Droit d’ester en justice du syndic

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Droit d’ester en justice du syndic
Ce point juridique est utile ?

Aux termes de l’article 55 du décret du 17 mars 1967, le syndic ne peut agir en justice au nom du syndicat sans y avoir été autorisé par une décision de l’assemblée générale, et une telle autorisation n’est pas nécessaire pour les actions en recouvrement de créance, la mise en ‘uvre des voies d’exécution forcée à l’exception de la saisie en vue de la vente d’un lot, les mesures conservatoires et les demandes qui relèvent des pouvoirs de juge des référés, ainsi que pour défendre aux actions intentées contre le syndicat.

Ces dispositions n’exigent pas que, pour interjeter appel, le syndic soit autorisé par l’assemblée générale, que le syndicat ait été demandeur ou défendeur, ainsi que l’a d’ailleurs jugé la Cour de cassation (3e Civ., 8 juin 1992, pourvoi n° 90-10.977 ; 3e Civ., 6 octobre 1993, pourvoi n° 90-18.359 ; 3e Civ., 15 décembre 1993, pourvoi n° 91-20.130).

En l’espèce, il est établi et non contesté que le syndic a été habilité à agir aux fins de faire cesser les nuisances sonores et de réparation des troubles subis. Le syndic pouvait donc, sans habilitation spéciale du syndicat des copropriétaires, interjeter appel du jugement, de sorte que l’appel est recevable.


 

COUR D’APPEL D’ORLÉANS

C H A M B R E C I V I L E

GROSSES + EXPÉDITIONS : le 23/01/2023

la SCP LAVAL – FIRKOWSKI

la SCP VALERIE DESPLANQUES

ARRÊT du : 23 JANVIER 2023

N° : – : N° RG 20/00626 – N° Portalis DBVN-V-B7E-GD7G

DÉCISION ENTREPRISE : Jugement du TJ hors JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP de TOURS en date du 30 Janvier 2020

PARTIES EN CAUSE

APPELANTE :- Timbre fiscal dématérialisé N°: 1265257690498852

LE SYNDICAT DE COPROPRIÉTÉ DE LA RESIDENCE LE [Adresse 6] pris en la personne de son syndic, la Centrale Immobilière, sise [Adresse 3], agissant elle-même poursuites et diligences de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 1]

[Localité 4]

représentée par Me Joanna FIRKOWSKI, de la SCP LAVAL – FIRKOWSKI, avocat postulant au barreau d’ORLEANS et par Me Julien BERBIGIER de la SELARL WALTER & GARANCE AVOCATS, avocat plaidant au barreau de TOURS

D’UNE PART

INTIMÉ : – Timbre fiscal dématérialisé N°: 1265256885148204

COMMUNE DE [Localité 4] agissant en la personne de son Maire en exercice, domicilié en cette qualité à la Mairie de ladite ville

1 à [Adresse 5]

[Adresse 5]

[Localité 4]

représenté par Me Valérie DESPLANQUES de la SCP VALERIE DESPLANQUES, avocat postulant au barreau d’ORLEANS et par Me Hubert VEAUVY, avocat plaidant au barreau de TOURS

D’AUTRE PART

DÉCLARATION D’APPEL en date du :11 Mars 2020

ORDONNANCE DE CLÔTURE du : 25 novembre 2022

COMPOSITION DE LA COUR

Lors des débats, du délibéré :

Madame Anne-Lise COLLOMP,, Président de chambre,

Monsieur Laurent SOUSA, Conseiller,

Madame Laure Aimée GRUA, Magistrat honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles.

Greffier :

Madame Fatima HAJBI, Greffier lors des débats et du prononcé.

DÉBATS :

A l’audience publique du 05 DECEMBRE 2022, à laquelle ont été entendus Monsieur Laurent SOUSA, Conseiller, en son rapport et les avocats des parties en leurs plaidoiries.

ARRÊT :

Prononcé le 23 JANVIER 2023 par mise à la disposition des parties au Greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile.

FAITS ET PROCÉDURE

Entre 2007 et 2008, la société [Localité 4] Promotion devenue Berdugo Immobilier, a fait construire un ensemble immobilier composé de divers bâtiments constituant la résidence le [Adresse 6]. Le bâtiment D entoure une salle de sport située au rez-de-chaussée et hors copropriété, destinée à la pratique de l’haltérophilie.

La société [Localité 4] Promotions qui avait acquis les terrains auprès de la ville de [Localité 4], a, par acte authentique du 13 juillet 2019, cédé, par dation en paiement, les locaux sportifs à la commune, laquelle a fait réaliser des travaux de second ‘uvre qui ont été réceptionnés sans réserve le 19 juin 2009.

À la ‘n de l’année 2009, la commune de [Localité 4] a consenti à l’Union Sportive de [Localité 4] haltérophilie (UST haltérophilie) une convention de mise à disposition de l’équipement sportif situé [Adresse 2] à [Localité 4] comprenant une salle d’haltérophilie dénommée salle [U] [C].

Suite à l’existence de nuisances sonores invoquées par les copropriétaires de la résidence le [Adresse 6], le juge des référés a désigné M. [V] en qualité d’expert qui a déposé son rapport le 20 octobre 2015 en concluant en substance à l’existence de vices de construction ayant contribué aux nuisances sonores.

La commune de [Localité 4] a alors fait assigner devant le tribunal de grande instance de [Localité 4] différents intervenants à l’acte de construction et leurs assureurs, la société Berdugo immobilier et le syndicat des copropriétaires de la résidence Le [Adresse 6].

Par jugement du 30 janvier 2020, le tribunal judiciaire de Tours a notamment :

— déclaré la commune de [Localité 4] recevable en ses demandes ;

— déclaré la société Berdugo Immobilier responsable, sur le fondement de l’article 1792 du code civil du désordre décennal de défaut d’isolation phonique de la salle de sport ;

— condamné in solidum la société Berdugo Immobilier et la MAF et M. [N] à verser à la commune de [Localité 4] la somme de 345 430 € au titre des travaux de reprise ;

— rejeté la demande de la commune de [Localité 4] au titre du préjudice de jouissance ;

— déclaré recevable le syndicat des copropriétaires de la résidence le [Adresse 6] ;

— condamné la commune de [Localité 4] à verser au syndicat des copropriétaires de la résidence le [Adresse 6] les sommes de :

25 000 € au titre du préjudice de jouissance ;

4 096 € au titre de la rémunération du sapiteur et de la démolition du faux-plafond ;

7 493,78 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

— dit que la société Berdugo Immobilier et la MAF en sa qualité d’assureur de M. [N] seront donc tenus de garantir la commune de [Localité 4] de l’ensemble des condamnations prononcées à son encontre au profit du syndicat des copropriétaires ;

— condamné in solidum la société Berdugo Immobilier et la MAF à verser à la commune de [Localité 4] une indemnité de 4 000 € en application de l’article 700 du code de procédure civile ;

— rejeté toutes autres demandes ;

— condamné la société Berdugo Immobilier, la MAF et la société Albingia aux entiers dépens en ce compris les frais d’expertise judiciaire (d’un montant de 9 870,65 €) dont distraction au pro’t des avocats de la cause.

Par déclaration d’appel du 11 mars 2020 visant la seule commune de [Localité 4], le syndicat des copropriétaires de la résidence Le [Adresse 6] a interjeté appel du jugement en ce qu’il a en ce qu’il a rejeté ses demandes tendant à ordonner à la commune de [Localité 4] de faire cesser le trouble découlant des nuisances phoniques générées par la salle d’haltérophilie, en procédant au déménagement de ladite salle, sous astreinte de 3 000 € par jour de retard à compter de la signification de la décision à intervenir et à défaut, de l’entendre condamner sous astreinte à réaliser les travaux de reprise chiffrés par l’expert à la somme de 345 430 €.

Suivant conclusions récapitulatives notifiées par voie électronique le 31 octobre 2022, le syndicat des copropriétaires de la résidence Le [Adresse 6] demande de :

— confirmer le jugement entrepris notamment en ce qu’il a :

condamné la commune de [Localité 4] à lui régler une somme de 4 096 € au titre de la rémunération du sapiteur et de la démolition du faux-plafond ;

condamné la commune de [Localité 4] à lui régler une somme de 7 493,78 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile en première instance ;

— infirmer en revanche le jugement entrepris en ce qu’il a condamné la commune de [Localité 4] à lui régler une somme de 25 000 € au titre du préjudice de jouissance ;

Statuant à nouveau sur ce point :

— condamner la commune de [Localité 4] à lui régler une somme de 65 000 € au titre du préjudice de jouissance ;

À défaut, en cas de confirmation du jugement à hauteur de 25 000 € :

— condamner a minima la commune de [Localité 4] à lui régler une somme complémentaire de 7 500 € au titre du préjudice de jouissance pour trois années complémentaires liées à la procédure d’appel ;

Statuant également à nouveau en cause d’appel :

— juger que si le jugement entrepris a permis à la commune de [Localité 4] d’obtenir des condamnations à hauteur de 345 430 €, le premier juge se devait de l’enjoindre voire de la condamner en contrepartie à faire cesser les nuisances sonores subies par le syndicat des copropriétaires ;

— enjoindre à la commune de [Localité 4] de faire cesser toute nuisance sonore, et par suite tout trouble anormal de voisinage ;

— condamner ainsi la commune de [Localité 4] à procéder au déménagement de la salle d’haltérophilie dans un autre local ou, à défaut, de cesser purement et simplement l’activité d’haltérophilie ;

— assortir l’une ou l’autre de ces condamnations d’une astreinte de 3 000 € par jour de retard à compter de la signification de la décision à intervenir ;

— condamner à défaut de condamnation sous astreinte au déménagement de la salle d’haltérophilie ou à la cessation de l’activité illicite, la commune de [Localité 4] à faire réaliser l’intégralité des travaux de reprise préconisés par le rapport d’expertise définitif de M. [V] du 20 octobre 2015 et chiffrés à la somme globale de 345 430 € TTC, et ce sous astreinte de 3 000 € par jour de retard à compter de la décision à intervenir ;

En tout état de cause,

— confirmer les condamnations prononcées au titre des frais irrépétibles et dépens en première instance ;

— condamner la commune de [Localité 4] à lui régler la somme complémentaire de 4 500 € au titre des frais irrépétibles correspondant à la seule procédure d’appel ;

— condamner la commune de [Localité 4] aux entiers dépens d’appel.

Suivant conclusions récapitulatives notifiées par voie électronique le 7 novembre 2022, la commune de [Localité 4] demande de :

— déclarer le syndicat des copropriétaires de la résidence Le [Adresse 6] irrecevable et mal fondé en son appel, et l’en débouter ;

— faire droit en revanche à son appel incident ;

— infirmer le jugement entrepris au titre des condamnations pécuniaires qu’il a prononcées à son encontre et débouter l’appelant de ces demandes ;

— confirmer le jugement de première instance en ce qu’il a : déclaré la commune de [Localité 4] recevable en ses demandes ; déclaré la société Berdugo Immobilier responsable, sur le fondement de l’article 1792 du code civil du désordre décennal de défaut d’isolation phonique de la salle de sport ; condamné in solidum la société Berdugo Immobilier et la MAF à verser à la commune de [Localité 4] la somme de 345 430 euros au titre des travaux de reprise ; dit que la société Berdugo immobilier et la MAF seront donc tenus de garantir la commune de [Localité 4] de toutes condamnations prononcées à son encontre au profit du syndicat des copropriétaires de la résidence Le [Adresse 6] ; condamné in solidum la société Berdugo immobilier et la MAF à verser à la Commune de [Localité 4] une indemnité de 4 000 euros sur le fondement de l’article 700 euros du code de procédure civile ; condamné la société Berdugo aux entiers dépens en ce compris les frais d’expertise judiciaire dont distraction au profit des avocats de la cause ;

— condamner le syndicat des copropriétaires de la résidence Le [Adresse 6] à lui verser une indemnité de 4 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens.

Pour un plus ample exposé des faits et des moyens des parties, il convient de se reporter à leurs dernières conclusions récapitulatives.

MOTIFS

I- Sur la recevabilité de l’appel

L’intimée soutient que l’appel est irrecevable faute d’habilitation du syndic par une décision d’assemblée générale à exercer une voie de recours, dès lors qu’il est nécessaire que le syndic soit valablement mandaté au moment où il interjette appel ou, au plus tard, avant que le délai d’appel soit expiré pour exercer cette voie de recours.

Le syndicat des copropriétaires réplique qu’aux termes de la résolution n° 14 du procès-verbal d’assemblée générale du 7 avril 2017, il a donné habilitation au syndic à agir pour qu’il soit mis fin aux nuisances sonores et pour obtenir la condamnation de la commune de [Localité 4] au règlement de toute indemnité permettant la réparation du préjudice subi par la copropriété ; qu’il produit le mandat de syndic en vigueur lors de la déclaration d’appel ; que le syndic en exercice peut interjeter appel sans autorisation expresse de l’assemblée générale, sans qu’il y ait lieu de distinguer selon que le syndicat ait été défendeur ou demandeur en première instance ; qu’il est donc recevable en son appel.

Aux termes de l’article 55 du décret du 17 mars 1967, le syndic ne peut agir en justice au nom du syndicat sans y avoir été autorisé par une décision de l’assemblée générale, et une telle autorisation n’est pas nécessaire pour les actions en recouvrement de créance, la mise en ‘uvre des voies d’exécution forcée à l’exception de la saisie en vue de la vente d’un lot, les mesures conservatoires et les demandes qui relèvent des pouvoirs de juge des référés, ainsi que pour défendre aux actions intentées contre le syndicat.

Ces dispositions n’exigent pas que, pour interjeter appel, le syndic soit autorisé par l’assemblée générale, que le syndicat ait été demandeur ou défendeur, ainsi que l’a d’ailleurs jugé la Cour de cassation (3e Civ., 8 juin 1992, pourvoi n° 90-10.977 ; 3e Civ., 6 octobre 1993, pourvoi n° 90-18.359 ; 3e Civ., 15 décembre 1993, pourvoi n° 91-20.130).

En l’espèce, il est établi et non contesté que le syndic a été habilité à agir aux fins de faire cesser les nuisances sonores et de réparation des troubles subis. Le syndic pouvait donc, sans habilitation spéciale du syndicat des copropriétaires, interjeter appel du jugement, de sorte que l’appel est recevable.

II- Sur la recevabilité de l’action du syndicat des copropriétaires

L’intimée explique que ce n’est qu’à partir du moment où les troubles affectent tous les occupants de l’immeuble, que l’action du syndicat est recevable ; que le rapport d’expertise ne démontre pas que le préjudice subi affecterait les 98 copropriétaires de la résidence Le [Adresse 6] ; que la cour devra déclarer que l’action du syndicat de copropriétaires est irrecevable et infirmer le jugement de première instance pour l’ensemble des condamnations prononcées à son profit ; que le syndicat des copropriétaires n’a ni qualité, ni intérêt pour agir aux fins d’injonction d’effectuer les travaux préconisés par l’expert judiciaire.

L’appelante réplique que le syndicat des copropriétaires, en vertu des dispositions de l’article 15 de la loi n° 65-557 du 10 juillet 1965, a qualité pour agir en justice aux fins de sauvegarde des droits afférents à l’immeuble, dont la réparation des troubles anormaux de voisinage présentant un caractère collectif ; que l’expert a relevé une gêne pour les occupants de la résidence résultant de nuisances sonores et vibratoires affectant tant les parties privatives que les parties communes ; que l’action syndicale est recevable dès lors que le trouble présente un caractère collectif par son ampleur et son étendue ; que la question de la recevabilité de la demande du syndicat des copropriétaires a d’ores et déjà été jugée dans le cadre de l’ordonnance de référé du 29 janvier 2013, dans le cadre de laquelle la commune de [Localité 4] avait déjà soulevé ce moyen ; qu’il convient de rappeler que lors de l’assemblée générale du 7 avril 2017, il a été voté à l’unanimité des copropriétaires présents la décision d’engager une procédure judiciaire à l’encontre de la commune de [Localité 4] afin de voir cesser les troubles de voisinage ; qu’il a donc qualité et intérêts à agir, et se trouve recevable à solliciter la condamnation de la commune de [Localité 4] à réparer son entier préjudice de jouissance subi du fait de ces troubles anormaux de voisinage.

L’article 15 de la Loi no 65-557 du 10 juillet 1965 dispose que le syndicat a qualité pour agir en justice, tant en demande qu’en défense, même contre certains des copropriétaires ; il peut notamment agir, conjointement ou non avec un ou plusieurs de ces derniers, en vue de la sauvegarde des droits afférents à l’immeuble.

En application de ces dispositions, l’action du syndicat des copropriétaires n’est recevable que s’il est établi qu’elle est fondée sur l’existence d’un trouble présentant un caractère collectif.

En l’espèce, le règlement de copropriété de la résidence Le [Adresse 6] avec état descriptif de division mentionne que l’ensemble immobilier comporte cinq bâtiments dont les bâtiments accolés A, B, C, D comportent chacun 13 à 29 appartements répartis sur 4 à 5 étages, et un bâtiment E en sous-sol comportant les parkings. La salle de sport se trouve au rez-de-chaussée du bâtiment D, mais est exclue de la copropriété.

Le rapport d’expertise judiciaire mentionne que des constatations ont été effectuées pour les nuisances sonores, dans le sous-sol de l’immeuble à usage de parking et dans des locaux proches de la salle de sport. S’agissant du sous-sol, l’expert a préconisé la dépose du faux-plafond instable.

Le rapport d’expertise judiciaire mentionne qu’il a été procédé à des mesures acoustiques dans quatre appartements, le D41, le D24, le C15 et le C16, pendant que des haltérophiles s’exerçaient dans la salle de sport du rez-de-chaussée de l’immeuble, et que ces mesures ont révélé des non-conformités importantes au regard du décret n° 2006-1099 du 31 août 2006 relatif à la lutte contre les bruits de voisinage. Toutefois, l’expert a relevé, qu’au cours des opérations d’expertise, 20 copropriétaires s’étaient manifesté pour se plaindre des nuisances engendrées par la salle d’haltérophilie.

L’expert judiciaire a précisé la nature des nuisances comme suit :

« Pour le faux-plafond qui a été déposé lors de nos opérations, sa solidité était affectée.

Pour les nuisances phoniques, nous avons vu qu’il s’agissait de bruits de chocs mettant la structure du bâtiment en vibrations. Ces bruits sont imprévisibles, car ils interviennent lorsque les haltères touchent le sol dans la salle de sport, au rez-de-chaussée de la résidence.

Ils sont violents et peuvent être ressentis par les occupants des logements de la résidence comme une intrusion dans leur intimité.

La répétition de ces bruits interdit toute concentration intellectuelle, tout vagabondage de pensée Les critères de gêne sont largement dépassés.

Les nuisances phoniques constatées constituent un trouble anormal de voisinage lié aux activités de la salle d’haltérophilie ».

Les conclusions du rapport d’expertise ne limitent donc pas l’existence des nuisances phoniques aux seuls quatre copropriétaires dans les appartements desquels, le sapiteur acousticien a réalisé des mesures permettant de relever le niveau d’émergence sonore de l’activité d’haltérophilie, outre le fait que cette activité a causé des désordres sur le faux-plafond du sous-sol de la résidence constituant une partie commune.

Le syndicat des copropriétaires produit également une pétition signée de 34 copropriétaires pour faire cesser les nuisances causées par la salle d’haltérophilie. Les commentaires émis par certains copropriétaires lors de cette pétition font état de bruits affectant les autres bâtiments de la résidence, et constituant une gêne ressentie par des occupants résidant au 3e étage.

Il convient également de constater que l’assemblée générale des copropriétaires réunie le 7 avril 2017 a voté à l’unanimité des copropriétaires présents et représentés la décision d’engager une procédure judiciaire aux fins de faire cesser les nuisances sonores et d’indemnisation du préjudice subi par la copropriété.

Il résulte de l’ensemble de ces éléments que le caractère collectif de l’action du syndicat des copropriétaires de la résidence Le [Adresse 6] est établi de sorte qu’elle sera déclarée recevable.

III- Sur l’existence d’un trouble anormal de voisinage

L’appelant soutient qu’en vertu des dispositions de l’article 651 du code civil, le propriétaire a l’obligation de ne causer à la propriété d’autrui aucun dommage dépassant les inconvénients normaux du voisinage ; que le rapport d’expertise judiciaire établit que l’activité de la salle d’haltérophilie crée un trouble anormal de voisinage à l’ensemble des copropriétaires ; que la commune de [Localité 4] doit être condamnée à faire cesser les nuisances sonores subies quelle que soit la solution.

La commune de [Localité 4] réplique que lui faire injonction de procéder au déménagement du club d’haltérophilie qui se trouve installé dans les locaux litigieux porterait atteinte à son droit de propriété sans cause légitime ; qu’en tout état de cause, cette injonction est désormais sans objet, car pour supprimer les nuisances sonores subies par certains copropriétaires, une extension de 167 m² a été réalisée pour accueillir l’activité d’haltérophilie ; que cette nouvelle salle d’haltérophilie a été utilisée à partir d’avril 2022 et l’ancienne salle d’haltérophilie a été transformée en salle de musculation et d’accueil du public ; que depuis la mise en service de cette nouvelle salle, aucune nuisance sonore n’a été établie ; que dans le cadre de ces travaux d’extension, toutes les dispositions ont été prises pour éviter la propagation de nuisances sonores.

Il est constant que nul ne doit causer à autrui un trouble anormal de voisinage, et que cette responsabilité objective ne repose pas sur la preuve d’une faute (1re Civ, 23 mars 1982, pourvoi n° 81-10.010).

Il résulte du rapport d’expertise que l’activité de la salle d’haltérophilie située au rez-de-chaussée du bâtiment D de la résidence Le [Adresse 6] cause des nuisances sonores dépassant les troubles normaux de voisinage, en raison du niveau d’émergence des bruits émis non-conformes au seuil visé au décret n° 2006-1099 du 31 août 2006 relatif à la lutte contre les bruits de voisinage, et de leur fréquence.

Afin de faire cesser les troubles, le syndicat des copropriétaires demande d’enjoindre à la commune de [Localité 4], sous astreinte, de procéder au déménagement de la salle d’haltérophilie dans un autre local ou, à défaut, de cesser purement et simplement l’activité d’haltérophilie.

La commune de [Localité 4] justifie aux débats avoir fait construire une extension de la salle de sports litigieuse, désolidarisée de l’ancien bâtiment et éloignée des habitations, dans laquelle l’activité d’haltérophilie a été déplacée. Il s’ensuit que la commune a elle-même, au cours de l’instance, pris des mesures adaptées aux fins de cessation des nuisances sonores, de sorte qu’il n’y a pas lieu de faire droit à la demande d’injonction sous astreinte formulée par le syndicat des copropriétaires.

Il n’y a pas plus lieu à condamner la commune de [Localité 4] à faire réaliser l’intégralité des travaux de reprise préconisés par le rapport d’expertise judiciaire sous astreinte, compte-tenu du déménagement de l’activité d’haltérophilie dans l’extension réalisée à cette fin.

Le jugement sera donc confirmé en ce qu’il a rejeté les autres demandes du syndicat des copropriétaires.

IV- Sur la réparation des préjudices subis par le syndicat des copropriétaires

Sur la recevabilité de la demande complémentaire d’indemnisation

L’intimée demande déclarer irrecevable la demande formée en cause d’appel par le syndicat des copropriétaires tendant au versement de la somme complémentaire de 2 500 euros par an au titre du préjudice de jouissance, en application de l’article 564 du code de procédure civile.

L’appelant fait valoir qu’au regard des dispositions de l’article 565 du code de procédure civile, les prétentions ne sont pas nouvelles dès lors qu’elles tendent aux mêmes fins que celles soumises au premier juge, de sorte que ne sont pas nouvelles les prétentions par lesquelles les parties élèvent le montant de leurs réclamations dès lors qu’elles tendent à la même fin d’indemnisation du préjudice subi ; que l’actualisation du montant de réparation de son préjudice en cause d’appel, sans est donc recevable.

L’article 565 du code de procédure civile dispose que les prétentions ne sont pas nouvelles dès lors qu’elles tendent aux mêmes fins que celles soumises au premier juge, même si leur fondement juridique est différent.

Ainsi, la demande de dommages-intérêts, majorée en cause d’appel, est recevable comme n’étant pas nouvelle, ainsi que l’a jugée la Cour de cassation (2e Civ., 4 mars 2004, pourvoi n° 00-17.613).

En l’espèce, le syndicat des copropriétaires a sollicité, en première instance, l’indemnisation de son préjudice de jouissance à hauteur de 50 000 euros et le tribunal lui a alloué à ce titre la somme de 25 000 euros.

En cause d’appel, le syndicat des copropriétaires sollicite l’indemnisation de son préjudice de jouissance à hauteur de 65 000 euros. Il s’ensuit que cette demande, bien que majorée, tend aux mêmes que celles soumises au premier juge, de sorte qu’elle est recevable.

Sur le bien-fondé des demandes

Le syndicat des copropriétaires explique que le préjudice de jouissance, au vu de sa nature et de son ampleur, doit être fixé à hauteur d’un montant minimal de 5 000 euros par année de préjudice subi soit, depuis l’apparition des désordres au second semestre 2009, une somme de 65 000 euros ; que pour le cas où le jugement entrepris serait confirmé sur le quantum de 25 000 euros alloué en première instance pour la période de 2009 à 2019, il conviendra naturellement d’y rajouter trois annuités complémentaires pour 7 500 euros eu égard à la présente procédure d’appel ; que le préjudice étant collectif, il est parfaitement recevable et fondé à solliciter des dommages et intérêts même forfaitaire à titre de réparation ; que le jugement doit être confirmé quant au remboursement des frais et honoraires engagés au titre de la procédure en référé et du suivi de l’expertise.

L’intimée fait valoir que le syndicat des copropriétaires n’établit ni le principe, ni le quantum du préjudice de 75 000 euros qu’il revendique ; que le syndicat est une personne morale qui, par définition, ne demeure pas au sein des locaux litigieux et qu’il ne peut donc avoir été victime de quelque façon que ce soit de troubles anormaux du voisinage que seraient à même de dénoncer certains copropriétaires ; qu’il n’est pas établi en quoi le syndicat des copropriétaires aurait dû accomplir quelque démarche particulière pour faire face auxdits troubles du voisinage, la demande d’indemnisation à ce titre devant donc être purement et simplement rejetée ; que la demande d’indemnisation ne tient pas compte des différentes périodes de fermeture de la salle pour des motifs liés à l’épidémie de Covid-19 ou aux travaux réalisés ; que l’augmentation de 25 000 euros du préjudice de jouissance ne pourra, dans ces conditions, être accueillie ; que le jugement sera infirmé en ce qu’il a condamné la commune de [Localité 4] à verser les honoraires du sapiteur acousticien et les frais de dépose du faux plafond en plaques de plâtre.

Le syndicat des copropriétaires est à même de solliciter et d’obtenir la réparation des préjudices de jouissance subis par les copropriétaires lorsque le préjudice est collectif, ce qui est le cas en l’espèce, ainsi qu’il a été précédemment démontré.

Les nuisances sonores liées à l’exploitation de la salle d’haltérophilie ont débuté au second semestre de l’année 2009. La nouvelle salle d’haltérophilie a été inaugurée le 3 septembre 2022, mais a été utilisée dès le mois d’avril 2022. Toutefois, la commune justifie de la fermeture de la salle d’haltérophilie du 13 mars 2020 au 15 juillet 2020, du 19 août 2020 au 31 août 2020, du 23 octobre 2020 au 9 juin 2021, du 29 octobre 2021 au 15 novembre 2021, du 27 décembre 2021 au 3 janvier 2022, et du 7 au 10 février 2022.

Au regard de la durée et de la fréquence des nuisances sonores subies par les copropriétaires, l’indemnité fixée par le tribunal à la somme de 25 000 euros répare intégralement le préjudice de jouissance subi y compris pendant la procédure d’appel, de sorte que le jugement sera confirmé de ce chef.

En outre, le tribunal a justement retenu que les vibrations répétées des chutes de matériels d’haltérophilie ont endommagé la structure des parties communes en particulier le faux-plafond en plaques de plâtre du sous-sol qui a dû être retiré en raison de son instabilité pour la somme de 1 106 euros engagée par le syndicat des copropriétaires, de sorte que la commune de [Localité 4] devait être condamnée à lui verser cette somme.

Il est également établi que le syndicat des copropriétaires a supporté le coût des honoraires du sapiteur acousticien à hauteur de 2 990 euros, ce qui constitue également un chef de préjudice subi par suite des troubles anormaux de voisinage dont la commune de [Localité 4] est responsable.

Le jugement sera donc confirmé en ce qu’il a condamné la commune de [Localité 4] à verser au syndicat des copropriétaires de la résidence Le [Adresse 6] la somme de 4 096 euros au titre de la démolition du faux-plafond et de la rémunération du sapiteur.

V- Sur les demandes accessoires

Le jugement sera confirmé en ce qu’il a condamné la commune de [Localité 4] à payer au syndicat des copropriétaires la somme totale de 7 493 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

L’appel du syndicat des copropriétaires était fondé en ce que le jugement n’avait pas enjoint à la commune de [Localité 4] de faire cesser les troubles anormaux de voisinage et ce n’est qu’en raison du déménagement récent de la salle d’haltérophilie qu’il n’a pas été fait droit à cette demande d’injonction. En conséquence, les dépens d’appel seront laissés à la charge de la commune de [Localité 4].

Il n’y a pas lieu en revanche de faire application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS,

Statuant publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,

DÉCLARE l’appel du syndicat des copropriétaires de la résidence Le [Adresse 6] recevable ;

DÉCLARE l’action du syndicat des copropriétaires de la résidence Le [Adresse 6] recevable ;

CONFIRME le jugement en toutes ses dispositions critiquées ;

Y AJOUTANT :

DIT n’y avoir lieu à application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE la commune de [Localité 4] aux entiers dépens d’appel.

Arrêt signé par Madame Anne-Lise COLLOMP, Président de Chambre et Madame Fatima HAJBI, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT

 

 


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