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COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE
Chambre 1-2
ARRÊT
DU 16 NOVEMBRE 2023
N° 2023/733
Rôle N° RG 22/14334 – N° Portalis DBVB-V-B7G-BKHRS
SAS DUPRE VINS D’ARDÈCHE
SAS [Localité 6]
C/
S.A.S. DUPRE ET FILS
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
Me Agnès ERMENEUX
Me Philippe BRUZZO
Décision déférée à la Cour :
Ordonnance de référé rendue par le Président du Tribunal Judiciaire de MARSEILLE en date du 29 septembre 2022 enregistrée au répertoire général sous le n° 22/01468.
APPELANTES
SAS DUPRE VINS D’ARDÈCHE
prise en la personne de son représentant légal en exercice
dont le siège social est situé [Adresse 8]
SAS [Localité 6]
prise en la personne de son représentant légal en exercice
dont le siège social est situé [Adresse 1]
représentées par Me Agnès ERMENEUX de la SCP SCP ERMENEUX – CAUCHI & ASSOCIES, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE
et assistées de Me Serge ALMODOVAR de la SELARL CABINET ALMODOVAR, avocat au barreau de VALENCE, plaidant
INTIMEE
S.A.S. DUPRE ET FILS
prise en la personne de son représentant légal en exercice
dont le siège social est situé [Adresse 5]
représentée par Me Philippe BRUZZO de la SELAS BRUZZO DUBUCQ, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE substitué par Me Etienne FEILDEL, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE, plaidant
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
L’affaire a été débattue le 10 octobre 2023 en audience publique. Conformément à l’article 804 du code de procédure civile, M. PACAUD, Président, a fait un rapport oral de l’affaire à l’audience avant les plaidoiries.
La Cour était composée de :
M. Gilles PACAUD, Président rapporteur
Mme Angélique NETO, Conseillère
Mme Florence PERRAUT, Conseillère
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Mme Julie DESHAYE.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 16 novembre 2023.
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 16 novembre 2023,
Signé par M. Gilles PACAUD, Président et Mme Julie DESHAYE, greffière auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
EXPOSÉ DU LITIGE
La société par action simplifiée (SAS) [N] et Fils, créée en 1994, est détenue à parité (33,3 % des parts) par monsieur [V] [N], qui est en est également le président, monsieur [E] [N] et madame [G] [N]. Elle exerce une activité de production de vins sous les appellations ‘Domaine de [Localité 7]’ et ‘Les Champs de Lierre’ et commercialise une partie de sa production auprès de la grande distribution.
La SAS [N] Vins d’Ardèche, créée en 1999, est détenue par deux associés égalitaires, M. [P] [N], qui en est le président, et M. [V] [N], qui en était directeur général jusqu’à une date récente. Elle n’exerce qu’une activité de conditionnement et négoce de vins.
La SAS [Localité 6] est détenue à 100 % par les enfants de M. [P] [N]. Elle a pour objet social la commercialisation de la production biologique de la SAS Vignoble Roman.
En 2014, dans le cadre du développement de son appellation ‘[Adresse 2]’, la SAS [N] et Fils a fait réaliser par la société Studio W des étiquettes stylisées au nom de ‘Grange de [Localité 7]’. Quatre lignes de produits étaient exploitées sous cette appellation :
– La cuvée « G » à base de raisins « Syrah »,
– La cuvée « S » à base de raisin « Viognier »,
– La cuvée « D » à base de raisins « Cabernet Merlot »,
– La cuvée « M » à bas de « Viognier d’Automne ».
De 2014 à 2021, la SAS [N] et Fils a régulièrement revendu ses vins sous l’appellation ‘[Adresse 2]’ à la SAS [N] Vins d’Ardèche.
À compter de l’année 2020, des tensions sont apparues entre M. [P] [N] (Président de la SAS [N] Vins d’Ardèche) ses 3 autres frères et s’urs, en particulier avec [V] (à l’époque Directeur général de la SAS [N] et Fils) et [G] (salariée de la SAS [N] Vins d’Ardèche).
Le 25 novembre 2020, la SAS [N] et Fils a déposé à l’Institut [4] (INPI) la marque ‘[Adresse 2]’.
En février 2021, M. [P] [N] a licencié sa soeur [G] de ses fonctions de salariée de la SAS [N] Vins d’Ardèche.
Le 13 août 2021, M. [P] [N] a fait déposer par la société [N] Vins d’Ardèche la marque ‘Grange de [Localité 7]’.
Le 25 août 2021, la SAS [N] et Fils a fait constater par huissier de justice que la SAS [N] Vins d’Ardèche vendait des vins prétendument produits par elle alors qu’il s’agissait en réalité de vins d’Espagne.
Le 27 septembre 2021, la SAS [N] et Fils a mis en demeure la SAS [N] Vins d’Ardèche de faire cesser toute exploitation commerciale de la dénomination ‘[Adresse 2]’.
Au cours de l’année 2021, [P] et [V] se sont, dans le cadre d’instances en référé, reproché diverses fautes de gestion et indélicatesses, [V] allant jusqu’à solliciter la désignation d’un administrateur provisoire pour gérer la SAS [N] Vins d’Ardèche.
Le 3 novembre 2021, prenant connaissance du dépôt de la marque ‘Grange de [Localité 7]’ par la SAS [N] Vins d’Ardèche, la SAS [N] et Fils a régularisé une opposition devant l’INPI.
Par décision du 10 juin 2022, cet institut a rejeté la demande d’enregistrement de la marque ‘Grange de [Localité 7]’ motif pris de la trop grande similarité avec le signe ‘[Adresse 2]’ déposé par la SAS [N] et Fils et du risque de confusion ainsi créé sur l’origine des produits.
Informée, au début de l’année 2022, par un de ses clients que la SAS [N] Vins d’Ardèche commercialisait, en grande surface, des bouteilles de vins sous l’appellation ‘Grange des Vignes’, porteuses d’étiquettes très fortement ressemblantes à celles dont étaient revêtues ses propres bouteilles, à l’appellation ‘Grange de [Localité 7]’, la SAS [N] et Fils l’a, par l’intermédiaire de son conseil, mise en demeure de faire cesser ces agissements qualifiés d’actes de parasitisme et contrefaçon.
En l’absence d’optempération, elle l’a, par acte d’huissier en date du 12 avril 2022, fait assigner devant le président du tribunal judiciaire de Marseille, statuant en référé, aux fins d’entendre :
– à titre principal :
‘ constater que les SAS [Localité 6] et [N] Vins d’Ardèche ont copié quasiment en tout point les étiquettes et design des bouteilles de vin de la ‘cuvée M’ produite par la SAS [N] et Fils ;
‘ dire et juger que ces actes ont pour objectif pour les SAS [Localité 6] et [N] Vins d’Ardèche de se placer dans le sillage d’une entreprise en profitant indûment des investissements consentis ou de sa notoriété et qu’ils constituent des actes de parasitisme ;
‘ enjoindre, en conséquence, aux SAS [Localité 6] et [N] Vins d’Ardèche de cesser, sous astreinte de l 000 euros par jour de retard, la production et la distribution d’un vin sous le nom de la ‘cuvée M’, ‘cuvée S’, reprenant l’ensemble du design et du graphisme du vin de la ‘cuvée M’ de la SAS [N] et Fils ;
– à titre subsidiaire :
‘ constater que les SAS [Localité 6] et [N] Vins d’Ardèche ont copié quasiment en tout point les étiquettes et le design des bouteilles de vin de la ‘cuvée M’ produite par la SAS [N] et Fils ;
‘ dire et juger que les SAS [Localité 6] et [N] Vins d’Ardèche ont opéré des actes de contrefaçon sur l’ensemble des cuvées produites par la société [N] et Fils ;
‘ enjoindre les SAS [Localité 6] et [N] Vins d’Ardèche à retirer, sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard, les produits contrefaisants du vin de la ‘cuvée M’ de la SAS [N] et Fils ;
– en tout état de cause :
‘ constater que la société [N] et Fils a subi un préjudice économique résultant des actes de parasitisme opérés par les SAS [Localité 6] et [N] Vins d’Ardèche ;
‘ désigner, en conséquence, tel expert-comptable qu’il plaira à la juridiction de céans afin d’établir le préjudice économique subi par la société [N] et Fils résultant des actes de parasitisme opérés par les SAS [Localité 6] et [N] Vins d’Ardèche ;
‘ condamner les SAS [Localité 6] et [N] Vins d’Ardèche à allouer à la société [N] et Fils et M. [V] [N] la somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
Par ordonnance contradictoire en date du 29 septembre 2022, le juge des référés du tribunal judiciaire de Marseille a :
– déclaré M. [V] [N] irrecevable en toutes ses demandes en tant que dirigées contre la société [N] Vins d’Ardèche dont il est directeur général ;
– mis M. [P] [N] hors de cause ;
– vu l’existence d’une contestation sérieuse en ce qui concerne les actes de parasitimes reprochés, dit n’y avoir lieu à référé et pas davantage à expertise comptable de ce chef et renvoyé la société [N] et Fils à se pourvoir au fond de ce chef ;
– jugé que le vin de la ‘cuvé M’ produit et distribué par les sociétés [Localité 6] et [N] Vins d’Ardèche est une contrefaçon du vin de la ‘cuvée M’ produit par la Société [N] et fils ;
– fait, en conséquence, injonction aux Sociétés [Localité 6] et [N] Vins d’Ardèche de cesser, sous astreinte globale de 600 euros par jour de retard à compter de la signification de son ordonnance, la production et la diffusion d’un vin sous le nom de la cuvée ‘Grange des Vignes’ au titre des cuvées et/ou ‘Champs de Lierre’ reprenant l’ensemble du design et du graphisme du vin des cuvées M, S, D et G de la société [N] et Fils et, de manière générale, tout produit contrefaisant portant l’appellation ‘[Localité 7]’ qui ne proviendrait pas de la production de la société [N] et fils et de le retirer de la vente ;
– constaté qu’aucune demande d’expertise n’a été expressément formulée pour évaluer un préjudice économique en lien avec une contrefaçon ;
– débouté les sociétés [Localité 6] et [N] Vins d’Ardèche de leur demande reconventionnelle ;
– condamné les sociétés [N] Vins d’Ardèche et [Localité 6] à payer à la société [N] et Fils une indemnité de 1 500 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile ;
– rejeté le surplus des demandes de la société [N] et Fils ;
– condamné les sociétés [N] Vins d’Ardèche et [Localité 6] aux dépens du référé.
Il a notamment considéré :
– qu’aucune faute personnelle n’était établie à l’encontre de M. [P] [N] ;
– que le procès-verbal d’huissier versé aux débats par les requérants, en date du 25 août 2021, n’établissait pas, à lui seul, que les vins vendus sur les plateformes U ou Alphaprix étaient constitutifs de parasitisme dès lors que cette vente pouvait aussi bien résulter de l’exécution d’accords commerciaux la société [N] Vins d’Ardèche exerçant une activité de négoce couvrant largement la commercialisation des vins produits par la société [N] et Fils ;
– que néanmoins, sur la contrefaçon, il était constant que la société [N] et Fils avait déposé la marque ‘[Adresse 2]’, le 25 novembre 2020, soit avant le dépôt par la société [N] Vins d’Ardèche de la marque ‘Grange de Vivier’ et que l’INPI ayant rejeté le dépôt de la marque ‘Grange de [Localité 7]’, le vin de la ‘cuvée M produit et distribué par les sociétés [Localité 6] et [N] Vins d’Ardèche était manifestement une contrefaçon du vin de la ‘cuvée M’ produit par la société [N] et Fils, l’acte de cession de droits d’auteur du 23 octobre 2021 ne démontrant rien de contraire.
Selon déclaration reçue au greffe le 27 octobre 2022, la SAS [Localité 6] et la SAS [N] Vins d’Ardèche ont interjeté appel de cette décision, l’appel visant à la critiquer en ce qu’elle a :
– jugé que le vin de la ‘cuvée M’ produit et distribué par les sociétés [Localité 6] et [N] Vins d’Ardèche est une contrefaçon du vin de la ‘cuvée M’ produit par la société [N] et fils ;
– fait, en conséquence, injonction aux sociétés [Localité 6] et [N] Vins d’Ardèche de cesser, sous astreinte globale de 600 euros par jour de retard à compter de la signification de l’ordonnance entreprise, la production et la diffusion d’un vin sous le nom de la cuvée ‘Grange des Vignes’ au titre des cuvées et/ou ‘Champs de Lierre’ reprenant l’ensemble du design et du graphisme du vin des cuvées M, S, D et G de la société [N] et Fils et de manière générale tout produit contrefaisant portant l’appellation ‘[Localité 7]’ qui ne proviendrait pas de la production de la Société [N] et fils et de le retirer de la vente ;
– débouté les sociétés [Localité 6] et [N] Vins d’Ardèche de leur demande reconvetionnelle ;
– condamné les sociétés [Localité 6] et [N] Vins d’Ardèche à payer à la société [N] et Fils une indemnité de 1 500 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile;
– condamné les sociétés [Localité 6] et [N] Vins d’Ardèches aux dépens du référé.
Par dernières conclusions transmises le 14 septembre 2023, auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé des prétentions et moyens, elles sollicitent de la cour qu’elle :
– déclare irrecevable toute demande de caducité de l’appel pour n’avoir pas été présentée dans le premier jeu de conclusions ;
– déclare irrecevable la demande de la société [N] et Fils de toute demande non contenue au dispositif de ses conclusions ;
– déclare irrecevable la demande de la société [N] et Fils tendant à la communication forcée de pièces comme constituant une demande nouvelle ;
– ce faisant, infirmant partiellement l’ordonnance entreprise et confirmant pour le le surplus :
‘ juge que la société [N] Vins d’Ardèche justifie de l’existence de droits d’auteur sur quatre ‘uvres graphiques, D Grange de Vignes (en caractère rouge), G Grange de Vignes (en caractère bleu), M Grange de Vignes (en caractère orange), S Grange de Vignes (en caractère vert), cédées par contrat de cession de droits d’auteur du 23 octobre 2021, modifié le 22 décembre 2021 ;
‘ dise, en conséquence, qu’il existe des contestations sérieuses faisant obstacle à leur condamnation du fait de l’antériorité des droits d’auteur en application de l’article 834 du code de procédure civile ;
‘ dise qu’il ne résulte de la situation juridique liée à l’antériorité des droits d’auteur aucun trouble illicite au préjudice de la société [N] et Fils et la déboute de l’entièreté de ses demandes ;
– à titre reconventionnel :
‘ condamne la société [N] et Fils à cesser, sous astreinte de 1 500 euros par jour de retard, toute commercialisation de vins avec étiquettes identiques reproduisant servilement les étiquettes dont la société [N] Vins d’Ardèche a acquis les droits d’auteur ;
‘ condamne la société [N] et Fils à porter et payer aux sociétés [Localité 6] et [N] Vins d’Ardèche la somme de 10 000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure manifestement abusive ;
‘ condamne la société [N] et Fils à la somme de 8 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens de l’instance ;
– déclare irrecevable la demande tendant à voir instaurer la mesure d’expertise judiciaire sur tout autre fondement que celui du parasitisme ;
– condamne la société [N] et Fils à cesser, sous astreinte de 1 500 euros par jour, toute commercialisation de vins avec étiquettes identiques ou reproduisant servilement les étiquettes dont [N] Vins d’Ardèche a acquis les droits d’auteur.
Par ordonnance en date du 14 septembre 2023, la conseillère déléguée de la chambre 1-2 de la cour d’appel d’Aix-en-Provence, statuant sur incident, a :
– dit qu’il n’entrait pas dans ses pouvoirs ou dans ceux du président de chambre de déclarer caduque la déclaration d’appel transmise le 27 octobre 2022 par la SAS [N] Vins d’Ardèche et la SAS [Localité 6] pour non respect des dispositions des articles 542, 562 et 954 du code de procédure civile ;
– rejeté la demande de caducité de la déclaration d’appel transmise le 27 octobre 2022 par la SAS [N] Vins d’Ardèche et la SAS [Localité 6] ;
– débouté la SAS [N] Vins d’Ardèche et la SAS [Localité 6] de leur demande de dommages et intérêts pour incident abusif ;
– débouté la SAS [N] et Fils de sa demande fondée sur les dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;
– dit que les dépens de l’incident suivraient le sort de ceux de l’instance principal.
Par dernières conclusions transmises le 15 septembre 2023, auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé des prétentions et moyens, la société [N] et Fils sollicite de la cour :
– à titre principal, qu’elle :
‘ juge qu’au terme de leurs conclusions régularisées le 14 novembre 2022, les sociétés [Localité 6] et [N] Vins d’Ardèche se bornent, dans leur dispositif, à solliciter l’infirmation partielle de l’ordonnance du 29 septembre 2022, sans préciser les chefs de l’ordonnance dont l’infirmation est concrètement sollicitée ;
‘ juge, en conséquence, que les conclusions régularisées le 14 novembre 2022 n’ont pas valablement saisi la cour ;
‘ confirme, en conséquence, purement et simplement l’ordonnance entreprise sur les chefs visés par la déclaration d’appel ;
– à titre subsidiaire, sur le fond, qu’elle :
‘ constate que les sociétés [Localité 6] et [N] Vins d’Ardèche ont copié quasiment en tous points les étiquettes et le design de ses bouteilles de vin des cuvées M, S, G et D et, de manière générale, tout produit portant l’appellation ‘[Localité 7]’ ;
‘ juge que ces actes caractérisent des actes de contrefaçon commis à son préjudice ;
‘ juge, à tout le moins, que ces actes ont pour objectif, pour les sociétés [Localité 6] et [N] Vins d’Ardèche, de se placer dans le sillage d’une entreprise en profitant indûment des investissements consentis ou de sa notoriété et qu’ils constituent des actes de parasitisme ;
‘ confirme, en conséquence, purement et simplement l’ordonnance entreprise sur les chefs visés par la déclaration d’appel ;
– à titre reconventionnel :
‘ constate qu’elle justifie d’un motif légitime pour obtenir communication des éléments permettant de déterminer les bénéfices réalisés les sociétés [Localité 6] et [N] Vins d’Ardèche du fait de la commercialisation des produits contrefaisants ;
‘ infirme, en conséquence, partiellement l’ordonnance de référé rendue le 29 septembre 2022, en ce qu’elle l’a déboutée de sa demande fondée sur l’article 145 du code de procédure civile et statuant à nouveau, ordonne la production :
‘ à la société [N] Vins d’Ardèche :
‘ de l’ensemble des factures d’achat des bouteilles ‘Grange des Vignes’ ou ‘Grange de [Localité 7]’ au titre des cuvées M, S, G et D de la société [N] et fils et de manière générale tout produit portant l’appellation ‘[Localité 7]’ qui ne proviendrait pas de la société [N] et Fils, pour la période allant de septembre 2021 à septembre 2023 ;
‘ des extraits de son grand livre relatifs à la rubrique [Localité 6], pour les exercices clos au 31 décembre 2021 et au 31 décembre 2022 ;
‘ de l’ensemble des factures de ventes des bouteilles ‘Grange des Vignes’ ou ‘Grange de [Localité 7]’ au titre des cuvées M, S, G et D de la société [N] et fils et de manière générale tout produit portant l’appellation ‘[Localité 7]’ qui ne proviendrait pas de la société [N] et Fils, pour la période allant de septembre 2021 à septembre 2023 ;
‘ à la société [Localité 6] :
‘ de l’ensemble des factures d’achat des bouteilles ‘Grange des Vignes’ ou ‘Grange de [Localité 7]’ au titre des cuvées M, S, G et D de la société [N] et fils et de manière générale tout produit portant l’appellation ‘[Localité 7]’ qui ne proviendrait pas de la société [N] et Fils, pour la période allant de septembre 2021 à septembre 2023 ;
‘ des extraits de son grand livre relatifs à la rubrique [N] Vins d’Ardèche, pour les exercices clos au 31 décembre 2021 et au 31 décembre 2022 ;
‘ de l’ensemble des factures de ventes des bouteilles ‘Grange des Vignes’ ou ‘Grange de [Localité 7]’ au titre des cuvées M, S, G et D de la société [N] et fils et, de manière générale, tout produit portant l’appellation ‘[Localité 7]’ qui ne proviendrait pas de la société [N] et Fils, pour la période allant de septembre 2021 à septembre 2023 ;
‘ assortisse ces injonctions d’une astreinte de 900 euros par jour de retard à compter de la signification de l’arrêt à intervenir ;
– en toutes hypothèses, condamne les sociétés [Localité 6] et [N] Vins d’Ardèche aux entiers dépens et à lui verser la somme de 8 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
L’instruction de l’affaire a été close par ordonnance en date du 26 septembre 2023.
Par soit-transmis en date du 16 octobre 2023, la cour a informé les conseils des parties qu’elle s’interrogeait sur la question sur la recevabilité de la demande de communication de pièces formulée par l’intimée dans ses dernières conclusions alors que, dans les premières, transmises dans le délai de l’article 905-2 du code de procédure civile, elle n’y figurait pas, la SA [N] et Fils s’étant alors contentée de former un appel incident sur le rejet de sa demande d’expertise. Elle leur a donc laissé un délai, expirant le 26 octobre suivant à minuit, pour lui présenter leurs observation par le truchement de notes en délibéré.
Par note en délibéré transmise le 18 octobre 2023, le conseil de la SA [N] et Fils a fait valoir que cette demande de communication de pièces s’analysait comme une ‘évolution’ de sa demande d’expertise formulée dans ses premières conclusions et qu’en tout état de cause il ne s’agissait pas d’une demande nouvelle puisque tendant aux mêmes fins (que la première).
Par note en délibéré transmise le 25 octobre 2023, le conseil des SAS [N] Vins d’Ardèche et [Localité 6] réplique que la demande de communication de pièces forcée constitue bien une demande nouvelle irrecevable et le fait que cette demande tende aux mêmes fins que celle soumise au premier juge est sans emport sur la sanction objective de l’article 910-4 du code de procédure civile selon lequel, à peine d’irrecevabilité relevée d’office, les parties doivent présenter, dès les conclusions mentionnées aux articles 905-2, et 908 à 910, l’ensemble de leurs prétentions au fond.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Il convient de rappeler, à titre liminaire, que la cour n’est pas tenue de statuer sur les demandes de ‘constater’, ‘donner acte’, ‘dire et juger’ ou ‘déclarer’ qui, sauf dispositions légales spécifiques, ne sont pas des prétentions, en ce qu’elles ne sont pas susceptibles d’emporter des conséquences juridiques, mais des moyens qui ne figurent que par erreur dans le dispositif, plutôt que dans la partie discussion des conclusions d’appel.
Sur recevabilité la demande de caducité de la déclaration d’appel devenue demande de confirmation de droit de la décision de première instance
Dans le dispositif de leurs dernières conclusions, les appelantes demandent à la cour de déclarer irrecevables toute demande de caducité de l’appel pour n’avoir pas été présentée dans le premier jeu de conclusions. Ce faisant, elles commettent une erreur puisque ce qui est sollicité, sur le même moyen, n’est pas la caducité de la déclaration d’appel mais la confirmation de l’ordonnance entreprise.
Par conclusions d’incident transmises le 12 décembre 2022, la SAS [N] et Fils sollicitait du président de chambre qu’il prononce la caducité de la déclaration d’appel au motif que, dans le dispositif de leurs premières conclusions notifiées le 14 novembre 2022, les SAS [Localité 6] et [N] Vins d’Ardèche se bornaient à solliciter l’infirmation partielle de l’ordonnance du 29 septembre 2022, sans préciser les chefs de l’ordonnance dont l’infirmation était concrètement sollicitée.
La conseillère déléguée de la chambre 1-2 a rejeté cette demande, fondée sur les dispositions des articles 542, 562 et 954 du code de procédure civile, au motif qu’elle relevait de la cour. Son ordonnance, rendue le 14 septembre 2023, n’a pas été déférée à la cour par application des dispositions de l’article 916 du code de procédure civile.
Elle constituait néanmoins un évènement nouveau qui permettait à l’intimée de reprendre cette prétention (caducité de la déclaration d’appel ou confirmation de droit de l’ordonnance entreprise) dans ses conclusions d’intimée n° 3, du 15 septembre 2023, et ce, même si elles ne l’avait pas fait dans ses premières écritures au fond déposées le 12 décembre 2022 et donc concomitamment aux conclusions d’incident précitées.
En effet, la question des conséquences à tirer de l’absence de reprise, dans les premières conclusions, des chefs de l’ordonnance critiqués a été mise dans les débats dans le délai pour conclure de l’article 905-2 du code de procédure civile et, formulée par voie d’incident, elle n’avait pas à figurer dans les premières conclusions au fond de l’intimée.
En outre, dans deux arrêts en date des 17 septembre 2020 et 9 septembre 2021, la deuxième chambre civile de la cour de cassation a jugé que l’absence de demande d’infirmation de la décision déférée pouvait être sanctionnée soit par la caducité de la déclaration d’appel soit par la confirmation de l’ordonnance entreprise en sorte que, dans ses conclusions au fond n° 3, du 15 septembre 2023, la SA [N] et Fils pouvait opter pour la confirmation de l’ordonnance entreprise en lieu et place de la caducité de la déclaration d’appel. Elle pouvait d’autant plus le faire que, dans le second des arrêts précités, la haute juridiction a ajouté l’option de la caducité dans le seul dessein de donner compétence au conseiller de la mise en état pour purger, ab initio, ce type de difficulté et donc pour éviter aux parties de mener à son terme un appel irrémédiablement dénué de toute portée pour son auteur.
La demande de confirmation de l’ordonnance entreprise pour non respect des dispositions des articles 542, 562 et 954 du code de procédure civile sera donc déclarée recevable.
Sur la demande de confirmation de l’ordonnance entreprise pour non respect des dispositions des articles 542, 562 et 954 du code de procédure civile
Aux termes de l’article 542 du code de procédure civile, l’appel tend, par la critique du jugement rendu par une juridiction du premier degré, à sa réformation ou à son annulation par la cour d’appel.
Par application des dispositions de l’article 562 alinéa 1 du même code, l’appel défère à la cour la connaissance des chefs de jugement qu’il critique expressément et de ceux qui en dépendent.
Enfin, l’article 954 dispose :
Les conclusions d’appel contiennent, en en-tête, les indications prévues à l’article 961. Elles doivent formuler expressément les prétentions des parties et les moyens de fait et de droit sur lesquels chacune de ces prétentions est fondée avec indication pour chaque prétention des pièces invoquées et de leur numérotation. Un bordereau récapitulatif des pièces est annexé.
Les conclusions comprennent distinctement un exposé des faits et de la procédure, l’énoncé des chefs de jugement critiqués, une discussion des prétentions et des moyens ainsi qu’un dispositif récapitulant les prétentions. Si, dans la discussion, des moyens nouveaux par rapport aux précédentes écritures sont invoqués au soutien des prétentions, ils sont présentés de manière formellement distincte.
La cour ne statue que sur les prétentions énoncées au dispositif et n’examine les moyens au soutien de ces prétentions que s’ils sont invoqués dans la discussion.
Les parties doivent reprendre, dans leurs dernières écritures, les prétentions et moyens précédemment présentés ou invoqués dans leurs conclusions antérieures. A défaut, elles sont réputées les avoir abandonnés et la cour ne statue que sur les dernières conclusions déposées.
La partie qui conclut à l’infirmation du jugement doit expressément énoncer les moyens qu’elle invoque sans pouvoir procéder par voie de référence à ses conclusions de première instance.
La partie qui ne conclut pas ou qui, sans énoncer de nouveaux moyens, demande la confirmation du jugement est réputée s’en approprier les motifs.
Par application des dispositions de ces textes, l’appelant, qui poursuit la réformation du jugement dont appel, doit, dans le dispositif de ses conclusions, d’une part, mentionner qu’il demande l’infirmation du jugement et, d’autre part, formuler une ou des prétentions. En revanche, il n’est pas exigé, comme soutenu par l’intimée, qu’il précise, dans le dispositif, les chefs du dispositif du jugement dont il est demandé l’infirmation (Civ 2, 3 mars 2022, n° 20-20.017).
En l’espèce, dans leur déclaration d’appel transmise le 27 octobre 2022, les SAS [Localité 6] et [N] Vins d’Ardèches ont expressément cité et donc critiqué chacune des dispositions de l’ordonnance entreprise qui leur faisait grief. Elles ont donc parfaitement défini l’objet de leur appel.
Dans toutes leurs conclusions au fond subséquentes, à commencer par les premières, transmises le 14 novembre 2022, elles ont systématiquement demandé à la cour d’infirmer partiellement l’ordonnance entreprise avant de formuler leurs prétentions. Comme indiqué supra, elles n’avaient pas à reprendre les chefs de l’ordonnance critiquée qu’elles avaient énoncés dans la déclaration d’appel signifiée à l’intimée le 14 novembre 2022.
La demande de confirmation de l’ordonnance entreprise fondée sur l’absence de mention dans le dispositif des conclusions des appelantes des chefs de l’ordonnance critiqués sera donc rejetée.
Sur l’appel principal et les demandes reconventionnelles
Aux termes de l’article 835 alinéa 1 du code de procédure civile, le président du tribunal judiciaire ou le juge du contentieux de la protection dans les limites de sa compétence peuvent toujours, même en présence d’une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s’imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite.
Le trouble manifestement illicite visé par ce texte désigne toute perturbation résultant d’un fait matériel ou juridique qui, directement ou indirectement, constitue une violation évidente de la règle de droit. Pour en apprécier la réalité, la cour d’appel, statuant en référé, doit se placer au jour où le premier juge a rendu sa décision et non au jour où elle statue. Enfin, le juge des référés apprécie souverainement le choix de la mesure propre à faire cesser le trouble qu’il constate.
En l’espèce, la SA [N] et Fils verse aux débats une facture n° F0857, du Studio W portant sur la ‘Création graphique d’une nouvelle gamme d’étiquette, Forfait traitement image, Bon à tirer/Maquettes/Frais techniques, Déclinaison : ‘S’téphane, ‘D’avid, ‘M’arjorie, ‘G’régory, Contre étiquettes, Visuel Carton’. D’un montant de 1 140 euros, elle a été établie le 22 février 2014 à l’ordre du ‘[Adresse 3]’, adresse de l’intimée.
Il n’est pas contesté que lesdites étiquettes correspondent à celles objet du présent litige, qui recouvrent, depuis 2014, les bouteilles produites SA [N] et Fils, sous le label ‘Grange de [Localité 7]’, et qui, pour certaines, ont été commercialisées par la SAS [N] Vins d’Ardèche dans le cadre des accords commerciaux liant ces deux sociétés.
Il s’induit, avec l’évidence requise en référé, du libellé de la facture sus-détaillée ainsi que de l’usage public et paisible que la SA [N] et Fils a fait de ce graphisme et/ou design pendant plus de 7 ans, que la société Studio W, designer, a bien entendu céder ses droits d’auteur à l’intimée moyennant la somme de 1 140 euros, honoraires de ‘création’ inclus.
Pour se prétendre seule et unique propriétaire des droits d’auteurs relatif au mêmes étiquettes, et donc de son droit exclusif de les utiliser sous le label, très voisin, de ‘Grange des Vignes’, la SAS [N] Vin d’Ardèche se prévaut d’un ‘contrat de cession de droit d’auteur sur quatre oeuvres graphiques pour étiquettes de vin’ signé, le 23 octobre 2021, avec Mme [W] [J] du Studio W. Elle ajoute que M. [V] [N], président de la SAS [N] et Fils et directeur général de la SAS [N] Vin d’Ardèche, aurait donné son accord à une telle cession, ce dont attesterait le fait qu’il aurait cosigné le chèque de règlement de Studio W, d’un montant de 500 euros et donc relativement faible.
Outre le fait que M. [V] [N] dément avoir donné tout accord sur le sujet et, ce faisant, avoir signé le chèque précité, sur lequel sa signature, extrêmement stylisée (un simple V, prolongé sur sa seconde branche et souligné d’un trait) aurait très aisément pu être contrefaite, la cour ne peut que constater qu’à l’époque, les deux frères étaient déjà en conflit, [P] ayant par ailleurs licencié sa soeur [G]. L’on voit dès lors mal comment [V] aurait pu donner son accord pour une cession de droits sur lesquels sa société avait l’antériorité et qui ne pouvait que se traduire, comme les photographies versées aux débats et la plainte de M.[K] [T] (courriel du 3 janvier 2022) en attestent, par une confusion dans l’esprit des distributeurs et clients, entre la production de la société [N] et Fils, viticulteur, et les produits assemblés et/ou conditionnés par la société [N] Vin d’Alsace et ce, au détriment de la première des personnes morales précitées.
En outre, dans l’attestation qu’elle a établie le 11 novembre 2022, Mme [B] ajoute à la confusion dans la mesure où elle précise que lesdites étiquettes, cédées en 2021 à M. [P] [N], ont été crées entre octobre 2013 et février 2014 et donc à une époque où le label ‘Grange des Vignes’ n’existait pas. Du reste, le fait qu’elle affirme que pour (les) concevoir, (elle a) travaillé en étroite collaboration avec M. [P] [N] et M. [H] [A] (employé de la SAS [N] Vins d’Alsace) n’apporte rien en termes de titularité des droits d’auteurs puisque :
– d’une part, la SAS [N] Vins d’Ardèche commercialisait les vins de la SAS [N] et Fils et que, dans le cadre des accords commerciaux liant les deux sociétés, M. [P] [N] pouvait représenter cette dernière dans les actes de distribution de ces produits, y compris la conception d’étiquettes
– d’autre part, il n’est pas contestable, que c’est l’intimée qui, la première, a règlé le 22 février 2014 les frais de création et cession des droits d’auteur relatifs aux dites étiquettes.
Au demeurant, Mme [B] elle-même valide cette analyse lorsqu’elle écrit, en conclusion de ladite attestation : Je précise que la dénomination initiale ‘Grange de [Localité 7]’ a été remplacée par ‘Grange des Vignes’ à la demande de M. [P] [N] sur l’ensemble des étiquettes. Or comme l’a rappelé l’INPI, dans sa décision du 10 juin 2022, seule la SA [N] et Fils peut utiliser le terme ‘de [Localité 7]’ ce dernier étant consbstantiel à la marque ‘[Adresse 2]’.
Il résulte, avec l’évidence requise en référé, de l’ensemble de ces éléments que, nonobstant les manoeuvres auxquelles la SAS [N] Vins d’Ardèche s’est livrée, avec l’étonnante participation de la gérante de la société Studio W, la société [N] et Fils est titulaire depuis février 2014, et donc antérieurement à la cession dont se prévalent les appelantes, des droits d’auteur sur les étiquettes litigieuses.
C’est donc par des motifs pertinents que le premier juge a considéré que les actes de contrefaçons ainsi caractérisés par leur utilsation par la SAS [N] Vins d’Ardèche étaient constitutifs d’un trouble manifestement illicite qu’il convenait de faire cesser. L’ordonnance entreprise sera donc confirmée en ce qu’elle a :
– jugé que le vin de la ‘cuvée M’ produit et distribué par les sociétés [Localité 6] et [N] Vins d’Ardèche est une contrefaçon du vin de la ‘cuvée M’ produit par la Société [N] et fils ;
– fait, en conséquence, injonction aux Sociétés [Localité 6] et [N] Vins d’Ardèche de cesser, sous astreinte globale de 600 euros par jour de retard à compter de la signification de la présente ordonnance, la production et la diffusion d’un vin sous le nom de la cuvée ‘Grange des Vignes’ au titre des cuvées et/ou ‘Champs de Lierre’ reprenant l’ensemble du design et du graphisme du vin des cuvées” M ” ” S ” ” D” et ” G ” de la société [N] et Fils et de manière générale tout produit contrefaisant portant l’appellation ‘[Localité 7]’ qui ne proviendrait pas de la production de la Société [N] et fils et de le retirer de la vente.
Elle le sera également en ce qu’elle a rejeté la demande reconventionnelle de la SAS [N] Vins d’Alsace de dommages et intérêts pour procédure abusive.
Enfin, à supposer qu’il ne s’agisse pas d’une demande nouvelle en cause d’appel, au vu des dispositions de l’article 566 du code de procédure civile, les SAS [N] Vins d’Alsace et [Localité 6], qui succombent en cause d’appel, ne peuvent, au vu des développements qui précèdent qu’être déboutée de leur demande reconventionnnelle visant à condamner la société [N] et Fils à cesser, sous astreinte de 1 500 euros par jour de retard, toute commercialisation de vins avec étiquettes identique reproduisant servilement les étiquettes dont la SAS [N] Vins d’Alsace prétend avoir acquis les droits d’auteur.
Sur la demande de communication de pièces
Aux termes de l’article 564 dispose qu’à peine d’irrecevabilité soulevée d’office, les parties ne peuvent soumettre à la cour de nouvelles demandes si ce n’est pour opposer compensation, faire écarter les prétentions adverses ou faire juger les questions nées de l’intervention d’un tiers ou de la révélation d’un fait.
L’article 565 dispose que les prétentions ne sont pas nouvelles dès lors qu’elles tendent aux mêmes fins que celles soumises au premier juge, même si leur fondement juridique est différent.
L’article 566 précise que les parties ne peuvent ajouter aux prétentions soumises au premier juge que les demandes qui en sont l’accessoire, la conséquence ou le complément nécessaire.
Aux termes de l’article 910-4 alinéa 1 du code de procédure civile, à peine d’irrecevabilité relevée d’office, les parties doivent présenter, dès les conclusions mentionnées aux articles 905-2 et 908 à 910, l’ensemble de leurs prétentions sur le fond.
Par application des dispositions de l’article 905-2 du code de procédure civile, à peine de caducité de la déclaration d’appel, relevée d’office par ordonnance du président de la chambre saisie ou du magistrat désigné par le premier président, l’appelant dispose d’un délai d’un mois, à compter de la réception de l’avis de fixation de l’affaire à bref délai pour remettre ses conclusions au greffe.
Il n’est pas contesté que dans ses premières conclusions ‘au fond’, transmises et notifiées le 12 décembre 2022 et qui ont figé ses prétentions par application des articles 905-2 et 910-4 précité du code de procédure civile, la SA [N] et Fils a formé un appel incident à l’encontre de l’ordonnance entreprise en ce qu’elle a en ce qu’elle a rejeté les autres demandes de la société DUPRE ET FILS, notamment sur la demande d’expertise judiciaire aux fins de chiffrer le préjudice subi du fait des agissements reprochés sur le parasitisme et/ou la contrefaçon.
Elle a alors sollicité de la cour qu’elle statue à nouveau de ces chefs et :
– constate (qu’elle) a subi un préjudice économique résultant des actes de parasitisme opérés par les sociétés [N] Vins d’Ardèche et [Localité 6] ;
– désigne, en conséquence, tel expert-comptable qu’il plaira à la juridiction de céans afin d’établir (son) préjudice économique … résultant des actes de parasitisme et/ou de contrefaçon opérés par les sociétés [N] Vins d’Ardèche et [Localité 6].
Néanmoins dans ses dernières conclusions du 15 septembre 2023, elle a abandonné sa demande d’expertise pour y substituer une demande de communications de pièces à l’encontre de chacune des sociétés appelantes. Cette prétention, nouvelle par rapport à ses premières conclusions déposées dans le délai de l’article 905-2 du code de procédure civile (soit le 12 décembre 2022), est donc irrecevable, par application des dispositions précitées de l’article 910-4, et donc, sans qu’il soit nécessaire de s’interroger sur le fait de savoir s’il s’agit, à l’aune des articles 564 à 566, d’une prétention nouvelle en cause d’appel.
Sur l’article 700 du code de procédure civile et les dépens
Il convient de confirmer l’ordonnance déférée en ce qu’elle a condamné les sociétés [N] Vins d’Ardèche et [Localité 6] aux dépens et à payer à la société [N] et Fils une indemnité de 1 500 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.
Les SAS [N] Vins d’Ardèche et [Localité 6] qui succombent au litige, seront déboutées de leur demande formulée sur le fondement de ce texte. Il serait en revanche inéquitable de laisser à la charge de l’intimée les frais non compris dans les dépens, qu’elle a exposés pour sa défense. Il lui sera donc alloué une somme de 5 000 euros en cause d’appel.
Les SAS [N] Vins d’Ardèche et [Localité 6] supporteront en outre les dépens de la procédure d’appel.
PAR CES MOTIFS
La cour,
Statuant dans les limites de l’appel ;
Déclare recevable la demande de confirmation de l’ordonnance entreprise pour non respect des dispositions des articles 542, 562 et 954 du code de procédure civile ;
Rejette la demande de confirmation de l’ordonnance entreprise fondée sur le simple non respect dispositions des articles 542, 562 et 954 du code de procédure civile ;
Confirme l’ordonnance entreprise en toutes ses dispositions déférées ;
Y ajoutant,
Dit n’y avoir lieu à référé sur la demande reconventionnnelle des SAS [N] Vins d’Ardèche et [Localité 6] visant à condamner la société [N] et Fils à cesser, sous astreinte de 1 500 euros par jour de retard, toute commercialisation de vins avec étiquettes identiques reproduisant les étiquettes dont la SAS [N] Vins d’Ardèche prétend avoir acquis les droits d’auteur ;
Déclare irrecevables les demandes de communication de pièces formulées par la SAS [N] et Fils à l’encontre des SAS [N] Vins d’Ardèche et [Localité 6] ;
Condamne in solidum les SAS [N] Vins d’Ardèche et [Localité 6] à payer à la SAS [N] et Fils la somme de 5 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;
Déboute les SAS [N] Vins d’Ardèche et [Localité 6] de leur demande sur ce même fondement ;
Condamne in solidum les SAS [N] Vins d’Ardèche et [Localité 6] aux dépens d’appel.
La greffière Le président