Contrat de sécurisation professionnelle : 14 avril 2023 Cour d’appel de Douai RG n° 20/02385

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Contrat de sécurisation professionnelle : 14 avril 2023 Cour d’appel de Douai RG n° 20/02385
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ARRÊT DU

14 Avril 2023

N° 608/23

N° RG 20/02385 – N° Portalis DBVT-V-B7E-TLGB

MLB/LF

Jugement du

Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de TOURCOING

en date du

23 Novembre 2020

(RG F19/00124 -section )

GROSSE :

Aux avocats

le 14 Avril 2023

République Française

Au nom du Peuple Français

COUR D’APPEL DE DOUAI

Chambre Sociale

– Prud’Hommes-

APPELANT :

Association L’UNEDIC DELEGATION AGS, CGEA DE [Localité 4]

[Adresse 2]

[Localité 4]

représentée par Me Catherine CAMUS-DEMAILLY, avocat au barreau de DOUAI substitué par Me Cecile HULEUX, avocat au barreau de DOUAI

INTIMÉE :

M. [K] [I]

[Adresse 1]

[Localité 5]

représenté par Me Aurore SELLIER-SUTY, avocate au barreau de LILLE

Me [M] [V] és qualité de liquidateur judiciaire de la SAS STIC

[Adresse 3]

[Localité 5]

représenté par Me Catherine CAMUS-DEMAILLY, avocate au barreau de DOUAI substituée par Me Cecile HULEUX, avocate au barreau de DOUAI

Assisté de Me Jean-François FENAERT, avocat au barreau de LILLE,

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ

Soleine HUNTER-FALCK

: PRÉSIDENT DE CHAMBRE

Muriel LE BELLEC

: CONSEILLER

Gilles GUTIERREZ

: CONSEILLER

GREFFIER lors des débats : Serge LAWECKI

DÉBATS : à l’audience publique du 15 Février 2023

ARRÊT : Contradictoire

prononcé par sa mise à disposition au greffe le 14 Avril 2023,

les parties présentes en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 du code de procédure civile, signé par Soleine HUNTER-FALCK, Président et par Serge LAWECKI, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

ORDONNANCE DE CLÔTURE : rendue le 25 janvier 2023

EXPOSE DES FAITS

Par jugement du 6 novembre 2017, le tribunal de commerce de Lille Métropole a ouvert une procédure de redressement judiciaire à l’encontre de la SAS STIC, immatriculée au RCS le 4 juin 2002, dirigée jusqu’au 5 février 2015 par M. [T] [I] et ensuite par la société holding Condor, qui exerçait une activité de commerce de gros de fournitures et équipements industriels divers, en fixant la date de cessation des paiements au 20 septembre 2017.

Maître [B] a été nommé administrateur judiciaire et Maître [V] mandataire judiciaire.

M. [K] [I], frère de M. [T] [I],a fait l’objet d’une procédure de licenciement pour motif économique et a accepté le contrat de sécurisation professionnelle remis le 7 mars 2018.

M. [D] [W], a établi le 28 mars 2018, en qualité de chef d’entreprise de la SAS STIC, un certificat de travail mentionnant que M. [K] [I] a été employé par la SAS STIC du 2 novembre 2003 au 28 mars 2018 en qualité de chargé de mission niveau VIII échelon 1. Le reçu pour solde de tout compte également établi le 28 mars 2018 et le bulletin de salaire de mars 2018 mentionnent un net à payer à M. [K] [I] de 95 391,82 euros. Seule l’indemnité de licenciement, évaluée à 49 576,40 euros, lui a été versée par le liquidateur judiciaire.

Par jugement du 4 avril 2018, le tribunal de commerce a prononcé la liquidation judiciaire de la SAS STIC, Maître [V] étant nommé liquidateur judiciaire.

Par requête reçue le 10 décembre 2018, M. [K] [I] a saisi le conseil de prud’hommes de Lille, qui s’est déclaré territorialement incompétent au profit du conseil de prud’hommes de Tourcoing, pour obtenir le paiement des créances salariales figurant sur le bulletin de salaire du mois de mars 2018.

Par jugement en date du 23 novembre 2020 le conseil de prud’hommes a dit irrecevable l’exception d’incompétence soulevée par le CGEA, s’est déclaré compétent pour connaître du litige, a dit que M. [K] [I] n’a pas été rempli de ses droits en matière de créances salariales et fixé la créance de M. [K] [I] dans la procédure collective de la SAS STIC comme suit :

6 944,34 euros au titre du salaire du mois de mars 2018

1 152,93 euros à titre de garantie d’ancienneté

14 988,05 euros à titre de rappel de garantie d’ancienneté régularisée depuis novembre 2015.

Il a également déclaré la décision opposable à l’Unedic AGS CGEA de [Localité 4] dans les limites de sa garantie légale prévue aux articles L.3253-6 et D.3253-5 du code du travail, rappelé qu’en application des dispositions de l’article R.1454-28 du code du travail, la décision ordonnant le paiement des sommes au titre des rémunérations et indemnités mentionnées à l’article R.1454-14 dudit code est exécutoire de plein droit dans la limite de 9 mois de salaire calculés sur la moyenne des 3 derniers mois (ladite moyenne s’élevant à 8 868,07 euros), précisé que le jugement d’ouverture de la procédure collective arrête le cours des intérêts légaux et conventionnels ainsi que tous intérêts de retard et majoration, ordonné l’emploi des dépens en frais privilégiés de la liquidation judiciaire et débouté les parties du surplus de leurs demandes.

Le 16 décembre 2020, l’Unedic délégation AGS CGEA de [Localité 4] a interjeté appel de ce jugement.

Par ses conclusions reçues le 17 janvier 2023 auxquelles il convient de se reporter pour un exposé détaillé des prétentions et moyens, l’Unedic délégation AGS CGEA de [Localité 4] sollicite de la cour qu’elle infirme le jugement et, statuant à nouveau, qu’elle juge que l’exception d’incompétence qu’elle soulève est recevable et que M. [K] [I] ne justifie pas de l’existence d’un contrat de travail, en conséquence qu’elle se déclare incompétente pour connaître du litige opposant M. [K] [I] et la SAS STIC au profit du tribunal de commerce de [Localité 4] Métropole, en tout état de cause qu’elle juge que l’apparence de contrat de travail conclu avec M. [K] [I] et l’augmentation substantielle de l’ancienneté et du salaire qu’il a obtenue est le résultat d’une instrumentalisation qui a été organisée en fraude du système de garantie des salaires, le déboute en conséquence de l’intégralité de ses demandes et le condamne à restituer la somme de 49 576,40 euros entre les mains de Maître [V], en qualité de liquidateur judiciaire de la SAS STIC, à titre subsidiaire si elle estimait qu’il était bien salarié de la société, qu’elle le déboute de l’intégralité de ses demandes faute de justifier de leur quantum, en toute hypothèse juge que l’astreinte éventuellement ordonnée n’est pas garantie par l’AGS, lui donne acte qu’il a été procédé aux avances au profit de M. [K] [I] d’un montant de 49 576,40 euros, dise que l’arrêt ne lui sera opposable que dans la limite de sa garantie légale fixée par les articles L.3253-6 et suivants du code du travail et des plafonds prévus à l’article D.3253-5 du code du travail, toutes créances confondues, et juge que l’obligation du CGEA ne pourra s’exécuter que sur présentation d’un relevé par le mandataire judiciaire, conformément à l’article L.3253-20 du code du travail.

Par ses conclusions reçues le 19 janvier 2023 auxquelles il convient de se reporter pour un exposé détaillé des prétentions et moyens, M. [K] [I] sollicite de la cour qu’elle confirme le jugement entrepris en ce qu’il a dit irrecevable l’exception d’incompétence soulevée par le CGEA, dit qu’il n’a pas été rempli de ses droits en matière de créances salariales, s’est déclaré compétent pour connaître du litige, a fixé sa créance dans la procédure collective de la SAS STIC aux sommes de 6 944,34 euros au titre du salaire du mois de mars 2018, 1 152,93 euros à titre de garantie d’ancienneté et 14 988,05 euros à titre de rappel de garantie d’ancienneté régularisée depuis novembre 2015, ainsi qu’en ses dispositions sur la garantie de l’AGS et les intérêts de retard, qu’elle l’infirme pour le surplus et, statuant a nouveau, qu’elle fixe sa créance et en tant que de besoin, ordonne à Maître [V] ès qualités, à peine d’astreinte de 50 euros par jour de retard à compter du 8ème jour suivant la notification de la décision à intervenir, de lui payer la somme de 33 759,90 euros, subsidiairement 13 873,92 euros, au titre de l’indemnité compensatrice de congés payés, qu’elle fixe sa créance et en tant que de besoin, ordonne de même à Maître [V] ès qualités, à peine d’astreinte de 50 euros par jour de retard à compter du 8ème jour suivant la notification de la décision à intervenir, de lui payer les créances salariales telles que prononcées par le conseil de prud’hommes et qui seront confirmées par la cour, qu’elle se réserve le pouvoir de liquider l’astreinte, déclare l’arrêt à intervenir commun et opposable au CGEA qui sera tenu de garantir le règlement de ladite créance à défaut de fonds disponibles au titre de la liquidation judiciaire et, en tout état de cause, qu’elle déboute le CGEA de toutes demandes, condamne solidairement Maître [V] ès qualités et le CGEA en qualité de partie au procès en tous les frais et dépens en ce compris la somme de 3 500 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile et dise que dans l’hypothèse où, à défaut de règlement spontané des condamnations prononcées dans le jugement à intervenir, l’exécution forcée devra être réalisée par l’intermédiaire d’un huissier, le montant des sommes retenues par l’huissier par application de l’article 10 du Décret du 8 mars 2001 portant modification du décret du 12 décembre 1996 devra être supporté par le débiteur en sus de l’application de l’article 700 du code de procédure civile.

Maître [V] s’est constitué en qualité de liquidateur judiciaire de la SAS STIC mais n’a pas conclu.

La clôture de la procédure a été ordonnée le 25 janvier 2023.

MOTIFS DE L’ARRET

Sur l’exception d’incompétence

L’exception d’incompétence soulevée par l’appelante est recevable puisque, au contraire de ce qui est soutenu par M. [K] [I], l’Unedic désigne bien dans le dispositif de ses conclusions, conformément à l’article 75 du code de procédure civile, la juridiction devant laquelle elle entend que l’affaire soit portée, à savoir le tribunal de commerce de Lille Métropole, ce qu’elle avait également fait en première instance, comme il résulte de la lecture du jugement.

En application de l’article L.1411-1 du code du travail, les juridictions du travail ont compétence matérielle pour connaître des demandes fondées sur un contrat de travail et statuer sur l’existence et la validité d’un tel contrat. Il leur appartient d’en tirer les conséquences, le cas échéant en rejetant les demandes si elles ne reconnaissent pas l’existence d’une relation de travail salariée. Les demandes de M. [K] [I] au titre de l’exécution et de la rupture du contrat de travail dont il se prévaut ne sauraient en conséquence être renvoyées à l’examen du tribunal de commerce.

Le jugement est donc infirmé en ce qu’il a déclaré irrecevable l’exception d’incompétence soulevée par le CGEA mais confirmé en ce qu’il a écarté cette exception d’incompétence et s’est déclaré compétent pour connaître du litige.

Sur l’existence d’un contrat de travail

En application de l’article L.1221-1 du code du travail, ensemble l’article 1353 du code civil, M. [K] [I] verse aux débats :

– deux bulletins de salaire (novembre et décembre 2003) établis par la SARL STIC et les bulletins de salaire de février 2016 à mars 2018 établis par la SAS STIC,

– le reçu pour solde de tout compte signé par M. [W] pour la SAS STIC le 28 mars 2018,

– le récapitulatif des créances salariales dont il ressort que M. [W] était le dirigeant de la SAS STIC,

– le certificat de travail établi par M. [W] pour la SAS STIC le 28 mars 2018.

L’intimé apporte en conséquence la preuve d’un contrat de travail apparent. En présence d’un contrat de travail apparent, il appartient à l’appelante, qui invoque son caractère fictif, d’en rapporter la preuve.

L’AGS ne soutient pas utilement que les éléments produits par M. [K] [I] ne sont pas suffisants pour prouver une relation de travail subordonnée, renversant ainsi la charge de la preuve. De même, la circonstance qu’à compter d’octobre 2017, les bulletins de salaire établis par la SAS STIC mentionnent soudainement au profit de M. [K] [I] une reprise d’ancienneté au 2 novembre 2003 au lieu du 1er février 2014 précédemment, ainsi qu’un nouvel élément de rémunération, libellé « garantie d’ancienneté », pour une somme de 1 152,93 euros par mois n’est pas de nature à remettre en cause l’existence d’un contrat de travail liant M. [K] [I] à la SAS STIC, pas plus que le lien de famille entre M. [K] [I] et M. [T] [I], qui a géré la société jusqu’en février 2015, sa qualité de dirigeant mandataire avec [T] [I] d’une SCI Rossi dont le siège social est situé à la même adresse que celui de la SAS STIC, [Adresse 6] à [Localité 7], ses mandats au sein de plusieurs SCI ayant leur siège social à la même adresse et sa qualité d’associé égalitaire dans la SAS Distreco, ayant également son siège social à la même adresse. Aucun de ces éléments n’est de nature à démontrer que l’intimé n’exerçait aucune activité pour la SAS STIC ou que les conditions réelles d’exercice par M. [K] [I] de son activité au sein de la SAS STIC étaient telles qu’il en était le dirigeant de fait.

Au contraire, M. [K] [I] produit plusieurs attestations dont il résulte qu’il ne dirigeait pas la SAS STIC mais n’en était que le salarié. M. [M], commercial embauché par la SAS STIC fin 2005, indique que l’ensemble des directives lui étaient données par M. [E] [I] et qu’à aucun moment des douze années passées chez la SAS STIC il n’a reçu d’ordres de M. [K] [I]. Mme [S], assistante de direction embauchée par la SAS STIC en 2014, déclare que son unique interlocuteur et décisionnaire était M. [E] [I], que M. [K] [I] assistait aux réunions en tant que collègue mais que toutes les directives et ordres émanaient de M. [E] [I] puis, après la reprise de la SAS STIC, de Messieurs [J] [O] et [D] [W]. Enfin, ce dernier atteste que M. [K] [I] était salarié de la SAS STIC, qu’il n’avait aucun mandat de gestion et qu’il était subordonné à M. [J] [O], président de STIC et co-gérant de CONDOR.

Il convient en conséquence de confirmer le jugement en ce qu’il a retenu que M. [K] [I] et la SAS STIC étaient liés par un contrat de travail.

Sur les créances de M. [K] [I] et l’allégation de fraude

Le bulletin de salaire de mars 2018 et le reçu pour solde de tout compte indiquent :

« salaire de base 8 868,67

absence pour entrée/sortie – 1 924,33

garantie d’ancienneté 1 152,93

garantie d’ancienneté régul depuis nov 2015 14 988,05

indemnité compensatrice de congés payés 33 759,90

salaire brut 58 845,22

indemnité de licenciement exonérée 49 576,40

net à payer  95 391,82 »

Il incombe à celui qui invoque la fraude de la prouver. L’appelante relève justement que les bulletins de salaire établis par la SAS STIC depuis février 2016 mentionnent une date d’entrée le 1er février 2014 avec une ancienneté évoluant en considération de cette date, soit 3 ans et 8 mois sur le bulletin de salaire de septembre 2017. A compter d’octobre 2017, les bulletins de salaire, tout en maintenant la mention d’une date d’entrée au 1er février 2014, font apparaître une ancienneté remontant au 2 novembre 2003, soit 13 ans et 11 mois sur le bulletin de salaire d’octobre 2017.

M. [K] [I] soutient qu’il a bien été embauché le 2 novembre 2003 et que la date du 1er février 2014 mentionnée sur ses bulletins de salaire procédait d’une erreur matérielle qui a été rectifiée. Il renvoie à ses bulletins de salaire de novembre et décembre 2003 mentionnant une date d’entrée au 2 novembre 2003. Cependant, aucun bulletin de salaire n’est produit pour la période de janvier 2004 à janvier 2014 qui accréditerait l’existence d’une continuité de la relation de travail. Les témoignages produits par M. [K] [I] ne permettent pas non plus de le vérifier.

Par ailleurs, l’appelante relève exactement qu’à compter d’octobre 2017, un nouvel élément de rémunération est apparu sur les bulletins de salaire de M. [K] [I], libellé « garantie d’ancienneté » pour un montant mensuel de 1 152,93 euros.

M. [K] [I] soutient qu’il ne s’agit que de l’application des dispositions conventionnelles qui instituent une garantie conventionnelle d’ancienneté, sans s’en expliquer plus avant.

L’accord du 5 mai 1992 attaché à la convention collective prévoit en son article IV A au titre de la garantie d’ancienneté (secteur non alimentaire) que les salariés bénéficient d’une garantie d’ancienneté égale à la somme des 12 salaires mensuels conventionnels de l’année civile écoulée, majorée d’un pourcentage variant selon l’ancienneté, qui est de 5% après 4 ans d’ancienneté dans l’entreprise, 9 % après 8 ans d’ancienneté, 13 % après 12 ans d’ancienneté et 17 % après 16 ans d’ancienneté. Ce texte prévoit qu’il faut pour la détermination de l’ancienneté, tenir compte non seulement de la présence continue au titre du contrat en cours, mais également de la durée des contrats antérieurs, à l’exclusion de ceux qui auraient été rompus pour faute grave ou dont la résiliation aurait été du fait du salarié intéressé ou des périodes de suspension du contrat de travail.

La garantie d’ancienneté ne joue que si le montant des rémunérations réelles est inférieur au montant de la garantie d’ancienneté. Or, la rémunération annuelle brute de M. [K] [I] (106 424,04 euros), largement supérieure au salaire annuel conventionnel (30 499,67 euros au 1er février 2013, 31 109,66 euros au 1er mars 2015 et 31 637,79 euros au 1er mars 2017), excédait la rémunération conventionnellement garantie même avec le taux de majoration le plus élevé prévu par le texte ci-dessus.

Au vu des éléments ci-dessus, la prise en compte d’une ancienneté depuis le 2 novembre 2013 et l’attribution d’un élément de rémunération s’ajoutant au salaire de base au titre de la garantie d’ancienneté sont dépourvues de cause. De plus, les modifications sont apparues sur la paie d’octobre 2017, concomitamment à l’ouverture de la procédure de redressement judiciaire de la SAS STIC le 6 novembre 2017, alors que la date de cessation des paiements a été fixée au 20 septembre 2017. Il s’en déduit qu’il s’agissait de gonfler artificiellement les éléments de rémunération et d’ancienneté pour le calcul des indemnités de rupture, en fraude au système de garantie des salaires.

La cour observe que M. [K] [I] affirme inexactement qu’il n’a aucun lien avec la société Condor alors que cette société a dirigé à compter du 5 février 2015 la société Distreco dont il était associé égalitaire.

Par conséquent, les créances de M. [K] [I] seront fixées à l’état créances salariales de la SAS STIC au titre du solde de tout compte sur la base d’une rémunération mensuelle brute de 8 868,67 euros et d’une ancienneté remontant au 1er février 2014. Le salarié qui n’a pas pris la totalité du congé auquel il avait droit doit recevoir une indemnité compensatrice de congé en application de l’article L.3141-28 du code du travail, sans qu’il ait à démontrer qu’il n’a pas pu prendre ses congés à cause de son employeur.

Le jugement sera confirmé en ce qu’il a fixé la créance de salaire de mars 2018 à 6 944,34 euros brut.

Il sera infirmé du chef de ses dispositions sur la garantie d’ancienneté et le rappel de garantie d’ancienneté depuis novembre 2015 et M. [K] [I] débouté de ces chefs.

Il sera infirmé en ce qu’il a débouté M. [K] [I] de sa demande d’indemnité compensatrice de congé payés et la créance de M. [K] [I] sera fixée à la somme de 28 955,14 euros de ce chef.

Enfin, M. [K] [I] ne saurait être condamné à procéder à la restitution de l’intégralité de la somme de 49 576,40 euros versée entre les mains du liquidateur de la SAS STIC au titre de l’indemnité de licenciement. Le montant de l’indemnité de licenciement étant limitée à la somme de 9 792,48 euros, M. [K] [I] devra restituer la somme de 39 783,92 euros.

L’Unedic devra procéder aux avances dans les limites de sa garantie et des plafonds résultant des articles L.3253-8, L.3253-15 à L.3253-17 du code du travail et dans les conditions prévues par les articles L.3253-19 à L.3253-21 dudit code, sur présentation par le mandataire d’un relevé de créance.

Il n’y a pas lieu d’ordonner une astreinte pour garantir le paiement des sommes ci-dessus.

Sur les autres demandes

Le jugement sera confirmé en ce qu’il a rappelé que le jugement d’ouverture de la procédure collective arrête le cours des intérêts légaux.

Il n’y a pas lieu de faire application de l’article 700 du code de procédure civile.

Outre le fait que l’article 10 du décret nº96-1080 du 12 décembre 1996 portant fixation du tarif des huissiers de justice en matière civile et commerciale, invoqué dans les conclusions de M. [K] [I], a été abrogé par le décret nº 2016-230 du 26 février 2016 relatif aux tarifs de certains professionnels du droit et au fonds interprofessionnel de l’accès au droit et à la justice et a été repris à l’article A. 444-32 du code de commerce, les droits visés par ces dispositions ne constituent pas des dépens et ont été réglementairement prévus comme restant à la charge du créancier de l’exécution sans que le juge puisse y déroger.

PAR CES MOTIFS

La cour statuant après débats en audience publique par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe,

Infirme le jugement en ce qu’il a déclaré irrecevable l’exception d’incompétence soulevée par le CGEA mais le confirme en ce qu’il a écarté cette exception d’incompétence, s’est déclaré compétent pour connaître du litige et a retenu que M. [K] [I] et la SAS STIC étaient liés par un contrat de travail.

Confirme le jugement en ce qu’il a fixé la créance de M. [K] [I] à l’état des créances salariales de la SAS STIC à la somme de 6 944,34 euros brut au titre du salaire de mars 2018, ainsi qu’en ses dispositions sur les intérêts de retard et les dépens.

Infirme le jugement déféré, statuant à nouveau et y ajoutant :

Déboute M. [K] [I] de ses demandes au titre de la garantie d’ancienneté et du rappel de garantie d’ancienneté depuis novembre 2015.

Fixe la créance de M. [K] [I] à l’état des créances salariales de la SAS STIC à la somme de 28 955,14 euros au titre de l’indemnité compensatrice de congé payés.

Condamne M. [K] [I] à restituer entre les mains du liquidateur judiciaire de la SAS STIC la somme de 39 783,92 euros trop versée au titre de l’indemnité de licenciement.

Déclare l’arrêt opposable à l’Unedic délégation AGS CGEA de [Localité 4] et ditqu’elle devra procéder aux avances dans les limites de sa garantie et des plafonds résultant des articles L.3253-8, L.3253-15 à L.3253-17 du code du travail et dans les conditions prévues par les articles L.3253-19 à L.3253-21 dudit code, sur présentation par le mandataire d’un relevé de créance.

Dit n’y avoir lieu à application de l’article 700 du code de procédure civile.

Met les dépens au passif de la liquidation judiciaire de la SAS STIC, ne comprenant pas les droits visés par l’article A. 444-32 du code de commerce.

LE GREFFIER

Serge LAWECKI

LE PRESIDENT

Soleine HUNTER-FALCK

 


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