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Texte intégral
Le Conseil constitutionnel,
Vu l’article 59 de la Constitution ;
Vu l’ordonnance du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ;
Vu l’ordonnance du 13 octobre 1958 relative à l’élection des députés à l’Assemblée nationale ;
Vu l’ordonnance du 16 octobre 1958 relative à l’élection des députés à l’Assemblée nationale dans les départements d’Algérie, modifiée par l’ordonnance du 14 novembre 1958 ;
Vu le décret du 12 mai 1951 ;
Vu le Code électoral ;
Vu la requête présentée pour le sieur Gilbert Saramite, demeurant 20, rue Séguy-Villevaleix, à Constantine (Algérie), ladite requête enregistrée au secrétariat général du Conseil constitutionnel, le 23 juillet 1959, et tendant à ce qu’il plaise au Conseil constitutionnel statuer sur les opérations électorales auxquelles il a été procédé les 10, 11 et 12 juillet 1959 dans la 14e circonscription d’Algérie pour la désignation d’un député à l’Assemblée nationale ;
Vu le mémoire en défense présenté pour le sieur Roger Roth, député maire de Philippeville, demeurant 34, rue Clemenceau, à Philippeville (Algérie), ledit mémoire enregistré le 21 août 1959 au secrétariat du Conseil constitutionnel ;
Vu les procès-verbaux de l’élection ;
Vu les autres pièces produites et jointes au dossier ;
Oui le rapporteur en son rapport ;
Sur la recevabilité de la requête :
Sur la recevabilité de la requête :
1. Considérant que la requête du sieur Saramite a été enregistrée, le 23 juillet 1959. au secrétariat général du Conseil constitutionnel, soit avant l’expiration du délai imparti pour la présentation des requêtes par l’article 33 de l’ordonnance du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ; que, dès lors, elle est recevable ;
Sur les griefs tirés des imputations portées, par voie de presse, contre le requérant :
2. Considérant que le sieur Saramite soutient qu’il a été victime d’une campagne de presse imputable au sieur Roth, excédant par sa violence les limites de la polémique électorale ;
3. Considérant qu’il résulte des pièces du dossier que les articles publiés pendant la campagne électorale dans le journal l’Intransigeant, qui soutenait la candidature du sieur Roth ont comporté des mentions injurieuses à l’égard du requérant ;
4. Mais considérant que des attaques violentes et injurieuses ont été portées contre le sieur Roth tant par le journal la Dépêche de Constantine, dont la diffusion était largement assurée dans l’ensemble de la 14e circonscription d’Algérie que par une publication occasionnelle consacrée au soutien de la candidature du sieur Saramite et disposant des mêmes moyens de diffusion que le journal susmentionné ;
5. Considérant que, dans ces conditions et si regrettables qu’aient été les excès de cette polémique, le requérant n’est pas fondé à soutenir que les imputations portées contre lui par le journal l’Intransigeant aient pu – eu égard à la faible diffusion de ce journal, limitée au canton de Philippeville – exercer une influence suffisante sur les opérations électorales pour en modifier le résultat ;
Sur les griefs tirés de prétendues pressions :
6. Considérant que, si la présence à l’inauguration de la foire-exposition de tinois et de personnalités civiles et militaires de la circonscription était, en Philippeville, le 25 juin 1959, du Général commandant la zone du Nord constan-période de campagne électorale, inopportune, cette manifestation commerciale avait été décidée antérieurement aux élections sénatoriales à la suite desquelles un siège de député s’est trouvé vacant dans la circonscription ; que la présence des autorités susmentionnées ne peut, dans les circonstances de l’espèce, être regardée comme un acte de pression de l’autorité civile et militaire en faveur de la candidature du sieur Roth ;
7. Considérant que, s’il n’est pas contesté que dans certains centres ruraux, et notamment à Saint-Charles, l’autorité militaire a demandé aux propriétaires de camions automobiles d’assurer le transport des électeurs de leur domicile aux bureaux de vote, ce fait n’est pas, à lui seul et alors que le requérant n’apporte aucun commencement de preuve de l’existence de fraudes commises à l’occasion de ces transports, de nature à entacher d’irrégularités les opérations électorales ;
8. Considérant qu’à le supposer établi, le fait que les officiers commandant respectivement les sections administratives spéciales de Lannoy et de Mila aient personnellement assisté au déroulement des opérations électorales dans un des bureaux de vote de leur secteur, ne saurait, en l’absence de toute allégation précise de fraude, être regardé comme ayant porté atteinte à la sincérité du scrutin dans ces bureaux de vote ;
9. Considérant que les allégations du requérant selon lesquelles, d’une part, une opération d’encerclement du centre d’El-Arrouch aurait été effectuée par des éléments armés en vue de faire pression sur les électeurs de cette localité, d’autre part, des forces supplétives seraient intervenues dans le même but, tant dans l’annexe de la section administrative urbaine de Bouabaz que dans la localité de Béni-Béchir, ne sont pas établies et sont formellement démenties, de façon précise et pertinente, par les autorités civiles et militaires ;
10. Considérant enfin qu’il résulte des pièces du dossier que les distributions de vivres effectuées au cours de la campagne électorale par le bureau de bienfaisance de Philippeville, n’ont excédé, ni par leur quantité ni par le nombre des bénéficiaires, l’importance des distributions faites au cours de chacun des mois précédents ; qu’ainsi le grief tiré de ce que ces distributions auraient constitué un moyen de pression sur certains électeurs, ne peut être retenu ;
Sur le grief tiré de l’appel lancé par le Président de l’Association, cultuelle musulmane de Philippeville en faveur du sieur Roth :
11. Considérant qu’il n’est pas contesté que le Président de l’Association cultuelle musulmane de Philippeville a signé un appel publié dans l’Intransigeant, le 8 juillet 1959, invitant ses coreligionnaires à porter leurs vairs sur le candidat Roth ; qu’il n’apparaît pas, dans les circonstances de l’affaire ; que ledit appel ait été de nature à exercer une influence sur les résultats des opération électorales dans la ville de Philippeville ;
Sur les griefs tirés d’irrégularités commises au cours des opérations de vote :
12. Considérant que le sieur Saramite soutient que l’heure d’ouverture de certains bureaux de vote aurait été illégalement avancée ; qu’il résulte de l’instruction que ces décisions ont été prises dans le cadre de la réglementation en vigueur en vue de faciliter la participation au scrutin des travailleurs agricoles ;
13. Considérant que le refus opposé par les présidents de trois bureaux de vote d’autoriser l’accès des délégués du requérant dans lesdits bureaux de vote, était motivé par le fait que la liste de ces délégués ne leur avait pas été, comme l’exige le décret du 12 mai 1951, notifiée au moins vingt-quatre heures avant l’ouverture du scrutin ;
14. Considérant que, s’il résulte de l’instruction que des incidents se sont produits au cours des opérations électorales à proximité de certains bureaux de vote de Philippeville ainsi qu’à Saint-Charles, le requérant n’apporte aucun commencement de preuve tendant à établir que des fraudes en soient résultées ni que ces faits dépourvus de gravité aient eu pour effet d’attribuer des voix au sieur Roth, alors surtout que Certains incidents imputables aux partisans du sieur Saramite se sont également produits ;
15. Considérant enfin qu’il n’est pas justifié que des irrégularités aient été commises dans la distribution des cartes d’électeurs au bureau de Bou-Taïeb ; que, si des irrégularités ont été constatées dans un autre bureau en ce qui concerne notamment la remise des bulletins de vote, elles n’ont pu – eu égard au très faible nombre d’électeurs inscrits dans ces bureaux – exercer une influence suffisante sur l’ensemble des opérations électorales pour en modifier le résultat ;
16. Considérant que de tout ce qui précède et compte tenu de l’écart important des voix, il résulte que les divers griefs invoqués par le sieur Saramite ne sont pas de nature à justifier l’annulation de l’élection du sieur Roth ;
Décide :
Article premier :
La requête du sieur Saramite est rejetée.
Article 2 :
La présente décision sera notifiée au président de l’Assemblée nationale et publiée au Journal officiel de la République française.
ECLI:FR:CC:1959:59.232.AN