Contrat d’édition : 9 février 2023 Cour d’appel de Versailles RG n° 21/03412

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Contrat d’édition : 9 février 2023 Cour d’appel de Versailles RG n° 21/03412
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COUR D’APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 58Z

12e chambre

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 9 FEVRIER 2023

N° RG 21/03412 – N° Portalis DBV3-V-B7F-UQ7C

AFFAIRE :

SOCIETE ANONYME DE DEFENSE ET D’ASSURANCE (SADA)

C/

S.A.R.L. MAGIC FORM PLAISIR

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 12 Mai 2021 par le Tribunal de Commerce de VERSAILLES

N° Chambre : 1

N° RG : 2020F00384

Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le :

à :

Me Dan ZERHAT

Me Audrey GAILLARD

TC VERSAILLES

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE NEUF FEVRIER DEUX MILLE VINGT TROIS,

La cour d’appel de Versailles a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre :

SOCIETE ANONYME DE DEFENSE ET D’ASSURANCE (SADA)

RCS Nîmes n° 580 201 127

[Adresse 5]

[Localité 4]

Représentée par Me Dan ZERHAT de l’AARPI OHANA ZERHAT, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 731 et Me Alain DUFLOT de la SELARL DUFLOT & ASSOCIES, Plaidant, avocat au barreau de LYON, vestiaire : 25

APPELANTE

****************

S.A.R.L. MAGIC FORM PLAISIR

RCS Versailles n° 823 556 246

[Adresse 8]

[Localité 7]

Représentée par Me Audrey GAILLARD, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : C59 et Me Olivier BERREBY, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : C1276

INTIMEE

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue à l’audience publique du 24 Novembre 2022 les avocats des parties ne s’y étant pas opposés, devant Madame Nathalie GAUTRON-AUDIC, Conseiller chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Monsieur François THOMAS, Président,

Madame Nathalie GAUTRON-AUDIC, Conseiller,

Madame Bérangère MEURANT, Conseiller,

Greffier, lors des débats : M. Hugo BELLANCOURT,

EXPOSÉ DU LITIGE

La SARL Magic Form Plaisir exploite un fonds de commerce de salle de sport sis [Adresse 8].

Le 14 novembre 2016, soit au début de son activité, elle a souscrit un contrat d’assurance multirisque professionnelle auprès de la SA Société Anonyme de Défense et d’Assurance – SADA (ci-après SADA), comprenant une garantie complémentaire « perte d’exploitation après fermeture administrative ».

A la suite de l’arrêté du 14 mars 2020 portant diverses mesures relatives à la lutte contre la propagation du virus Covid-19, la société Magic Form Plaisir indique avoir été dans l’obligation d’interrompre son activité jusqu’au 15 juin 2021.

Le 14 avril 2020, la société Magic Form Plaisir a déclaré son sinistre auprès de la compagnie SADA, laquelle s’est opposée à la mise en jeu de la garantie perte d’exploitation en cas de fermeture administrative.

Par courrier du 20 mai 2020, la société Magic Form Plaisir a mis en demeure la société SADA de l’indemniser de sa perte d’exploitation. Cette dernière a maintenu son refus.

Par acte du 31 juillet 2020, la société Magic Form Plaisir a assigné la société SADA devant le tribunal de commerce de Versailles en paiement, au principal, de la somme de 385.180 € au titre de la perte d’exploitation de l’année 2020.

Par jugement contradictoire du 12 mai 2021, le tribunal de commerce de Versailles a :

– Dit que la SA SADA Assurances doit garantir la SARL Magic Form Plaisir au titre de la perte d’exploitation suite à la fermeture de son établissement du fait de l’épidémie de Covid-19 ;

– Ordonné une expertise ;

– Commis pour y procéder M. [U] [E], [Adresse 6] Tél : [XXXXXXXX02] Fax : [XXXXXXXX01] Port. : [XXXXXXXX03] Mèl : [Courriel 9], avec pour mission de :

– Convoquer et entendre les parties, assistées, le cas échéant, de leurs conseils, et recueillir leurs observations à l’occasion de l’exécution des opérations ou de la tenue des réunions d’expertise,

– Se faire remettre toutes les pièces utiles à l’accomplissement de sa mission,

– Evaluer la perte d’exploitation subie par la SARL Magic Form Plaisir pour le sinistre déclaré et indemnisable dans le cadre du contrat d’assurance conclu avec la SA SADA Assurances au titre de la perte d’exploitation subie suite aux fermetures administratives décrétées,

– Donner son avis sur le montant des sommes dues par la société SA SADA Assurances à la SARL Magic Form Plaisir,

– Rapporter toutes autres constatations utiles à l’examen des prétentions des parties,

– Mettre, en temps utile, au terme des opérations d’expertise, par Ie dépôt d’un pré-rapport, les parties en mesure de faire valoir, dans le délai qu’il leur fixera, leurs observations qui seront annexées au rapport ;

– Fixé à 3.000 € le montant de la provision à valoir sur la rémunération de l’expert, qui sera versée par la SARL Magic Form Plaisir, au plus tard le 12 juin 2021, entre les mains du greffe de cette juridiction, sous sanction de caducité prévue à I’article 271 du code civil ;

– Dit que les opérations d’expertise seront suivies par le juge chargé du contrôle des expertises de ce tribunal ;

– lmparti à l’expert, pour Ie dépôt du rapport d’expertise, un délai de 6 mois à compter de l’avertissement qui lui sera donné par le greffe du versement de la provision ;

– Dit qu’à I’issue de sa première réunion avec les parties, l’expert communiquera aux parties et au juge chargé du contrôle un calendrier de ses opérations et une estimation de son budget ;

– Dit qu’en cas de refus ou d’empêchement de l’expert, il sera procédé à son remplacement par le juge chargé du contrôle des expertises ;

– Condamné la SA SADA Assurances à payer à titre provisionnel à la SARL Magic Form Plaisir la somme de 37.000 € ;

– Débouté la SARL Magic Form Plaisir de ses autres demandes ;

– Renvoyé la cause et les parties à l’audience du 12 janvier 2022 à 14 heures ;

– Réservé l’application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

– Réservé les dépens, dont les frais de greffe s’élèvent à la somme de 197,59 €.

Par déclaration reçue au greffe le 27 mai 2021 et enregistrée le 28 mai 2021, la société SADA a interjeté appel du jugement.

L’expert désigné aux termes de ce jugement a déposé son rapport le 15 octobre 2021, chiffrant la perte d’exploitation de la société Magic Forme Plaisir à 222.000 €.

PRÉTENTIONS DES PARTIES

Par dernières conclusions notifiées le 2 mars 2022, la société SADA demande à la cour de :

– Réformer le jugement du 12 mai 2021 rendu par le tribunal de commerce de Versailles en ce qu’il a :

– Dit que la SA SADA Assurances doit garantir la SARL Magic Form Plaisir au titre de la perte d’exploitation suite à la fermeture de son établissement du fait de l’épidémie de Covid-19 ;

– Ordonné une expertise ;

– Commis pour y procéder M. [U] [E], [Adresse 6] Tél : [XXXXXXXX02]. Fax : [XXXXXXXX01]. Port : [XXXXXXXX03]. Mèl : [Courriel 9], avec pour mission de :

* Convoquer et entendre les parties, assistées, le cas échéant, de leurs conseils, et recueillir leurs observations à l’occasion de l’exécution des opérations ou de la tenue des réunions d’expertise,

* Se faire remettre toutes les pièces utiles à l’accomplissement de sa mission,

* Evaluer la perte d’exploitation subie par la SARL Magic Form Plaisir pour le sinistre déclaré et indemnisable dans le cadre du contrat d’assurance conclu avec la SA SADA Assurances au titre de la perte d’exploitation subie suite aux fermetures administratives décrétées,

* Donner son avis sur le montant des sommes dues par la SA SADA Assurances à la SARL Magic Form Plaisir,

* Rapporter toutes autres constatations utiles à l’examen des prétentions des parties,

* Mettre, en temps utile, au terme des opérations d’expertise, par Ie dépôt d’un pré-rapport, les parties en mesure de faire valoir, dans le délai qu’il leur fixera, leurs observations qui seront annexées au rapport ;

– Fixé à 3.000 € le montant de la provision à valoir sur la rémunération de l’expert, qui sera versée par la SARL Magic Form Plaisir, au plus tard le 12 juin 2021, entre les mains du greffe de cette juridiction, sous sanction de caducité prévue à l’article 271 du code civil ;

– Dit que les opérations d’expertise seront suivies par le juge chargé du contrôle des expertises de ce tribunal ;

– Imparti à l’expert, pour le dépôt du rapport d’expertise, un délai de 6 mois à compter de l’avertissement qui lui sera donné par le greffe du versement de la provision ;

– Dit qu’à l’issue de sa première réunion avec les parties, l’expert communiquera aux parties et au juge chargé du contrôle un calendrier de ses opérations et une estimation de son budget ;

– Dit qu’en cas de refus ou d’empêchement de l’expert, il sera procédé à son remplacement par le juge chargé du contrôle des expertises ;

– Condamné la SA SADA Assurances à payer à titre provisionnel à la SARL Magic Form Plaisir la somme de 37.000 € ;

– Renvoyé la cause et les parties à l’audience du 12 janvier 2022 à 14 heures ;

– Réservé l’application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

– Réservé les dépens, dont les frais de greffe s’élèvent à la somme de 197,59 €.

Statuant à nouveau,

A titre principal,

En l’absence de « fermeture administrative »,

Compte-tenu de l’absence de « fermeture administrative » spécifique au local de l’assuré,

En raison de la dénaturation du contrat d’assurance et de son objet et de l’existence d’un préjudice anormal et spécial,

– Rejeter les demandes de la SARL Magic Form Plaisir ;

– Avant dire droit, accueillir la question préjudicielle formée par la concluante en ce qui concerne la qualification de fermeture administrative attribuée à l’interdiction de recevoir du public et saisir la juridiction administrative compétente à ce titre, en l’occurrence le Conseil d’Etat ;

A titre subsidiaire, sur le quantum,

En l’absence de justification des demandes par des éléments probants et de l’existence d’une procédure toujours pendante devant le tribunal de commerce de Versailles,

– Rejeter les demandes de la SARL Magic Form Plaisir ;

– Renvoyer la liquidation des préjudices allégués par l’intimé au tribunal de commerce de Versailles (RG 2020F00384) actuellement saisi ;

En tout état de cause,

– Rejeter l’appel incident de la SARL Magic Form Plaisir ;

– Condamner la SARL Magic Form Plaisir à payer à la SA SADA la somme de 4.000 € par application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

– Condamner la SARL Magic Form Plaisir aux dépens d’instance et d’appel.

Par dernières conclusions notifiées le 30 mai 2022, la société Magic Form Plaisir demande à la cour de :

– Déclarer la société SADA irrecevable et infondée en son appel et en l’ensemble de ses demandes ;

– L’en débouter ;

– Déclarer la société Magic Form Plaisir recevable et bien fondée en l’ensemble de ses demandes ;

L’y recevant,

– Confirmer le jugement dont appel en ce qu’il a :

– Dit que la société SADA doit garantir la société Magic Form Plaisir au titre de la perte d’exploitation à la suite de la fermeture de son établissement du fait de l’épidémie de Covid-19 ;

– Ordonné une expertise et désigné pour y procéder M. [U] [E] ;

– Condamné la société SADA à payer une indemnisation à titre provisionnel à la société Magic Form Plaisir ;

– Infirmer le jugement dont appel en ce qu’il a :

– Limité le montant de la condamnation provisionnelle de la société SADA au-delà de 37.000 € ;

– Rejeté la demande de condamnation de la société SADA à publication judiciaire de la décision ;

– Rejeté la demande de condamnation de la société SADA à paiement d’une provision au titre des honoraires de l’expert d’assuré de la société Magic Form Plaisir ;

– Rejeté la demande de condamnation de la société SADA à paiement de dommages et intérêts pour retard de paiement de l’indemnisation due ;

Statuant à nouveau,

1/ Sur l’indemnisation de la perte d’exploitation au titre de la garantie souscrite

Vu le rapport d’expertise judiciaire fixant à la somme de 222.000 € le montant de la perte d’exploitation,

– Condamner la société SADA à payer à la société Magic Form Plaisir à titre provisionnel la somme complémentaire de 185.000 € (222.000 € – 37.000 €) en indemnisation de sa perte d’exploitation ;

2/ Sur les frais d’expertise judiciaire

– Condamner la société SADA à payer à la société Magic Form Plaisir à titre provisionnel la somme de 7.686 € en remboursement des frais d’expertise judiciaire avec intérêt légal à compter des présentes conclusions ;

3/ Sur les honoraires provisionnels de l’expert d’assuré de la société Magic Form Plaisir

– Condamner la société SADA à payer à la société Magic Form Plaisir 8 % du montant de la condamnation provisionnelle qui sera prononcée par la cour d’appel au titre des honoraires provisionnels de son expert d’assuré ;

4/ Sur les dommages et intérêts pour retard de paiement de l’indemnisation

– Condamner la société SADA à payer à la société Magic Form Plaisir la somme de 30.000 € à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice résultant du retard de prise en charge ;

5/ Sur les dommages et intérêts pour résistance et appel abusif

– Condamner la société SADA à payer à la société Magic Form Plaisir la somme de 30.000 € à titre de dommages et intérêts pour résistance et appel abusifs ;

6/ Sur la publication judiciaire sous astreinte du jugement

– Ordonner la publication judiciaire, aux frais de la société SADA, sous astreinte de 1.000 € par jour de retard et par manquement, par publication et se réserver la liquidation des astreintes :

* Dans un délai de quatre jours à compter de la signification du jugement (sic) à intervenir, au sein d’une édition de presse quotidienne nationale sur format papier et format dématérialisé au choix de la demanderesse sans que le coût de la publication ne puisse excéder la somme de 10.000 €, dans un cadre, étant précisé que la taille des caractères ne pourra être inférieure à une police de taille 16, du texte suivant :

« Par arrêt du… la cour d’appel de Versailles a notamment :

– confirmé un jugement en date du 12 mai 2021 rendu par le tribunal de commerce de Versailles, ayant condamné la société SADA au versement d’une provision de 37.000 € à la société Magic Form Plaisir, au titre de l’indemnisation des pertes d’exploitation à la suite de la fermeture administrative de son activité résultant des arrêtés du gouvernement pris pour lutter contre la Covid-19,

y ajoutant,

– condamné la société SADA au versement d’une provision supplémentaire de … € à la société Magic Form Plaisir, au titre de l’indemnisation des pertes d’exploitation à la suite de la fermeture administrative de son activité résultant des arrêtés du gouvernement pris pour lutter contre la Covid-19. » ;

* Dans un délai de sept jours ouvrables à compter de la signification de l’ordonnance (sic) à intervenir, au sein d’une édition de presse magazine sur format papier et format dématérialisé au choix de la demanderesse sans que le coût de la publication ne puisse excéder la somme de 10.000 €, dans un encadré, étant précisé que la taille des caractères ne pourra être inférieure à une police de taille 16 du texte suivant :

« Par arrêt du…la cour d’appel de Versailles a notamment :

– confirmé un jugement en date du 12 mai 2021 rendu par le tribunal de commerce de Versailles, ayant condamné la société SADA au versement d’une provision de 37.000 € à la société Magic Form Plaisir, au titre de l’indemnisation des pertes d’exploitation à la suite de la fermeture administrative de son activité résultant des arrêtés du gouvernement pris pour lutter contre la Covid-19,

y ajoutant,

– condamné la société SADA au versement d’une provision supplémentaire de … € à la société Magic Form Plaisir, au titre de l’indemnisation des pertes d’exploitation à la suite de la fermeture administrative de son activité résultant des arrêtés du gouvernement pris pour lutter contre la Covid-19. » ;

* Dans un délai de 48 heures à compter de la signification du jugement (sic) à intervenir, sur la page d’accueil du site Internet de la défenderesse accessible à l’adresse URL www.sada.fr pendant une durée ininterrompue de 30 jours, sur un bandeau fixe, en haut de page, dans un encadré, étant précisé que la taille des caractères ne pourra être inférieure à celle utilisée pour les titres encadrés habituels existants sur le dit site du texte suivant :

« Par arrêt du…la cour d’appel de Versailles a notamment :

– confirmé un jugement en date du 12 mai 2021 rendu par le tribunal de commerce de Versailles, ayant condamné la société SADA au versement d’une provision de 37.000 € à la société Magic Form Plaisir, au titre de l’indemnisation des pertes d’exploitation à la suite de la fermeture administrative de son activité résultant des arrêtés du gouvernement pris pour lutter contre la Covid-19,

y ajoutant,

– condamné la société SADA au versement d’une provision supplémentaire de … € à la société Magic Form Plaisir, au titre de l’indemnisation des pertes d’exploitation à la suite de la fermeture administrative de son activité résultant des arrêtés du gouvernement pris pour lutter contre la Covid-19. » ;

7/ Sur l’article 700 et les dépens

– Condamner la société SADA à payer la société Magic Form Plaisir la somme de 8.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

– Condamner la société SADA en tous les dépens de la présente instance dont distraction au profit de Me Audrey Gaillard, avocate aux offres de droit, conformément à l’article 699 du code de procédure civile.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 22 septembre 2022.

Pour un exposé complet des faits et de la procédure, la cour renvoie expressément au jugement déféré et aux écritures des parties ainsi que cela est prescrit à l’article 455 du code de procédure civile.

MOTIFS

Sur la procédure

Le 10 novembre 2022, la société SADA a notifié des « Conclusions d’appelante n°4 et de réouverture des débats » aux termes desquelles elle demande à la cour, en plus des prétentions déjà formulées dans ses conclusions notifiées le 2 mars 2022, d’ordonner la réouverture des débats dans l’attente de la décision faisant suite à l’audience de plaidoirie du 16 novembre 2022 devant le tribunal de commerce de Versailles et concernant la liquidation des préjudices allégués par l’assurée.

Par « Conclusions en irrecevabilité et rejet des conclusions n°4 en réouverture des débats de l’appelante » notifiées le 19 novembre 2022, la société Magic Form Plaisir demande à la cour de déclarer ces nouvelles conclusions d’appelante et les 10 pièces nouvelles qui y sont visées irrecevables, nulles, non avenues et infondées ainsi que de débouter la société SADA de ses demandes de rabat de clôture et de réouverture des débats.

*****

En application de l’article 802 du code de procédure civile, les conclusions notifiées par l’appelante le 10 novembre 2022, soit postérieurement à la clôture, doivent être déclarées d’office irrecevables de même que les 11 nouvelles pièces n°21 à 31 qui les accompagnent, étant observé que la cour n’a pas été saisie par l’appelante, conformément aux dispositions de l’article 954 du même code, d’une demande de rabat de l’ordonnance de clôture.

Sur la mobilisation de la garantie perte d’exploitation

La garantie « Perte d’exploitation après fermeture administrative » dont la société Magic Form Plaisir sollicite la mise en oeuvre est définie en page 5 des dispositions particulières du contrat d’assurance multirisque professionnelle qu’elle a souscrit le 14 novembre 2016. Elle est ainsi rédigée :

« La garantie perte d’exploitation est étendue en cas d’interruption ou de réduction d’activité de votre entreprise consécutive à une fermeture administrative de votre activité (arrêté de péril ou raison sanitaire) située dans vos locaux professionnels.

Seules sont indemnisées les pertes d’exploitation subies durant la période pendant laquelle est constatée la baisse de chiffre d’affaires et débutant après un délai de carence de 3 jours.

Cette période prend fin au jour de la reprise normale de votre activité dans les conditions les plus diligentes à dire d’expert (c’est-à-dire dès que les résultats de votre entreprise ne sont plus affectés par le sinistre), sans pouvoir excéder la durée maximale d’indemnisation Perte d’Exploitation.

Vous serez déchus de la garantie si la fermeture administrative fait suite à un fait dont la responsabilité peut vous être imputée.

La garantie ne s’applique pas à la fermeture définitive de votre entreprise (…) ».

La société SADA soutient que la société Magic Form Plaisir n’a fait l’objet d’aucune décision de fermeture administrative ; que les décisions réglementaires prises dans le cadre de la lutte contre le Covid-19 lui ont seulement interdit d’accueillir du public ; que la notion de fermeture administrative, qui implique une interdiction totale de fonctionnement et d’accès, doit être entendue strictement et dissociée de la notion d’interdiction de recevoir du public ; que la fermeture administrative, qui peut être ordonnée à titre de sanction en cas de non-respect de l’interdiction d’accueillir du public, constitue une mesure complémentaire et distincte et ne peut donc s’assimiler à cette dernière.

Elle fait valoir que la garantie « Perte d’exploitation après fermeture administrative » ne peut être mobilisée qu’à la condition d’une part, d’une fermeture administrative et d’autre part, que cette fermeture ait comme origine « les locaux professionnels » de l’assuré, ce qui signifie que la fermeture administrative doit avoir été décidée en raison d’un motif propre à l’établissement concerné et non en raison d’un événement extérieur ; que la clause est claire et précise, qu’elle ne nécessite donc pas d’être interprétée, sauf à la dénaturer comme l’ont fait les premiers juges ; qu’une garantie d’assurance ne peut s’appliquer que si toutes les conditions de sa mise en oeuvre sont réunies ; que toute inactivité de l’assuré n’entraîne pas nécessairement une prise en charge par son assurance.

Elle en déduit que la garantie « Perte d’exploitation après fermeture administrative » ne peut pas s’appliquer, de sorte que les demandes de la société Magic Form Plaisir doivent être rejetées.

Elle demande à la cour, pour le cas où celle-ci considérerait que l’« interdiction d’accueillir du public » est synonyme de « fermeture administrative », de saisir préalablement le juge administratif d’une question préjudicielle.

Elle invoque enfin, indépendamment de la discussion concernant les notions de fermeture administrative et d’interdiction d’accueillir du public, l’existence d’un préjudice anormal et spécial qui ne relève pas d’une garantie d’assurance individuelle de droit privé, de sorte que la police d’assurance SADA ne peut s’appliquer.

La société Magic Form Plaisir répond que le droit à garantie est acquis dès lors que l’activité exercée dans les locaux assurés a bien fait l’objet d’une fermeture administrative au sens du contrat souscrit.

Elle prétend que la société SADA tente de créer une distinction artificielle entre « fermeture administrative » et « interdiction d’accueillir du public » ; que la notion de « fermeture administrative » n’a pas été définie dans le contrat, de sorte qu’il convient de considérer que constitue une fermeture administrative, toute décision émanant d’une autorité administrative ayant pour conséquence d’empêcher l’activité exploitée dans les locaux assurés de se poursuivre. Elle considère que la définition que donne, a posteriori, la société SADA de la fermeture administrative, qui aurait pour objet exclusif de « sanctionner le non-respect de certaine réglementation et législation », a pour effet de vider les termes de la garantie de sa substance.

Elle fait valoir qu’en tout état de cause, les salles de sport ont bien fait l’objet de fermeture pour raison sanitaire, qu’ainsi les arrêtés anti-Covid précisaient bien concernant les salles de sport que « les établissements mentionnés aux articles L.322-1 et L322-2 du code du sport sont fermés ».

Elle soutient que la prétendue inassurabilité du risque pandémique, qui constituerait selon l’assureur un préjudice anormal et spécial ne relevant pas d’une garantie de droit privé, est une question d’ordre économique et non une question juridique ; que le risque d’épidémie est pleinement soumis à aléa et donc assurable ; qu’aucune disposition légale ne permet d’évincer ce risque ; que le contrat souscrit, qui ne comporte pas de clause excluant les épidémies de la garantie des pertes d’exploitation en cas de fermeture administrative pour raison sanitaire, doit primer sur toutes les autres considérations mises en avant par la société SADA.

Selon la société Magic Form, la garantie, qui est visée et réglementée par les conditions particulières de la police, est due du seul fait de la fermeture administrative de l’activité exploitée dans les locaux assurés, et nullement du fait d’une décision administrative visant directement ou exclusivement la fermeture des locaux assurés.

Enfin, elle s’oppose à la demande, purement dilatoire, de la société SADA de saisir le juge administratif d’une question préjudicielle, faisant observer que cette demande « avant dire droit » après avoir sollicité au fond le rejet des demandes de la société magic Form, démontre son inutilité, qu’en outre il n’y a pas matière à question préjudicielle dès lors que la légalité des arrêtés anti-Covid n’est pas en cause et qu’il appartient exclusivement au juge judiciaire de statuer sur l’interprétation des termes d’un contrat d’assurance de droit privé.

*****

Selon l’article 1103 du code civil, les contrats légalement formés tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faits.

L’article 1104 de ce même code prévoit que les contrats doivent être négociés, formés et exécutés de bonne foi.

L’article 1353 du code civil dispose que celui qui réclame l’exécution d’une obligation doit la prouver. En application de ce texte, il appartient à l’assuré de démontrer que les conditions d’application de la garantie sont remplies, sachant que la charge de la preuve repose sur l’assureur lorsqu’il entend opposer à l’assuré une clause d’exclusion de garantie.

Il résulte des dispositions particulières du contrat d’assurance, telles que rappelées ci-dessus, que la garantie « Perte d’exploitation après fermeture administrative » peut être mobilisée en cas « d’interruption ou de réduction d’activité de votre entreprise consécutive à une fermeture administrative de votre activité (arrêté de péril ou raison sanitaire) située dans vos locaux professionnels ».

Cette garantie est exprimée en termes clairs et précis, qui ne nécessitent pas d’être interprétés.

La société Magic Form Plaisir fait état des pertes d’exploitation qu’elle a subies du fait des mesures édictées pour lutter contre la propagation du Covid-19, en particulier l’arrêté du 14 mars 2020 et les décrets des 23 mars, 14 avril, 11 et 31 mai et 14 juin 2020. Elle affirme qu’elle a été dans l’obligation de cesser totalement son activité exercée dans les locaux professionnels assurés, et ce du 15 mars au 15 juin 2020 dans un premier temps, puis du 17 octobre 2020 au 9 juin 2021 dans un second temps.

La cour doit déterminer si la société Magic Form Plaisir peut invoquer à son profit les dispositions réglementaires comme constitutives de l’évènement « fermeture administrative », susceptible de déclencher la mise en oeuvre de la garantie « Perte d’exploitation après fermeture administrative » prévue par les dispositions particulières du contrat d’assurance.

L’arrêté du 14 mars 2020, portant diverses mesures relatives à la lutte contre la propagation du virus Covid-19, en vigueur au 16 mars 2020, a été pris par le Ministre des solidarités et de la santé sur le fondement notamment de l’article L.3131-1 du code de la santé publique qui dispose :

« En cas de menace sanitaire grave appelant des mesures d’urgence, notamment en cas de menace d’épidémie, le ministre chargé de la santé peut, par arrêté motivé, prescrire dans l’intérêt de la santé publique toute mesure proportionnée aux risques courus et appropriée aux circonstances de temps et de lieu afin de prévenir et de limiter les conséquences des menaces possibles sur la santé de la population (‘) ».

L’article 1 du chapitre 1er de cet arrêté relatif aux mesures concernant les établissements recevant du public a d’abord prévu qu’« afin de ralentir la propagation du virus Covid-19, les établissements (…) figurant ci-après ne peuvent plus accueillir du public jusqu’au 15 avril 2020 :

– au titre de la catégorie L : [Localité 10] d’auditions, de conférences, de réunions, de spectacles ou à usage multiple ;

– au titre de la catégorie M : Centres commerciaux ;

– au titre de la catégorie N : Restaurants et débits de boissons ;

– au titre de la catégorie P : [Localité 10] de danse et salles de jeux ;

– au titre de la catégorie S : Bibliothèques, centres de documentation ;

– au titre de la catégorie T : [Localité 10] d’expositions ;

– au titre de la catégorie X : Etablissements sportifs couverts ;

– au titre de la catégorie Y : Musées. (…) ».

Le décret n°2020-293 du 23 mars 2020 prescrivant les mesures générales nécessaires pour faire face à l’épidémie de Covid-19 dans le cadre de l’état d’urgence sanitaire a confirmé en son article 8 que « I. – Les établissements relevant des catégories mentionnées par le règlement pris en application de l’article R.123-12 du code de la construction et de l’habitation figurant ci-après ne peuvent plus accueillir de public jusqu’au 15 avril 2020 :

– au titre de la catégorie L : [Localité 10] d’auditions, de conférences, de réunions, de spectacles ou à usage multiple sauf pour les salles d’audience des juridictions ;

– au titre de la catégorie M : Magasins de vente et Centres commerciaux, sauf pour leurs activités de livraison et de retraits de commandes ;

– au titre de la catégorie N : Restaurants et débits de boissons, sauf pour leurs activités de livraison et de vente à emporter, le « room service » des restaurants et bars d’hôtels et la restauration collective sous contrat ;

– au titre de la catégorie P : [Localité 10] de danse et salles de jeux ;

– au titre de la catégorie S : Bibliothèques, centres de documentation ;

– au titre de la catégorie T : [Localité 10] d’expositions ;

– au titre de la catégorie X : Etablissements sportifs couverts ;

– au titre de la catégorie Y : Musées ;

– au titre de la catégorie CTS : Chapiteaux, tentes et structures ;

– au titre de la catégorie PA : Etablissements de plein air ;

– au titre de la catégorie R : Etablissements d’éveil, d’enseignement, de formation, centres de vacances, centres de loisirs sans hébergement, sauf ceux relevant des articles 9 et 10 ».

Comme le fait justement valoir l’intimée, il a néanmoins été spécifiquement indiqué dans le paragraphe IV de ce même article 8 que « Les établissements mentionnés aux articles L.322-1 et L.322-2 du code du sport sont fermés ».

Aux termes de l’article L.322-1 du code du sport, « Nul ne peut exploiter soit directement, soit par l’intermédiaire d’un tiers, un établissement dans lequel sont pratiquées des activités physiques ou sportives s’il a fait l’objet d’une condamnation prévue à l’article L.212-9 ».

Et, selon l’article L.322-2 du même code, « Les établissements où sont pratiquées une ou des activités physiques ou sportives doivent présenter pour chaque type d’activité et d’établissement des garanties d’hygiène et de sécurité définies par voie réglementaire ».

Ces deux textes visent les établissements dans lesquels « sont pratiquées une ou des activités physiques ou sportives ».

Selon son extrait Kbis, la société Magic Form Plaisir exerce une activité de « centre de remise en forme, club de culture physique, mise à disposition de matériel de remise en forme, activités complémentaires », de sorte qu’elle rentre bien dans la catégorie des établissements dans lesquels « sont pratiquées une ou des activités physiques ou sportives », la cour observant que la société SADA ne propose pas la moindre argumentation sur ce point.

Le décret n°2020-548 du 11 mai 2020 a maintenu en son article 10, paragraphe IV que « Les établissements mentionnés aux articles L.322-1 et L.322-2 du code du sport sont fermés (…) ».

Ces éléments permettent de retenir que la société Magic Form Plaisir a fait l’objet d’une fermeture administrative pour raison sanitaire. Cette fermeture a concerné les locaux dans lesquels l’activité est exercée, soit les locaux visés par les conditions particulières du contrat d’assurance et situés au [Adresse 8], la clause de garantie « Perte d’exploitation après fermeture administrative » ne prévoyant aucunement, comme le soutient la société SADA, que l’hypothèse de fermeture administrative se limite à une fermeture individuelle à titre de sanction.

Les conditions posées par la clause de garantie « Perte d’exploitation après fermeture administrative », figurant en page 5 des dispositions particulières du contrat d’assurance multirisque professionnelle souscrit le 14 novembre 2016 par la société Magic Form Plaisir, sont ainsi remplies, les arguments opposés par la société SADA étant tous inopérants. Il n’est pas non plus nécessaire, dans ces conditions, de saisir le juge administratif d’une question préjudicielle relative à la distinction des notions de fermeture administrative et d’interdiction d’accueillir du public, qui apparaît sans objet au regard de ce qui précède ; le jugement entrepris sera confirmé sur ce point.

La cour relève en outre qu’aucune clause d’exclusion ne s’oppose à la mobilisation de la garantie « Perte d’exploitation après fermeture administrative ».

Le jugement entrepris sera en conséquence confirmé en ce qu’il a dit que l’assureur doit garantir la société Magic Form Plaisir au titre de sa perte d’exploitation suite à la fermeture de son établissement du fait de l’épidémie de Covid-19.

Sur le montant de l’indemnité provisionnelle

La société SADA fait ici valoir qu’une procédure tendant à la liquidation du préjudice de l’intimée est pendante devant le tribunal de commerce de Versailles et qu’afin de respecter le principe du double degré de juridiction, il convient pour la cour de renvoyer cette question au tribunal de commerce qui en est déjà saisi.

Elle s’oppose à la demande de révision du montant de l’indemnité et conteste le montant sollicité, soulignant que contrairement aux allégations de la société Magic Form Plaisir, elle n’a pas reconnu l’existence d’un préjudice à hauteur de 117.000 €. Elle soutient qu’elle est fondée à invoquer sa franchise et sa limite de garantie ainsi que le délai de carence de trois jours, tels qu’ils figurent aux conditions particulières.

La société Magic Form Plaisir s’estime quant à elle bien fondée, au regard du rapport d’expertise judiciaire qui a été déposé postérieurement au prononcé du jugement dont appel, à solliciter le versement d’une provision plus importante que celle de 37.000 € qui lui a été allouée par les premiers juges. Elle se prévaut du propre dire que l’assureur a adressé à l’expert judiciaire et aux termes duquel il a lui-même reconnu que la perte de son assurée s’établissait à la somme d’au moins 117.000 €, ainsi que du rapport de l’expert judiciaire qui a chiffré la perte subie à la somme de 222.000 €. Elle considère que l’indemnisation lui revenant pourrait être fixée à la somme bien supérieure de 479.419,32 € mais sollicite que la provision allouée par le tribunal de commerce soit portée au montant de 222.000 € résultant du rapport d’expertise judiciaire, ce qui suppose le versement d’une somme complémentaire de 185.000 €.

*****

Comme le fait justement observer l’intimée, la cour est saisie, au titre d’un appel incident, d’une demande de réformation du montant de l’indemnité provisionnelle qui lui a été allouée par les premiers juges et le fait, qu’en vertu de l’effet dévolutif de l’appel, il soit statué sur cette demande ne porte nullement atteinte au principe du double degré de juridiction.

La société Magic Form Plaisir verse aux débats le rapport établi le 15 octobre 2021 par M. [U], expert désigné par le tribunal de commerce de Versailles aux termes du jugement déféré. En conclusion de son rapport, l’expert a retenu un préjudice économique et financier évalué à la somme de 222.000 € en valeur arrondie, pour les deux périodes du 15 mars au 17 octobre 2020 et du 18 octobre 2020 au 30 juin 2021. Dans son évaluation, M. [U] a notamment tenu compte des dispositions particulières du contrat d’assurance, en particulier de la franchise de 0,3 fois l’indice, ainsi que des aides de l’Etat.

L’assurée indique en page 35 de ses conclusions qu’elle conteste la limitation de sa perte d’exploitation par l’expert judiciaire à la somme de 222.000 €. Pour autant, elle sollicite dans le dispositif de ses conclusions, qui seul saisit la cour conformément à l’article 954 du code de procédure civile, la condamnation de la société SADA à lui verser à titre provisionnel la somme complémentaire de 185.000 € (222.000 € – 37.000 €) en indemnisation de sa perte d’exploitation.

La cour confirmera la décision déférée en ce qu’elle a ordonné une expertise et commis pour y procéder M. [U] [E]. Les premiers juges méritent également d’être suivis en ce qu’ils ont fixé à 37.000 € le montant de l’indemnité provisionnelle due à la société Magic Form Plaisir au titre de sa perte d’exploitation suite à la fermeture administrative de son établissement, dès lors qu’une instance est en cours devant le tribunal de commerce de Versailles aux fins de fixation et de liquidation du préjudice.

Sur les frais d’expertise judiciaire

La société Magic Form Plaisir fait valoir qu’elle a fait l’avance des frais d’expertise judiciaire pour la somme de 7.686 € et elle sollicite la condamnation de la société SADA à lui rembourser cette somme à titre provisionnel.

La société SADA s’y oppose et demande à la cour de laisser à la charge de l’intimée les frais d’expertise judiciaire dès lors que cette expertise n’a plus d’intérêt pour la solution du litige et que la demande d’expertise a été formulée sous la propre responsabilité de l’assurée, alors même que le principe de la garantie était contestée par l’assureur.

*****

Le principe de mobilisation de la garantie perte d’exploitation ayant été retenu et la désignation de l’expert judiciaire étant confirmée, la société Magic Form est bien fondée à obtenir le remboursement, à titre provisionnel, des frais d’expertise judiciaire s’élevant à 7.686 €, dont elle justifie avoir fait l’avance.

Sur les honoraires de l’expert d’assuré

La société Magic Form Plaisir prétend que, conformément au contrat d’assurance, la société SADA doit prendre en charge les honoraires de l’expert d’assuré dans la limite de 8 % de la perte de marge brute. Elle sollicite la condamnation de l’assureur à lui payer, à titre provisionnel, la somme de 17.760 € HT, soit 21.312 € TTC.

Elle expose qu’elle a été assistée de la société CB Evaluations Financières, qui a établi deux notes techniques très détaillées, adressées à l’expert judiciaire, chiffrant la perte d’exploitation à la somme de 479.419,32 € ; que l’expert continue de l’assister dans le cadre de la procédure actuellement pendante devant le tribunal de commerce afin de démontrer que sa perte d’exploitation ne se limite pas au montant de 222.000 €.

La société SADA répond que la clause de la police d’assurance prévoyant une participation à concurrence de 8 % des pertes évaluées n’a pas vocation à s’appliquer à la situation présente ; qu’en effet cette clause concerne la procédure d’expertise amiable mise en oeuvre avec l’accord de l’assureur sur le principe de sa garantie et permettant à l’assuré d’être assisté d’un expert pour l’évaluation amiable et privée des pertes d’exploitation. Elle ajoute que la facture de provision produite par l’intimée, qui ne détaille pas la nature et le montant des prestations réalisées, n’a aucune réalité économique mais constitue un artifice pour tenter d’obtenir une prestation indue.

*****

Les conditions générales du contrat d’assurance multirisque professionnelle souscrit le 14 novembre 2016 prévoient, dans le chapitre relatif aux pertes d’exploitation, que l’assureur garantit « en cas d’interruption ou de réduction d’activité de votre entreprise consécutive à un dommage matériel ayant donné lieu à indemnisation au titre d’une des garanties suivantes :

* ‘Incendie et événements assimilés’, ‘Evénements climatiques’, ‘Catastrophes naturelles’, ‘Dégâts des eaux’,

Le paiement d’une indemnité correspondant :

– soit à la perte de marge brute, soit à la perte de revenus ou d’honoraires ;

– aux honoraires de l’expert que vous avez choisi, dans la limite de 8 % de la perte de marge brute, de revenus ou d’honoraires ;

– aux frais supplémentaires d’exploitation. »

Si la société Magic Form Plaisir communique une facture de provision sur honoraires d’expert d’un montant de 17.760 € HT, soit 21.312 € TTC, émise le 20 octobre 2021 par la société CB Evaluations Financières, elle ne justifie pas de son règlement.

La demande en paiement à titre provisionnel ne peut dès lors qu’être rejetée, par confirmation du jugement entrepris.

Sur la demande de dommages-intérêts pour retard de prise en charge

La société Magic Form Plaisir fait valoir que le retard de prise en charge par l’assureur l’a fragilisée financièrement, ce qui l’a empêchée d’investir pour améliorer la qualité de son service et in fine le développement de son activité. Elle sollicite, au visa de l’article 1231-1 du code civil, le versement de dommages-intérêts à hauteur de 30.000 €.

La société SADA répond que cette demande est totalement injustifiée et qu’elle ne peut se voir reprocher un retard de prise en charge dès lors qu’elle a contesté, comme elle en a le droit, et continue de contester l’application de la clause litigieuse.

*****

Selon l’article 1231-1 du code civil, « Le débiteur est condamné, s’il y a lieu, au paiement de dommages et intérêts soit à raison de l’inexécution de l’obligation, soit à raison du retard dans l’exécution, s’il ne justifie pas que l’exécution a été empêchée par la force majeure ».

En l’espèce, la société Magic Form Plaisir ne justifie pas du préjudice allégué, de sorte qu’elle doit être déboutée de sa demande de dommages-intérêts, par confirmation du jugement entrepris.

Sur la résistance et l’appel abusifs

La société Magic Form Plaisir sollicite la condamnation de la société SADA à lui verser la somme de 30.000 € à titre de dommages-intérêts pour résistance et appel abusifs.

Elle considère qu’en tant que professionnel de l’assurance, il ne pouvait échapper à la société SADA que sa garantie était engagée ; qu’elle ne pouvait non plus ignorer que la crise du Covid-19 a très gravement mis à mal l’équilibre financier de Magic Form et que la résistance infondée qui lui a été opposée engendrerait nécessairement une aggravation de sa situation. Elle soutient que la société SADA a interjeté appel sans le moindre fondement sérieux dans le seul but de lui nuire.

La société SADA répond que son appel n’est aucunement abusif et qu’il trouve sa justification dans les termes de la police d’assurance.

*****

L’exercice d’un droit ne dégénère en abus qu’en cas de faute équipollente au dol, qui n’est pas démontrée en l’espèce à l’encontre de la société SADA.

En conséquence, le jugement entrepris doit être confirmé en ce qu’il a débouté la société Magic Form Plaisir de sa demande indemnitaire au titre de la résistance et de la procédure abusives. L’intimée doit être pareillement déboutée de sa demande de dommages-intérêts au titre de l’appel abusif.

Sur la publication de la décision

La société Magic Form Plaisir demande à la cour d’ordonner, sous astreinte et aux frais de la société SADA, la publication de la décision à intervenir, « afin que le plus d’assurés soient informés et ne se laissent plus impressionner par les postures de SADA », qui impose « une guérilla judiciaire » à ses assurés, déjà fragilisés par un contexte économique incertain.

La société SADA s’y oppose, faisant valoir que la condamnation à publication d’un jugement est prévue seulement dans certains cas strictement encadrés par la loi,qu’en outre il n’appartient pas à l’intimée de s’ériger en « représentante des assurés SADA » et de solliciter pour ces derniers la publication d’une décision la concernant directement et uniquement.

*****

Il ne sera pas fait droit à la demande de publication sollicitée, qui n’apparaît pas en l’état justifiée.

Sur les dépens et les frais irrépétibles

Les dispositions du jugement déféré relatives aux dépens et à l’article 700 du code de procédure civile seront infirmées.

La société SADA, qui succombe, supportera les entiers dépens de première instance et d’appel, dont distraction au profit de Me Gaillard, conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

Elle sera en outre condamnée à payer à la société Magic Form Plaisir une indemnité de 5.000 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La COUR, statuant publiquement, par arrêt contradictoire et en dernier ressort,

DÉCLARE irrecevables les « Conclusions d’appelante n°4 et de réouverture des débats » notifiées le 10 novembre 2022 ainsi que les pièces n°21 à 31 communiquées par la Société Anonyme de Défense et d’Assurance – SADA à l’appui de ces conclusions ;

CONFIRME le jugement rendu le 12 mai 2021 par le tribunal de commerce de Versailles sauf s’agissant des dépens et des frais irrépétibles ;

Statuant à nouveau et y ajoutant,

CONDAMNE la Société Anonyme de Défense et d’Assurance – SADA à rembourser à la société Magic Form Plaisir, à titre provisionnel, la somme de 7.686 € au titre des frais d’expertise judiciaire ;

DÉBOUTE la société Magic Form Plaisir de sa demande de dommages-intérêts pour appel abusif ;

CONDAMNE la Société Anonyme de Défense et d’Assurance – SADA aux entiers dépens de première instance et d’appel, dont distraction au profit de Me Gaillard, conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile ;

CONDAMNE la Société Anonyme de Défense et d’Assurance – SADA à verser à la société Magic Form Plaisir la somme de 5.000 € au titre de l’article 700 du code procédure civile.

Prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

Signé par Monsieur François THOMAS, Président et par M. BELLANCOURT, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le greffier, Le président,

 


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