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SOC.
OR
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 9 novembre 2022
Cassation partielle
Mme MARIETTE, conseiller doyen
faisant fonction de président
Arrêt n° 1158 F-D
Pourvoi n° U 20-16.542
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 9 NOVEMBRE 2022
La société Hydrola, société à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 2], a formé le pourvoi n° U 20-16.542 contre l’arrêt rendu le 18 décembre 2019 par la cour d’appel de Lyon (chambre sociale A), dans le litige l’opposant :
1°/ à M. [M] [X], domicilié [Adresse 3],
2°/ à Pôle emploi Auvergne Rhône-Alpes, dont le siège est [Adresse 1],
défendeurs à la cassation.
M. [X] a formé un pourvoi incident contre le même arrêt.
La demanderesse au pourvoi principal invoque, à l’appui de son recours, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.
Le demandeur au pourvoi incident invoque, à l’appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation également annexés au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Seguy, conseiller, les observations de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat de la société Hydrola, de la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat de M. [X], après débats en l’audience publique du 20 septembre 2022 où étaient présents Mme Mariette, conseiller doyen faisant fonction de président, M. Seguy, conseiller rapporteur, Mme Le Lay, conseiller, et Mme Jouanneau, greffier de chambre,
la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l’arrêt attaqué (Lyon, 18 décembre 2019) et les productions, M. [X] a été engagé à compter du 1er octobre 2009 en qualité de responsable commercial export Maghreb par la société Hydrola (la société).
2. Il a été convoqué, le 9 juillet 2014, à un entretien préalable à un licenciement pour motif économique fixé le 18 juillet 2014, reporté au 21 juillet 2014, au cours duquel il lui a été proposé un contrat de sécurisation professionnelle. A l’issue de cet entretien, il s’est vu remettre une lettre lui notifiant le motif économique de la rupture en lui précisant qu’en cas d’adhésion au dispositif son contrat de travail serait rompu à l’issue du délai de réflexion de 21 jours, soit le 11 août 2014.
3. Après avoir accepté, le 31 juillet 2014, le contrat de sécurisation professionnelle, il a saisi la juridiction prud’homale pour contester cette rupture et obtenir paiement de diverses sommes.
Examen des moyens
Sur le premier moyen du pourvoi incident
Enoncé du moyen
4. Le salarié fait grief à l’arrêt de rejeter sa demande de condamnation de la société au paiement de dommages-intérêts au titre des objectifs de 2014, alors « qu’il dénonçait dans ses écritures d’appel le procédé déloyal de la société Hydrola qui, en 2014, avait non seulement augmenté substantiellement ses objectifs mais encore les avait subordonnés au résultat collectif ; que la cour d’appel qui a constaté qu’il n’avait perçu aucune commission sur les deux premiers trimestres de 2014 n’a pas recherché, comme elle y était invitée, si cette décision unilatérale de l’employeur ne constituait pas un procédé déloyal justifiant la demande de dommages-intérêts formée par le salarié a privé sa décision de motifs sur ce moyen déterminant et a violé l’article 455 du code de procédure civile. »
Réponse de la Cour
5. Ayant relevé que le salarié, qui avait signé et accepté sa fiche d’objectifs pour l’année 2014 modifiant les modalités de calcul de sa rémunération variable, ne démontrait pas les pressions alléguées l’ayant contraint à accepter cet avenant non plus que le caractère irréaliste de ces objectifs, la cour d’appel, qui n’avait pas à procéder à une recherche que ses constatations rendaient inopérante, a, par ces seuls motifs, légalement justifié sa décision.
6. Le moyen n’est donc pas fondé.
Sur le second moyen du pourvoi incident
Enoncé du moyen
7. Le salarié fait grief à l’arrêt de le débouter de sa demande de condamnation de la société au paiement de dommages-intérêts au titre du recours abusif au chômage partiel et du travail dissimulé, alors « qu’il faisait valoir dans ses conclusions d’appel que pendant la période de chômage partiel imposée par l’employeur, il avait en réalité dû travailler à temps plein sans être rémunéré en conséquence, ce qui était constitutif de travail dissimulé ; que la cour d’appel qui s’est bornée à énoncer que la mesure de chômage partiel apparaissait bien fondée et n’avait fait l’objet d’aucune contestation du délégué du personnel ni d’alerte auprès de l’inspection du travail a entaché sa décision d’un défaut de motifs et violé l’article 455 du code de procédure civile. »
Réponse de la Cour
8. La cour d’appel, qui a relevé, par une appréciation souveraine des éléments de fait et de preuve qui lui étaient soumis, que les témoignages de salariés affirmant avoir été obligés de travailler à temps plein sous peine de sanction ainsi que les courriels envoyés par l’intéressé en avril 2014 postérieurement à l’horaire de fin de journée ne permettaient pas de remettre en cause le bien-fondé de la mesure de chômage partiel mise en oeuvre de mars 2014 à septembre 2014 avec l’acceptation préalable de la direction régionale des entreprises de la concurrence, de la consommation, du travail et de l’emploi, ainsi qu’avec l’avis favorable du délégué du personnel, lequel n’avait pas réagi, et que les salariés n’avaient pas alerté l’inspection du travail, a fait ainsi ressortir que la société n’avait pas eu recours abusivement au chômage partiel sur la période considérée.
9. Le moyen n’est donc pas fondé.
Mais sur le moyen du pourvoi principal, pris en sa troisième branche
Enoncé du moyen
10. La société fait grief à l’arrêt de dire le licenciement sans cause réelle et sérieuse, de la condamner à verser au salarié des sommes à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile pour les procédures d’instance et d’appel, et à rembourser aux organismes concernés la totalité des indemnités de chômage versées au salarié du jour de son licenciement au jour du jugement, dans la limite de trois mois d’indemnités, alors « que l’employeur n’a pas à différer le licenciement économique d’un salarié afin de pouvoir lui proposer, au titre du reclassement, des postes qui n’ont été à pourvoir que postérieurement à la rupture de son contrat de travail ; qu’en l’espèce, la cour d’appel a retenu que compte tenu de la proximité de dates entre le licenciement et la proposition de postes au titre de la priorité de réembauchage, l’employeur ne justifiait pas de la bonne exécution de son obligation de reclassement faute de démontrer qu’il n’aurait pas pu prolonger la période de recherche de reclassement pour éviter le licenciement de M. [X], sachant qu’il allait prochainement créer des postes en rapport avec la qualification de M. [X] et embaucher dans sa filiale tunisienne ; qu’en statuant ainsi, la cour d’appel a violé l’article L. 1233-4 du code du travail dans sa version applicable au litige. »
Réponse de la Cour
Vu les articles L. 1233-4 du code du travail, dans sa rédaction antérieure à la loi n° 2015-990 du 6 août 2015, L. 1233-67 du même code et 5 de la convention Unédic relative au contrat de sécurisation professionnelle du 19 juillet 2011 agréée par arrêté du 6 octobre 2011 :
11. Il résulte de la combinaison de ces textes qu’au titre de son obligation de reclassement l’employeur doit proposer au salarié les emplois disponibles au moment où il manifeste sa volonté de mettre fin au contrat de travail en notifiant la lettre de licenciement, quand bien même le licenciement serait subordonné au refus par le salarié du contrat de sécurisation professionnelle qui lui a été proposé.
12. Pour condamner la société à payer au salarié des dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et à rembourser les indemnités de chômage dans la limite de trois mois, l’arrêt retient que par lettre du 25 août 2014, soit un mois environ après la convocation à l’entretien préalable, et deux semaines après la notification du licenciement, la société a adressé à l’intéressé une liste de postes qu’elle ouvrait dans la filiale de Tunis, dont un poste de responsable commercial Maghreb, lui précisant par lettre du 9 septembre 2014 que ces offres s’inscrivaient dans le cadre de la priorité de réembauchage dont il pouvait bénéficier et qu’elle n’avait pas pu lui proposer ces postes à titre de reclassement car ils n’étaient pas encore créés.
13. Il relève ensuite que, compte-tenu de la proximité des dates, sachant qu’elle allait prochainement créer des postes en rapport avec la qualification du salarié et embaucher dans sa filiale tunisienne, la société ne démontre pas qu’elle n’aurait pas pu prolonger la période de recherche de reclassement pour éviter le licenciement de l’intéressé, de sorte qu’elle n’a pas exécuté loyalement son obligation de reclassement.
14. En statuant ainsi, alors qu’il résultait de ses propres constatations que la lettre de licenciement avait été remise au salarié le 21 juillet 2014 et que les postes dans la filiale tunisienne, et notamment celui de responsable commercial Maghreb à Tunis, ne s’étaient révélés disponibles que postérieurement, la cour d’appel a violé les textes susvisés.
Portée et conséquence de la cassation
15. La cassation des chefs de dispositif condamnant la société à verser au salarié une somme à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et à rembourser aux organismes concernés la totalité des indemnités de chômage versées au salarié dans la limite de trois mois d’indemnités n’emporte pas cassation des chefs de dispositif de l’arrêt condamnant la société aux dépens d’appel ainsi qu’au paiement d’une somme au titre de l’article 700 du code de procédure civile en cause d’appel, justifiés par une autre condamnation prononcée à l’encontre de celle-ci et non remise en cause.
PAR CES MOTIFS, et sans qu’il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :
REJETTE le pourvoi incident ;
CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu’il rejette les demandes de dommages-intérêts formées par M. [X] pour fixation déloyale des objectifs, pour recours abusif au chômage partiel ainsi que sa demande d’indemnité pour travail dissimulé qui y était liée et en ce qu’il condamne la société Hydrola à lui payer les sommes de 200 euros à titre de dommages-intérêts pour absence de maintien des garanties santé et de 1 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile en cause d’appel, l’arrêt rendu le 18 décembre 2019, entre les parties, par la cour d’appel de Lyon ;
Remet, sauf sur ces points, l’affaire et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d’appel de Lyon autrement composée ;
Condamne M. [X] aux dépens ;
En application de l’article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l’arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du neuf novembre deux mille vingt-deux.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt
Moyen produit par la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat aux Conseils, pour la société Hydrola, demanderesse au pourvoi principal
Il est fait grief à la décision attaquée d’AVOIR confirmé le jugement entrepris en ce qu’il avait jugé que la société Hydrola n’avait pas exécuté loyalement l’obligation de reclassement qui lui incombait, que le licenciement de M. [X] est sans cause réelle et sérieuse, condamné la société Hydrola à verser à M. [X] les sommes de 30 000 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et 1500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, débouté la société Hydrola de ses demandes, fins et prétentions, condamné la société Hydrola à rembourser aux organismes concernés la totalité les indemnités de chômage versées à M. [X] du jour de son licenciement au jour du jugement, dans la limite de trois mois d’indemnités, condamné la société Hydrola aux dépens, d’AVOIR dit que l’attestation Pôle emploi et le certificat de travail de M. [X] devront être rectifiés conformément aux dispositions du jugement confirmé par l’arrêt, d’AVOIR condamné la société Hydrola aux dépens d’appel et à payer à M. [X] la somme de 1000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile en cause d’appel ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE « L’article L1233-4 du code du travail dispose que “le licenciement pour motif économique d’un salarié ne peut intervenir que lorsque tous les efforts de formation et d’adaptation ont été réalisés et que le reclassement de l’intéressé ne peut être opéré dans l’entreprise ou dans les entreprises du groupe auquel l’entreprise appartient. Le reclassement du salarié s’effectue sur un emploi relevant de la même catégorie que celui qu’il occupe ou sur un emploi équivalent. À défaut, et sous réserve de l’accord exprès du salarié, le reclassement s’opère sur un emploi d’une catégorie inférieure. Les offres de reclassement proposées au salarié doivent être écrites et précises”. La tentative de reclassement est donc un préalable nécessaire à tout licenciement économique. C’est à l’employeur d’établir la preuve de l’impossibilité d’affecter le salarié dans un autre emploi. Si l’obligation de reclassement n’est qu’une obligation de moyens, encore faut-il que l’employeur démontre avoir mis en oeuvre tous les moyens à sa disposition pour trouver une solution afin d’éviter le licenciement. Lorsque l’employeur n’a pas satisfait à son obligation de reclassement, le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse. M. [X] soutient que l’employeur ne lui a adressé aucune offre de reclassement individualisé, qu’il n’a pas prévu son adaptation à l’un des emplois disponibles, qu’il communique un registre d’entrée et de sortie du personnel incomplet, inexploitable et donc non probant, que plusieurs salariés ont été embauchés courant 2014 jusqu’en 2015 par contrat à durée déterminée au motif annoncé de surcroît temporaire d’activité (M. [P] et M. [D] au poste de chargé d’affaires industrielles pour la période 25 août 2014 au 25 février 2015, M. [C] au poste de technicien hydraulicien pour la période du 28 juillet 2014 au 28 janvier 2015), qu’il incombait incontestablement à la société Hydrola qui dispose d’au moins quatre filiales à l’étranger de rechercher des postes pour le reclasser, ce qu’elle s’est abstenue de faire, que la filiale tunisienne qui aurait été officiellement créée postérieurement à son licenciement a été immatriculée le 12 août 2014, quatre jours avant la notification de son licenciement, qu’un contrat à durée déterminée avait même été rédigé pour l’embauche d’une commerciale par la filiale Hydro Tunis, à compter du 1er juin 2014 et qu’une liste de postes s’ouvrant dans la filiale de TUNIS lui a été adressée quelques jours après son licenciement alors que la plupart de ces postes existaient déjà avant son licenciement, lui-même ayant dû procéder au recrutement. La société Hydrola explique qu’elle a recherché un poste disponible auprès de ses filiales mexicaine et malgache, en l’absence de reclassement interne et de poste disponible en France, que les filiales chinoise et tunisienne ont été créées postérieurement à la rupture du contrat de travail, que la filiale sénégalaise n’emploie plus aucun salarié depuis le mois de janvier 2014, que les documents versés aux débats par M. [X] établissent l’existence de démarches préparatoires légitimes mais ne permettent pas de justifier de la création effective desdits postes avant son licenciement, qu’elle ne pouvait pas proposer au salarié des postes non encore disponibles, qu’il n’y avait aucune certitude que la filiale tunisienne soit créée à la date initialement convenue, compte tenu des spécificités de la législation locale, qu’il ne peut lui être reproché de ne pas avoir proposé à M. [X] des postes pour lesquels il ne disposait pas des compétences et de la formation appropriée (chef comptable, technicien hydraulicien) et que les deux postes de chargé d’affaires industrie n’étaient pas disponibles au moment des faits. Les deux contrats durée déterminée ont été consentis à MM. [P] et [D] le 25 août 2014, postérieurement au licenciement de M. [X], le poste de technicien hydraulicien ne correspond pas à la qualification de ce dernier et la société Hydrola produit : – les lettres envoyées le 12 juillet 2014 à ses filiales de Madagascar et du Mexique et les réponses négatives du 13 juillet 2014 – la liste du personnel de sa filiale mexicaine montrant que trois personnes sur six ont quitté l’entreprise en août 2014 et février 2015 sans être remplacées et que deux personnes travaillaient dans la filiale chinoise comme commercial et assistante depuis le 1er octobre 2014. Toutefois, la copie de deux feuilles de registre du personnel de la société Hydrola en France versée aux débats par la société est très difficilement lisible et ne permet pas de déterminer si des postes étaient disponibles dans l’entreprise à la date du licenciement. Par ailleurs, par lettre du 25 août 2014, soit un mois environ après la convocation à l’entretien préalable, et deux semaines après la notification du licenciement, la société Hydrola a adressé à M. [X] une liste de postes qu’elle ouvrait dans la filiale de Tunis, dont un poste de responsable commercial Maghreb. M. [X] ayant répondu le 1er septembre 2014 qu’il ne comprenait pas comment il pourrait postuler puisqu’il ne faisait plus partie de l’entreprise et pour quel motif il n’avait pas eu de proposition de reclassement lors de son entretien préalable, la société Hydrola lui a précisé le 9 septembre 2014 que ces offres s’inscrivaient dans le cadre de la priorité de réembauchage dont il pouvait bénéficier et qu’elle n’avait pas pu lui proposer ces postes à titre de reclassement car ils n’étaient pas encore créés. Or, compte tenu de la proximité des dates, sachant qu’elle allait prochainement créer des postes en rapport avec la qualification de M. [X] et embaucher dans sa filiale tunisienne, la société Hydrola ne démontre pas qu’elle n’aurait pas pu prolonger la période de recherche de reclassement pour éviter le licenciement de M. [X]. Il importe peu dans ces conditions que M. [X] n’ait pas répondu à la proposition de réembauche. Le jugement qui a dit que la société Hydrola n’avait pas exécuté loyalement son obligation de reclassement à l’égard de M. [X] et, en conséquence, que le licenciement de ce dernier était sans cause réelle et sérieuse, sera confirmé. Au regard des circonstances du licenciement, de l’ancienneté de M. [X] dans l’entreprise (6 ans et 8 mois), de son âge lors de la rupture (28 ans) et de ce qu’il a été indemnisé par Pôle emploi jusqu’en août 2015, date à laquelle il a été embauché par contrat à durée déterminée, puis à durée indéterminée à compter du 1er juin 2015, son premier bulletin de salaire montrant qu’il perçoit à cette date une rémunération inférieure à celle qui lui était versée par la société Hydrola, le préjudice matériel et moral qu’il a subi en raison de la perte de son emploi a été exactement apprécié par le conseil de prud’hommes dont le jugement sera confirmé sur ce point » ;
AUX MOTIFS ÉVENTUELLEMENT ADOPTES QUE l’article L. 1233-4 du code du travail indique « Le licenciement pour motif économique d’un salarié ne peut intervenir que lorsque tous les efforts de formation et d’adaptation ont été réalisés et que le reclassement de l’intéressé ne peut être opéré dans l’entreprise ou dans les entreprises du groupe auquel l’entreprise appartient ; Le reclassement du salarié s’effectue sur un emploi relevant de la même catégorie que celui qu’il occupe ou sur un emploi équivalent. À défaut, et sous réserve de l’accord express du salarié, le reclassement s’effectue sur un emploi d’une catégorie inférieure. Les offres de reclassement proposées au salarié sont écrites et précises » ; que la SARL Hydrola écrit dans la lettre de rupture du 8 août 2014 : « Malgré nos démarches, nos recherches de reclassement au sein de la SARL Hydrola et de ses filiales n’ont donné aucun résultat » ; que la SARL Hydrola écrit dans ses conclusions « avoir recherché un poste disponible auprès de ses filiales mexicaine et malgache » ; que les échanges de courrier produits par la SARL Hydrola confirment cette affirmation ; que la SARL Hydrola explique ensuite que « les filiales chinoises et tunisiennes ont été créées postérieurement à la rupture du contrat de travail de sorte qu’il ne saurait être reproché la SARL Hydrola de ne pas les avoir interrogées en vue du reclassement de M. [X] ; que dans un courrier daté du 9 septembre 2014, la SARL Hydrola écrit à M. [X] n’avoir pu lui proposer de poste en Tunisie “à titre de reclassement et avant la notification de votre licenciement car ces postes n’étaient pas encore créés” ; que dans un mail, daté du 16 avril 2014 et adressé à un représentant de la SARL en Tunisie, le directeur général de la SARL Hydrola écrit que pour Tunis “La mission sera en première urgence de signer le bail” du local qui a été trouvé et pour lequel des travaux sont prévus ; que ce mail se poursuit ainsi (s’agissant du collaborateur en mission sur place) : “Il recevra en entretien d’embauche les candidats” ; que trois mois avant la convocation à entretien préalable de M. [X], des postes étaient disponibles à Tunis puisque des recrutements étaient en cours ; que ce n’est qu’après le licenciement, et sous le prétexte de la priorité de réembauche, que lesdits postes ont été proposés à M. [X] ; que la SARL Hydrola ne peut prétendre que des postes à n’étaient pas disponibles parce que la société n’a été créée qu’en août 2014 alors que les embauches avaient été lancées quelques mois plus tôt à savoir dès avril 2014, ce qui est parfaitement logique ; que la SARL Hydrola aurait dû chercher sérieusement un reclassement en Tunisie d’autant plus que les fonctions de M. [X] au sein de la SARL Hydrola étaient en lien direct avec le Maghreb ; que, de ce qui précède, la SARL Hydrola n’a pas exécuté loyalement l’obligation de reclassement qui lui incombait ; qu’en conséquence le licenciement prononcé est dépourvu de cause réelle et sérieuse » ;
1) ALORS QUE le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ; qu’en affirmant que le registre du personnel versé aux débats était « très difficilement lisible » sans inviter les parties à s’expliquer sur la lisibilité du registre du personnel, aucune difficulté n’ayant été invoquée par elles, la cour d’appel a violé l’article 16 du code de procédure civile ;
2) ALORS QU’en tout état de cause le juge a l’obligation de ne pas dénaturer les documents de la cause ; qu’en l’espèce, la cour d’appel a affirmé que « la copie de deux feuilles de registre du personnel de la société Hydrola en France versée aux débats par la société est très difficilement lisible et ne permet pas de déterminer si des postes étaient disponibles dans l’entreprise à la date du licenciement » (arrêt page 7, al. 4) ; que cependant, la pièce d’appel n° 3 de l’employeur intitulée « registre d’entrées et de sorties du personnel de la Société Hydrola » était lisible sans difficulté et permettait de constater l’absence de poste disponible dans l’entreprise à la date du licenciement comme le soutenait l’employeur en cause d’appel (conclusions page 10) ; qu’il en résulte que la cour d’appel a dénaturé cette pièce en violation du principe susvisé ;
3) ALORS QUE l’employeur n’a pas à différer le licenciement économique d’un salarié afin de pouvoir lui proposer, au titre du reclassement, des postes qui n’ont été à pourvoir que postérieurement à la rupture de son contrat de travail ; qu’en l’espèce, la cour d’appel a retenu que compte tenu de la proximité de dates entre le licenciement et la proposition de postes au titre de la priorité de réembauchage, l’employeur ne justifiait pas de la bonne exécution de son obligation de reclassement faute de démontrer qu’il n’aurait pas pu prolonger la période de recherche de reclassement pour éviter le licenciement de M. [X], sachant qu’il allait prochainement créer des postes en rapport avec la qualification de M. [X] et embaucher dans sa filiale tunisienne ; qu’en statuant ainsi, la cour d’appel a violé l’article L. 1233-4 du code du travail dans sa version applicable au litige ;
4) ALORS QUE, à supposer les motifs des premiers juges adoptés, l’employeur n’est tenu de proposer au titre du reclassement d’un salarié dont le licenciement économique est envisagé que les postes pouvant être effectivement pourvus à l’époque de la rupture ; que particulièrement, il ne peut pas proposer des postes à créer dans une société qui n’existe pas encore au jour de la rupture ; que les postes effectivement créés après la rupture relèvent de la priorité de réembauchage ; qu’en reprochant à l’employeur de ne pas avoir proposé à M. [X] des postes qui n’avaient effectivement été créés qu’avec la naissance, postérieurement au licenciement, de la filiale tunisienne devant procéder aux embauches, au prétexte que dès avant la rupture, la société Hydrola aurait initié un processus de recrutement en recherchant des candidats, les juges du fond ont violé l’article L. 1233-4 du code du travail dans sa version applicable au litige et l’article L.1233-45 du même code ;
5) ALORS QUE, subsidiairement, il ne peut pas être reproché à l’employeur de ne pas avoir proposé au titre du reclassement un poste que le salarié licencié pour motif économique a refusé par la suite au titre de l’obligation de réembauchage ; qu’en l’espèce, la cour d’appel a reproché à l’employeur de ne pas avoir proposé à M. [X] au titre du reclassement des postes créés au Maroc et a affirmé qu’il importait peu que M. [X] n’ait pas répondu à la proposition de réembauchage concernant les mêmes postes (arrêt page 7, al. 7) ; qu’en statuant ainsi, la cour d’appel a violé l’article L. 1233-4 du code du travail dans sa version applicable au litige et l’article L.1233-45 du même code.
Moyens produits par la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat aux Conseils, pour M. [X], demandeur au pourvoi incident
PREMIER MOYEN DE CASSATION
Monsieur [X] fait grief à l’arrêt qu’il attaque d’AVOIR rejeté sa demande tendant à voir la société Hydrola condamnée à lui payer des dommages et intérêts au titre des objectifs de 2014 ;
ALORS QUE Monsieur [X] dénonçait dans ses écritures d’appel le procédé déloyal de la société Hydrola qui, en 2014, avait non seulement augmenté substantiellement ses objectifs mais encore les avait subordonnés au résultat collectif ; que la cour d’appel qui a constaté qu’il n’avait perçu aucune commission sur les deux premiers trimestres de 2014 n’a pas recherché, comme elle y était invitée, si cette décision unilatérale de l’employeur ne constituait pas un procédé déloyal justifiant la demande de dommages et intérêts formée par Monsieur [X] a privé sa décision de motifs sur ce moyen déterminant et a violé l’article 455 du code de procédure civile
SECOND MOYEN DE CASSATION
Monsieur [X] fait grief à l’arrêt attaqué de l’AVOIR débouté de sa demande tendant à voir la société Hydrola condamnée à lui payer des dommages et intérêts au titre du recours abusif au chômage partiel et du travail dissimulé ;
ALORS QUE Monsieur [X] faisait valoir dans ses conclusions d’appel que pendant la période de chômage partiel imposée par l’employeur, il avait en réalité dû travailler à temps plein sans être rémunéré en conséquence, ce qui était constitutif de travail dissimulé ; que la cour d’appel qui s’est bornée à énoncer que la mesure de chômage partiel apparaissait bien fondée et n’avait fait l’objet d’aucune contestation du délégué du personnel ni d’alerte auprès de l’inspection du travail a entaché sa décision d’un défaut de motifs et violé l’article 455 du code de procédure civile ;