Designer : 17 janvier 2023 Cour d’appel de Nîmes RG n° 21/04488

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Designer : 17 janvier 2023 Cour d’appel de Nîmes RG n° 21/04488
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ARRÊT N°

R.G : N° RG 21/04488 – N° Portalis DBVH-V-B7F-IJBV

YRD/ID

POLE SOCIAL DU TJ D’AVIGNON

02 décembre 2021

RG:16/00785

[H]

C/

S.A.S. [10]

Caisse CAISSE PRIMAIRE D’ASSURANCE MALADIE DE VAUCLUSE (C PAM)

Grosse délivrée

le

à

COUR D’APPEL DE NÎMES

CHAMBRE SOCIALE

ARRÊT DU 17 JANVIER 2023

APPELANT :

Monsieur [B] [H]

[Adresse 1]

[Localité 6]

représenté par Me Philippe MOURET, avocat au barreau D’AVIGNON

INTIMÉES :

S.A.S. [10]

[Adresse 7]

[Localité 5]

représentée par Me Thierry COSTE, avocat au barreau d’AVIGNON substitué par Me Hélène MALDONADO, avocat au barreau de NIMES

Caisse CAISSE PRIMAIRE D’ASSURANCE MALADIE DE VAUCLUSE (C PAM) Prise en la personne de son représentant légal en exercice, demeurant et domicilié ès qualité audit siège.

[Adresse 2]

[Localité 4]

représentée par M. [R] [S] (Autre) en vertu d’un pouvoir général

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :

Monsieur Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président, a entendu les plaidoiries en application de l’article 945-1 du code de Procédure Civile, sans opposition des parties.

en a rendu compte à la Cour lors de son délibéré.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Monsieur Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président

Mme Catherine REYTER LEVIS, Conseillère

Madame Evelyne MARTIN, Conseillère

GREFFIER :

Madame Isabelle DELOR, Greffière, lors des débats et du prononcé de la décision

DÉBATS :

A l’audience publique du 16 Novembre 2022, où l’affaire a été mise en délibéré au 17 Janvier 2023.

Les parties ont été avisées que l’arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d’appel.

ARRÊT :

Arrêt contradictoire, rendu en dernier ressort, prononcé publiquement et signé par Monsieur Yves ROUQUETTE-DUGARET, Président, le 17 Janvier 2023, par mise à disposition au greffe de la Cour.

FAITS, PROCÉDURE, MOYENS ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

M. [B] [H], chauffeur poids lourd au sein de la SAS [10], déclare avoir été victime d’un accident le 12 mars 2015 en chutant d’une hauteur de deux mètres dans une cuve de dégraissage.

Le certificat médical initial établi le même jour par le centre hospitalier d'[Localité 4] fait état d’un ‘traumatisme du rachis lombaire’.

Le 13 mars 2015, la société [10] a souscrit une déclaration d’accident du travail dans laquelle elle indique ‘ en descendant dans un regard pour retirer la plaque, M. [B] [H] a glissé et s’est fait mal au dos’.

Par décision du 30 mars 2015, la caisse primaire d’assurance maladie (CPAM) de Vaucluse a pris en charge cet accident au titre de la législation professionnelle.

L’état de santé de M. [B] [H] a été déclaré consolidé au 30 juillet 2015.

M. [B] [H] a alors sollicité la reconnaissance de la faute inexcusable de son employeur et la mise en ‘uvre, par la CPAM de Vaucluse, de la procédure de conciliation.

Après échec de cette procédure, constaté par un procès-verbal de non-conciliation établi le 17 mai 2016, M. [B] [H] a saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale d’Avignon par requête du 6 juin 2016.

Par jugement du 2 décembre 2021, le pôle social du tribunal judiciaire d’Avignon a :

– débouté M. [B] [H] de l’intégralité de ses demandes,

– débouté les parties des demandes fondées sur les dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamné M. [B] [H] aux dépens.

Par acte du 21 décembre 2021, M. [B] [H] a régulièrement interjeté appel de cette décision.

Par conclusions déposées et développées oralement à l’audience, M. [B] [H] demande à la cour de :

– infirmer le jugement rendu par le tribunal judiciaire d’Avignon, contentieux de la protection sociale, du 2 décembre 2021,

Statuant à nouveau,

– retenir la faute inexcusable de l’employeur dans l’accident de travail du 12 mars 2015 dont il a été victime,

En tirer toutes conséquences de droit,

– ordonner la majoration de la rente ou du capital à son maximum,

– ordonner une mesure d’expertise médicale judiciaire confiée à tel médecin expert qu’il plaira à la cour de designer avec pour mission de fixer le préjudice qu’il a subi du fait de l’accident de travail du 12 mars 2015 et de la faute inexcusable de son employeur,

– lui octroyer une provision de 2 000 euros à valoir sur l’indemnisation de ses préjudices,

– débouter la société [10] de toutes ses demandes, fins et conclusions,

– déclarer la décision à intervenir commune et opposable à la CPAM de Vaucluse,

– condamner la société [10], prise en la personne de son représentant légal en exercice, d’avoir à lui régler la somme de 2 500 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile pour frais irrépétibles en cause d’appel,

– la condamner aux entiers dépens.

Il soutient que :

– la décision de prise en charge de l’accident du travail est définitive à l’égard de son employeur,

– son employeur n’a pas respecté les préconisations du médecin du travail selon lesquelles il ne devait pas travailler seul,

– les secours qui l’ont pris en charge le jour de son accident attestent de douleurs dorsales et d’un transport à l’hôpital.

Par conclusions déposées et développées oralement à l’audience, la société [10] demande à la cour de :

– confirmer le jugement déféré,

– dire les prétentions de M. [B] [H] infondées,

– condamner M. [B] [H] au paiement d’une somme de 900 euros par application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

Elle fait valoir que :

– M. [B] [H] est parti seul de sa propre initiative en méconnaissance des instructions générales données,

– M. [B] [H] ne prouve pas la réalité de l’accident ni l’origine professionnelle de ses douleurs lombaires alors que circonstances de l’accident sont inconnues et qu’il n’y avait aucun témoin,

– la chute aurait pu se produire même si M. [B] [H] avait été accompagné.

Par conclusions déposées et développées oralement à l’audience, la CPAM de Vaucluse demande à la cour de :

– lui donner acte de ses protestations et réserves quant à la reconnaissance ou pas du caractère inexcusable de la faute éventuellement commise par l’employeur,

Dans l’hypothèse où la faute inexcusable de l’employeur serait retenue :

– lui donner acte de ses protestations et réserves tant sur la demande d’expertise médicale que sur les préjudices réparables,

– notamment refuser d’ordonner une expertise médicale visant à déterminer :

* la date de consolidation,

* le taux d’IPP,

* le déficit fonctionnement permanent,

* les pertes de gains professionnels actuels,

* plus généralement, tous les préjudices déjà couverts, même partiellement par le livre IV du code de la sécurité sociale dont :

° les dépenses de santé future et actuelle,

° les pertes de gains professionnels actuels,

° l’assistance d’une tierce personne,

– lui donner acte de ce qu’elle s’en remet à la sagesse du tribunal quant au montant de l’indemnisation à accorder à la victime au titre de la faute inexcusable de l’employeur,

– ramener les sommes réclamées à de justes et raisonnables proportions compte tenu du ‘référentiel indicatif régional de l’indemnisation du préjudice corporel’ habituellement retenu par les diverses cour d’appel,

– dire et juger qu’elle sera tenue d’en faire l’avance à la victime,

– au visa de l’article L. 452-3-1 du code de la sécurité sociale, dire et juger que l’employeur est de plein droit tenu de lui verser l’ensemble des sommes ainsi avancées par elle au titre de la faute inexcusable de l’employeur commise par lui,

– en tout état de causes, elle rappelle toutefois qu’elle ne saurait être tenu à indemniser l’assuré au-delà des obligations mises à sa charge par l’article précité, notamment à lui verser une somme allouée au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Elle indique :

– s’en remettre à la sagesse de la cour quant à la reconnaissance du caractère inexcusable de la faute éventuellement commise par l’employeur,

– s’en remettre à la sagesse de la cour quant au montant de l’indemnisation à accorder à la victime au titre de la faute inexcusable de l’employeur,

– qu’il appartient à l’employeur de lui reverser l’ensemble des sommes qu’elle a avancées au titre de la faute inexcusable commise par lui.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des moyens des parties, il convient de se reporter à leurs écritures déposées et soutenues oralement lors de l’audience.

MOTIFS

Sur la demande de faute inexcusable de la société [10] dans l’accident de travail dont M. [B] [H] a été victime le 12 mars 2015

Au terme de l’article L. 452-1 du code de la sécurité sociale, ‘lorsque l’accident est dû à la faute inexcusable de l’employeur ou de ceux qu’il s’est substitués dans la direction, la victime ou ses ayants droit ont droit à une indemnisation complémentaire dans les conditions définies aux articles suivants’.

Ainsi, le manquement à l’obligation légale de sécurité et de protection de la santé à laquelle l’employeur est tenu envers le travailleur a le caractère d’une faute inexcusable lorsque l’employeur avait ou aurait dû avoir conscience du danger auquel était soumis le travailleur et qu’il n’a pas pris les mesures nécessaires pour l’en préserver.

Il résulte de l’application combinée des articles L. 452-1 du code de la sécurité sociale, L. 4121-1 et L. 4121-2 du code du travail que le manquement à l’obligation légale de sécurité et de protection de la santé à laquelle l’employeur est tenu envers le travailleur et qu’il n’a pas pris les mesures nécessaires pour l’en préserver, sont constitutifs d’une faute inexcusable.

Il est indifférent que la faute inexcusable commise par l’employeur ait été la cause déterminante de l’accident survenu au salarié ; il suffit qu’elle en soit une cause nécessaire, même non exclusive ou indirecte, pour que la responsabilité de l’employeur soit engagée, étant précisé que la faute de la victime, dès lors qu’elle ne revêt pas le caractère d’une faute intentionnelle, n’a pas pour effet d’exonérer l’employeur de la responsabilité qu’il encourt en raison de sa faute inexcusable.

Il incombe, néanmoins, au salarié de rapporter la preuve de la faute inexcusable de l’employeur dont il se prévaut ; il lui appartient en conséquence de prouver, d’une part, que l’employeur avait ou aurait dû avoir conscience du danger auquel il exposait ses salariés et qu’il n’a pas pris les mesures nécessaires concernant ce risque, d’autre part, que ce manquement tenant au risque connu ou ayant dû être connu de l’employeur est une cause certaine et non simplement possible de l’accident.

Lorsque le salarié ne peut rapporter cette preuve, ou même lorsque les circonstances de l’accident demeurent inconnues, la faute inexcusable ne peut être retenue.

Par ailleurs, l’employeur peut toujours se défendre s’agissant d’une action en reconnaissance de la faute inexcusable en contestant le caractère professionnel de l’accident, quand bien même la décision de prise en charge revêtirait à son égard un caractère définitif.

En l’espèce, bien que la décision du 30 mars 2015 de prise en charge, au titre de la législation professionnelle, de l’accident dont M. [B] [H] prétend avoir été victime le 12 mars 2015 est devenue définitive, la société [10] est en droit d’en contester le caractère professionnel dans la mesure où le contentieux de la législation professionnelle est indépendant de celui de la faute inexcusable.

Dès lors, et s’agissant de cette contestation relative au caractère professionnel de l’accident dont M. [B] [H] prétend avoir été victime le 12 mars 2015, il y a lieu de rappeler que selon l’article L. 411-1 du code de la sécurité sociale ‘est considéré comme accident du travail quelle qu’en soit la cause, l’accident survenu par le fait ou à l’occasion du travail de toute personne salariée ou travaillant, à quelque titre ou en quelque lieu que ce soit, pour un ou plusieurs employeurs ou chefs d’entreprise’.

L’accident du travail se définit donc comme un évènement ou une série d’évènements survenus soudainement, à dates certaines, par le fait ou à l’occasion du travail, dont il est résulté une lésion corporelle, quelle que soit la date d’apparition de celle-ci. Le caractère soudain se définit comme l’élément imprévu, instantané ou brusque qui s’attache à la lésion ou à l’évènement. Le préjudice subi n’est pas forcément lié à un fait ou un geste de nature exceptionnelle.

La charge de la preuve de l’existence d’un fait accidentel incombe au salarié qui doit établir, autrement que par ses propres affirmations, les circonstances exactes de l’accident et son caractère professionnel.

Or, en l’espèce, si M. [B] [H] soutient avoir chuté dans une cuve de dégraissage le 12 mars 2015 alors qu’il intervenait seul au sein de la maison de retraite ‘[9]’ située sur la commune de [Localité 11], force est de constater que le bon de travail daté du jour de l’accident qu’il produit décrit une intervention ayant eu lieu au ‘collège [8]. [Adresse 3]’ et indique la mention ‘RAS’ dans la partie intitulée : ‘Observation après travaux’.

En outre, l’attestation délivrée le 28 mai 2015 par le service départemental d’incendie et de secours de Vaucluse, qui fait état d’une intervention réalisée le 12 mars 2015 à la maison de retraite ‘[9]’, n’est pas de nature à démontrer un lien de causalité entre cette intervention et l’activité professionnelle de M. [B] [H] dans la mesure où ce dernier ne rapporte pas la preuve qu’il se trouvait à cet endroit pour son travail.

Il n’existe par ailleurs aucun témoin de cet accident, et si les services de secours indiquent être intervenus ‘pour une personne ayant fait une chute de 2 mètres environ, dans une cuve de dégraissage. La victime souffre de douleurs dorsales. Elle est transportée non médicalisées vers le centre hospitalier d'[Localité 4]’, il est constant que ces derniers n’ont pas assisté à la chute alléguée par M. [B] [H] et, qu’en tout état de cause, aucun élément ne permet d’établir que les douleurs dorsales constatées lors de cette intervention trouvent leurs origines dans un accident survenu par le fait ou à l’occasion du travail.

Enfin, le certificat médical initial établi par le centre hospitalier d'[Localité 4] le jour de l’accident allégué, qui fait état d’un ‘traumatisme du rachis lombaire’, n’est pas non plus de nature à démontrer que cette affection est en lien avec un accident survenu par le fait ou à l’occasion du travail.

Dans ces conditions, et au vu de l’ensemble de ces considérations, il apparaît que M. [B] [H] ne rapporte pas la preuve, qui lui incombe, de la survenue d’un événement soudain sur son lieu de travail et au temps du travail, à l’origine d’une lésion physique ou psychologique, de sorte que sa demande de reconnaissance d’un accident de travail doit être rejetée.

S’agissant des demandes se rapportant à la faute inexcusable de l’employeur, force est de constater qu’à défaut de rapporter la preuve de l’existence d’un événement accidentel à la date alléguée, la demande de M. [B] [H] n’est pas fondée.

C’est donc à bon droit que les premiers juges ont débouté M. [B] [H] de sa demande de reconnaissance d’une faute inexcusable de son employeur.

Il convient, en conséquence, tant pour les motifs qui précèdent que ceux non contraires des premiers juges, de confirmer en toutes ses dispositions le jugement déféré.

Sur les dépens

M. [B] [H], partie perdante, supportera les dépens de l’instance.

Sur l’article 700 du code de procédure civile

L’équité commande de faire application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile et donc de condamner M. [B] [H] à payer à la société [10] la somme de 900 euros à ce titre.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire, en matière de sécurité sociale et en dernier ressort;

Confirme en toutes ses dispositions le jugement rendu par le pôle social du tribunal judicaire d’Avignon le 2 décembre 2021,

Rejette les demandes plus amples ou contraires,

Condamne M. [B] [H] aux dépens de la procédure d’appel,

Condamne M. [B] [H] à payer à la SAS [10] la somme de 900 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.

Arrêt signé par le président et par la greffiere.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT

 


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