutient que pour la période de 1973 à 1986 retenue par la caisse, le salarié a été en formation pendant 4 ans et un mois. Elle précise qu’à partir de 1979, l’intéressé a contribué au développement de l’informatique dans le cadre d’activité ne rentrant pas dans la liste du tableau n° 30 bis. L’attestation de M. [P] produite par le FIVA ne remplit pas les conditions de régularité de l’article 202 du code de procédure civile et qu’il ne résulte pas du contenu de celle-ci que le salarié manipulait de l’amiante. La durée d’exposition au risque n’est pas respectée, le médecin conseil de la caisse ayant retenu une exposition au risque jusqu’en 1986.

Le FIVA précise que pendant toute la durée d’exécution de son contrat de travail, M. [E] a été exposé aux poussières d’amiante, la société ayant utilisé une quantité importante de produits contenant de l’amiante compte tenu des propriétés de ce matériau sous forme de tresses, cordons, plaques, gaines, équipements personnels contre la chaleur, composant des masselottes. Le salarié a commencé sa carrière au secteur chaud, chargé de la préparation des coulées et de la prise d’échantillon supposant la découpe de plaques d’amiante. Dans le cadre de ses fonctions d’agent d’étude qu’il effectuait près des hauts fourneaux, il effectuait la mise en place des chemins de câblage contenant souvent de l’amiante. Il a donc manipulé de l’amiante et des produites amiantés plus de deux jours par semaine de 1973 à 1979, entre une demi-journée et deux jours par semaine de 1979 à 1984 et moins d’une demi-journée par semaine après 1984. Il était chargé d’effectuer des travaux d’entretien, et de maintenance sur des matériaux floqués et calorifugés. Ces éléments sont confirmés par témoignage et le dossier administratif.

Selon le tableau n° 30 bis des maladies professionnelles concernant relatif au cancer broncho-pulmonaire primitif provoqué par l’inhalation de poussières d’amiante et prévoyant un délai de prise en charge de de 40 ans sous réserve d’une durée d’exposition de 10 ans, la liste limitative des travaux susceptibles de provoquer cette maladie est la suivante’:

Travaux directement associés à la production des matériaux contenant de l’amiante.

Travaux nécessitant l’utilisation d’amiante en vrac.

Travaux d’isolation utilisant des matériaux contenant de l’amiante.

Travaux de retrait d’amiante.

Travaux de pose et de dépose de matériaux isolants à base d’amiante.

Travaux de construction et de réparation navale.

Travaux d’usinage, de découpe et de ponçage de matériaux contenant de l’amiante.

Fabrication de matériels de friction contenant de l’amiante.

Travaux d’entretien ou de maintenance effectués sur des équipements contenant des matériaux à base d’amiante.

Il convient de constater qu’au regard des explications des parties et des pièces produites aux débats que l’exposition à l’amiante de l’intéressé pour la période entre 1973 et 1979 ne saurait pas remise en cause en ce que la circonstance même que ce dernier ait pu être en formation, puisque précisément celle-ci consistait au regard des pièces produites par l’employeur à l’acquisition des compétences le destinant à l’exerce des fonctions dont il est admis qu’elles l’exposaient à l’amiante et alors que les pièces produites par le FIVA ne distinguent pas selon le cadre d’exercice.

Pour ce qui concerne la période postérieure, au cours de laquelle le salarié a exercé des fonctions d’agent d’étude de 1979 à 1984 et de technicien informatique à compter de 1984 jusqu’en 1998, il convient de relever que contrairement aux allégations de l’employeur, les éléments produits aux débats permettent de mettre en évidence une continuation d’exposition à l’amiante car le témoin M. [P] explique que les salles de contrôle où étaient exercées les fonctions de technicien, très proches du haut fourneaux, se trouvaient protégées contre les risques d’incendie par un flocage d’amiante.

A cet égard, la circonstance selon laquelle cette attestation n’est pas conforme aux dispositions de l’article 202 du code de procédure civile ne saurait être de nature à remettre en cause en tant que telle la valeur probante de ce document qui a été établi, non pas en vue d’une procédure judiciaire, mais dans le cadre administratif de traitement des demandes du salarié.

De plus le document d’évaluation de l’exposition à l’amiante rempli par le salarié dans le cadre de l’instruction de la demande auprès du FIVA et permet de montrer que les travaux de manipulation de matériaux contenant de l’amiante ou d’entretien, réparation maintenance de matériaux floqués ou calorifugés ont été réguliers à raison de deux jours par semaine de 1973 à 1979, d’une demi-journée à deux jours par semaine de 1979 à 1984 et d’au moins d’une demi-journée par semaine de 1984 à 2000.

A l’inverse les documents produits par l’employeur datés du 13 novembre 1991, décrivant les postes occupés, compétence acquises et formations suivies par l’intéressé ne contiennent pas d’informations en terme d’exposition à l’amiante.

Il convient dans ces conditions de rejeter la contestation opposée par l’employeurs quant au caractère professionnel de la maladie présentée par l’intéressé et de confirmer le jugement entrepris.

2/ Sur la faute inexcusable’:

Il résulte des articles L. 452-1 du code de la sécurité sociale, L. 4121-1 et L. 4121-2 du code du travail que le manquement à l’obligation légale de sécurité et de protection de la santé à laquelle l’employeur est tenu envers le travailleur a le caractère d’une faute inexcusable lorsque l’employeur avait ou aurait dû avoir conscience du danger auquel était soumis le travailleur et qu’il n’a pas pris les mesures nécessaires pour l’en préserver (civ.2e, 8 octobre 2020, pourvoi n°18-25.021 ; civ.2e, 8 octobre 2020, pourvoi n° 18-26.677). Il est indifférent que la faute inexcusable commise par l’employeur ait été la cause déterminante de la maladie survenue au salarié mais qu’il suffit qu’elle en soit une cause nécessaire pour que la responsabilité de l’employeur soit engagée, alors même que d’autres fautes auraient concouru au dommage (Cass. Ass plen, 24 juin 2005, pourvoi n°03-30.038).

La société [7] soutient que le FIVA ne rapporte pas la preuve de la faute inexcusable et alors que les conditions d’exposition à l’amiante ont été très différentes en fonction des périodes et des périodes de formation et il n’est pas justifié d’éléments établissant de façon circonstanciées les conditions effectives de travail de l’intéressé.

Le FIVA après rappel de la réglementation et des connaissances au moment de l’exposition au risque soutient que l’employeur avait conscience du danger, compte tenu de l’objet de son activité et de l’importance de ses structures et qu’il n’a pas pris de mesures de protection.

En raison des conditions d’usage de ce matériau au sein de l’entreprise qui ont été précédemment décrites au cours de la période considérée, de l’état de la législation et de la réglementation pendant cette période, telle que résultant des tableaux de maladies professionnelles n° 30 en leur rédaction applicable dès 1950 et du décret de 1977, l’employeur devait avoir conscience du danger auquel était exposé le salarié et représenté par l’emploi de ce matériau au sein de l’établissement considéré et ne saurait faire état de sa situation d’entreprise non productrice d’amiante ou encore de l’évolution postérieure de la législation pour s’exonérer de ses propres obligations à l’égard du salarié et ce d’autant que ce dernier a été exposé dans ses fonctions après 1977.

Contrairement aux allégations de l’employeur, les conditions de travail de l’intéressé au regard du risque considéré sont établies ainsi qu’il a déjà été précisé et l’employeur ne justifie ni même ne fait état d’élément de nature à caractériser la mise en ‘uvre de mesures propres à préserver le salarié du danger.

Il convient dans ces conditions de confirmer le jugement entrepris de ce chef.

3/ Sur les conséquences de la faute inexcusable’:

Dès lors qu’il n’est pas allégué de faute inexcusable du salarié, il convient de confirmer le jugement entrepris qui n’apparait pas contesté sur ce point par la société appelante.

Pour ce qui concerne la demande de la société [7] de disposer des éléments de calcul de la majoration, celle-ci, légitime, apparait avoir été ordonnée par le premier juge, sans que la caisse n’ait entendue s’y opposer dans le cadre de l’exécution des décisions afférentes à la présente action, en sorte qu’il convient de confirmer le jugement entrepris de ce chef.

*

Selon l’article L. 452-3 du code de la sécurité sociale : Indépendamment de la majoration de rente qu’elle reçoit en vertu de l’article précédent, la victime a le droit de demander à l’employeur devant la juridiction de sécurité sociale la réparation du préjudice causé par les souffrances physiques et morales par elle endurées, de ses préjudices esthétiques et d’agrément ainsi que celle du préjudice résultant de la perte ou de la diminution de ses possibilités de promotion professionnelle. Si la victime est atteinte d’un taux d’incapacité permanente de 100 %, il lui est alloué, en outre, une indemnité forfaitaire égale au montant du salaire minimum légal en vigueur à la date de consolidation.

Il résulte de ce texte, tel qu’interprété par le Conseil constitutionnel dans sa décision n° 2010-8 QPC du 18 juin 2010, qu’en cas de faute inexcusable, la victime d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle peut demander à l’employeur, devant la juridiction de sécurité sociale, la réparation d’autres chefs de préjudice que ceux énumérés par le texte précité, à la condition que ces préjudices ne soient pas déjà couverts par le livre IV du code de la sécurité sociale.

Il en résulte que c’est à l’aune de ces principes que la réparation des préjudices de la victime doit s’opérer.

L’employeur soutient qu’il n’est pas justifié d’un préjudice d’agrément et demande de réduire à de plus justes proportions les autres chefs de préjudice.

Pour ce qui concerne la réparation des souffrances physiques et morales et du préjudice esthétique, les sommes telles que fixées par le premier juge apparaissent de nature à réparer ces préjudices et il n’est pas produit de pièces ou d’éléments nouveaux de nature à remettre en cause cette appréciation. Il conviendra de confirmer le jugement entrepris de ce chef.

Par ailleurs, la réparation du préjudice d’agrément aux termes des dispositions de l’article L.452-3 du code de la sécurité sociale, vise à l’indemnisation du préjudice lié à l’impossibilité pour la victime de pratiquer régulièrement une activité spécifique sportive ou de loisirs à laquelle elle se livrait antérieurement à la maladie professionnelle.

A cet égard, la simple allégation d’une dyspnée d’effort empêchant la victime de ne plus se livrer à ses activités sportives ne saurait suffire à caractériser l’existence d’un tel préjudice, en sorte qu’il convient de rejeter la demande à ce titre.

4/ Sur les mesures accessoires :

La demande du FIVA tendant à voir dire qu’en cas de décès de M. [E] résultant des conséquences de sa maladie professionnelle due à l’amiante, le principe de la majoration de rente restera acquis pour le calcul de la rente de conjoint survivant, ne fait l’objet d’aucune contestation, en sorte qu’il convient d’y faire droit.

L’employeur qui succombe sera condamné aux dépens ainsi qu’au paiement d’une somme de 1 200 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile au profit du FIVA.

PAR CES MOTIFS,

La Cour, chambre sociale, statuant contradictoirement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, après débats en audience publique et après en avoir délibéré,

Confirme le jugement du pôle social du tribunal judiciaire de Nancy du 26 juillet 2022, sauf en ce qu’il a fixé lea réparation du préjudice d’agrément à la somme de 14 100 euros;

Statuant à nouveau et dans cette limite,

Rejette la demande au titre du préjudice d’agrément,

Y ajoutant,

Dit qu’en cas de décès de M. [E] résultant des conséquences de sa maladie professionnelle due à l’amiante, le principe de la majoration de rente restera acquis pour le calcul de la rente de conjoint survivant’;

Condamne la société [7] au Fonds d’indemnisation des victimes de l’amiante la somme de 1 200 euros (mille deux cents euros) au titre de l’article 700 du code de procédure civile’;

Condamne la société [7] aux dépens.

Ainsi prononcé par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

Et signé par monsieur Guerric HENON, président de chambre et par madame Clara TRICHOT-BURTÉ, greffier.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT DE CHAMBRE

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