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Arrêt n°
du 18/10/2023
N° RG 22/01023
IF/ML
Formule exécutoire le :
à :
COUR D’APPEL DE REIMS
CHAMBRE SOCIALE
Arrêt du 18 octobre 2023
APPELANT :
d’un jugement rendu le 12 avril 2022 par le Conseil de Prud’hommes de CHARLEVILLE-MEZIERES, section Encadrement (n° F21/00015)
Monsieur [M] [H]
[Adresse 3]
[Localité 2] / FRANCE
Représenté par la SCP LEDOUX FERRI RIOU-JACQUES TOUCHON MAYOLET, avocats au barreau des ARDENNES
INTIMÉE :
S.A.S.U. SEMAP COMPOSITE
[Adresse 4]
[Localité 1]
Représentée par la SELAS FIDAL DIRECTION PARIS, avocats au barreau de REIMS
DÉBATS :
En audience publique, en application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 06 septembre 2023, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Madame Isabelle FALEUR, conseiller, chargé du rapport, qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré ; elle a été mise en délibéré au 18 octobre 2023.
COMPOSITION DE LA COUR lors du délibéré :
Monsieur François M”LIN, président de chambre
Madame Marie-Lisette SAUTRON, conseiller
Madame Isabelle FALEUR, conseiller
GREFFIER lors des débats :
Madame Maureen LANGLET, greffier placé
ARRÊT :
Prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour d’appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile, et signé par Monsieur François M”LIN, président de chambre, et Madame Maureen LANGLET, greffier placé, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
* * * * *
Faits et procédure,
La société SEMAP COMPOSITE, créée en 2013, est spécialisée dans la fabrication de chambres de télécommunication en matière plastique.
Selon contrat à durée indéterminée en date du 1er juillet 2014, elle a embauché Monsieur [M] [H] en qualité de directeur des opérations.
Monsieur [M] [H] relevait du statut cadre et bénéficiait d’une convention annuelle de forfait en jours de 216 jours. Sa rémunération fixe s’élevait à 120’000 euros bruts annuels.
La convention collective applicable était celle de la plasturgie.
Rencontrant des difficultés économiques, la société SEMAP COMPOSITE a engagé une procédure de licenciement pour motif économique et a convoqué Monsieur [M] [H] à un entretien préalable fixé au 9 septembre 2020, à l’occasion duquel il s’est présenté, assisté d’un représentant syndical.
Le 17 septembre 2020, Monsieur [M] [H] a adhéré au contrat de sécurisation professionnelle qui lui a été proposé lors de l’entretien préalable.
Le contrat de travail a été rompu à l’issu du délai de réflexion, soit le 1er octobre 2020.
Selon requête en date du 21 janvier 2021, Monsieur [M] [H] a saisi le conseil de prud’hommes de Charleville-Mézières aux fins d’obtenir un rappel de salaire lié à la nullité de la convention de forfait jours, le paiement de divers dommages et intérêts en raison du non-respect par l’employeur de ses obligations et en réparation de son préjudice moral, le paiement de la contrepartie financière de la clause de non-concurrence et le paiement de dommage et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Par jugement du 12 avril 2020, le conseil de prud’hommes de Charleville-Mézières a :
– dit que la clause de forfait annuel en jours prévue au contrat de travail de Monsieur [M] [H] était privée d’effet
– condamné la société SEMAP COMPOSITE à payer à Monsieur [M] [H] une indemnité de non-concurrence à hauteur de 37’022,40 euros bruts outre la somme de 3702,24 euros bruts de congés payés afférents
– condamné Monsieur [M] [H] à rembourser à la société SEMAP COMPOSITE la somme de 16’339,56 euros de salaires indûment perçus au titre des jours de RTT pris de 2017 à 2020
– débouté Monsieur [M] [H] de l’ensemble de ses autres demandes
– débouté la société SEMAP COMPOSITE du surplus de ses demandes reconventionnelles
– condamné Monsieur [M] [H] à payer à la société SEMAP COMPOSITE la somme de 100 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile
– condamné Monsieur [M] [H] aux dépens.
Monsieur [M] [H] a interjeté appel le 12 mai 2022 pour voir infirmer le jugement de première instance sauf en ce qu’il a dit que la clause de forfait annuel en jour était privée d’effet.
L’ordonnance de clôture a été rendue le 3 juillet 2023 et l’affaire fixée à l’audience du 6 septembre 2023 pour être mise en délibéré au 18 octobre 2023.
Prétentions et moyens des parties,
Au terme de ses conclusions notifiées par RPVA le 29 juin 2023, auxquelles, en application de l’article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé pour un plus ample exposé de ses moyens, Monsieur [M] [H] demande à la cour :
*D’INFIRMER la décision entreprise en ce que le conseil des prud’hommes
– a limité la condamnation de la société SEMAP COMPOSITE à lui payer une indemnité de non-concurrence à hauteur de 37’022,40 euros bruts et à lui verser une indemnité de congés payés afférente d’un montant de 3702,24 euros bruts
– l’a condamné à rembourser à la société SEMAP COMPOSITE les salaires indûment perçus au titre des jours de RTT pris de 2017 à 2020 soit une somme de 16’339,56 euros
– l’a débouté de l’ensemble de ses autres demandes
– l’a condamné à payer à la société SEMAP COMPOSITE la somme de 100 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile
– l’a condamné aux dépens
– et plus généralement de toutes les dispositions lui faisant grief bien que non visées au dispositif, selon les moyens développés dans les conclusions ;
Et dans cette limite, statuant à nouveau,
*DE CONDAMNER la société SEMAP COMPOSITE à lui payer les sommes suivantes :
. 10’000 euros de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi du fait du défaut de mise à disposition d’un véhicule conformément à l’engagement contractuel
. 51’533,45 euros de rappel de salaire lié à la nullité de la convention de forfait en jours
. 5153,34 euros d’indemnité de congés payés sur rappel de salaire
. 20’000 euros de dommages et intérêts pour non-respect par l’employeur de ses obligations
. 40’000 euros au titre de la contrepartie financière de la clause de non-concurrence
. 4 000 euros d’indemnité de congés payés sur la contrepartie financière de la clause de non-concurrence
. 70’000 euros de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse
. 10’000 euros de dommages et intérêts pour préjudice moral
. 4 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile pour les frais irrépétibles de première instance
. 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile pour les frais irrépétibles de la procédure d’appel ;
*DE DEBOUTER la société SEMAP COMPOSITE de ses demandes plus amples ou contraires ;
*DE CONDAMNER la société SEMAP COMPOSITE aux dépens de première instance et aux dépens d’appel ;
Au soutien de ses demandes, Monsieur [M] [H] fait valoir que contrairement aux clauses de son contrat de travail, la société SEMAP COMPOSITE ne lui a mis un véhicule de fonction à disposition qu’au mois de janvier 2019 et que, pour le débouter de ses demandes de dommages et intérêts à ce titre, le conseil de prud’hommes a violé les règles d’interprétation des contrats telles que prévues aux articles 1188, 1190 et 1191 du Code civil dans la mesure où, si son contrat de travail ne précisait pas qu’il s’agissait d’un véhicule de fonction, il ne précisait pas davantage qu’il s’agissait seulement d’un véhicule de service, ce qui doit conduire à interpréter la clause dans le sens qui lui est le plus favorable.
Il souligne que le fait que la société SEMAP COMPOSITE ait, finalement, mis à sa disposition un véhicule de fonction à compter du mois de janvier 2019 établit que l’intention des parties était incontestablement de prévoir l’attribution d’un tel véhicule, lequel faisait partie des éléments de négociation et de rémunération dans le cadre de son recrutement.
Monsieur [M] [H] soutient que, contrairement aux dispositions de l’accord de branche de la plasturgie sur la convention de forfait jours et aux dispositions de l’article L 3121-48 du code du travail, il n’a jamais bénéficié des entretiens annuels individuels et qu’il a été amené à travailler au-delà de la durée maximale quotidienne de travail fixée par les dispositions légales et conventionnelles, ce qui justifie la nullité de la convention de forfait en jours et le paiement des heures de travail réalisées de manière hebdomadaire au-delà de 35 heures.
Monsieur [M] [H] souligne que le premier juge a fait peser sur lui seul la charge de la preuve des heures de travail réalisées.
Il indique qu’il fournit le décompte précis des heures de travail qu’il a effectuées de manière quotidienne, en produisant les fiches de suivi de son temps de travail, le temps de suivi pour le crédit impôt recherche, et ses agendas et souligne, s’agissant des temps de pause méridienne que l’employeur conteste, qu’il était alors en déjeuners d’affaires ce dont il justifiait, chaque mois, par une note de frais détaillée avec liste des invités, nature de la mission et de la dépense, adressée au service comptabilité.
Monsieur [M] [H] conteste sa condamnation à rembourser le salaire payé au titre des jours de RTT pris en faisant valoir que, dès lors qu’aucun décompte précis du temps de travail n’est produit par son employeur, il n’est pas établi que l’octroi de ces jours de RTT a eu pour effet de porter la durée hebdomadaire de travail en deçà de 35 heures.
Il souligne par ailleurs que le fait de payer un salarié au-delà du minimum conventionnel ne permet pas à l’employeur de s’exonérer du paiement des heures supplémentaires après annulation de la convention de forfait en jours.
Monsieur [M] [H] indique enfin que sa délégation de pouvoir ne portait pas sur la gestion du temps de travail des salariés et souligne qu’il demandait expressément à son employeur à pouvoir bénéficier de jours de RTT ce qui n’aurait pas été le cas si sa délégation de pouvoir comprenait la gestion du temps de travail des salariés.
Monsieur [M] [H] reproche à son employeur une violation de l’obligation de sécurité en raison du dépassement des amplitudes maximum de temps de travail et affirme que ce dernier a conservé l’obligation de contrôler son temps de travail dès lors que, même s’il était autonome dans l’organisation de ses journées de travail et de son emploi du temps, il ne lui a pas été conféré un statut de cadre dirigeant.
Il expose qu’il a retrouvé un poste au sein de l’éducation nationale ce qui ne peut être considéré comme étant susceptible de concurrencer l’activité de la société SEMAP COMPOSITE et il fait valoir que c’est à tort que le premier juge a limité le montant de la contrepartie financière de la clause de non concurrence dès lors que la mise en chômage partiel n’a pas pour effet de modifier le contrat de travail et que la rémunération servant de base de calcul doit être celle qu’il aurait perçue s’il n’avait pas été au chômage partiel.
Monsieur [M] [H] conteste les difficultés économiques de la société SEMAP COMPOSITE. Il souligne que le bilan de l’année 2020 démontre que la situation sanitaire liée à l’épidémie de covid 19 n’a pas empêché la société de réaliser un meilleur résultat qu’au titre de l’exercice précédent et ajoute que sa pérennité était par ailleurs assurée par la signature d’un contrat de cinq ans avec la société ORANGE à compter du 1er janvier 2019, représentant plus de 80 % de son chiffre d’affaires.
Il fait valoir que la baisse significative du chiffre d’affaires telle que prévue par l’article L 1233-3 du code du travail constitue une présomption simple de difficultés économiques puisque le juge conserve toutes ses prérogatives pour apprécier le caractère réel et sérieux de la rupture.
Rappelant que le juge doit se placer à la date du licenciement pour apprécier le motif de celui-ci, il souligne que le conseil de prud’hommes devait prendre en considération les données économiques des mois de juillet, août et septembre 2020 et ajoute que la société SEMAP COMPOSITE ne produit aucun bilan mais seulement une attestation de son expert-comptable, qui d’une part ne correspond pas à la période de référence exigée par les textes et qui, d’autre part, exprime de manière tronquée le chiffre d’affaires, en net et non en brut.
Monsieur [M] [H] soutient que la crise sanitaire n’a constitué qu’une difficulté conjoncturelle et qu’il a été licencié alors que l’activité économique de l’entreprise connaissait un regain notable.
Il fait valoir que son employeur a manqué à son obligation de reclassement en recherchant seulement, au sein du groupe, un poste équivalent alors qu’il devait, faute de poste équivalent, lui proposer des postes de catégorie inférieure, qui en l’espèce étaient disponibles puisque le registre du personnel de la société SEMAP établit notamment qu’un cariste a été embauché le 14 septembre 2020.
Il expose que l’adhésion du salarié à un contrat de sécurisation professionnelle entraîne une rupture du contrat de travail qui est réputée intervenir d’un commun accord mais qui ne le prive pas de la possibilité d’en contester le motif économique sur la base d’un manquement à l’obligation de reclassement.
Monsieur [M] [H] expose qu’il avait plus de six ans d’ancienneté, qu’il est âgé de 54 ans et que la perte de revenus liée à la rupture du contrat de travail s’accompagne d’une perte sur ses droits futurs à la retraite.
Il souligne le caractère vexatoire des conditions de la rupture du contrat de travail dès lors qu’il a reçu une convocation à entretien préalable sans que la question des performances économiques de la société n’ait été abordée avec lui et dans la mesure où, le jour de l’entretien préalable, tous ses codes d’accès au serveur de l’entreprise ont été bloqués, les serrures changées, la société ayant par ailleurs mandaté un huissier pour lui remettre les documents de rupture et reprendre possession du matériel professionnel.
Au terme de ses conclusions notifiées par RPVA le 30 juin 2023, auxquelles en application de l’article 455 du code de procédure civile, il est renvoyé pour un plus ample exposé de ses moyens, la société SEMAP COMPOSITE demande à la cour :
‘ titre principal
– DE JUGER Monsieur [M] [H] recevable mais mal fondé en son appel ;
– DE DEBOUTER Monsieur [M] [H] de l’intégralité des fins de son appel et de l’intégralité de ses demandes ;
– DE LA JUGER recevable et bien fondée en ses demandes incidentes ;
Sur la validité de la convention de forfait jours
– DE CONFIRMER le jugement dont appel en ce que Monsieur [M] [H] a été débouté de sa demande de rappel d’heures supplémentaires ;
– DE CONFIRMER le jugement dont appel en ce que Monsieur [M] [H] a été débouté de sa demande de dommages et intérêts pour non-respect par l’employeur de son obligation de sécurité ;
– DE CONFIRMER le jugement dont appel en ce que Monsieur [M] [H] a été condamné à lui rembourser la somme de 16’399,56 euros de salaires indûment perçus correspondant aux jours de RTT ;
– D’INFIRMER le jugement dont appel en ce qu’il a jugé que la convention de forfait en jour était privée d’effet ;
– DE DEBOUTER Monsieur [M] [H] de l’intégralité de ses demandes ;
– D’INFIRMER le jugement dont appel en ce qu’il l’a déboutée de sa demande tendant à voir Monsieur [M] [H] condamné à lui rembourser la somme de 164’664 euros correspondant à la différence indûment perçue sur trois années entre son salaire de base et le salaire prévu par la convention collective ;
– DE CONDAMNER Monsieur [M] [H] à lui rembourser la somme de 164’664 euros correspondant à la différence indûment perçue sur trois années entre son salaire de base et le salaire prévu par la convention collective ;
‘ titre subsidiaire, si la cour devait considérer que la convention de forfait en jours est privée d’effet
– DE CONFIRMER le jugement dont appel en ce que Monsieur [M] [H] a été débouté de sa demande de rappel d’heures supplémentaires ;
– DE CONFIRMER le jugement dont appel en ce que Monsieur [M] [H] a été débouté de sa demande de dommages et intérêts pour non-respect par l’employeur de son obligation de sécurité ;
– DE CONFIRMER le jugement dont appel en ce que Monsieur [M] [H] a été condamné à lui rembourser le salaire correspondant aux jours de RTT, indûment perçu à hauteur de 16’399,56 euros ;
– DE DEBOUTER Monsieur [M] [H] de sa demande au titre du rappel d’heures supplémentaires ;
– DE CONDAMNER Monsieur [M] [H] à lui rembourser le salaire correspondant aux jour de RTT, indûment perçu à hauteur de 16’399,56 euros ;
Sur le licenciement pour motif économique
– DE CONFIRMER le jugement dont appel ;
‘ titre subsidiaire, si la cour devait dire le licenciement sans cause réelle et sérieuse
– DE DEBOUTER Monsieur [M] [H] de sa demande au titre des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
– DE FIXER le montant des dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse à trois mois de salaire en application du barème légal ;
Sur la clause de non-concurrence
– D’INFIRMER le jugement dont appel en ce qu’elle a été condamnée à payer à Monsieur [M] [H] la somme de 37’022,40 euros outre l’indemnité compensatrice de congés payés afférents ;
– DE DEBOUTER Monsieur [M] [H] de sa demande au titre de la contrepartie financière à la clause de non-concurrence et au titre de l’indemnité compensatrice de congés payés afférents ;
A titre subsidiaire si la cour devait confirmer le jugement de ce chef
– DE CONFIRMER le jugement en ce que le conseil de prud’hommes a fixé l’indemnité au titre de la clause de non-concurrence à la somme de 37’022,40 euros outre l’indemnité compensatrice de congés payés afférents ;
En toute hypothèse
– DE CONFIRMER le jugement dont appel en ce que Monsieur [M] [H] a été débouté de sa demande de dommages et intérêts pour préjudice moral ;
– DE CONFIRMER le jugement dont appel en ce que Monsieur [M] [H] a été débouté de sa demande de dommages et intérêts pour défaut de mise à disposition d’un véhicule de fonction ;
– DE DEBOUTER Monsieur [M] [H] de sa demande de dommages et intérêts pour préjudice moral ;
– DE DEBOUTER Monsieur [M] [H] de sa demande de dommages et intérêts pour défaut de mise à disposition d’un véhicule de fonction ;
Au surplus
– DE CONDAMNER Monsieur [M] [H] à lui payer la somme de 4000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;
– DE CONDAMNER Monsieur [M] [H] aux entiers frais et dépens.
La société SEMAP COMPOSITE fait valoir que la clause du contrat de travail de Monsieur [M] [H], relative à la mise à disposition d’un véhicule, n’est affectée d’aucune ambiguïté et que si l’intention des parties avait été de considérer qu’il s’agissait d’un véhicule de fonction, un avantage en nature aurait été mentionné dans le contrat de travail et aurait figuré sur les bulletins de salaire dès l’embauche du salarié.
Elle souligne qu’elle a toujours respecté son obligation en mettant un véhicule à la disposition de Monsieur [M] [H], pour ses déplacements professionnels, et que, lorsqu’à compter du mois de janvier 2019 elle a fait droit à sa demande d’augmentation de salaire en lui octroyant un véhicule de fonction, dont il jouissait de manière permanente à la fois pour ses déplacements professionnels mais également pour ses déplacements personnels, elle a fait figurer cet avantage en nature sur les bulletins de salaire.
Concernant la convention de forfait en jours, la société SEMAP COMPOSITE fait valoir qu’en sa qualité de directeur des opérations, Monsieur [M] [H] avait notamment pour attribution d’agir en tant que conseiller préférentiel auprès de l’ensemble des dirigeants de l’entreprise relativement à toutes ses activités, de quelque nature qu’elles soient, de veiller au respect des dispositions légales et réglementaires et qu’au surplus il s’était vu confier une délégation de pouvoir dès sa prise de fonction, par laquelle il était investi de tous pouvoirs dans le cadre des activités de la société aux fins d’agir en son nom et pour son compte et de prendre toute mesure et toute décision, notamment en ce qui concernait le droit du travail et la sécurité sociale.
Elle soutient qu’au terme de cette délégation de pouvoir, Monsieur [M] [H] s’était engagé à exercer la responsabilité de l’employeur relative à l’application et au respect de la législation du travail, de sorte qu’il lui incombait d’organiser son entretien individuel au nom et pour le compte du président, ce qu’il n’a pas fait, au mépris de ses obligations découlant de son contrat de travail et de la délégation de pouvoir qu’il avait acceptée.
Elle souligne que ce manquement le prive, en application du principe selon lequel nul ne peut se prévaloir de sa propre turpitude, de tirer argument de l’absence d’entretien annuel pour solliciter la nullité de sa convention annuelle de forfait en jours.
La société SEMAP COMPOSITE soutient que si l’annulation de la clause de forfait en jours est le préalable à une demande d’heures supplémentaires, elle n’implique pas la condamnation automatique de l’employeur au paiement de telles heures.
Elle conteste les éléments présentés par Monsieur [M] [H] au soutien de sa demande de rappel de salaire et souligne que les plannings produits sont non seulement illisibles mais au surplus reconstitués par les soins du salarié, à posteriori, pour les besoins de la cause.
Elle expose que, pendant l’exécution du contrat de travail, Monsieur [M] [H] ne lui a transmis aucun relevé de ses horaires de travail puisque, compte tenu de son autonomie liée à son statut de cadre au forfait, elle n’avait ni à contrôler ni même à connaître son horaire de travail. Elle conteste la fiabilité des relevés hebdomadaires que Monsieur [M] [H] a établis sans qu’ils soient étayés par des éléments extrinsèques et elle souligne que ces relevés comportent des erreurs et ne déduisent pas certains temps de pause déjeuner.
La société SEMAP COMPOSITE conteste avoir manqué à son obligation de sécurité en ne respectant pas les amplitudes maximales de travail, fait valoir que Monsieur [M] [H] bénéficiait de jours de congés payés et de RTT afin de ne pas dépasser le nombre de jours fixés dans le cadre de son forfait et elle souligne que dans le cadre de l’avenant à son contrat de travail du 27 avril 2017, le salarié a expressément reconnu pouvoir, sauf impondérable, accomplir sa mission dans le cadre du forfait annuel de 216 jours.
La société SEMAP COMPOSITE soutient que lorsqu’une convention de forfait jour est privée d’effet, le paiement des jours de réduction du temps de travail, accordés en exécution de la convention de forfait, devient indû et elle sollicite sur ce fondement le paiement des 28,5 jours de RTT accordés à Monsieur [M] [H] en exécution de la convention de forfait en jours, soit 23,5 jours pris et 5 jours indemnisés à la rupture du contrat de travail.
Elle soutient par ailleurs que la rémunération fixe de Monsieur [M] [H] n’a été portée à 123’408 euros par an qu’en contrepartie de la convention de forfait annuel en jour, et que si cette convention devait être considérée comme privée d’effet, il y aurait lieu de réduire la rémunération du salarié au minimum conventionnel soit la somme annuelle de 68’520 euros et de le condamner à restituer le trop-perçu soit la somme de 164’664 euros.
La société SEMAP COMPOSITE fait valoir que le non-versement de la contrepartie financière a pour simple effet de rendre la clause de non-concurrence inopposable au salarié qui se retrouve donc libéré de l’interdiction de concurrence prévue contractuellement et souligne que Monsieur [M] [H] ne justifie ni avoir respecté l’obligation de non-concurrence prévue par son contrat de travail et ni avoir dû renoncer à des postes dans des entreprises dont les activités étaient susceptibles de la concurrencer.
Elle ajoute que Monsieur [M] [H] a détourné de nombreux documents professionnels confidentiels en violation de sa clause de non-concurrence et notamment les comptes et bilans annuels de l’année 2018 et 2019 et les formulaires de déclaration à la direction générale des finances publiques justificatives du crédit d’impôt en faveur de la recherche au titre des dépenses engagées pour les années 2016 à 2019.
Elle expose, à titre subsidiaire que l’indemnité au titre de la clause de non-concurrence ne pourrait dépasser la somme de 37’022,40 euros dans la mesure où les primes de vacances et de fin d’année ne doivent pas être prises en compte pour déterminer le salaire de référence.
La société SEMAP COMPOSITE soutient, sur le fondement de l’article L 1233- 3 du code du travail que, dans le cadre de son activité elle répond à des marchés publics et privés, que la société FRANS BONHOMME est l’un de ses principaux clients, représentant 80 % de son chiffre d’affaires, que cette société a rencontré d’importantes difficultés économiques au cours du premier semestre 2020, qui l’ont directement impactée. Elle ajoute que dans le contexte de la crise sanitaire liée au covid 19, elle a été contrainte d’arrêter son activité et de recourir au chômage partiel mais que ni ce dispositif, ni le recours au PGE, ni la demande de report des échéances des prêts contractés n’ont été suffisants, en raison de ses graves difficultés de trésorerie liées aux difficultés de paiement rencontrées par son principal client la société FRANS BOHOMME.
Elle expose qu’elle a dû faire face à une baisse très importante de 39,32 % de son chiffre d’affaires entre les mois de mars et août 2020 en comparaison avec la même période en 2019, que cette baisse du chiffre d’affaires est établie tant par l’attestation de son expert-comptable que par les déclarations de TVA des mois de mars au mois d’août 2020.
Elle souligne que dans ce contexte, elle ne pouvait plus assumer le salaire annuel de Monsieur [M] [H] et que la décision de le licencier est une décision de gestion indispensable à la pérennité de l’entreprise dans le contexte de la crise sanitaire liée au covid 19 qui a provoqué un choc majeur sur l’activité économique mondiale et une chute brutale de son activité.
Elle conteste la période de référence retenue par Monsieur [M] [H] pour apprécier les difficultés économiques, faisant valoir que cette période ne pouvait inclure le mois de septembre dès lors qu’elle avait pour obligation d’informer le salarié du motif économique au plus tard au moment de l’acceptation du contrat de sécurisation professionnelle, soit au plus tard le 17 septembre 2020.
La société SEMAP COMPOSITE ajoute que, selon la jurisprudence de la chambre sociale de la Cour de cassation, les éléments à prendre en considération pour caractériser le motif économique sont les mois du ou des trimestres connus précédant la rupture du contrat de travail.
La société SEMAP COMPOSITE fait valoir que son obligation de reclassement a pris fin à l’adhésion de Monsieur [M] [H] au contrat de sécurisation professionnelle, le 17 septembre 2020, date à laquelle aucun reclassement n’était possible sur un poste de même catégorie ou d’une catégorie inférieure faute de poste disponible, que ce soit en son sein ou au sein des autres entités du groupe, les sociétés SEMAP et FBA.
Elle ajoute que l’adhésion au contrat de sécurisation professionnelle met fin à l’obligation de reclassement et qu’il ne peut être imposé à l’employeur, dans le cadre d’une recherche de reclassement, d’assurer la formation initiale qui fait défaut au salarié.
Elle précise qu’elle a recruté le 14 septembre 2020, un cariste polyvalent, poste nécessitant d’être titulaire du permis CACES, raison pour laquelle elle ne l’a pas proposé à Monsieur [M] [H], qui ne disposait pas d’un tel permis et n’aurait pu pourvoir ce poste, même après une adaptation ou une formation complémentaire dans la mesure où le certificat d’aptitude à la conduite en sécurité est un examen qui valide les connaissances et le savoir-faire d’un salarié pour la conduite d’engins spécifiques.
‘ titre subsidiaire, la société SEMAP COMPOSITE fait valoir que les dommages et intérêts dûs à Monsieur [M] [H] pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ne pourraient excéder l’équivalent de trois mois de salaire, faute pour ce dernier de produire les justificatifs de sa situation professionnelle actuelle.
La société SEMAP COMPOSITE expose qu’elle a été contrainte de bloquer les codes d’accès de Monsieur [M] [H] au serveur de l’entreprise et de mandater un huissier de justice au jour de la restitution du matériel professionnel après avoir constaté qu’il avait envoyé vers sa boîte mail personnelle une attestation rédigée au nom du PDG, en format Word, pour pouvoir l’utiliser à son insu et qu’il avait procédé à la suppression de plus de 80 % des courriels et des fichiers clients et fournisseurs de l’entreprise, ce qui a nécessité de nombreux mois et un temps de travail très important pour les reconstituer, sans certitude de pouvoir retrouver l’intégralité des éléments supprimés.
Motifs,
Sur la demande tendant à voir écarter les conclusions n° 4 de la société SEMAP COMPOSITE notifiées par RPVA le 30 juin 2023
‘ l’audience, Monsieur [M] [H] demande à la cour d’écarter les’conclusions n°4 notifiées par la société SEMAP COMPOSITE le 30 juin 2023 soit 3 jours avant l’audience ainsi que les nouvelles pièces communiquées n° 65 et 66, composées d’une description du poste de cariste, émanant de l’AFPA, et d’un extrait d’article de presse des 3 et 15 juin 2020 sur la situation de la société Frans Bonhomme.
Le principe de la contradiction posé par les’articles 15 et 16 du code de procédure civile,’emportant obligation aux parties de se faire connaître mutuellement en temps utile les moyens de fait sur lesquelles elles fondent leurs prétentions, les éléments de preuve qu’elles produisent et les moyens de droit qu’elles invoquent afin que chacun soit en mesure d’organiser sa défense, fait en principe obstacle à ce qu’une partie verse aux débats quelques jours avant l’ordonnance de clôture de nouvelles pièces et conclusions, et que celles-ci puissent être retenues.
Cependant, la cour constate que les parties ont pu amplement échanger leurs moyens et pièces dès lors que chacune des parties a conclu à quatre reprises et que le conseiller de la mise en état, à leur demande et pour leur permettre de conclure une quatrième fois, a ordonné le report de l’ordonnance de clôture du 26 juin au 3 juillet 2023.
La cour constate également que les conclusions numéro 4 de la société SEMAP COMPOSITE ne comportent pas de nouvelles prétentions, qu’elles sont la réponse aux conclusions n°4 notifiées le 29 juin 2023 par Monsieur [M] [H], que la nouvelle pièce que l’intimée communique en numéro 65 est la réponse aux nouvelles pièce communiquées en numéro 31 et 32 le 29 juin 2023 par l’appelant et que sa nouvelle pièce 65 s’inscrit dans le droit fil des pièces précédemment communiquées et afférentes au licenciement économique.
En conséquence, il n’y a pas lieu d’écarter ces conclusions et pièces.
I / Sur l’exécution du contrat de travail
Sur la demande liée au véhicule
Le contrat de travail à durée indéterminée de Monsieur [M] [H] signé le 1er juillet 2014 stipule : « équipements et frais professionnels : la société SEMAP COMPOSITE mettra à la disposition de Monsieur [M] [H] les équipements requis par ses fonctions et octroyés conformément aux pratiques internes.
Monsieur [M] [H] sera remboursé, sur les justificatifs, des frais raisonnablement occasionnés dans l’exercice de ses fonctions.
La société SEMAP COMPOSITE mettra à disposition de Monsieur [M] [H] un téléphone portable, un ordinateur, un véhicule automobile de type Audi Q5 ou équivalent, une carte bancaire ainsi qu’une carte essence.
Il est entendu que Monsieur [M] [H] devra respecter les règles internes relatives aux dépenses pouvant être engagées à titre de frais professionnels et que la société SEMAP COMPOSITE se réserve quant à elle, le droit de modifier ces règles internes à tout moment »
Ainsi que l’a relevé le premier juge, cette clause, qui ne souffre d’aucune ambiguïté nécessitant une interprétation, prévoit seulement la mise à disposition d’un véhicule à usage professionnel, et il est indifférent qu’à partir du mois de janvier 2020, la société SEMAP COMPOSITE ait décidé d’octroyer à Monsieur [M] [H] un véhicule de fonction assorti, sur ses bulletins de salaire, d’un avantage en nature.
Monsieur [M] [H] ne conteste pas que pour la période du 1er juillet 2014 au 1er janvier 2019, un véhicule a été mis à sa disposition pour ses déplacements professionnels.
La société SEMAP COMPOSITE a rempli ses obligations contractuelles et le jugement sera confirmé sur ce point.
Sur l’application de la convention de forfait jours et le rappel de salaire
Il résulte de l’article L 3121-55 du code du travail que la forfaitisation de la durée du travail doit faire l’objet de l’accord du salarié et d’une convention individuelle de forfait établie par écrit.
En application de l’article L 3121-63 du code du travail, les forfaits annuels en heures ou en jours sur l’année sont mis en place par un accord collectif d’entreprise ou d’établissement ou, à défaut, par une convention ou un accord de branche.
L’annexe VI du 17 octobre 2000 de la Convention collective nationale de la plasturgie du 1er juillet 1960, modifiée par l’accord du 15 mai 2013 ‘ Organisation et durée du temps de travail dans les entreprises relevant de la convention collective nationale de la plasturgie ‘ stipule :
– article 5.5. Forfait annuel en jours : la conclusion de conventions individuelles de forfait en jours sur l’année peut être faite sur la base d’un accord collectif d’entreprise ou d’établissement ou, à défaut, du présent accord. Les entreprises utilisant le forfait en jours en application du présent accord devront respecter les points qui suivent
– article 5.5.4.1. Durée quotidienne et hebdomadaire de travail : Nonobstant les dispositions de l’article L. 3121-48 du code du travail, afin de garantir une durée raisonnable, les limites suivantes devront être respectées :
– la durée quotidienne maximale prévue à l’article L. 3121-34 du code du travail,
– aux durées hebdomadaires maximales de travail prévues au 1er alinéa de l’article L. 3121-35 et aux 1er et 2e alinéas de l’article L. 3121-36 (sic)
– article 5.5.4.2. Repos hebdomadaire : En application des dispositions de l’article L. 3132-2 du code du travail, et bien que le temps de travail puisse être réparti sur certains ou sur tous les jours ouvrables de la semaine, en journée ou demi-journée de travail, le salarié doit bénéficier du temps de repos hebdomadaire prévu par l’article L. 3132-2 du code du travail.
Il est préconisé – au regard des particularités du forfait en jours – que la durée du repos hebdomadaire soit de 2 jours consécutifs. A défaut de pouvoir suivre cette préconisation, le nombre de semaines pendant lesquelles le salarié travaille 6 jours sur 7 doit être limité à 10 par année.
– article 5.5.6. Suivi de l’organisation du travail du salarié et de sa charge de travail : Les entreprises veilleront à prendre toute disposition afin que la charge de travail, le temps de travail effectif et les amplitudes des journées de travail demeurent adaptés et raisonnables et assurer une bonne répartition, dans le temps, du travail des intéressés.
Pour ce faire, et avec l’appui du salarié, les entreprises devront adopter les mécanismes de suivi et de contrôle ci-après définis. Il est expressément entendu que ces modalités de suivi et de contrôle ont pour objectifs de concourir à préserver la santé du salarié et ne sauraient caractériser une réduction de son autonomie.
– article 5.5.6.1. Suivi régulier par le supérieur hiérarchique : Le supérieur hiérarchique du salarié ayant conclu une convention de forfait défini en jours assure le suivi régulier de l’organisation du travail de l’intéressé et de sa charge de travail ainsi que de l’adéquation entre les objectifs et les missions assignés au salarié avec les moyens dont il dispose. Ce suivi peut donner lieu à des entretiens périodiques.
-article 5.5.6.2. Entretien annuel : Chaque année, un entretien doit être organisé par l’employeur avec le salarié ayant conclu une convention individuelle de forfait en jours. A l’occasion de cet entretien – qui peut être indépendant ou juxtaposé avec les autres entretiens (professionnel, d’évaluation…) – doivent être abordés avec le salarié :
– sa charge de travail ;
– l’amplitude de ses journées travaillées ;
– la répartition dans le temps de son travail ;
– l’organisation du travail dans l’entreprise et l’organisation des déplacements professionnels ;
– l’articulation entre son activité professionnelle et sa vie personnelle et familiale ;
– sa rémunération ;
– les incidences des technologies de communication (smartphone …) ;
– le suivi de la prise des jours de repos supplémentaires et des congés.
– Article 5.5.7. Contrôle du nombre de jours de travail : Le forfait en jours s’accompagne d’un contrôle du nombre de jours travaillés.
L’employeur est tenu d’établir un document de contrôle faisant apparaître le nombre et la date des journées ou demi-journées travaillées ou non travaillées, ainsi que le positionnement et la qualification de ces journées ou demi-journées (jour de repos hebdomadaires, congés payés, congés conventionnels, jours de repos supplémentaires …). Afin de permettre à l’employeur d’établir ce décompte, le salarié renseignera mensuellement ces informations sur un support défini au sein de l’entreprise (formulaire papier, déclaration sur un intranet ou d’une manière général sur tout support pouvant remplir cette fonction). Le support devra prévoir un espace sur lequel le salarié pourra y indiquer ses éventuelles difficultés en termes de charge de travail ou d’organisation du temps de travail.
Le contrat de travail à durée indéterminée de Monsieur [M] [H] en date du 1er juillet 2014 stipulait seulement que Monsieur [M] [H] était soumis à un forfait annuel en jour dans les conditions prévues par l’accord sur l’aménagement du temps de travail et que la durée du travail était fixée à 217 jours travaillés par an
L’avenant numéro 1 au contrat de travail portant convention individuelle de forfait annuel en jour, en date du 27 avril 2017 contenait les clauses contractuelles suivantes :
– compte tenu de la journée de solidarité, la durée du travail était fixée à 216 jours par an
– Monsieur [M] [H] était libre de s’organiser comme il l’entendait, et s’engageait sur l’honneur à respecter en toute circonstance le repos minimal quotidien de 11 heures consécutives et le repos hebdomadaire
– le forfait jours s’accompagnait d’un contrôle du nombre de jours travaillés, opéré au moyen d’un document auto-déclaratif faisant apparaître le nombre et la date des journées travaillées ainsi que la qualification des jours non travaillés en repos hebdomadaire, congés payés, congés conventionnels ou jours de repos au titre de la réduction du temps de travail
– un bilan individuel devait être effectué tous les ans pour vérifier l’adéquation de la charge de travail du salarié au nombre de jours travaillés ainsi que l’organisation de son travail dans l’entreprise, l’articulation entre ses activités professionnelles et sa vie personnelle et familiale et le niveau de son salaire, l’amplitude des journées d’activité ainsi que la charge de travail.
C’est à juste titre que le premier juge a dit que la clause de forfait annuel en jours prévue à l’avenant du 27 avril 2017 au contrat de travail de Monsieur [M] [H] répondait aux exigences de la loi et de la convention collective mais qu’elle était privée d’effet dans la mesure où le salarié n’avait bénéficié d’aucun entretien annuel ou bilan individuel et qu’il était indifférent qu’au titre de ses attributions, Monsieur [M] [H] ait été responsable de veiller au respect des dispositions légales et réglementaires et n’ait pas alerté son employeur sur cette obligation de tenir l’entretien annuel, une telle situation n’étant pas de nature à exonérer l’employeur de ses obligations issues d’un contrat qu’il avait lui-même signé.
En effet, la société SEMAP COMPOSITE ne justifie pas de la tenue des entretiens annuels définis par les dispositions conventionnelles précitées et destinés à aborder spécifiquement avec le salarié sa charge de travail , l’amplitude de ses journées et la répartition de son travail .
Si par délégation de pouvoir du 1er juillet 2014, l’employeur a délégué à Monsieur [M] [H] la gestion du personnel de la société SEMAP COMPOSITE en procédant le cas échéant à l’embauche du personnel nécessaire à l’activité, en déterminant les attributions des salariés, le montant de leur salaire, en exerçant le pouvoir disciplinaire notamment celui relatif au pouvoir de licenciement et en exerçant la responsabilité de l’employeur relativement à l’application et au respect de la législation en vigueur en matière de droit du travail et de sécurité sociale, il n’en demeure pas moins que Monsieur [M] [H] n’était pas cadre dirigeant et que, de ce fait, il était soumis à l’autorité d’un supérieur hiérarchique qui conservait les prérogatives de contrôler son travail, d’exercer le pouvoir disciplinaire le cas échéant et sur lequel pesait l’obligation de procéder à un entretien annuel individuel.
Le salarié qui a été soumis à un’forfait’annuel en’jours’privé d’effet peut prétendre au paiement d’heures supplémentaires dont le’juge’doit vérifier l’existence et le nombre, conformément aux dispositions de l’article L 3171-4 du Code du travail.
Le versement d’un salaire supérieur au minimum conventionnel ne peut tenir lieu de règlement des heures supplémentaires ainsi que l’a jugé la chambre sociale de la cour de cassation dans un arrêt du 12 Novembre 2020 (n° 19-15.173).
Sur la demande de paiement d’heures supplémentaires
Aux termes de l’article L 3171-4 du code du travail , en cas de litige relatif à l’existence ou au nombre d’heures effectuées, l’employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié ; le juge forme sa conviction au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l’appui de sa demande après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d’instruction qu’il estime utiles.
Si la preuve des horaires de travail effectuées n’incombe spécialement à aucune des parties, l’employeur doit être en mesure de fournir des éléments de nature à justifier des horaires effectivement réalisés par le salarié. Il appartient cependant à ce dernier de présenter préalablement au juge des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu’il prétend avoir accomplies afin de permettre à l’employeur d’y répondre utilement en produisant ses propres éléments.
Ainsi, en cas de litige relatif à l’existence ou au nombre d’heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l’appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu’il prétend avoir accomplies afin de permettre à l’employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d’y répondre utilement en produisant ses propres éléments. Le juge forme sa conviction en tenant compte de l’ensemble de ces éléments au regard des exigences rappelées aux dispositions légales et réglementaires précitées. Après analyse des pièces produites par l’une et l’autre des parties, dans l’hypothèse où il retient l’existence d’heures supplémentaires, il évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l’importance de celles-ci et fixe les créances salariales s’y rapportant.
Au soutien de sa demande en paiement d’une somme de 51 533,45 euros à titre d’ heures supplémentaires outre 5153,34 euros de congés payés afférents pour la période de septembre 2017 jusqu’à la rupture du contrat de travail, Monsieur [M] [H] présente les éléments suivants :
– des tableaux manuscrits de relevés d’heures faisant apparaître pour chaque jour du mois les heures travaillées
– le temps de suivi pour le crédit impôt recherche
– ses agendas pour les jours pour lesquels l’employeur conteste la comptabilisation du temps de pause méridienne
– ses bulletins de paie.
Ces éléments sont suffisamment précis pour permettre à l’employeur d’y répondre.
Ce dernier critique la validité des tableaux manuscrits de relevés d’heures dont il prétend qu’ils ont été établis à postériori pour les beoins de la cause dès lors que Monsieur [M] [H] bénéficiait d’une très grande autonomie dans la gestion de son temps de travail, mais il n’apporte cependant aucun élément objectif, ne serait-ce sous la forme de témoignages, de nature à évaluer le temps de travail du salarié en fonction de son activité de directeur des opérations, de la nature de ses tâches, des déplacements qu’il devait effectuer pour visiter des clients ou des fournisseurs.
Contrairement à ce que soutient la société SEMAP COMPOSITE, la signature et l’application d’une convention de forfait en jours n’exonère pas l’employeur de son obligation de contrôler le respect des amplitudes et des temps de repos, la compatibilité entre le travail et la vie personnelle, et l’organisation du travail de son salarié, et au contraire, l’accord collectif sur lequel la convention de forfait en jours de Monsieur [M] [H] était basée, imposait à l’employeur de contrôler l’adéquation de sa charge de travail au nombre de jours travaillés, l’organisation de son travail dans l’entreprise, l’articulation entre ses activités professionnelles et sa vie personnelle et familiale, l’amplitude des journées d’activité ainsi que la charge de travail.
La société SEMAP COMPOSITE soutient que Monsieur [M] [H] n’a pas tenu compte de certaines pauses déjeuner dans le cadre de son décompte dès lors qu’il prétend avoir repris le travail alors qu’il se trouvait au restaurant ou dans un café. Toutefois, pour les dates concernées, Monsieur [M] [H] produit des extraits de son agenda qui démontrent qu’il avait des rendez-vous professionnels. Il était donc, ainsi qu’il l’affirme, susceptible de se trouver en repas d’affaires.
Monsieur [M] [H] produit des relevés de temps de suivi pour le crédit impôt recherche.
La société SEMAP COMPOSITE fait justement observer, en produisant une attestation de Monsieur [W], directeur du pôle innovation de la société LEYTON FRANCE, que cette société était en charge de la valorisation des dépenses éligibles au crédit impôt recherche au terme d’un contrat conclu le 3 septembre 2013 qui impliquait notamment la réalisation des tâches suivantes : collecte des inventaires des données, identification des projets éligibles et validation par le client, établissement des arguments concernant les prestataires d’études éligibles au crédit impôt recherche, chiffrage poste par poste, établissement de la déclaration rectificative de la facture, accompagnement au dépôt de la déclaration, montage des dossiers justificatifs structurés par projet.
Il est ainsi établi qu’une grande partie du temps de travail que Monsieur [M] [H] affirme avoir consacré au crédit impôt recherche correspond à des tâches qui ne lui incombaient pas et qui étaient effectuées par le cabinet LEYTON.
Au vu des éléments produits par l’une et l’autre partie, la cour retient que Monsieur [M] [H] a effectué des heures supplémentaires qui n’ont pas donné lieu à rémunération, sans toutefois qu’elles justifient un rappel de salaire à hauteur des sommes sollicitées. Il y a lieu, par voie d’infirmation du jugement, de condamner la société SEMAP COMPOSITE à payer à Monsieur [M] [H] la somme de 23 190,05 euros à titre de rappel d’ heures supplémentaires, outre la somme de 2319 euros au titre des congés payés afférents.
Sur les dommages et intérêts pour violation de l’obligation de sécurité liée au non-respect des amplitudes de travail
Il résulte de l’article L 4121-1 du code du travail que l’employeur, tenu d’une obligation de sécurité envers les salariés, doit prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs. Il ne méconnaît pas cette obligation légale s’il justifie avoir pris toutes les mesures prévues par les articles L 4121-1 et L 4121-2 du code du travail .
Manque à son obligation de sécurité l’employeur qui ne justifie pas avoir pris les dispositions nécessaires de nature à garantir que l’ amplitude et la charge de travail du salarié restent raisonnables et permettent une bonne répartition dans le temps du travail, et donc à assurer la protection de la sécurité et de la santé du salarié, ainsi que l’a jugé la chambre sociale de la Cour de cassation dans un arrêt du 2 mars 2022, n° 20-16.683.
Le juge qui constate que l’employeur a manqué à son obligation de sécurité doit vérifier si un préjudice en est résulté.
La convention collective de la plasturgie stipule que le repos quotidien est d’une durée minimale de 11 heures consécutives pouvant être réduite à 9 heures pour des activités caractérisées par la nécessité d’assurer une continuité du service, ou en cas de travaux urgents liés à la sécurité et à l’environnement.
Le salarié dont le repos quotidien est inférieur à 11 heures, à la demande de l’employeur, bénéficie d’une contrepartie en temps de repos au moins égale à l’amplitude de la réduction imposée.
Au terme des dispositions de l’article L 3121-18 du code du travail, la durée maximale quotidienne de travail est de 10 heures, sauf exceptions prévues par ce texte.
Monsieur [M] [H] précise que :
– le 2 février 2019 il a travaillé de 6h30 à 19h30, soit 13 heures
– le 11 juin 2019 il a travaillé de 7 heures à 18h30 soit 11 heures et 30 minutes
– le 15 juillet 2019 il a travaillé de 8heures à 19 heures, soit 11 heures
Selon les relevés horaire qu’il produit lui-même aux débats, le 2 février 2019 était un samedi et Monsieur [M] [H] n’a pas travaillé ; le 11 juin 2019 il a travaillé de 8h à 12h et de 13h30 à 18 soit 8h30.
Il est toutefois établi par ces relevés horaires que Monsieur [M] [H] a ponctuellement travaillé plus de 10 heures par jour.
Par ailleurs, en ne contrôlant pas le temps de travail pour garantir que l’ amplitude et la charge de travail du salarié restaient raisonnables et permettaient une bonne répartition dans le temps du travail, la société SEMAP COMPOSITE a manqué à son obligation de sécurité.
Monsieur [M] [H] ne justifie d’aucun préjudice mais, ainsi qu’il l’expose, le seul constat du dépassement de la durée maximale de travail ouvre droit à réparation, ainsi que l’a jugé la chambre sociale de la Cour de cassation dans un arrêt du 11 mai 2023 numéro 21-22.281
Le jugement de première instance sera donc infirmé en ce qu’il l’a débouté de sa demande de dommages et intérêts pour violation de l’obligation de sécurité liée au dépassement des amplitudes maximum de travail.
Faute pour Monsieur [M] [H] de justifier de l’ampleur de son préjudice et compte tenu du caractère très ponctuel des dépassements de la durée maximale de travail, la société SEMAP COMPOSITE est condamnée à lui payer la somme de 1 000 euros à titre de dommages et intérêts.
Sur le remboursement par Monsieur [M] [H] des jours de RTT dont il a bénéficié
Dès lors qu’une’convention’de’forfait’en’jours’est privée d’effet, pour la durée de la période de suspension de la’convention’individuelle de’forfait’en’jours, le paiement des’jours’de repos accordés en exécution de la’convention’est devenu indu.
Monsieur [M] [H] a bénéficié de 28,5 jours de RTT en exécution de la convention de forfait en jours au cours de la période où elle était privée d’effet.
Le jugement de première instance sera confirmé en ce qu’il a condamné Monsieur [M] [H] à rembourser à la société SEMAP COMPOSITE la somme de 16’339,56 euros au titre des jours de RTT dont il a indûment bénéficié.
Sur la demande de remboursement de la rémunération perçue par Monsieur [M] [H] en contrepartie du forfait jours annuel excédant la rémunération minimale garantie par la convention collective
La société SEMAP COMPOSITE affirme que ce n’est qu’en contrepartie de la convention de forfait annuelle en jours que le salaire de Monsieur [M] [H] a été fixé à un montant supérieur à la rémunération minimale garantie par la convention collective.
La convention de forfait n’est, en l’espèce, privée d’effet qu’en raison du manquement de l’employeur, au cours de l’exécution du contrat, à son obligation de contrôler le temps et la charge de travail du salarié, ce qui n’est pas de nature à remettre en cause l’accord initial des parties sur les fonctions et la rémunération de Monsieur [M] [H].
Le jugement de première instance sera donc confirmé en ce qu’il a débouté la société SEMAP COMPOSITE de sa demande de remboursement de la somme de 164 664 euros.
II sur la rupture du contrat de travail
Sur le paiement de l’indemnité compensatrice de non-concurrence
Le contrat de travail en date du 1er juillet 2014 comporte une clause ‘obligation de non-concurrence’ rédigée comme suit : « compte tenu de la nature de ses fonctions de directeur des opérations, Monsieur [M] [H] s’interdit :
– d’entrer au service d’une entreprise fabricant ou vendant des produits pouvant concurrencer ceux de la société SASU SEMAP COMPOSITE ;
– de s’intéresser directement ou indirectement, et sous quelque forme que ce soit, à une entreprise de cet ordre ;
Cette interdiction s’appliquera en cas de cessation du présent contrat, quelle qu’en soit la cause. Cette interdiction de concurrence est limitée à une période de un an à compter du jour de la cessation effective du contrat. Elle couvre le territoire national.
En contrepartie de l’obligation de non-concurrence prévue ci-dessus, Monsieur [M] [H] percevra une indemnité mensuelle d’un montant brut de 30 % du salaire moyen brut perçu par ses soins.
Ce salaire moyen brut s’entend comme étant la moyenne sur les 12 derniers mois précédant la notification de la rupture du contrat de travail des sommes versées à Monsieur [M] [H] à titre de salaire de base et primes sur objectif à l’exclusion des primes exceptionnelles ou autres prime discrétionnaires ou non.
La SASU SEMAP COMPOSITE pourra cependant libérer Monsieur [M] [H] de l’interdiction de concurrence et par là même, se dégager du paiement de l’indemnité prévue en contrepartie, soit à tout moment au cours de l’exécution du contrat, soit à l’occasion de sa cessation.
Dans ce dernier cas, la SASU SEMAP COMPOSITE s’engage à notifier sa décision selon les modalités prévues par la convention collective : plasturgie.
Toute violation de la présente clause de non-concurrence rendra Monsieur [M] [H] redevable d’une pénalité fixée dès à présent et forfaitairement à 12 mois de salaire de bruts euros (sic) pénalité due pour chaque infraction constatée, sans qu’il soit besoin d’une mise en demeure d’avoir à cesser l’activité concurrentielle.
Le paiement de cette indemnité ne porte pas atteinte au droit que la société se réserve expressément de poursuivre Monsieur [M] [H] en remboursement du préjudice pécuniaire et moral effectivement subi et de faire ordonner sous astreinte la cessation de l’activité concurrentielle »
L’adhésion du salarié au contrat de sécurisation professionnelle emporte rupture du contrat de travail à la date d’expiration du délai de réflexion. Cette rupture ne comporte ni préavis ni indemnité compensatrice de préavis et le contrat de sécurisation professionnelle prend effet dès le lendemain de la fin du contrat de travail.
Dès lors que la rupture intervient sans préavis, l’employeur, s’il entend renoncer à l’exécution d’une clause de non-concurrence, doit le faire au plus tard à la date du départ effectif de l’intéressé de l’entreprise, nonobstant stipulations ou dispositions contraires.
En l’espèce, la société SEMAP COMPOSITE ne prétend ni ne justifie avoir renoncé à l’exécution de la clause de non concurrence à la date du 1er octobre 2020.
Contrairement à ce qu’affirme la société SEMAP COMPOSITE, Monsieur [M] [H] a respecté son obligation de non-concurrence dès lors qu’il a retrouvé un emploi en tant que directeur opérationnel Campus des métiers et des qualifications d’excellence procédés et matériaux innovants Grand Est au sein de l’enseignement public, qu’il occupe toujours à ce jour.
Pendant les 12 mois qui ont suivi la rupture de son contrat de travail, période expirant au 30 septembre 2021, Monsieur [M] [H] n’a pas travaillé pour une ou des entreprises concurrentes, sans qu’il importe de déterminer s’il a dû renoncer à des postes qui lui étaient proposés dans des entreprises dont les activités étaient susceptibles de concurrencer celles de la société SEMAP COMPOSITE.
La société SEMAP COMPOSITE affirme par ailleurs qu’il a détourné des documents professionnels confidentiels, mais, à le supposer établi, ce détournement constituerait une violation de l’obligation de loyauté et non une violation de la clause de non concurrence.
Ainsi que l’a jugé le conseil de prud’hommes de Charleville-Mézières, Monsieur [M] [H] peut prétendre au paiement de l’intégralité de la contrepartie financière découlant de l’obligation de non-concurrence insérée au contrat de travail.
La mise en chômage partiel n’a pas pour effet de modifier le contrat de travail. Dès lors, la rémunération servant de base au calcul de l’indemnité compensatrice de non concurrence doit être celle que le salarié aurait perçue s’il n’avait pas été au chômage partiel et c’est à tort que le premier juge à limité la somme due à Monsieur [M] [H] à 37 022,40 euros outre 3702,24 euros de congés payés afférents.
La société SEMAP COMPOSITE sera donc condamnée, par infirmation du jugement, à payer à Monsieur [M] [H] la somme de 40’000 euros outre 4000 euros de congés payés afférents.
Sur le motif économique du licenciement
L’article L 1233-3 du code du travail dispose : ‘ constitue un licenciement pour motif économique le licenciement effectué par un employeur pour un ou plusieurs motifs non inhérents à la personne du salarié résultant d’une suppression ou transformation d’emploi ou d’une modification, refusée par le salarié, d’un élément essentiel du contrat de travail, consécutives notamment :
1° A des difficultés économiques caractérisées soit par l’évolution significative d’au moins un indicateur économique tel qu’une baisse des commandes ou du chiffre d’affaires, des pertes d’exploitation ou une dégradation de la trésorerie ou de l’excédent brut d’exploitation, soit par tout autre élément de nature à justifier de ces difficultés.
Une baisse significative des commandes ou du chiffre d’affaires est constituée dès lors que la durée de cette baisse est, en comparaison avec la même période de l’année précédente, au moins égale à :
a) Un trimestre pour une entreprise de moins de onze salariés ;
b) Deux trimestres consécutifs pour une entreprise d’au moins onze salariés et de moins de cinquante salariés ;
c) Trois trimestres consécutifs pour une entreprise d’au moins cinquante salariés et de moins de trois cents salariés ;
d) Quatre trimestres consécutifs pour une entreprise de trois cents salariés et plus ;
2° A des mutations technologiques ;
3° A une réorganisation de l’entreprise nécessaire à la sauvegarde de sa compétitivité ;
4° A la cessation d’activité de l’entreprise.
La matérialité de la suppression, de la transformation d’emploi ou de la modification d’un élément essentiel du contrat de travail s’apprécie au niveau de l’entreprise.
Les difficultés économiques, les mutations technologiques ou la nécessité de sauvegarder la compétitivité de l’entreprise s’apprécient au niveau de cette entreprise si elle n’appartient pas à un groupe et, dans le cas contraire, au niveau du secteur d’activité commun à cette entreprise et aux entreprises du groupe auquel elle appartient, établies sur le territoire national, sauf fraude.
Pour l’application du présent article, la notion de groupe désigne le groupe formé par une entreprise appelée entreprise dominante et les entreprises qu’elle contrôle dans les conditions définies à l’article L. 233-1, aux I et II de l’article L. 233-3 et à l’article L. 233-16 du code de commerce.
Le secteur d’activité permettant d’apprécier la cause économique du licenciement est caractérisé, notamment, par la nature des produits biens ou services délivrés, la clientèle ciblée, ainsi que les réseaux et modes de distribution, se rapportant à un même marché.
Les dispositions du présent chapitre sont applicables à toute rupture du contrat de travail résultant de l’une des causes énoncées au présent article, à l’exclusion de la rupture conventionnelle visée aux articles L. 1237-11 et suivants et de la rupture d’un commun accord dans le cadre d’un accord collectif visée aux articles L. 1237-17 et suivants ‘
Par courrier en date du 9 septembre 2020, qui fixe les limites du litige, la société SEMAP COMPOSITE, qui ne justifie pas de son effectif précis mais compte en tout état de cause moins de 50 salariés, a notifié à Monsieur [M] [H] qu’elle envisageait de rompre son contrat de travail en raison des difficultés économiques qu’elle rencontrait depuis plusieurs mois et caractérisées comme suit :
– variation globale du chiffre d’affaire net de -40,32% sur la période du 1er mars au 31 août 2020, par rapport à la même période en 2019
– baisse significative et persistante du chiffre d’affaires net entre mars et août 2020 en comparaison avec les mois de mars à août 2019
– nécessité de réaliser d’importantes économies afin de maintenir l’activité de la structure justifiant la suppression du poste de directeur des opérations.
– réorganisation indispensable pour endiguer les conséquences que pourraient entraîner les difficultés économiques actuelles
Selon la jurisprudence constante de la Cour de cassation, le juge doit se placer à la date du licenciement pour apprécier le motif de celui-ci.
Il en résulte que la durée d’une baisse significative des commandes ou du chiffre d’affaires, telle que définie par l’article L. 1233-3, 1°, a) à d), du code du travail, s’apprécie en comparant le niveau des commandes ou du chiffre d’affaires au cours de la période contemporaine de la notification de la rupture du contrat de travail par rapport à celui de l’année précédente à la même période ainsi que l’a jugé la chambre sociale de la Cour de cassation dans un arrêt du 1er juin 2022, n° 20-19.957.
C’est donc à tort que Monsieur [M] [H] soutient que la période de référence, sur laquelle les difficultés économiques devaient être appréciées, était obligatoirement celle des mois de juillet, août et septembre 2020, étant par ailleurs souligné que c’est lors de l’entretien préalable du 9 septembre 2020 que la société SEMAP COMPOSITE a exposé au salarié le motif économique de la mesure de licenciement envisagée. Le motif économique devait donc être caractérisé à cette date.
La société SEMAP COMPOSITE justifie, au moyen d’une attestation de son expert-comptable, corroborée par les déclarations de TVA, d’une baisse du chiffre d’affaires net dans les proportions suivantes :
entre mars 2019 et mars 2020 : – 47%
entre avril 2019 avril 2020 : – 96 %
entre mai 2019 et mai 2020 : -59 %
entre juin 2019 et juin 2020 : -21 %
entre juillet 2019 et juillet 2020 : -13 %
entre août 2019 et août 2020 : -19,5 %
Ainsi par rapport à la même période en 2019, la société SEMAP COMPOSITE a subi une baisse cumulée de 39 % de son chiffre d’affaires net sur six mois, du mois de mars au mois d’août 2020.
La baisse de son chiffre d’affaires, s’il a ralenti entre les mois de juin et août 2020 a néanmoins perduré chaque mois pendant les six mois précédant l’entretien préalable.
La société SEMAP COMPOSITE justifie par ailleurs que cette baisse durable de son chiffre d’affaires s’est inscrite dans les difficultés économiques qu’ont également subies ses clients et fournisseurs en raison de la crise sanitaire liée au covid 19.
Il est ainsi établi que l’un de ses principaux clients la société FRANS BONHOMME lui devait un solde de facture de 562’473 euros au 31 mars 2020.
Elle-même se trouvait débitrice de plus de 300’000 euros envers la société PLASTIVALOIRE au 22 avril 2020.
Enfin son chiffre d’affaire net au 31 décembre 2020 était de 3 820 612 euros contre 4 077 598 euros au 31 décembre 2019 soit une baisse de 7% et son résultat net au 31 décembre 2020 était de 366 271 euros contre 489 574 euros au 31 décembre 2019 soit une baisse de 25%.
Au vu de ces éléments, les difficultés économiques sont caractérisées.
Sur l’obligation de reclassement
L’article L 1233-4 du code du travail dispose : ‘ le licenciement pour motif économique d’un salarié ne peut intervenir que lorsque tous les efforts de formation et d’adaptation ont été réalisés et que le reclassement de l’intéressé ne peut être opéré sur les emplois disponibles, situés sur le territoire national dans l’entreprise ou les autres entreprises du groupe dont l’entreprise fait partie et dont l’organisation, les activités ou le lieu d’exploitation assurent la permutation de tout ou partie du personnel.
Pour l’application du présent article, la notion de groupe désigne le groupe formé par une entreprise appelée entreprise dominante et les entreprises qu’elle contrôle dans les conditions définies à l’article L. 233-1, aux I et II de l’article L. 233-3 et à l’article L. 233-16 du code de commerce.
Le reclassement du salarié s’effectue sur un emploi relevant de la même catégorie que celui qu’il occupe ou sur un emploi équivalent assorti d’une rémunération équivalente. A défaut, et sous réserve de l’accord exprès du salarié, le reclassement s’effectue sur un emploi d’une catégorie inférieure.
L’employeur adresse de manière personnalisée les offres de reclassement à chaque salarié ou diffuse par tout moyen une liste des postes disponibles à l’ensemble des salariés, dans des conditions précisées par décret.
Les offres de reclassement proposées au salarié sont écrites et précises’.
Il résulte de ces dispositions que, à défaut de postes disponibles relevant de la même catégorie que celui occupé par le salarié, l’employeur doit lui proposer, s’ils existent, des emplois de catégorie inférieure même s’ils impliquent une importante perte de rémunération et de niveau hiérarchique.
Si un emploi disponible n’a pas été proposé au salarié, il appartient à l’employeur de justifier de l’impossibilité de l’y reclasser moyennant une formation permettant son adaptation à cet emploi.
Toutefois, si l’employeur a l’obligation d’assurer l’adaptation d’un salarié menacé de licenciement économique à l’évolution de son emploi, au besoin en lui assurant une formation complémentaire, il ne peut pas lui être imposé d’assurer la formation initiale qui lui fait défaut.
L’employeur doit rechercher les possibilités de reclassement dans l’entreprise ou le cas échéant dans le groupe auquel appartient l’entreprise.
L’adhésion d’un salariée au dispositif du contrat de sécurisation professionnelle ne le prive pas de la possibilité de contester le respect par l’employeur de son obligation de reclassement.
Il résulte de la combinaison des articles L 1233-4 et L 1233-67 du code du travail qu’au titre de son obligation de reclassement l’employeur doit proposer au salarié les emplois disponibles au moment où il manifeste sa volonté de mettre fin au contrat de travail en notifiant la lettre de licenciement, quand bien même le licenciement serait subordonné au refus par le salarié du contrat de sécurisation professionnelle qui lui a été proposé.
Envers le salarié qui a reçu la proposition de contrat de sécurisation professionnelle, l’employeur demeure tenu d’une obligation de reclassement jusqu’à ce que le contrat de travail soit rompu. La date de la rupture du contrat est alors celle de l’acceptation du CSP ou, si elle est antérieure, la date de notification du licenciement à titre conservatoire.
L’ obligation de reclassement préalable doit être mise en oeuvre, de façon loyale et sérieuse jusqu’à l’adhésion par le salarié au contrat de sécurisation professionnelle.
La société SEMAP COMPOSITE produit aux débats des courriers éléctroniques qu’elle a adressés le 7 septembre 2020 à la société SEMAP et à la société FBA, appartenant également au groupe KMC, pour rechercher des postes disponibles pour reclasser Monsieur [M] [H], en détaillant sa situation professionnelle et sa qualification. Elle justifie des réponses négatives qu’elle a reçues de ces deux sociétés.
La société SEMAP COMPOSITE produit les registres du personnel des sociétés FABA et SEMAP.
Il est ainsi établi que :
– la société FBA a embauché un cariste polyvalent le 27 juillet 2020, un agent de fabrication le 3 août 2020 et un agent de fabrication le 9 novembre 2020.
– la société SEMAP a embauché un cariste polyvalent le 14 septembre 2020 et trois soudeurs polyvalents le 9 novembre 2020.
La société SEMAP COMPOSITE n’avait pas à proposer à Monsieur [M] [H] les postes de cariste polyvalent et d’agent de fabrication sur lesquels la société FBA a procédé à des recrutements le 27 juillet 2020 et 3 août 2020, dans la mesure où, à ces dates, elle n’avait pas encore manifesté sa volonté de mettre fin à son contrat de travail pour motif économique.
La société SEMAP COMPOSITE n’avait pas davantage à proposer à Monsieur [M] [H] les postes d’agent de fabrication et de soudeurs sur lesquels les société FBA et SEMAP ont procédé à des recrutements le 9 novembre 2020, soit postérieurement à la rupture du contrat de travail.
Un poste de cariste polyvalent était disponible au sein de la société SEMAP au moment où Monsieur [M] [H] a été convoqué à un entretien préalable un éventuel licenciement. Ce poste a été pourvu le 14 septembre 2020, avant la signature du contrat de sécurisation professionnelle par Monsieur [M] [H].
Toutefois c’est à juste titre que la société SEMAP COMPOSITE soutient que Monsieur [M] [H] ne disposait pas des compétences techniques et professionnelles pour occuper ce poste et qu’une simple formation complémentaire de quelques jours aurait été insuffisante pour lui apporter cette compétence.
En effet, un cariste est un technicien qualifié, professionnel de la manutention, chargé de déplacer, en respectant strictement les règles de sécurité, des matériaux et produits. Il travaille au moyen d’engins spéciaux de levage, transpalettes, tracteurs, grues, chariots élévateurs, fonctions pour lesquelles il doit être titulaire du permis CACES.
Or, le poste de directeur des opérations, occupé par Monsieur [M] [H] impliquait les tâches suivantes:
– la définition de la stratégie globale de l’entreprise,
– l’élaboration des grandes lignes de la politique commerciale et de distribution,
– la définition des objectifs de modernisation et de développement de l’entreprise,
– la prise de décision quant à l’investissement à mettre en ‘uvre, à la réduction des coûts et à l’évolution des effectifs,
– la supervision de la politique de recherche et développement,
– le conseil auprès de l’ensemble des dirigeants de l’entreprise
– la garantie des procédures de sécurité et le respect des dispositions légales et réglementaires.
Les compétences de Monsieur [M] [H] étaient très différentes de celles nécessaires pour occuper un emploi de cariste, qui nécessite une formation initiale théorique et pratique, sanctionnée par l’obtention d’un CACES, étant souligné que l’employeur sur lequel repose l’obligation de sécurité doit s’assurer que les compétences du salarié et son expérience lui permettent d’occuper ce poste sans danger pour la sécurité des autres salariés.
Le poste de cariste nécessitait plus qu’une formation complémentaire de Monsieur [M] [H] pour qu’il puisse être opérationnel et occuper ces fonctions en toute sécurité pour lui-même et les autres salariés, et la société SEMAP COMPOSITE n’avait pas à assurer une telle formation initiale pour reclasser son salarié.
La société SEMAP COMPOSITE a respecté son obligation de reclassement.
Le jugement de première instance sera donc confirmé en ce qu’il a jugé que la rupture du contrat de travail de Monsieur [M] [H] reposait sur une cause réelle et sérieuse et l’a débouté de sa demande de dommages et intérêts pour rupture abusive du contrat de travail.
Sur la demande de dommages et intérêts pour préjudice moral
Monsieur [M] [H] affirme avoir été profondément affecté par le fait que ses codes d’accès au serveur de l’entreprise aient été bloqués et qu’un huissier ait été mandaté à l’occasion de la remise des documents de fin de contrat et de la restitution du matériel de l’entreprise.
Il est établi par les captures d’écran produite aux débats qu’à compter du 10 septembre 2020, Monsieur [M] [H] n’a plus eu accès au système informatique de gestion et à sa boîte e-mail professionnelle, et ce alors que le licenciement n’était pas effectif.
Toutefois il est établi par un procès-verbal de constat d’huissier en date du 14 septembre 2020 que le 9 septembre 2020 entre 8h54 et 9h06, soit avant la tenue de l’entretien préalable, des documents concernant la société SEMAP COMPOSITE et la société SEMAP ont été modifiés et des mails ont été effacés à partir du poste informatique de Monsieur [M] [H].
Par ailleurs, il est établi que Monsieur [M] [H] a transféré de sa boîte mail professionnelle vers sa boîte mail personnelle une attestation employeur vierge au format word, donc modifiable.
Dans ces conditions, ainsi que l’a relevé le premier juge, cette attitude a pu légitimement affecter la relation de confiance entre la société SEMAP COMPOSITE et Monsieur [M] [H] qui, du fait de sa position de directeur avait accès à beaucoup d’informations et de documents sensibles. Les mesures conservatoires prises par l’employeur étaient proportionnées et dictées par le légitime souci de la protection de ses intérêts et ne constituent donc pas une faute.
Le jugement de première instance sera donc confirmé en ce qu’il a débouté Monsieur [M] [H] de sa demande de dommages et intérêts.
Sur les autres demandes
La société SEMAP COMPOSITE étant condamnée au titre du rappel de salaire lié à l’absence d’effet de la convention de forfait jours, au titre de l’indemnité compensatrice de clause de non-concurrence, de l’obligation de sécurité, il y a lieu d’infirmer le jugement de première instance en ce qu’il a condamné Monsieur [M] [H] à payer à l’employeur la somme de 100 euros sur le fondement de l’article 700 et en ce qu’il l’a condamné aux dépens.
La société SEMAP COMPOSITE est condamnée aux dépens de première instance et d’appel.
Elle est par ailleurs condamnée à payer à Monsieur [M] [H] la somme de 1000 euros au titre des frais irrépétibles de première instance et 1000 euros au titre des frais irrépétibles d’appel.
Il convient de rappeler que les condamnations sont prononcées sous déduction des éventuelles cotisations sociales et salariales applicables.
Par ces motifs,
La cour, statuant publiquement, contradictoirement, après en avoir délibéré conformément à la loi,
INFIRME le jugement de première instance :
– en ce qu’il a débouté débouté Monsieur [M] [H] de sa demande de rappel de salaire liée à l’absence d’effet de la convention de forfait jours, et de sa demande de dommages et intérêts pour non-respect de l’obligation de sécurité ;
– en ce qu’il a condamné la société SEMAP COMPOSITE à payer à Monsieur [M] [H] la somme de 37’022,40 euros outre congés payés afférents au titre de l’indemnité de contrepartie de la clause de non-concurrence ;
– en ce qu’il a condamné Monsieur [M] [H] aux dépens et à payer à la société SEMAP COMPOSITE une somme de 100 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile
LE CONFIRME pour le surplus ;
Statuant dans les limités de l’infirmation,
CONDAMNE la société SEMAP COMPOSITE à payer à Monsieur [M] [H]
. la somme de 23 190,05 euros outre la somme de 2319 euros à titre de rappel de salaires lié à l’absence d’effet de la convention de forfait en jours et à titre de congés payés afférents;
. la somme de 1 000 euros à titre de dommages et intérêts pour manquement à l’obligation de sécurité;
. la somme de 40 000 euros outre 4 000 euros de congés payés afférents au titre de l’indemnité de contrepartie de clause de non-concurrence et à titre de congés payés afférents ;
. la somme de 1 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles de première instance ;
RAPPELLE que les condamnations sont prononcées sous déduction des éventuelles cotisations sociales et salariales applicables ;
Y ajoutant,
CONDAMNE la société SEMAP COMPOSITE à payer à Monsieur [M] [H] la somme de 1 000 euros au titre des frais irrépétibles d’appel ;
CONDAMNE la société SEMAP COMPOSITE aux dépens de première instance et d’appel.
Le greffier, Le président,