Designer : 5 décembre 2022 Cour d’appel d’Amiens RG n° 21/03799

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Designer : 5 décembre 2022 Cour d’appel d’Amiens RG n° 21/03799
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ARRET

N° 1025

[Y]

C/

S.A.S. [10]

S.A.S. [14]

CPAM DE L’ARTOIS

COUR D’APPEL D’AMIENS

2EME PROTECTION SOCIALE

ARRET DU 05 DECEMBRE 2022

*************************************************************

N° RG 21/03799 – N° Portalis DBV4-V-B7F-IFP3 – N° registre 1ère instance : 19/00948

JUGEMENT DU TRIBUNAL JUDICIAIRE DE ARRAS EN DATE DU 10 juin 2021

PARTIES EN CAUSE :

APPELANT

Monsieur [T] [Y]

[Adresse 7]

[Localité 6]

Représenté et plaidant par Me MERLIN, avocat au barreau de BETHUNE substituant Me Stéphane CAMPAGNE de la SELEURL CABINET ALTURA AVOCATS CONSEIL-DÉFENSE-MÉDIATION, avocat au barreau de BETHUNE, vestiaire : 74

ET :

INTIMES

S.A.S. [10] agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 4]

[Localité 8]

Représentée par Me DE LAMARLIERE substituant Me Denis ROUANET de la SELARL BENOIT – LALLIARD – ROUANET, avocat au barreau de LYON

S.A.S. [14] agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 3]

[Localité 9]

Représentée et plaidant par Me Maïtena LAVELLE de la SELARL CABINET LAVELLE, avocat au barreau de PARIS

CPAM DE L’ARTOIS agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

[Adresse 2]

[Adresse 2]

[Localité 5]

Représentée par Mme [K] [Z] dûment mandatée

DEBATS :

A l’audience publique du 12 Septembre 2022 devant Monsieur Renaud DELOFFRE, conseiller, siégeant seul, sans opposition des avocats, en vertu des articles 786 et 945-1 du Code de procédure civile qui a avisé les parties à l’issue des débats que l’arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe le 05 Décembre 2022.

GREFFIER LORS DES DEBATS :

Madame Malika RABHI

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE :

Monsieur Renaud DELOFFRE en a rendu compte à la Cour composée en outre de:

Mme Elisabeth WABLE, Président,

Mme Graziella HAUDUIN, Président,

et Monsieur Renaud DELOFFRE, Conseiller,

qui en ont délibéré conformément à la loi.

PRONONCE :

Le 05 Décembre 2022, par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au 2e alinéa de l’article 450 du code de procédure civile, Mme Elisabeth WABLE, Président a signé la minute avec Madame Blanche THARAUD, Greffier.

*

* *

DECISION

Le 31 octobre 2017, [T] [Y], salarié intérimaire de la société [10] mis à disposition de la société [14] en qualité de tireur de câbles, a été victime d’un accident du travail déclaré dans les termes suivants :

“Lieu de l’accident : [Localité 16] [Localité 16]

Circonstances de l’accident : il manipulait des tourets à l’aide d’une sangle de levage quand celui ci se met en mouvement et coince son bras entre deux tourets

Siège des lésions : bras

Nature des lésions : contusion bras gauche”.

Son état de santé a été déclaré consolidé le 3 septembre 2018 avec attribution d’un taux d’incapacité permanente de 6 % porté à 13% à la suite d’une décision du pôle social du tribunal de grande instance d’Arras du 27 septembre 2019.

Le 27 septembre 2019, [T] [Y] a saisi le pôle social du tribunal de grande instance d’ARRAS, devenu le ler janvier 2020 tribunal judiciaire d’Arras, d’une demande de reconnaissance de la faute inexcusable de son employeur.

Par jugement en date du 10 juin 2021 le Tribunal a débouté Monsieur [T] [Y] de l’ensemble de ses demandes et l’a condamné aux dépens.

Au soutien de cette décision, le Tribunal a relevé que les missions de ” tireur de cables et diverses tâches liées à l’activité du chantier” ne figuraient pas parmi les postes à risque répérés au sein de la société, que la société produisait aux débats deux contrats de mise à disposition concernant deux autres salariés employés à des périodes similaires pour des missions de tireurs de cables pour lesquels la société [10] n’avait pas indiqué qu’il s’agissait de postes à risque, que cette société a reconnu oralement que la rubrique ” poste à risque” avait été cochée par erreur s’agissant de ce salarié, que ce dernier connaîssait parfaitement son poste de travail pour avoir effectué trois missions successives avec des tâches similaires et qu’il ne décrivait ni ne justifiait pas de risques particuliers pour sa santé ou sa sécurité, qu’il n’y a donc pas lieu de faire application de la présomption de faute inexcusable, qu’il appartient donc au salarié de rapporter la preuve des éléments constitutifs de la faute inexcusable de l’entreprise utilisatrice substituée dans la direction du salarié, qu’il résulte des faits tels que décrits par le salarié que les circonstances de l’accident sont totalement indéterminées, que par ailleurs il n’est pas démontré par lui la conscience par l’employeur du danger auquel il était exposé et qu’il convenait donc de le débouter de sa demande en reconnaissance de la faute inexcusable de l’employeur.

Notifié au salarié par courrier du greffe du 21 juin 2021 reçu au plus tard par lui le 25 juin 2021 ( date de retour de l’AR à la poste figurant sur l’AR), ce jugement a fait l’objet d’un appel général par courrier de son avocat expédié au greffe de la Cour le 12 juillet 2021.

Par conclusions enregistrées par le greffe en date du 19 août 2021 et soutenues oralement, l’appelant demande à la Cour de :

REFORMER le jugement rendu par le Pôle social du Tribunal judiciaire d’ARRAS le 10 juin 2021 en qu’il :

.” DEBOUTE [T] [Y] de l’ensemble de ses demandes

. CONDAMNE [T] [Y] aux dépens “.

Statuant à nouveau,

JUGER que le poste de tireur de câbles pour lequel Monsieur [Y] était employé à l’occasion de l’accident de travail du 31 octobre 2017 était identifié comme présentant des risques particuliers pour la santé ou la sécurité du travailleur au sens de l’article L 4142-2 du Code du travail,

JUGER que Monsieur [T] [Y] devait bénéficier d’une formation renforcée à la sécurité avant de prendre ses fonctions de tireurs de câble,

JUGER au surplus que Monsieur [F] [G], salarié de la société [14] ne disposait pas de la qualification et des formations obligatoires pour manoeuvrer le bras mécanique à l’origine de l’accident dont était victime Monsieur [Y],

JUGER que l’employeur avait conscience du danger auquel il exposait le salarié,

JUGER qu’à défaut d’avoir dispensé à Monsieur [T] [Y] la formation renforcée à la sécurité, la faute inexcusable de l’employeur est présumée établie par juste application de l’article L 4154-3 du Code du travail,

JUGER que l’accident de de travail dont a été victime Monsieur [T] [Y] le 31 octobre 2017 est la conséquence d’une faute inexcusable de l’employeur,

En conséquence,

FIXER au maximum la majoration de la rente due à Monsieur [T] [Y] Avant dire-droit sur la réparation des préjudices extra-patrimoniaux,

DESIGNER un expert judiciaire avec pour mission de :

Prendre connaissance du dossier et se faire communiquer tous renseignements utiles y compris auprès des tiers

Convoquer les parties par lettre recommandée avec accusé de réception et leurs conseils par lettre simple,

Examiner la victime, décrire son état en rapport avec le litige et recueillir ses doléances

Donner un avis motivé sur l’existence et l’importance des souffrances physiques et morales subies par Monsieur [T] [Y], du préjudice esthétique, du préjudice d’agrément, chacun étant évalué sur une échelle de zéro à sept,

Donner un avis motivé sur le point de savoir si l’accident du travail dont a été victime Monsieur [T] [Y] est susceptible d’entraîner ou non une perte ou une diminution de ses possibilités de promotion professionnelle,

Evaluer le déficit fonctionnel temporaire de Monsieur [T] [Y] et, s’il y a lieu, donner un avis motivé sur l’existence ou non d’un préjudice sexuel,

Déterminer si Monsieur [T] [Y] a dû bénéficier de l’assistance d’une tierce personne avant consolidation

Recueillir à son initiative, s’il l’estime utile, l’avis d’un autre technicien mais seulement dans une spécialité différente de la sienne qui sera intégré en tant qu’élément de la discussion menée par l’expert dans son rapport définitif,

En toute hypothèse,

ALLOUER à Monsieur [T] [Y] une provision d’un montant de 10.000 euros à valoir sur son préjudice,

CONDAMNER les sociétés [10] et [14] au paiement de la somme de 3.500 € en vertu de l’article 700 du Code de procédure civile.

LES CONDAMNER aux entiers frais et dépens de l’instance

Il fait en substance valoir que son poste de tireur de câble est un poste à risque comme indiqué à ses contrats de mission, qu’il devait donc bénéficier d’une formation renforcée à la sécurité laquelle n’a pas été dispensée, que la faute inexcusable de l’employeur est donc présumée établie, que le salarié chargé de la man’uvre des tourets par la manipulation du bras mécanique du camion n’était pas titulaire du [11] à la date de l’accident, que les sommations de communication de pièces ( rapport du [12], rapport de l’inspection du travail, contrats de mise à disposition) sont demeurées infructueuses, qu’il doit percevoir la majoration de sa rente, une provision de 10 000 € et qu’une expertise doit être ordonnée selon les modalités proposées.

Par conclusions visées par le greffe le 1er septembre 2021 et soutenues oralement par avocat, la société [14] demande à la Cour de :

A titre principal,

– CONFIRMER le jugement entrepris en toutes ces dispositions ;

– DEBOUTER Monsieur [Y] de l’ensemble de ses demandes.

Subsidiairement,

Si par impossible, la Cour devait retenir la faute inexcusable de la société [14], il lui est demandé d’ORDONNER une expertise et de définir la mission de l’expert judiciaire de la façon suivante :

convoquer les parties ;

se faire remettre l’entier dossier médical de Monsieur [Y];

examiner Monsieur [Y] ;

décrire les lésions résultantes directement et exclusivement de l’accident du travail survenu le 31 octobre 2017 ;

déterminer le déficit fonctionnel temporaire et le quantifier ;

évaluer le pretium doloris en lien direct et exclusif avec l’accident du travail précité ;

déterminer si Monsieur [Y] a subi un préjudice esthétique et un préjudice d’agrément en lien direct et exclusif avec son accident du travail;

déterminer s’il a dû bénéficier d’une tierce personne avant consolidation ;

déterminer s’il a subi un préjudice sexuel ;

déterminer s’il a dû bénéficier d’un aménagement de son véhicule et ou de son logement ;

déposer un pré-rapport qui sera soumis au contradictoire des parties qui pourront présenter des dires ;

déposer un rapport et l’adresser aux parties.

– ORDONNER à la CPAM de procéder à l’avance de l’ensemble des sommes allouées à la victime et ce y compris de la provision qui pourrait lui être accordée ;

– DEBOUTER Monsieur [Y] de ses demandes tendant à voir condamner la concluante aux côtés de la société [10] à lui verser la somme de 3.500 € au titre de l’article 700 du CPC.

Elle fait valoir que Monsieur [Y] a bénéficié d’une transmission d’informations participant de sa formation, laquelle a été complétée oralement par la personne qui l’a accueilli avant sa prise de fonctions, que son attention a donc été attirée sur les dangers potentiels auxquels il pouvait être confronté dans son environnement de travail, que le conducteur de l’engin de levage disposait des qualifications requises, que si la case poste à risque a été cochée, cela procède d’une erreur et ” d’une mauvaise habitude de la société [10] qui avait tendance à le faire systématiquement alors même que ce n’était pas le cas”, que le poste de Monsieur [Y] ne figure pas sur la liste des postes à risque établie par la société utilisatrice, que sa conscience du danger n’est pas établie, que la communication des contrats de mise à disposition conclus par elle avec la société [14] n’apportera rien aux débats, que rien ne permet de dire que le touret à l’origine de l’accident n’a pas basculé du fait d’une manoeuvre de Monsieur [Y] lui-même qui tentait de le sengler par le haut, que la mission d’expertise sollictée par ce dernier s’apparente à celle ordonnée en droit commun.

Par conclusions enregistrées par le greffe à la date du 19 juillet 2022 et soutenues oralement par avocat, la société [10] demande à la Cour de :

A TITRE PRINCIPAL

– DIRE ET JUGER qu’aucune faute inexcusable à l’origine de l’accident dont a été victime Monsieur [T] [Y] ne peut être caractérisée en l’espèce.

EN CONSEQUENCE

– CONFIRMER en toutes ses dispositions le jugement rendu le 10 juin 2021 par le Pôle Social du Tribunal Judiciaire d’Arras.

– DEBOUTER Monsieur [T] [Y] de l’intégralité de ses demandes, fins et conclusions.

A TITRE SUBSIDIAIRE

– DIRE ET JUGER que la faute inexcusable à l’origine de l’accident dont a été victime Monsieur [T] [Y] résulte des manquements exclusifs de la Société [14] ;

– DIRE ET JUGER le taux d’incapacité permanente partielle de Monsieur [T] [Y] opposable à la Société [10] sera celui de 6,00% qui lui a été notifié le 21 décembre 2018.

EN CONSEQUENCE

– CONDAMNER la Société [13]; à relever et garantir la Société [10] de toutes l’intégralité des conséquences financières résultant de l’action engagée par Monsieur [T] [Y] et à supporter tous les dépens et condamnations, tant au principal qu’aux intérêts, résultant du présent litige (y compris l’ensemble des dommages et intérêts susceptibles de lui être versés en réparations de préjudices subis, la majoration de son indemnité en capital, les éventuels frais d’expertise et la condamnation, éventuelle, au titre des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile) ;

– DIRE ET JUGER la Caisse Primaire d’Assurance Maladie de l’Artois ne pourra exercer son action récursoire en application de l’article L. 452 3 du Code de la sécurité sociale que dans la limite du taux de 6,00% initialement notifié à l’employeur ;

– DEBOUTER Monsieur [T] [Y] de la demande de provision à valoir sur la liquidation de ses préjudices qu’il formule ou, à tout le moins, la ramener à une plus juste proportion et DIRE ET JUGER que la Caisse Primaire d’Assurance Maladie de l’Artois devra en faire l’avance ;

– DEBOUTER Monsieur [T] [Y] de toute demande de condamnation de la Société [10] au titre des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile ou, à tout le moins, DIRE ET JUGER qu’elle doit être couverte par la garantie mise à la charge de la Société [17] ;

– LIMITER la mission d’expertise à la détermination des postes de préjudice suivants :

souffrances physiques et morales endurées ;

préjudice esthétique ;

préjudice d’agrément suivant la définition donnée par la Cour de cassation ;

déficit fonctionnel temporaire ;

tierce personne avant consolidation.

– DEBOUTER Monsieur [T] [Y] du surplus de ses demandes.

Elle fait valoir que Monsieur [Y] échoue à démontrer qu’il occupait un poste à risque et ne peut donc se prévaloir de la présomption d’imputabilité, qu’il ne communique aucune pièce relative aux circonstances de l’accident et n’établit aucunement la faute invoquée ce qui justifie son débouté, que le salarié a reçu une formation générale à la sécurité qu’il convenait à la société [14] de compléter si nécessaire en fonction des spécificités du poste et du chantier, qu’il avait obtenu pas moins de 90 % de réponses positives au test ayant suivi cette session de formation, qu’aucune obligation à la sécurité renforcée ne pesait d’ailleurs sur elle mais sur la société [14], qu’il appartiendra donc à cette dernière de justifier de son obligation de formation pour le cas où la notion de poste à risque serait retenue, que dans le cas où la version du salarié serait retenue, les circonstances de l’accident mettraient en cause des problématiques inhérentes à la seule entreprise utilisatrice, qu’à titre subsidiaire elle sollicite la garantie par la société [14] de toutes les conséquences financières résultant de l’action engagée par le salarié, que l’action récursoire de la caisse ne pourra s’exercer que dans la limite du taux de 6% qui lui a été notifié le 21 décembre 2018, qu’en ce qui concerne la mission d’expertise portant sur les préjudices non couverts par le livre IV il appartiendra à Monsieur [Y] d’en justifier au préalable l’existence puisque la mission de l’expert consiste à évaluer le préjudice et non à en rechercher l’existence.

La caisse primaire d’assurance maladie de l’Artois demande par sa représentante à la Cour de lui accorder le bénéfice de son action récursoire si la faute inexcusable de l’employeur est reconnue et elle reconnaît que, s’agissant de la récupération sur l’employeur de la majoration de rente, cette dernière doit s’effectuer dans la limite du taux initial de 6% reconnu au salarié.

Le Président a demandé au conseil de Monsieur [Y] de faire parvenir toutes explications sous 15 jours sur les circonstances de l’accident à charge pour les intimées de répondre à cette note et sur ce point sous 15 jours.

Par note en délibéré adressée à la Cour le 26 septembre 2022, Monsieur [Y] a réitéré les explications déjà fournies et à produit une nouvelle pièce à savoir une photographie du type de camion utilisé.

Par note en délibéré reçue par message électronique en date du 6 octobre 2022, la société [14] indique que contrairement à ce qu’indique le conseil de Monsieur [Y] l’accident ne soit pas dû à la manipulation de la grue mais à une cause étrangère qui ne s’explique pas et qui n’était pas anticipable par la société [14].

MOTIFS DE L’ARRET.

SUR LA DEMANDE DE MONSIEUR [Y] EN RECONNAISSANCE DE LA FAUTE INEXCUSABLE DE SON EMPLOYEUR.

Vu les articles L. 231-3-1 et L. 231-8, devenus les articles L. 4154-2 et L. 4154-3 du code du travail, ensemble l’article L. 452-1 du code de la sécurité sociale ;

Attendu qu’il résulte des dispositions combinées des premiers de ces textes que l’existence d’une faute inexcusable de l’employeur, au sens du dernier, est présumée établie pour les salariés mis à la disposition d’une entreprise utilisatrice par une entreprise de travail temporaire, victimes d’un accident du travail, alors qu’affectés à des postes de travail présentant des risques particuliers pour leur santé ou leur sécurité, ils n’ont pas bénéficié d’une formation renforcée à la sécurité ainsi que d’un accueil et d’une information adaptés dans l’entreprise dans laquelle ils sont employés ( en ce sens notamment 2e Civ., 12 février 2015, pourvoi n° 14-10.855).

Qu’il résulte des textes précités que cette formation ainsi que cet accueil et information adaptés, qui incombent à l’entreprise utilisatrice en application de l’article L.4154-2 précité du Code du travail ( en ce sens notamment 2e Civ., 1 juillet 2010, pourvoi n° 09-66.300 qui précise en outre que cette dernière ne peut se retrancher derrière la formation reçue par le salarié de l’entreprise d’intérim) doivent être mise en oeuvre dès lors que le poste présente un risque ( Civ. 2ème 6 novembre 2014, no13-23.247, salarié assurant le nettoyage d’une machine contenant des résidus séchés de produit instable et explosif, , Civ. 2ème 20 septembre 2012, no11-19.886, fabrique de rhum-distillation, Civ. 2ème 1er décembre 2011, no10-25.918, 10-25.989 ; 2e Civ., 1 juillet 2010, pourvoi n° 09-66.300 salarié affecté à la conduite d’un appareil de levage ; 2e Civ., 11 mars 2010, pourvoi n° 08-21.374 salarié employé en qualité de chauffeur de benne chargé de la conduite et du tri et coincé entre la benne et le camion à la suite d’un déclenchement intempestif de la marche arrière du camion par le chauffeur).

Attendu qu’il en résulte, lorsque la formation, l’accueil et l’information adaptés n’ont pas été mis en ‘uvre par l’entreprise utilisatrice, l’existence d’une présomption simple de faute inexcusable que l’employeur pourra renverser en rapportant la preuve que les éléments permettant de retenir l’existence d’une faute inexcusable ne sont pas réunis (Soc., 29 juin 2000, no 99-10.589 ; en sens contraire 2e Civ., 11 octobre 2018, pourvoi no 17-23.694 , arrêt publié qui retient que la présomption ne peut être renversée que par la preuve que l’employeur a dispensé au salarié la formation renforcée à la sécurité).

Qu’il en résulte également que la présomption s’applique même lorsque les circonstances de l’accident sont indéterminées (Soc., 4 avril 1996, no 94-11.319, Bulletin 1996, V, no 135 ; 27 juin 2002, no 00-14.744, Bulletin civil 2002, V, no 225) ou lorsque le salarié a fait preuve d’imprudence (2e Civ., 15 novembre 2005, no 04-30.420 ; – 18 octobre 2005, no 03-30.162) ou commis une faute grossière (Soc., 31 octobre 2002, no 01-20.197), dès lors que l’employeur a affecté un salarié recruté sous contrat à durée déterminée à des postes dangereux, sans l’avoir fait bénéficier d’une formation adaptée, étant rappelé que la faute de la victime n’a pas pour effet d’exonérer l’employeur de la responsabilité qu’il encourt en raison de sa faute inexcusable et que seule une faute inexcusable de la victime, au sens de l’article L. 453-1 du code de la sécurité sociale, peut permettre de réduire la majoration de sa rente.

Qu’en application des textes précités, l’expérience précédente du salarié importe peu (Civ. 2ème 12 février 2015, no14-10.855 ; Civ. 2ème 11 mars 2010, no08-21.374 ; également 2e Civ., 1 juillet 2010, pourvoi n° 09-66.300 dont il résulte que l’ancienneté du salarié dans le métier ne dispense pas l’entreprise utilisatrice de son obligation de formation renforcé, y compris dans la même entreprise ; également 2e Civ., 31 mai 2012, pourvoi n° 11-18.857 qui casse pour violation de la loi un arrêt ayant retenu que si le salarié devait bénéficier d’une formation renforcée à la sécurité ainsi que d’un accueil et d’une information adaptée dans l’entreprise, ces obligations étaient satisfaites dans la mesure où le salarié avait été précédemment employé au même poste dans l’entreprise et avait acquis différents certificats d’aptitude) et que l’entreprise utilisatrice ne peut se retrancher derrière la formation fournie par la société d’intérim et l’ancienneté du salarié dans le métier ( en ce sens 2e Civ., 1er juillet 2010, no 09-66.300).

Qu’il résulte ensuite des textes précités qu’il appartient aux juges du fond d’apprécier les tâches confiées à la victime, au moment de l’accident, pour déterminer si elle occupait un poste de travail présentant des risques particuliers pour sa santé ou sa sécurité sans avoir reçu la formation à la sécurité renforcée prévue à l’article L. 4154-2 du code du travail (2e Civ., 7 mai 2014, pourvoi n° 12-20.335 ; 2e Civ., 27 novembre 2014, pourvoi n° 13-27.2742e Civ., 15 décembre 2016, pourvoi no 15-26.682).

Attendu qu’en l’espèce, si les intimées font valoir que les circonstances de l’accident sont indéterminées, en insinuant qu’une faute à l’origine de son préjudice a pu être commise par l’intérimaire, et n’ont produit strictement aucune pièce ni explications sur les circonstances exactes de l’accident, l’entreprise utilisatrice ayant en outre laissé sans aucune réponse les différentes sommations de communication de pièces qui lui ont été adressées sur ce point, il est constant que le salarié a été blessé lors de la man’uvre d’un touret ( bobine en bois pour câbles ) qui devait être levé et emporté par une grue montée sur un camion.

Qu’en effet, la société [14], non contestée sur ce point par la société [10], fait valoir en page 7 de ses écritures que Monsieur [Y] travaillait sous la responsabilité de Monsieur [G], le conducteur de l’engin de levage, et en binôme avec ce dernier, et indique en page 10 de ses écritures que ” rien ne permet de dire que le touret à l’origine de l’accident n’a pas basculé du fait d’une man’uvre de Monsieur [Y] qui tentait de le sangler par le haut “, reconnaissant ainsi que l’intérimaire était chargé de poser des sangles sur le touret et que cette pièce devait ensuite être enlevée par le matériel de levage.

Attendu qu’il résulte de ce fait constant que Monsieur [Y], recruté par l’agence d’intérim en qualité de tireur de câble et chargé par son contrat de mission du déroulage des câbles et de diverses tâches liées à l’activité, était affecté le jour de l’accident au déchargement d’un camion d’une bobine en bois pour câbles dite touret et qu’il intervenait en binôme avec le chauffeur du camion, sa participation consistant à sangler le matériel pour permettre au chauffeur du camion de le décharger au moyen d’une grue située sur le camion.

Attendu qu’une tâche consistant pour un intérimaire à poser des sangles sur un matériel lourd devant être chargé ou déchargé sur un camion par une grue actionnée par le chauffeur de ce dernier présente des risques particuliers de basculement de la charge exposant l’intérimaire à un choc avec la charge ou à un écrasement et plus généralement à des lésions corporelles pouvant être graves en cas de mauvaise coordination entre les deux intervenants.

Qu’il s’agit donc d’un poste à risque, peu important que la case du contrat de mission indiquant cette qualification de poste à risque ait été prétendument renseignée par erreur par la société intérim et peu important que le poste ne figurerait pas, selon l’employeur, sur la liste des postes à risques communiquée au médecin du travail.

Attendu qu’aucun des moyens soutenus par les intimées et tirés de l’expérience du salarié, de la formation à la sécurité reçue par lui de la société d’intérim, de l’existence de précédentes mises à disposition de cet intérimaire par cette dernière auprès de la société [14], des réponses positives à 90 % données par le salarié au test auquel il avait été soumis par la société d’intérim, de l’absence de détermination des circonstances de l’accident, de la qualification du chauffeur du camion et de l’absence de complexité du poste occupé par l’intérimaire et de l’éventuelle faute commise par ce dernier ( ce dernier moyen étant d’ailleurs hypothétique ) n’étaient de nature à exonérer la société utilisatrice de son obligation de dispenser à Monsieur [Y] une formation à la sécurité renforcée et de le faire bénéficier d’un accueil et d’une information adaptés dans son entreprise.

Que par ailleurs si la société utilisatrice produit l’attestation du chauffeur du camion, Monsieur [G], indiquant avoir ” formé Monsieur [Y] aux risques du chantier, avec l’ensemble de l’équipe, au travers du PPSPS” (plan particulier de sécurité et de protection de la santé ) et indiquant également avoir réalisé le formulaire ” formation à la sécurité des intérimaires” et que le [15] et le formulaire précité avaient été signés par l’intérimaire mais qu’il ne les avait pas conservés, elle ne produit pas le plan de sécurité et de protection de la santé prétendument établi et justifie encore moins que les modes opératoires et mesures de prévention des risques du travail qui doivent être contenues dans un tel document, à supposer qu’il existe, auraient servi de base à une véritable formation du salarié et non à une simple information dont la preuve n’est d’ailleurs elle-même aucunement rapportée.

Que l’attestation de Monsieur [G] n’étant pas étayée par la moindre preuve de l’existence de mesures concrètes de formation de Monsieur [Y] pouvant recevoir la qualification de formation renforcée à la sécurité ainsi que d’un accueil et une information adaptés sur les condition de travail dans l’entreprise, il s’ensuit que la société utilisatrice n’a pas satisfait aux obligations qui lui sont imparties lorsque l’intérimaire occupe comme en l’espèce un poste à risque ce dont il résulte que la faute inexcusable de la société de travail temporaire [10] doit être considérée comme présumée.

Attendu que soutenant que les circonstances de l’accident seraient indéterminées, la société [14] fait valoir en page 7 de ses écritures que l’accident ne pouvait être anticipé et que ses circonstances auraient été imprévisibles et elle en déduit qu’elle ne pouvait avoir conscience du danger.

Que cependant, elle indique en même temps en page 10 de ses écritures que dans le document unique d’évaluation des risques en cours de révision lors de l’accident le risque lié précisément à l’activité de chargement et de déchargement était indiqué et que face à ce risque elle avait listé les mesures de prévention mises en ‘uvre.

Que ces deux séries d’affirmations successives étant contradictoires puisque l’on ne peut à la fois soutenir ne pas avoir eu conscience du danger puis avoir évalué les risques de l’activité en listant les mesures de prévention applicables, il s’ensuit que les moyens correspondants doivent être disqualifiés en simples arguments auxquels la Cour n’est pas tenue de répondre.

Attendu que la société [10] n’apporte aucunement la preuve qu’elle n’aurait pas eu conscience du danger et que la preuve contraire est même rapportée puisqu’il a été démontré ci-dessus lors des développements sur le caractère de poste à risque du poste occupé par l’intérimaire lors de l’accident, que les tâches qui lui étaient confiées présentaient des risques particuliers justifiant une formation à la sécurité renforcée de ce dernier et que le document unique d’évaluation des risques fait apparaître l’existence de risques liés à l’activité de chargement et de déchargement.

Attendu par ailleurs que si la société utilisatrice allègue avoir mis en place des mesures de prévention dans son document d’évaluation des risques parmi lesquelles l’interdiction de circuler ou de stationner sous la charge, l’utilisation des avertisseurs sonores lors des man’uvres, l’application de la consigne ” toujours être vu du conducteur “, l’utilisation des accessoires adaptés à la charge manutentionnée “, elle ne justifie aucunement de la mise en ‘uvre concrète de ces mesures de protection et des autres mesures prévues en établissant qu’elle avait avait mis en place des actions d’information, de formation ainsi qu’une organisation et des moyens adaptés.

Qu’elle n’apporte donc aucune preuve contraire à la présomption de faute inexcusable.

Qu’il convient donc de dire, réformant le jugement en ses dispositions contraires, que la société [10], qui s’est substituée la société [14] dans la direction de Monsieur [Y], est tenue d’indemniser les conséquences de la faute inexcusable commise par cette dernière.

SUR LA DEMANDE DE MONSIEUR [Y] EN MAJORATION A SON MAXIMUM DE SA RENTE D’ACCIDENT DU TRAVAIL.

Attendu qu’aux termes des deux premiers alinéa de l’article L.452-2 du Code de la sécurité sociale en cas de faute inexcusable de l’employeur la victime qui s’est vu accorder une indemnité en capital reçoit une majoration ne pouvant excéder le montant de ladite indemnité et celle ayant obtenu le bénéfice d’une rente reçoit une rente majorée ne pouvant excéder soit la fraction du salaire annuel correspondant à la réduction de capacité soit le montant de ce salaire dans le cas d’incapacité totale .

Qu’il résulte du texte précité que la majoration de la rente et du capital alloué à la victime d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle consécutif à une faute inexcusable de l’employeur est calculée en fonction de la réduction de la capacité dont celle-ci reste atteinte et que dès lors la majoration doit suivre l’évolution du taux d’incapacité de la victime .

Qu’il résulte également de la combinaison du texte précité et des articles L. 434-2 et L.453-1 du code de la sécurité sociale seule la faute inexcusable du salarié est de nature à limiter la majoration de la rente à laquelle il est en droit de prétendre en raison de la faute inexcusable de son employeur ;

Attendu qu’en l’espèce il n’est pas soutenu et encore moins démontré que le salarié ait commis une faute inexcusable, la société [14] faisant seulement valoir, par un motif d’ailleurs hypothétique devant être de ce fait disqualifié en simple argument, que le salarié a pu commettre une faute à l’origine de l’accident en effectuant la man’uvre de sanglage du touret.

Qu’il convient donc, réformant le jugement en ses dispositions contraires, de fixer au maximum la majoration de la rente accordée à Monsieur [Y] au titre de l’article R.434-1 du Code de la sécurité sociale et de dire que la majoration ainsi ordonnée suivra le taux d’évolution de l’incapacité de la victime .

SUR LA DEMANDE D’EXPERTISE DE MONSIEUR [Y] EN CE QUI CONCERNE LES INDEMNISATIONS DEVANT LUI REVENIR SUR LE FONDEMENT DE L’ARTICLE L.453-3 DU CODE DE LA SECURITE SOCIALE

Attendu que la Cour ne disposant pas de suffisamment pas d’éléments pour statuer sur les différents postes de préjudice de la victime, il convient de reformer les dispositions du jugement déféré déboutant Monsieur [Y] de sa demande d’expertise et, statuant à nouveau de chef avant dire droit; d’ordonner une mesure d’expertise selon les modalités indiquées au dispositif du présent arrêt et le versement à la victime par la caisse d’une provision de 8000 €.

SUR L’ACTION RECURSOIRE DE LA CAISSE PRIMAIRE D’ASSURANCE MALADIE DE LA SOMME.

Attendu que les caisses de sécurité sociale disposent contre les employeurs ayant commis une faute inexcusable d’une action récursoire prévue par l’article L.452-2 du Code de la sécurité sociale en ce qui concerne la récupération, sous la forme prévue par cet article dans ses versions successives, de la majoration de rente d’accident du travail et par l’article L.452-3 du même Code en ce qui concerne les indemnisations complémentaires revenant à la victime sur le fondement de ce texte;

Attendu que rien ne s’opposant à l’action récursoire de la caisse en l’espèce, il convient de condamner la société [10] à lui rembourser d’une part le capital représentatif de la majoration qui sera versée à la victime par la caisse à la suite de la reconnaissance de la faute inexcusable de cette société, dans la limite du taux de 6% faisant l’objet de la notification initiale à l’employeur, et, d’autre part, outre la provision de 8000 € devant être versée à la victime, les indemnisations qui seront éventuellement accordées à cette dernière par la Cour au vu de l’expertise à intervenir, étant rappelé que les frais de l’expertise ainsi ordonnée constituent un des postes de préjudice de la victime sur lequel s’exerce l’action récursoire de la caisse.

SUR LA DEMANDE DE LA SOCIETE [10] EN CONDAMNATION DE LA SOCIETE [14] A LA GARANTIR DES CONSEQUENCES FINANCIERES DE SA FAUTE INEXCUSABLE AU TITRE DES ARTICLES L.452-2 ET L.452-3 DU CODE DE LA SECURITE SOCIALE.

Attendu qu’il résulte des articles L. 241-5-1, L. 412-6, R. 242-6-1 et R. 242-6-3 du code de la sécurité sociale qu’en cas d’accident du travail imputable à la faute inexcusable d’une entreprise utilisatrice, l’entreprise de travail temporaire, seule tenue, en sa qualité d’employeur de la victime, des obligations prévues aux articles L. 452-1 à L.452-4 du même code dispose d’un recours contre l’entreprise utilisatrice pour obtenir simultanément ou successivement le remboursement des indemnités complémentaires versées à la victime et la répartition de la charge financière de l’accident du travail, étant précisé que le coût de l’accident du travail mis intégralement à la charge de l’entreprise utilisatrice en application de l’article L. 241-5-1 du code de la sécurité sociale, lorsque l’accident est entièrement imputable à la faute inexcusable de cette entreprise, doit s’entendre, en vertu de l’article R. 242-6-1 du même code, du seul capital représentatif de la rente accident du travail .

Attendu qu’en l’espèce il résulte des écritures de la société [10] soutenues à l’audience que sa demande en garantie porte sur les indemnisations revenant à la victime au titre des articles L.452-2 et L.452-3 du Code de la sécurité sociale été au titre de l’article 700 mais qu’elle ne présente aucune demande au titre de la répartition financière de l’accident du travail.

Attendu qu’il vient d’être jugé que la société [14] avait manqué à ses obligations en sa qualité d’entreprise utilisatrice en n’organisant pas au bénéfice de Monsieur [Y] une formation renforcée à la sécurité ainsi qu’un accueil et une information adaptés dans l’entreprise et qu’elle ne justifiait pas non plus avoir mis en oeuvre de mesures de protection de cet intérimaire contre le risque.

Que le juge ne peut fonder sa décision sur des faits qui ne sont pas dans le débat en application du premier alinéa de l’article 7 du code de procédure civile.

Que la société [14] n’invoquant pour sa part aucune faute de la société [10] et ne faisant notamment à aucun moment valoir qu’il appartenait à cette dernière de vérifier qu’elle avait mis en oeuvre une formation renforcée de l’intérimaire à la sécurité, il s’ensuit que les fautes commises par la société [14] doivent être considérées comme à l’origine exclusive de l’accident et justifient que cette société soit condamnée à garantir intégralement la société [10] de toutes les conséquences financières de la faute inexcusable à l’origine de l’accident de Monsieur [Y], qu’il s’agisse des sommes devant être versées par cette dernière à la caisse au titre de la majoration ordonnée, dans la limite du taux de 6% notifié à l’employeur, ainsi que des indemnisations susceptibles d’être versées à la caisse à la victime sur le fondement de l’article L.452-3 du Code de la sécurité sociale et la provision revenant à la victime.

Que la demande de garantie présentée par la société [10] à l’encontre de la société [14] au titre des dépens et des frais non répétibles sera examinée, s’il y a lieu, à l’occasion de ce qui sera jugé de ces chefs.

SUR LES DEPENS ET LES FRAIS NON REPETIBLES.

Attendu que la Cour n’étant pas dessaisie de la cause, il convient de surseoir à statuer sur les dépens jusqu’à la solution des questions restant en litige.

Que la société [14] devant être considérée comme partie perdante, il convient de réformer les dispositions du jugement déféré déboutant Monsieur [Y] de ses prétentions dirigées contre cette société au titre des frais non répétibles et, statuant à nouveau de ce chef, de la condamner à régler à Monsieur [Y] la somme de 3500 € sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile, le jugement devant par contre être confirmé en ses dispositions déboutant ce dernier de ses prétentions dirigées de ce chef contre la société [10].

PAR CES MOTIFS.

La Cour, statuant par arrêt contradictoire rendu en audience publique par sa mise à disposition au greffe,

Réforme le jugement déféré en toutes ses dispositions à l’exception de celles portant sur les dépens, qu’il convient de réserver jusqu’à la solution des questions restant en litige, et de celles portant sur les prétentions de Monsieur [Y] dirigées contre la société [10] au titre des frais non répétibles qu’il convient de confirmer.

Et statuant à nouveau dans les limites précédemment énoncées et ajoutant au jugement,

Dit que la société [14], que la société [10] s’est substituée dans la direction de Monsieur [Y], a commis une faute inexcusable à l’origine de l’accident survenu à ce dernier.

Ordonne la majoration à son maximum de la majoration de la rente versée à Monsieur [Y] et dit que la majoration ainsi ordonnée suivra le taux d’évolution de l’incapacité de la victime .

Avant dire droit sur l’indemnisation des éventuels préjudices de la victime au titre de l’article L.453-2 du Code de la sécurité sociale,

Désigne le Docteur [M] [R] Doctorat en médecine , CES en médecine légale , CES de médecine du travail, Diplôme de réparation du Dommage corporel et inscrite sur la liste des experts judiciaires près la Cour d’Appel d’Amiens, [Adresse 1] avec la mission, les parties et leurs conseils convoquées , d’examiner Monsieur [T] [Y], de prendre connaissance de tous éléments utiles, de décrire les lésions subies par lui à la suite de son accident du travail du 31 octobre 2017 pris en charge au titre de la législation professionnelle, de donner son avis sur le préjudice éventuellement subi par lui du fait des souffrances physiques et morales endurées avant la date de sa consolidation, telle que fixée par la caisse, en l’évaluant sur l’échelle des 7 degrés, de donner son avis sur le préjudice esthétique éventuellement subi par lui tant avant qu’après la consolidation, en l’évaluant sur l’échelle des 7 degrés, d’indiquer si à son avis il a subi un préjudice d’agrément c’est-à-dire une incapacité du fait de l’accident de se livrer à une activité spécifique de sport ou de loisir exercée avant l’accident, de donner à la Cour tous éléments lui permettant de déterminer s’il a subi un préjudice sexuel du fait de l’accident, de donner son avis sur d’éventuels aménagements nécessaires pour permettre, le cas échéant, à la victime d’adapter son logement et/ou son véhicule à son handicap, de dire s’il a subi un déficit fonctionnel temporaire lequel inclut pour la période antérieure à la date de consolidation, l’incapacité fonctionnelle totale ou partielle, ainsi que le temps d’hospitalisation et les pertes de qualité de vie et des joies usuelles de la vie courante pendant la maladie traumatique, en indiquant sa durée et son taux en cas de déficit partiel, d’indiquer si à son avis, au vu des pièces qui lui seront communiquées par la victime, cette dernière a pu subir à la suite de l’accident une perte ou une diminution de ses possibilités de promotion professionnelle, de dire si la victime a subi un préjudice permanent exceptionnel réparable lequel correspond à un préjudice extra-patrimonial atypique, directement lié au handicap permanent qui prend une résonance particulière pour certaines victimes en raison soit de leur personne, soit des circonstances et de la nature du fait dommageable et si elle a subi un préjudice d’établissement préjudice d’établissement réparable en application de l’article L.452-3 qui consiste en la perte d’espoir et de chance de réaliser un projet de vie familiale en raison de la gravité du handicap, dire si la nature et de la gravité des lésions et de leurs suites rend nécessaire l’usage par la victime de substances non spécifiquement pharmaceutiques telles que des crèmes hydratantes et des protections solaires, selon quelle fréquence et le coût mensuel correspondant.

Dit que les frais d’expertise, qui constituent un poste de préjudice régi par l’article L.452-3 in fine, seront avancés par la caisse primaire d’assurance maladie de la Somme et pourront être recouvrés par elle à l’encontre de la société [10].

Fixe à 800 euros le montant de la provision à valoir sur la rémunération de l’expert qui sera avancée par la CPAM de l’Artois entre les mains du régisseur d’avances et de recettes de la cour d’appel d’Amiens dans le mois de la notification de l’arrêt.

Dit que l’expert ne débutera les opérations d’expertise qu’à réception de l’avis de consignation ;

Dit que l’expert devra adresser un rapport qui sera déposé au greffe de la chambre de la protection sociale de la cour dans les six mois de sa saisine et qu’il devra en adresser copie aux parties ;

Désigne le magistrat chargé du contrôle des expertises de la cour d’appel d’Amiens afin de surveiller les opérations d’expertise ;

Ordonne le versement par la caisse à la victime d’une provision de 8000 € qu’elle pourra recouvrer à l’encontre de la société [10] au titre de son action récursoire.

Condamne la société [10] à rembourser à la caisse primaire d’assurance maladie de l’Artois d’une part le capital représentatif de la majoration revenant à la victime et ce dans la limite du taux initial de 6% notifié à l’employeur et, d’autre part, la provision accordée à la victime et les indemnisations qui seront éventuellement accordées à cette dernière par la Cour sur le fondement de l’article L.452-3 du Code de la sécurité sociale au vu de l’expertise à intervenir, étant rappelé que les frais de l’expertise constituent un des postes de préjudice de la victime sur lequel s’exerce l’action récursoire de la caisse.

Condamne la société [14] à garantir intégralement la société [10] des sommes qu’elle sera éventuellement amenée à verser à la Caisse au titre de l’action récursoire de cette dernière.

Condamne la société [14] à verser à Monsieur [Y] la somme de 3500 € sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile.

Renvoie la présente affaire à l’audience du 02 octobre 2023 à 13h30 ;

Dit que la notification de l’arrêt aux parties vaut convocation à cette audience;

Réserve les dépens.

Le Greffier, Le Président,

 


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