Contrat d’édition : 2 février 2023 Cour d’appel de Bordeaux RG n° 22/02601

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Contrat d’édition : 2 février 2023 Cour d’appel de Bordeaux RG n° 22/02601
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COUR D’APPEL DE BORDEAUX

PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE

————————–

ARRÊT DU : 02 FEVRIER 2023

N° RG 22/02601 – N° Portalis DBVJ-V-B7G-MXGF

S.A. MAAF ASSURANCES

c/

[L] [J]

CPAM DE LA GIRONDE

S.A. SWISSLIFE PREVOYANCE ET SANTE

Nature de la décision : APPEL D’UNE ORDONNANCE DE REFERE

Grosse délivrée le : 02 février 2023

aux avocats

Décision déférée à la cour : ordonnance de référé rendue le 04 avril 2022 par le Tribunal judiciaire de BORDEAUX ( RG : 21/02413) suivant déclaration d’appel du 31 mai 2022

APPELANTE :

S.A. MAAF ASSURANCES prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège [Adresse 6]

Représentée par Me Julie JULES de la SCP DEFFIEUX – GARRAUD – JULES, avocat au barreau de BORDEAUX

INTIMÉS :

[L] [J]

né le [Date naissance 1] 1994 à [Localité 5] (GIRONDE)

de nationalité Française

demeurant [Adresse 2]

Représenté par Me Valérie JANOUEIX de la SCP BATS – LACOSTE – JANOUEIX, avocat postulant au barreau de BORDEAUX, et assisté de Me Maryannick BRAUN de la SELARL MESCAM & BRAUN, avocat plaidant au barreau de BORDEAUX

CPAM DE LA GIRONDE prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège [Adresse 7]

Non représentée, assignée à personne morale (à personne habilitée)

S.A. SWISSLIFE PREVOYANCE ET SANTE prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège [Adresse 4]

Non représentée, assignée à personne morale (à personne habilitée)

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 912 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 08 décembre 2022 en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Bérengère VALLEE, conseiller, chargé du rapport,

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Roland POTEE, président,

Bérengère VALLEE, conseiller,

Emmanuel BREARD, conseiller,

Greffier lors des débats : Séléna BONNET

ARRÊT :

– reputé contradictoire

– prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile.

* * *

EXPOSE DU LITIGE ET DE LA PROCÉDURE

Le 6 novembre 2019, M. [L] [J] a été victime d’un accident de la circulation alors qu’il circulait à moto.

Une première expertise amiable a été réalisée le 6 octobre 2020 avec le docteur [N], médecin conseil de M. [L] [J], et le docteur [M], représentant son assureur AXA France, concluant à l’absence de consolidation de l’état de santé de la victime.

Par courrier du 6 septembre 2021, la compagnie MAAF Assurances, assureur de l’autre véhicule impliqué, a proposé à M. [J] la réalisation d’une nouvelle expertise amiable et contradictoire en désignant le docteur [T]. Par courrier du 11 octobre suivant, M. [J] s’est opposé à la désignation de cet expert tout en suggérant quatre autres experts. Par courrier du 13 octobre 2021, la MAAF a confirmé sa volonté de maintenir la mission du docteur [T].

C’est dans ces conditions que par actes des 23 et 24 novembre 2021, M. [J] a assigné la compagnie MAAF Assurances, la Mutuelle Swisslife Prévoyance et Santé et la CPAM de la Gironde devant le juge des référés du tribunal judiciaire de Bordeaux, afin, au visa de l’article 145 du code de procédure civile, de voir ordonner une expertise médicale et condamner la compagnie MAAF Assurances à lui verser une provision de 10.000 euros à valoir sur l’indemnisation de son préjudice outre la somme de 2.500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Par ordonnance réputée contradictoire du 4 avril 2022 , le juge des référés du tribunal judiciaire de Bordeaux a :

– Ordonné une mesure d’expertise et désigné pour y procéder le docteur [C], [Adresse 3],

– Dit que l’expert répondra à la mission suivante :

*Après avoir convoqué et entendu les parties, assistées, le cas échéant, de leurs conseils, et recueilli leurs observations à l’occasion de l’exécution des opérations ou de la tenue des réunions d’expertise, s’être fait remettre toutes pièces utiles à l’accomplissement de sa mission, procédé à l’examen médical de M. [L] [J];

1) indiquer son état antérieur à la survenance de l’événement à l’origine du litige

2) rappeler les soins, traitements, opérations et autres interventions à fins curatives,thérapeutiques, de restauration ou de rééducation nécessités par l’événement à l’origine du litige,

3) décrire précisément l’état actuel, la date de consolidation et les conséquences qu’il comporte sur l’activité professionnelle et sur la vie personnelle, en mentionnant les atteintes à l’autonomie et la nécessité de l’intervention d’une tierce personne,

4) indiquer l’évolution prévisible dans le temps de cet état, soit par suite d’aggravation, soit par suite d’amélioration, en précisant, dans ce dernier cas, les soins, traitements ouinterventions auxquels l’intéressé devra se soumettre,

5) préciser si et dans quelle mesure cet état actuel et les suites prévisibles sont en lien direct avec l’événement à l’origine du litige,

6) évaluer les postes de préjudice qui résultent de l’état actuel constaté :

– indiquer s’il y eu un Déficit Fonctionnel Temporaire ( DFT), le quantifier et proposer la date de consolidation des blessures; à défaut, indiquer dans quel délai la victime devra être à nouveau examinée, en évaluant, si possible, l’importance prévisible des dommages,

– indiquer la durée de l’incapacité temporaire de travail, totale ou partielle éventuellement liée au déficit fonctionnel temporaire ;

– indiquer si, du fait des lésions imputables à l’accident, il existe une atteinte permanente (Déficit Fonctionnel Permanent DFP) d’une ou plusieurs fonctions physiques,psychosensorielles, intellectuelles à ventiler, en spécifiant les actes, gestes et mouvements rendus difficiles ou impossibles, à laquelle s’ajoute les phénomènes douloureux, les répercussions psychologiques, la souffrance morale et les troubles dans les conditions d’existence (personnelles, familiales et sociales)

– donner son avis sur le taux du déficit physiologique qui en résulte,

– préciser l’incidence de cette atteinte sur l’activité professionnelle de la victime ou la gêne qu’elle entraîne dans l’exercice de son métier (Incidence Professionnelle IP – préjudicescolaire, universitaire ou de formation),

– dans l’hypothèse d’un état pathologique antérieur, mentionner si cet état était révélé etentraînait un déficit physiologique, s’il a été révélé par l’accident, s’il a été aggravé par lui, et donner son avis sur le taux global de déficit physiologique, compte tenu de l’état préexistant,

– donner son avis sur l’importance des souffrances endurées,

– indiquer s’il existe des atteintes esthétiques temporaires et permanentes et les spécifier et les quantifier,

– dire s’il existe un préjudice d’agrément et le caractériser

-dire s’il existe un préjudice sexuel, ou un préjudice d’ établissement,

-dire, le cas échéant, si l’aide d’une tierce personne à domicile est nécessaire avantconsolidation et après consolidation, s’il existe un besoin d’appareillage et si des soins postérieurs à la consolidation des blessures sont à prévoir ; dire s’il y aura des Dépenses de Santé Futures (DSF), Frais de Logement Adapté (FLA), Frais de Véhicule Adapté (FVA).

Dans l’affirmative, donner des éléments permettant d’en chiffrer le coût,

– Dit que l’expert accomplira sa mission conformément aux dispositions des articles 264 et suivants du code de procédure civile et qu’en particulier, il pourra s’adjoindre, en cas de besoin, un sapiteur de son choix dans une spécialité autre que la sienne ;

– Dit que l’expert devra déposer un pré-rapport, le soumettre aux parties à qui il impartira un délai pour présenter leurs dires et qu’il devra répondre aux dires reçus dans le délai imparti ;

– Dit que l’expert déposera son rapport au Greffe de ce Tribunal dans un délai de SIX mois à compter de sa saisine et qu’il en fera parvenir une copie aux parties ou à leurs conseils ;

– Désigné le juge chargé du contrôle des expertises pour suivre le déroulement de la présente expertise ;

– Dit que M. [L] [J] consignera la somme de 1.200 € au greffe du tribunal dans le délai de DEUX mois à compter de la présente décision pour valoir provision sur les frais et honoraires de l’expert, faute de quoi la présente décision pourra être déclarée caduque ;

– Déclaré la présente ordonnance commune et opposable à la Mutuelle Swisslife Prévoyance et Santé et à la CPAM de la Gironde ;

– Condamné la compagnie MAAF Assurances SA à payer à M. [L] [J] la somme provisionnelle de 7.000 € à valoir sur la réparation de son préjudice corporel ;

– Condamné la compagnie MAAF Assurances SA aux dépens et la condamne à payer à M. [L] [J] la somme de 1.200 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

La MAAF Assurances a relevé appel de cette ordonnance par déclaration du 31 mai 2022 et, par conclusions déposées le 19 juillet 2022, elle demande à la cour de :

– Dire et juger recevable l’appel interjeté par la MAAF Assurances contre l’ordonnance de référé rendue le 4 avril 2022 recevable et bien fondée,

– Réformer l’ordonnance dont appel concernant la mission confiée à l’expert judiciaire et plus particulièrement concernant les postes DFTT, DFP, PA, Tierce Personne

Statuant à nouveau :

– Fixer la mission de l’expert judiciaire concernant ces postes de préjudices ainsi que suit:

*Les gênes temporaires constitutives d’un Déficit Fonctionnel Temporaire (DFT)

Que la victime exerce ou non une activité professionnelle :

. Prendre en considération toutes les gênes temporaires subies par la victime dans la réalisation de ses activités habituelles à la suite de l’accident ; en préciser la nature et la durée (notamment hospitalisation, astreinte aux soins, difficultés dans la réalisation des tâches domestiques, privation temporaire des activités privées ou d’agrément auxquelles se livre habituellement ou spécifiquement la victime, retentissement sur la vie sexuelle).

. En discuter l’imputabilité à l’accident en fonction des lésions et de leur évolution et en préciser le caractère direct et certain.

. En évaluer le caractère total ou partiel en précisant la durée et la classe pour chaque période retenue.

* Déficit Fonctionnel Permanent (DFP)

Décrire les séquelles imputables, fixer par référence à la dernière édition du “Barème indicatif d’évaluation des taux d’incapacité en droit commun”, publié par le Concours Médical, le taux éventuel résultant d’une ou plusieurs Atteinte(s) permanente(s) à l’Intégrité Physique et Psychique (AIPP) persistant au moment de la consolidation, constitutif d’un déficit fonctionnel permanent (DFP). L’AIPP se définit comme “la réduction définitive du potentiel physique, psychosensoriel ou intellectuel résultant d’une atteinte à l’intégrité anatomo-physiologique :

– médicalement constatable donc appréciable par un examen clinique approprié, complété par l’étude des examens complémentaires produits ;

– à laquelle s’ajoutent les phénomènes douloureux et les répercussions psychologiques normalement liés à l’atteinte séquellaire décrite ainsi que les conséquences habituellement et objectivement liées à cette atteinte dans la vie de tous les jours.

* Répercussions des séquelles sur les activités d’agrément constitutives d’un Préjudice d’Agrément (PA)

Lorsque la victime fait état d’une répercussion dans l’exercice de ses activités spécifiques sportives ou de loisirs effectivement pratiquées antérieurement à l’accident, émettre un avis motivé en discutant son imputabilité à l’accident, aux lésions et aux séquelles retenues.

Se prononcer sur son caractère direct et certain et son aspect définitif.

* Assistance par tierce personne

«Assistance par Tierce Personne (ATP) : que la victime soit consolidée ou non, dresser un bilan situationnel en décrivant avec précision les modalités de réalisation des différents actes de la vie quotidienne et le déroulement d’une journée (24 heures), d’une semaine…, puis, en s’aidant, si besoin des professionnels nécessaires et en tenant compte de l’âge et de l’éventuel état antérieur, décrire le degré d’autonomie de la victime et les aides matérielles d’ores et déjà mises en ‘uvre ; pour chacun des actes de la vie courante non couverts par les aides matérielles déjà mises en ‘uvre, décrire les besoins en aide humaine, les possibilités d’aide matérielle, et l’incidence éventuelle de ces aides matérielles sur les besoins en aide humaine; pour les aides techniques, préciser leur nature et la fréquence de leur renouvellement ; pour les possibilités d’adaptation du logement, décrire les possibilités domotiques disponibles et préciser si ce matériel peut être mis en ‘uvre dans le logement actuel ou nécessite un

changement de logement, étant entendu qu’il appartient à l’expert de se limiter à décrire l’environnement en question, et au professionnel spécialisé de décrire les aménagements immobiliers nécessaires et l’aménagement d’un véhicule adapté ; pour les besoins en aide humaine, déterminer, les besoins de la victime, que cette aide soit apportée par l’entourage ou par du personnel extérieur, en précisant sa nature, ses modalités d’intervention et sa durée (aide active pour les actes réalisés sur la victime hors actes de soins et sur son environnement ; aide passive pour les actes de présence) ; concernant les séquelles neuropsychologiques graves, préciser leurs conséquences quand elles sont à l’origine d’un déficit majeur d’initiative ou de troubles du comportement et indiquer si une mesure de protection a été prise ;

– Confirmer l’ordonnance de référé pour le surplus.

– Dire que chacune des parties conservera ses propres frais et dépens

Par conclusions déposées le 21 novembre 2022, M. [J] demande à la cour de :

A titre principal :

– Constater que les demandes de la MAAF sont sans objet et la déclarer irrecevable en ses demandes,

A titre subsidiaire à défaut de la déclarer irrecevable :

– Débouter la MAAF de l’intégralité de ses demandes

En tout état de cause :

– Confirmer l’ordonnance en date du 4 avril 2022

– Condamner la MAAF à lui payer une somme de 2.500 € sur le fondement l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens.

La Mutuelle Swisslife Prévoyance et Santé et la CPAM de la Gironde n’ont pas constitué avocat. La déclaration d’appel et les conclusions des parties leur ont été régulièrement signifiées.

Au visa de l’article 905 du code de procédure civile, l’affaire a fait l’objet le 23 juin 2022 d’une ordonnance de fixation à bref délai à l’audience du 8 décembre 2022 avec clôture de la procédure le 24 novembre 2022.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la recevabilité de la demande de modification de la mission d’expertise

La MAAF Assurances a interjeté appel de la décision déférée afin de voir modifier certains chefs de la mission confiée à l’expert.

Il est constant que l’ordonnance de référé dont s’agit est exécutoire à titre provisoire et que la MAAF Assurances n’a pas sollicité la suspension de l’exécution provisoire de cette décision.

Il est tout aussi acquis que les opérations d’expertise, auxquelles la MAAF Assurances a participé, se sont déroulées le 26 septembre 2022 et que le rapport d’expertise définitif a été déposé le 15 novembre 2022.

Or, dès lors que l’expert a achevé sa mission par le dépôt de son rapport définitif, la demande de modification des chefs de sa mission est devenue sans objet.

Sur les dépens et les frais irrépétibles

Aux termes de l’article 696, alinéa premier, du code de procédure civile, la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n’en mette la totalité ou une fraction à la charge d’une autre partie. La MAAF Assurances sera condamnée aux dépens d’appel.

En application de l’article 700 du code de procédure civile, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer à l’autre partie la somme qu’il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Sur ce fondement, la MAAF Assurances sera condamnée à payer la somme de 1.500 euros à M. [J].

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Déclare sans objet la demande de modification d’expertise formée par la MAAF Assurances,

Confirme l’ordonnance déférée,

Y ajoutant,

Condamne la MAAF Assurances à payer à M. [J] la somme de 1.500 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure,

Condamne la MAAF Assurances aux dépens d’appel.

Le présent arrêt a été signé par Monsieur Roland POTEE, président, et par Madame Séléna BONNET, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le Greffier, Le Président,

 


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