Designer : 2 juin 2022 Cour d’appel de Versailles RG n° 21/01255

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Designer : 2 juin 2022 Cour d’appel de Versailles RG n° 21/01255
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COUR D’APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 22G

2e chambre 1re section

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 2 JUIN 2022

N° RG 21/01255 – N° Portalis DBV3-V-B7F-UK6D

AFFAIRE :

[F] [K]

C/

[H] [B]

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 22 Janvier 2021 par le Juge aux affaires familiales de Versailles

N° Chambre :

N° Cabinet :

N° RG : 19/00039

Expéditions exécutoires

Expéditions

délivrées le :

à :

– Me Dominique REGNIER

– Me Dominique LEBRUN

– TJ Versailles

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE DEUX JUIN DEUX MILLE VINGT DEUX,

La cour d’appel de VERSAILLES, a rendu l’arrêt suivant, qui a été prorogé le 19 mai 2022 puis le 25 mai 2022 les parties en ayant été avisées, dans l’affaire entre :

Madame [F], [Y], [Z] [K]

née le 22 Juin 1949 à [Localité 8] (FINISTÈRE) ([Localité 8])

[Adresse 1]

[Localité 9]

Représentée par Me Dominique REGNIER, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 141

APPELANTE

****************

Monsieur [H] [B]

né le 26 Juillet 1946 à [Localité 7] (64)

[Adresse 3]

[Localité 2]

Représenté par Me Dominique LEBRUN, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 160

INTIME

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 23 Mars 2022 en audience publique, les avocats des parties ne s’y étant pas opposés, devant Madame Julie MOUTY TARDIEU, Conseiller chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Dominique SALVARY, Président,

Madame Julie MOUTY TARDIEU, Conseiller,

Madame Sophie MATHE, Conseiller,

Greffier, lors des débats : Mme Maëlle LE DEVEDEC,

FAITS ET PROCEDURE,

Mme [F] [K] et M. [H] [B] se sont mariés le 24 février 1973 sans contrat préalable. Par un acte notarié du 13 janvier 1996, homologué par un jugement du tribunal de grande instance de Valenciennes le 10 mai 1996, les époux ont adopté le régime de la séparation de biens.

Par un jugement du 10 septembre 2013, le juge aux affaires familiales du tribunal de grande instance de Versailles a prononcé leur divorce, ordonné la liquidation et le partage de leurs intérêts patrimoniaux et condamné M. [B] à payer à son épouse une prestation compensatoire de 280 000 euros, en capital.

Par un jugement rectificatif du 28 novembre 2013, le juge aux affaires familiales a complété ce jugement et ordonné une expertise d’un bien immobilier (plus-value produite par des travaux réalisés par M. [B]). L’expert a déposé son rapport le 30 juin 2014.

Le 4 septembre 2014, M. [B] a assigné Mme [K] en partage judiciaire devant le juge aux affaires familiales.

Par un jugement du 23 mai 2016, ce juge a notamment :

– rappelé que la date des effets du divorce entre les parties, concernant leurs biens, est le 29 mars 2011,

– ordonné le partage judiciaire des intérêts patrimoniaux de M. [B] et de Mme [K],

– désigné Maître Picard-Mariscal, notaire à Versailles, pour procéder à ces opérations,

– désigné un juge commis,

– constaté l’accord des parties sur la mise en vente du bien indivis de [Localité 9] (78), sous le contrôle du notaire commis,

– constaté qu’aucune partie ne sollicite l’attribution du bien indivis situé à [Localité 9],

– renvoyé les parties devant le notaire commis s’agissant des travaux d’amélioration effectués sur le bien indivis de [Localité 9] et dit qu’il appartient à M. [B] de rapporter la preuve du financement personnel de ces travaux, faute de quoi aucune créance ne pourra être retenue à son profit,

– dit que Mme [K] sera redevable d’une indemnité d’occupation envers l’indivision pour sa jouissance privative du bien indivis de [Localité 9], du 2 novembre 2013 jusqu’à la date du partage ou de la libération des lieux,

– dit que pour la période allant du 2 novembre 2013 jusqu’au 31 décembre 2014, le montant de cette indemnité est fixé à la somme de 3 600 euros par mois,

– dit que la valeur locative de ce bien indivis, pour les années 2015, 2016 et suivantes, sera déterminée par le notaire,

– dit que l’indemnité d’occupation sera fixée à 80% de la valeur locative du bien ainsi déterminée,

– renvoyé les parties devant le notaire qui sera chargé de déterminer la valeur du ou des véhicules indivis à la date la plus proche du partage,

– constaté l’accord des parties sur l’attribution à Mme [K] du terrain sis à [Adresse 10], à charge pour le notaire d’en déterminer la valeur,

– constaté l’aveu judiciaire de M. [B] s’agissant des dettes à l’égard de Mme [K] au titre d’un prêt de 20 000 euros consenti le 10 décembre 2008 avec intérêts au taux de 5% et de la prestation compensatoire de 280 000 euros portant intérêts à compter du 2 novembre 2013.

Le 24 septembre 2018 le notaire commis a établi un procès-verbal de difficultés. M. [B] a demandé le rétablissement de l’affaire.

Par un jugement du 22 janvier 2021, le juge aux affaires familiales du tribunal judiciaire de Versailles a notamment :

– ordonné la poursuite des opérations de partage judiciaire des intérêts patrimoniaux de M. [B] et Mme [K] conformément aux dispositions des articles 1364 et suivants du code de procédure civile et selon ce qui est jugé par la décision,

– désigné, pour y procéder, Maître Aurelie Villette, notaire à Versailles, dans la suite des activités de Maître Picard-Mariscal,

– commis le magistrat coordonnateur du pôle famille de ce tribunal, ou son délégataire, pour surveiller les opérations, statuer sur les difficultés et faire rapport au tribunal en cas de désaccords persistants des parties,

– autorisé le notaire désigné à prendre tous renseignements utiles auprès de la direction générale des finances publiques par l’intermédiaire du fichier national des comptes bancaires et assimilés (FICOBA),

– dit qu’il appartiendra au notaire commis de préciser la consistance exacte de la masse à partager, de procéder, au besoin, à la constitution des lots pour leur répartition entre M. [B] et Mme [K], et réaliser, en cas de besoin, leur tirage au sort,

– dit que conformément aux dispositions de l’article 1365 du code de procédure civile, si la valeur ou la consistance des biens le justifie, le notaire désigné pourra s’adjoindre un expert, choisi d’un commun accord entre les parties ou, à défaut, désigné par le juge commis, à frais partagés et avancés à charge de compte lors de la liquidation des intérêts patrimoniaux,

– fixé la valeur du bien indivis de [Localité 9] à la somme de 1 210 000 euros,

– ordonné, à défaut d’accord entre les parties sur la vente amiable du bien immobilier dans un délai de trois mois à compter de la signification de la décision, la licitation à la barre de ce tribunal à la requête de M. [B] en présence de Mme [K] sur le cahier des conditions de vente dressé et déposé par Maître Dominique Lebrun, avocat au barreau de Versailles, après accomplissement par lui de toutes les formalités judiciaires et de publicité, à la vente aux enchères publiques de l’immeuble et ce, sur la mise à prix de 1200 000 euros, avec faculté de baisse d’un quart, puis de moitié jusqu’à provocation d’enchères et ce, indéfiniment,

– désigné, H-Juris, Huissier de Justice, [Adresse 4], [Localité 5] (78), aux fins de pénétrer dans l’immeuble, dresser un procès-verbal et vérifier les conditions d’occupation et à l’aide d’un géomètre expert, procéder à toutes les investigations et vérifications rendues utiles et nécessaires par la réglementation en vigueur,

– fixé l’indemnité d’occupation due par Mme [K] à l’indivision pour la période du 1er janvier 2015 jusqu’à la date de la libération du bien, à la somme mensuelle de 4 033 euros, sur laquelle il y a lieu d’appliquer un abattement de 20 %,

– constaté que M. [B] renonce à solliciter la prise en compte des travaux réalisés sur le bien indivis,

– constaté l’accord des parties sur l’échange des véhicules,

– renvoyé les parties devant le notaire commis qui sera chargé de déterminer la valeur des meubles meublants et leur répartition entre les co-partageants,

– débouté Mme [K] de sa demande tendant à voir ordonner l’ouverture des opérations de compte sur le régime communautaire antérieurement au 10 mai 1996,

– débouté M. [B] de sa demande de voir fixer à son profit une créance de 115 806,60 euros au titre de la libération du capital de la SCI TI AMO,

– débouté M. [B] de sa demande tendant à fixer à son profit une créance de 83 297 euros figurant au compte courant de la SCI TI AMO,

– débouté M. [B] de sa demande de dommages et intérêts,

– débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires,

– ordonné l’emploi des dépens en frais généraux de partage,

– ordonné l’exécution provisoire.

Par une déclaration du 24 février 2021, Mme [K] a fait appel de cette décision en ce qu’elle a :

“- Ordonné la poursuite des opérations de partage judiciaire des intérêts patrimoniaux de Monsieur [H] [B] et Madame [F] [K], et toutes dispositions subséquentes ;

– Fixé la valeur du bien indivis de [Localité 9] à la somme de 1.210.000 ‘euros,

– Ordonné, à défaut d’accord entre les parties sur la vente amiable du bien immobilier sis [Adresse 1] [Localité 9] dans un délai de trois mois à compter de la signification de la présente décision, la licitation à la barre de ce tribunal à la requête de Monsieur [H] [B], et toutes dispositions subséquentes ;

– Désigné, H-Juris, Huissier de Justice, [Adresse 4] [Localité 5], aux fins de pénétrer dans l’immeuble, dresser un procès-verbal et vérifier les conditions d’occupation et à l’aide d’un géomètre expert, procéder à toutes les investigations et vérifications rendues utiles et nécessaires par la réglementation en vigueur, et toutes dispositions subséquentes ;

– Fixé l’indemnité d’occupation due par Madame [F] [K] à l’indivision pour la période du 1er janvier 2015 jusqu’à la date de la libération du bien, à la somme mensuelle de 4.033 euros’, et toutes dispositions subséquentes ;

– Débouté Madame [F] [K] de sa demande tendant à voir ordonner l’ouverture des opérations de compte sur le régime communautaire antérieurement au 10 mai 1996”.

Dans ses dernières conclusions du 22 octobre 2021, Mme [K] demande à la cour de :

“- INFIRMER le jugement dont appel en ce qu’il a fixé la valeur du bien indivis de [Localité 9] à la somme de 1 210 000 €,

– INFIRMER le jugement dont appel en ce qu’il a ordonné, à défaut d’accord entre les parties sur la vente amiable du bien immobilier dans un délai de trois mois à compter de la signification de la présente décision, la licitation à la barre du bien sis [Adresse 1] [Localité 9], et les dispositions subséquentes,

– INFIRMER le jugement dont appel en ce qu’il a fixé l’indemnité d’occupation due par Madame [F] [K] à l’indivision pour la période du 1er janvier 2015 jusqu’à la date de la libération du bien, à la somme mensuelle de 4 033 euros, sur laquelle il y a lieu d’appliquer un abattement de 20 %,

– INFIRMER le jugement dont appel en ce qu’il a débouté Madame [F] [K] de sa demande tendant à voir ordonner l’ouverture des opérations de compte liquidation partage concernant le régime communautaire ayant régi les rapports des époux antérieurement au 10 mai 1996,

– CONFIRMER le jugement dont appel en ses autres dispositions,

STATUANT A NOUVEAU :

– ORDONNER la poursuite des opérations de partage judiciaire des intérêts patrimoniaux de Monsieur [H] [B] et Madame [F] [K] conformément aux dispositions des articles 1364 et suivants du code de procédure civile et selon ce qui est jugé par la présente décision,

– DÉSIGNER pour procéder aux opérations de partage, Maître Aurélie VILLETTE, notaire à Versailles, dans la suite des activités de Maître PICARD-MARISCAL,

– COMMETTRE le magistrat coordonnateur du Pôle famille de ce tribunal, ou son délégataire, pour surveiller les opérations, statuer sur les difficultés et faire rapport au tribunal en cas de désaccords persistants des parties,

– AUTORISER le notaire désigné à prendre tous renseignements utiles auprès de la direction générale des finances publiques par l’intermédiaire du fichier national des comptes bancaires et assimilés (FICOBA),

– DIRE qu’il appartiendra au notaire commis de préciser la consistance exacte de la masse à partager, de procéder, au besoin, à la constitution des lots pour leur répartition entre Monsieur [H] [B] et Madame [F] [K], et réaliser, en cas de besoin, leur tirage au sort,

– DIRE que conformément aux dispositions de l’article 1365 du code de procédure civile, si la valeur ou la consistance des biens le justifie, le notaire désigné pourra s’adjoindre un expert, choisi d’un commun accord entre les parties ou, à défaut, désigné par le juge commis, à frais partagés et avancés à charge de compte lors de la liquidation des intérêts patrimoniaux,

– FIXER la valeur du bien indivis de [Localité 9] à la somme de 1 120 000 €,

– DESIGNER Madame [F] [K] attributaire du bien sis [Adresse 1] – [Localité 9],

– ORDONNER l’ouverture des opérations de compte liquidation partage concernant le régime matrimonial applicable antérieurement au régime de la séparation de biens adopté par les époux et homologué par jugement rendu le 10 mai 1996 par le Tribunal de grande instance de Valenciennes,

– DEBOUTER Monsieur [H] [B] de ses demandes,

SUR L’APPEL INCIDENT :

– DEBOUTER Monsieur [H] [B] de ses demandes,

– CONDAMNER Monsieur [H] [B] à payer à Madame [F] [K] une somme de 8 000 € au titre de l’article 700 du Code de procédure civile,

– Le condamner aux dépens qui seront recouvrés par Maître Dominique REGNIER, avocat au Barreau de Versailles, conformément aux dispositions de l’article 699 du Code de procédure civile.”

Dans ses dernières conclusions du 6 février 2022, M. [B] demande à la cour de :

“- RECEVOIR Monsieur [B] [R] [W] en ses conclusions contenant appel incident,

– INFIRMER en conséquence partiellement le jugement du 22 janvier 2021,

– DIRE et constater que le compte courant de Me [B] à hauteur de 76 681 n’est pas un actif partageable pouvant bénéficier à la communauté, mais un bien propre de Monsieur [B],

– DIRE et constater que les sommes portées au crédit du compte courant intitulé «Monsieur ou Madame [B]» ne constituent pas un actif commun et qu’elles doivent revenir en totalité à Monsieur [H] [B] à l’occasion des opérations de compte liquidation partage,

– CONDAMNER Madame [K] à verser à Monsieur [H] [B] la somme de 80 000 euros à titre de dommages et intérêts sur le fondement de l’article 1240 du Code civil,

– CONDAMNER Madame [K] à verser à Monsieur [H] [B] la somme de 5 000 euros sur le fondement de l’article 700 du Code de Procédure Civile,

– DECLARER Mme [K] mal fondée en son appel,

– CONFIRMER le jugement du 22 janvier 2021 en ce qu’il a :

* FIXE l’indemnité d’occupation due par Madame [K] à l’indivision pour la période du premier janvier 2015 jusqu’à la date de la libération du bien à la somme mensuelle de 4 033 € avant abattement de 20 %,

* ORDONNE, à défaut d’accord entre les parties sur la vente amiable du bien immobilier, la licitation à la barre de la maison à usage d’habitation située [Adresse 1] et [Adresse 6] à [Localité 9] sur la mise à prix de 1 200 000 €,

* DEBOUTE Madame [K] de sa demande tendant à voir ordonner l’ouverture des opérations de compte sur le régime communautaire antérieurement au 10 mai 1996,

* DEBOUTE Madame [K] de sa demande au titre de l’article 700 du CPC,

– CONDAMNER Madame [K] au paiement des entiers dépens en application de l’article 696 du CPC dont distraction au profit de Maitre LEBRUN Dominique”.

L’ordonnance de clôture a été prononcée le 8 mars 2022.

Pour un exposé plus détaillé des faits, de la procédure, des moyens et prétentions des parties, la cour renvoie expressément à la décision déférée, ainsi qu’aux écritures déposées.

Le 18 mai 2022 la cour a adressé aux parties la note en délibéré suivante :

« Dans cette affaire, M. [B] formule des prétentions relatives aux comptes de la SCI TI AMO. Cette société est composée de quatre associés dont deux ne sont pas parties à la procédure. En outre, cette société est sous administration provisoire (ordonnance de référé du 25 octobre 2018) et l’administrateur n’est pas non plus partie à la procédure.

La cour souhaite donc recueillir les observations des parties sur la recevabilité des demandes de M. [B] au regard des exigences des articles 30 et 122 du code de procédure civile.

Les réponses des parties doivent parvenir à la cour au plus tard le vendredi 20 mai 2022 à 16 heures. »

L’avocat de M. [B] a répondu par un courriel du 18 mai 2022, le conseil de Mme [K] n’a pas répondu.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur la valeur de l’immeuble indivis de [Localité 9]

Le juge aux affaires familiales a fixé la valeur de l’immeuble indivis de [Localité 9] à la somme de 1 210 000 euros en se référant à l’estimation du notaire chargé des opérations de liquidation (procès-verbal de difficultés du 24 septembre 2018, page 9).

En appel Mme [K] conteste cette estimation et demande la fixation de la valeur de cet immeuble à la somme de 1 120 000 euros.

M. [B] répond que l’évaluation de l’immeuble est ancienne en ce qu’elle a été réalisée en 2014. Il souligne que les prix de l’immobilier ont augmenté depuis cette époque et que cette tendance a été accentuée par la crise sanitaire. Il ajoute que Mme [K] a refusé la visite des agents immobiliers qu’il avait mandatés et qu’il est nécessaire de mettre fin à l’indivision. Il conclut à la confirmation du jugement ayant ordonné la licitation de l’immeuble sur une mise à prix de 1 210 000 euros.

La cour relève que Mme [K] ne produit aucune pièce relative à la valeur actuelle de l’immeuble indivis pour fonder sa contestation. Sa demande sera rejetée et le jugement sera confirmé en ce qu’il a fixé la valeur de l’immeuble indivis à la somme de 1 210 000 euros.

Sur la demande d’attribution préférentielle de Mme [K]

En appel, Mme [K] demande l’attribution préférentielle de l’immeuble indivis qu’elle occupe depuis l’ordonnance de non-conciliation du 29 mars 2011, en application de l’article 831-2 du code civil, applicable aux partages des indivisions entre anciens époux, qui dispose :

” Le conjoint survivant ou tout héritier copropriétaire peut également demander l’attribution préférentielle :

1° De la propriété ou du droit au bail du local qui lui sert effectivement d’habitation, s’il y avait sa résidence à l’époque du décès, et du mobilier le garnissant, ainsi que du véhicule du défunt dès lors que ce véhicule lui est nécessaire pour les besoins de la vie courante ; (…)”

Selon une jurisprudence constante, cette attribution est facultative pour les indivisions dissoutes par un divorce, le juge apprécie souverainement l’opportunité de l’ordonner et il appartient au demandeur d’établir qu’il dispose de la capacité financière pour payer la soulte qui sera mise à sa charge (Civ. 1re, 11 avril 1995, Bull. I n°174, pourvoi n°93-14.461 ; 4 novembre 2015, pourvoi n°14-16624).

En l’espèce, Mme [K] indique qu’elle pourra payer la soulte mise à sa charge par la prestation compensatoire qui lui est due (280 000 euros) et les intérêts de retard dus sur ce capital (plus de 400 000 euros).

M. [B] ne s’oppose pas à cette prétention et demande que les comptes établis par le notaire ne soient pas remis en cause en permanence.

Il résulte du procès-verbal de difficultés du 24 septembre 2018 que Mme [K] dispose des deux tiers de la propriété indivise de l’immeuble de [Localité 9], et M. [B] d’un tiers.

Ce document précise que dans le cas où Mme [K] serait attributaire de cet immeuble indivis, elle sera redevable d’une soulte de 441 545 euros.

Selon le même acte, M. [B] doit à son épouse une prestation compensatoire d’un montant de 280 000 euros augmentée de 105 989 euros d’intérêts de retard (compte arrêté au 1er semestre 2018).

Il s’en déduit que cette soulte pourrait être payée en partie par compensation avec la prestation compensatoire et les intérêts dus par M. [B], Mme [K] serait alors redevable d’une soulte résiduelle de 55 556 euros.

La cour relève toutefois que cette hypothèse omet l’indemnité d’occupation due par Mme [K] à l’indivision.

Cette indemnité était évaluée par le notaire à la somme de 185 908 euros au 30 juin 2018, la part revenant à M. [B] étant de 61 969 euros (un tiers). Depuis cet acte, le montant de l’indemnité a augmenté puisqu’il convient d’ajouter la valeur de quatre années d’occupation.

Or, Mme [K] ne donne aucune explication ni justification des moyens par lesquelles elle va payer la soulte résiduelle restant à sa charge et l’indemnité d’occupation.

Il convient donc de rejeter la demande d’attribution préférentielle et de confirmer le jugement ayant ordonné la licitation de l’immeuble indivis.

Sur les opérations de comptes, liquidation et partage de l’ancienne communauté

Le juge aux affaires familiales a rejeté la demande de Mme [K] tendant au partage de l’ancienne communauté ayant existé entre les époux aux motifs qu’ils ont changé de régime matrimonial au moment de l’acquisition de l’immeuble de [Localité 9], qu’ils ont ainsi manifesté leur volonté de réduire les effets de leurs engagements et que Mme [K] n’établit pas son intérêt à liquider cette ancienne communauté.

Mme [K] critique cette décision en relevant que la liquidation ne dépend pas de l’existence d’un intérêt à y procéder et souligne que ses droits dans l’immeuble de [Localité 9] ont été incorrectement estimés par le notaire.

M. [B] répond que Mme [K] n’a jamais produit devant le notaire les documents justifiant de la nécessité de liquider l’ancienne communauté. Il conclut à la confirmation du jugement.

La cour relève que, selon les indications données par le notaire chargé de la liquidation du régime matrimonial (procès-verbal de difficultés du 24 septembre 2018, page 9), l’immeuble de [Localité 9] a été acquis par les époux le 3 septembre 1998 en indivision, à concurrence de un tiers pour M. [B] et deux tiers pour Mme [K].

Ainsi, ce bien a été acquis après la dissolution de la communauté, intervenue par un jugement du 10 mai 1996, et au cours du mariage sous le régime de la séparation de biens. Cet immeuble ne dépend donc pas de l’ancienne communauté.

Mme [K] ne justifie pas non plus de l’existence actuelle de biens dépendant de l’ancienne communauté. Le jugement sera donc confirmé en ce qu’il a rejeté la demande.

Sur l’indemnité d’occupation

Au dispositif de ses conclusions Mme [K] demande l’infirmation du jugement quant à l’indemnité d’occupation de l’immeuble indivis mais elle n’exprime aucune prétention à ce titre.

Le jugement sera donc confirmé sur cette question, comme le sollicite M. [B].

Sur les demandes relatives à la SCI TI AMO

Le juge aux affaires familiales a rejeté la créance revendiquée par M. [B] au moment de la constitution de la société en retenant que la prétention n’était pas justifiée.

En appel, M. [B] critique cette décision et demande à la cour de :

“- DIRE et constater que le compte courant de Me [B] à hauteur de 76 681 n’est pas un actif partageable pouvant bénéficier à la communauté, mais un bien propre de Monsieur [B],

– DIRE et constater que les sommes portées au crédit du compte courant intitulé « Monsieur ou Madame [B] » ne constituent pas un actif commun et qu’elles doivent revenir en totalité à Monsieur [H] [B] à l’occasion des opérations de compte liquidation partage”.

Par une note en délibéré, la cour a interrogé les parties sur la recevabilité de cette prétention relative aux comptes d’une société dont tous les associés ne sont pas parties à l’instance, et qui est soumise à une procédure de dissolution prononcée le 18 mars 2021 par un jugement du tribunal judiciaire de Versailles, M. [X] étant désigné en qualité de mandataire judiciaire.

M. [B] a répondu en délibéré que sa demande n’exigeait pas la mise en cause des tous les associés de la société ni de l’administrateur au motif que le compte courant d’associé ne fait pas l’objet d’une discussion au sein de la société. Il ajoute que sa demande se limite à la qualification des fonds déposés sur ce compte au regard des règles applicables au régime matrimonial des époux (bien commun ou bien propre de l’époux).

Mme [K] n’a pas répondu à cette note en délibéré.

La cour relève qu’elle est saisie de deux prétentions :

– l’une relative à la qualification des fonds déposés sur le compte courant d’associé, qui est bien recevable en ce qu’elle se limite à l’application du droit des régimes matrimoniaux,

– l’autre ayant pour objet d’attribuer “en totalité” à M. [B] les sommes déposées sur le compte litigieux.

Or, la seconde question qui conduit à attribuer à l’un des associés des sommes déposées sur un compte de la société concerne l’ensemble des associés et le mandataire judiciaire désigné par le jugement du 18 mars 2021. En l’absence de ces parties à la présente procédure, cette prétention sera déclarée irrecevable en application des articles 30 et 122 du code de procédure civile.

M. [B] soutient que les fonds déposés sur ce compte courant d’associés de la SCI TI AMO lui étaient personnels.

Mme [K] conclut à la confirmation du jugement ayant rejeté la demande de M. [B]. Elle souligne que les opérations de liquidation de la société sont en cours.

La cour relève que la société a été constituée le 5 octobre 2005, à une époque où les époux étaient mariés sous le régime de la séparation de biens. Il convient donc d’appliquer ce régime, et non celui de la communauté comme l’indique M. [B] dans sa note en délibéré.

L’époux revendiquant la propriété exclusive des fonds déposés sur ce compte, il lui appartient d’en établir la preuve.

M. [B] justifie que la SCI TI AMO a reçu sur son compte bancaire le 20 octobre 2005 un virement de 50 000 euros à son nom (“virement de DAV M. [B] [N]”). Le numéro de compte d’origine de ce virement n’est pas précisé par le relevé bancaire produit (banque Crédit Agricole).

M. [B] justifie par le relevé de son compte personnel ouvert au Crédit Agricole que deux virements ont eu lieu au mois d’octobre 2005 au débit de ce compte :

– 30 000 euros le 1er octobre 2005,

– 10 000 euros le 12 octobre suivant,

vers un compte non précisé.

Ces virements ne coïncident pas avec celui reçu le 20 octobre par la SCI (différences de dates, deux virements et non un, montants différents).

Il produit la suite de ce relevé du Crédit Agricole mentionnant des virements entre le 22 et le 28 octobre 2005 provenant du compte personnel de M. [B], du CODEVI et du compte épargne logement. Toutefois, ces virements au débit des comptes de l’époux ne mentionnent pas le compte bénéficiaire. Ils ne coïncident pas avec celui reçu par la société (dates différentes, montants différents).

M. [B] produit enfin le relevé du compte joint des époux du mois d’octobre 2005 qui ne mentionne toujours pas un virement d’un montant de 50 000 euros le 20 octobre au profit de la SCI.

L’opération signalée par M. [B] comme la preuve de l’origine de ses fonds personnels est du 22 octobre et concerne un montant de 647 000 euros. Elle ne peut pas expliquer une opération intervenue deux jours avant pour un autre montant.

Ce relevé mentionne en outre un chèque de 50 000 euros débité le 21 octobre 2005, mais le numéro ne coïncide pas avec le chèque encaissé par la SCI TI AMO le même jour, du même montant.

Il résulte de l’examen de ces documents bancaires que M. [B] ne démontre pas avoir financé de ses deniers personnels le capital social de la société, ni le compte courant d’associé.

Pour les époux séparés de biens, il convient d’appliquer l’article 1538, dernier alinéa, du code civil qui dispose :

“Les biens sur lesquels aucun des époux ne peut justifier d’une propriété exclusive sont réputés leur appartenir indivisément, à chacun pour une moitié”.

La cour en déduit que le compte courant d’associés détenu par M. [B] et Mme [K] dans les livres de la SCI TI AMO leur appartient indivisément, chacun pour une moitié.

Sur la demande indemnitaire de M. [B]

M. [B] soutient que Mme [K] bloque les opérations de liquidation, qu’il ne dispose plus de liquidités ce qui l’a empêché de payer la prestation compensatoire mise à sa charge. Il souligne que les intérêts dus sur ce capital sont désormais de plus de 120 000 euros. Il estime que cet abus de droit doit être sanctionné par l’allocation de 80 000 euros de dommages et intérêts. M. [B] ajoute que la liquidation de la SCI familiale est également bloquée par Mme [K].

Mme [K] conclut à la confirmation du jugement ayant rejeté la demande d’indemnisation.

Toutefois, les parties ont alimenté le litige au cours des opérations de liquidation et de partage de leurs intérêts patrimoniaux, Mme [K] quant à la valeur de l’immeuble indivis, M. [B] quant à l’indemnité d’occupation due. Les parties sont également en désaccord sur la liquidation de la SCI familiale et M. [B] a saisi la cour d’une demande à ce titre, omettant l’existence de trois autres parties dans ce litige distinct (deux associés et le liquidateur de la société).

La durée du partage judiciaire n’est donc pas totalement imputable à Mme [K] et le jugement sera confirmé en ce qu’il a rejeté la demande indemnitaire de M. [B].

Sur les demandes accessoires

L’équité et le sens du présent arrêt justifient de rejeter la demande de Mme [K] fondée sur l’article 700 du code de procédure civile.

Mme [K], qui a formé un appel sans produire de pièces à l’appui de ses prétentions et dont toutes les demandes sont rejetées sera condamnée à payer les dépens de l’instance et à payer à M. [B] la somme de 3 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Statuant publiquement, dans la limite de sa saisine, par un arrêt contradictoire rendu en dernier ressort,

CONFIRME le jugement rendu par le juge aux affaires familiales du tribunal judiciaire de Versailles le 22 janvier 2021, sauf au titre de l’attribution d’un compte ouvert dans les livres de la SCI TI AMO,

Statuant à nouveau,

DECLARE irrecevable la demande de M. [B] tendant à l’attribution du compte courant d’associés dénommé “M ou Mme [B]” ouvert dans les livres de la SCI TI AMO,

QUALIFIE de bien indivis le compte courant d’associés détenu par M. [B] et Mme [K] dans les livres de la SCI TI AMO, chacun détenant une moitié de la propriété indivise,

Y ajoutant,

REJETTE les demandes de Mme [K],

CONDAMNE Mme [K] à payer à M. [B] la somme de 3 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE Mme [K] à payer les dépens de l’instance,

DIT que Me Lebrun, avocat, pourra recouvrer directement contre la partie condamnée les dépens dont il a fait l’avance sans avoir reçu de provision.

Arrêt prononcé par Madame Dominique SALVARY, Président, et signé par Madame Dominique SALVARY, Président et par Mme Nazia KHELLADI, Greffier, présent lors du prononcé

LE GREFFIERLE PRESIDENT

 


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