Contrat de sécurisation professionnelle : 13 octobre 2023 Cour d’appel de Toulouse RG n° 22/01481

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Contrat de sécurisation professionnelle : 13 octobre 2023 Cour d’appel de Toulouse RG n° 22/01481
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13/10/2023

ARRÊT N°2023/378

N° RG 22/01481 – N° Portalis DBVI-V-B7G-OXRO

CB/AR

Décision déférée du 24 Mars 2022 – Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de TOULOUSE ( 20/01316)

Section ENCADREMENT – MUNOZ P

[V] [N]

C/

S.A.S. FIBRE EXCELLENCE

infirmation partielle

Grosse délivrée

le 13 10 2023

à Me Elisabeth MALET

Me Michel JOLLY

1CCC POLE EMPLOI

REPUBLIQUE FRANCAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

***

COUR D’APPEL DE TOULOUSE

4eme Chambre Section 2

***

ARRÊT DU TREIZE OCTOBRE DEUX MILLE VINGT TROIS

***

APPELANT

Monsieur [V] [N]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représenté par Me Elisabeth MALET de la SCP MALET FRANCK ET ELISABETH, avocat au barreau de TOULOUSE (postulant) et par Me Nelly BESSET de la SELARL LDSCONSEIL, avocat au barreau de PYRENEES-ORIENTALES (plaidant)

INTIMEE

S.A.S. FIBRE EXCELLENCE

prise en la personne de son représentant légal, domicilié en cette qualité audit siège, [Adresse 2]

Représentée par Me Michel JOLLY de la SELARL CAPSTAN SUD OUEST, avocat au barreau de TOULOUSE

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 786 et 907 du Code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 07 Septembre 2023, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant C. BRISSET, présidente et E.BILLOT, vice-présidente placée chargées du rapport. Ces magistrats ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

C. BRISSET, présidente

F. CROISILLE-CABROL, conseillère

E. BILLOT, vice- présidente placée

Greffier, lors des débats : A. RAVEANE

ARRET :

– contradictoire

– prononcé publiquement par mise à disposition au greffe après avis aux parties

– signé par C. BRISSET, présidente, et par A. RAVEANE, greffière de chambre

EXPOSÉ DU LITIGE

M. [V] [N] a été embauché selon contrat de travail à durée indéterminée du 17 mai 2010 par la SAS Tembec en qualité de directeur de ressources humaines. Son contrat a fait l’objet d’un premier transfert au profit de la société Sebso en qualité de directeur délégué.

Par une convention tripartite, il a été décidé d’un commun accord du transfert définitif du contrat de travail de M. [N] de la société Sebso vers la SAS Fibre Excellence à compter du 2 février 2017, en qualité de directeur système IRH/Sécurité. À cette date M. [N] exécutait son contrat dans le cadre d’un mi-temps thérapeutique. Le 1er septembre 2019, M. [N] a repris à temps complet.

La convention collective applicable est celle des ingénieurs et cadres de la production des papiers, cartons et celluloses.

La société Fibre Excellence emploie plus de 11 salariés.

En mai 2020, l’employeur a mis en place une procédure de licenciement pour motif économique. Par courrier du 18 mai 2020, la société Fibre Excellence a proposé des offres de reclassement dans le cadre d’une réorganisation de la société liée à sa situation économique et dans le cadre de laquelle le poste de directeur SIRH était supprimé.

Le même jour, M. [N] a été convoqué à un entretien préalable au licenciement fixé au 11 juin 2020.

M. [N] a accepté le contrat de sécurisation professionnelle et le contrat a pris fin le 3 juillet 2020 à l’issue du délai de réflexion de 21 jours.

Le 1er octobre 2020, M. [N] a saisi le conseil de prud’hommes de Toulouse de demandes portant sur l’exécution et la rupture du contrat de travail.

Par jugement du 24 mars 2022, le conseil a :

– dit et jugé que l’ensemble des demandes de M. [V] [N] sont infondées,

– débouté M. [N] de l’ensemble de ses demandes,

– confirmé que la convention de forfait annuel en jours de M. [N] est valide,

– débouté la SAS Fibre Excellence de sa demande reconventionnelle de remboursement de salaires et des congés payés y afférents,

– dit et jugé que ni M. [N], qui de plus succombe, ni la société Fibre Excellence n’apportent d’élément probant concernant les sommes réclamées au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– débouté M. [N] et la société Fibre Excellence de leur demande respective au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamné aux entiers dépens M. [N].

Le 14 avril 2022, M. [N] a interjeté appel du jugement, énonçant dans sa déclaration les chefs critiqués de la décision.

Dans ses dernières écritures en date du 22 août 2023, auxquelles il est fait expressément référence, M. [N] demande à la cour de :

– infirmer le jugement du conseil des prud’hommes 24 mars 2022, en ce qu’il a :

– dit et jugé que l’ensemble des demandes de M. [V] [N] sont infondées,

– débouté M. [N] de l’ensemble de ses demandes,

– confirmé que la convention de forfait annuel en jours de M. [N] est valide,

– débouté M. [N] de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamné aux entiers dépens M. [N].

Statuant à nouveau,

sur la procédure,

sur la déclaration d’appel:

– juger que M. [N] demande la reformation totale du jugement entrepris,

– juger que la déclaration d’appel de M. [N] du 14 avril 2022 produit pleinement ses effets,

– déclarer recevable la déclaration d’appel de M. [N].

Sur le fond :

– juger que sur la période du 1er novembre 2018 au 1er septembre 2019 la rémunération de cadre dirigeant de M. [N] a été proratisée à tort à hauteur de sa durée de travail,

– allouer en conséquence à M. [N] la somme de 15 954,48 euros à titre de rappels de salaires et les congés y afférents,

– juger que M. [N] n’a pas bénéficié des augmentations individuelles,

– condamner en conséquence la société Fibre Excellence SAS, à lui verser la somme de 16 083,33 euros à titre de rappels de salaires à ce titre et les congés y afférents,

– fixer le salaire mensuel de référence à la somme de 9 053,88 euros brut,

– juger que la société Fibre Excellence est redevable de la somme de 1 230 euros au titre de la régularisation de ses avantages en nature,

– en conséquence, condamner la société Fibre Excellence à lui payer cette somme,

– juger que M. [N] a droit à un rappel d’indemnité conventionnelle de licenciement établie à 17 893,10 euros,

– en conséquence, condamner son employeur à lui payer cette somme,

– juger qu’il y a défaut de suivi de la convention de forfait via les entretiens annuels,

– juger que M. [N] a subi un préjudice et le fixer à la somme de 13 430,89 euros brut (soit 1 mois de salaire brut de référence),

– dès lors, la condamner à payer cette somme à titre de dommages-intérêts pour défaut d’entretien annuel,

– juger que la convention de forfait en jours de M. [N] lui est inopposable,

– par conséquent, condamner l’employeur à payer à M. [N] à ce titre et à titre additionnel, les sommes suivantes :

– 48 112,79 euros brut au titre de rappels de salaires (HS sur 2019 et 2020),

– 4 811,28 euros brut au titre des congés y afférents,

– 31 681,46 euros au titre des repos compensateurs pour dépassement du seuil conventionnel et légal des HS,

– 80 585,34 euros pour travail dissimulé,

– juger que M. [N] a subi un préjudice en raison du manquement à l’égalité de traitement qu’il a subie, évalué à 2 mois de salaire,

– par conséquent, condamner l’employeur à payer la somme de 26 861,78 euros,

– juger que l’employeur a connaissance des difficultés économiques depuis à minima le transfert de M. [N] à Fibre Excellence SAS,

– juger que l’actionnaire unique n’a pris aucune mesure pour mettre aux normes le site de [Localité 4] et s’adapter aux évolutions du marché de la pâte à papier,

– juger que la réorganisation réalisée fait peser un risque sur la rentabilité de la société Fibre Excellence,

– juger qu’en juin 2020, la situation économique du secteur de la pâte à papier était favorable à la suite des besoins découlant de la crise sanitaire,

– dans ces conditions, juger que l’actionnaire unique et donc in fine l’employeur est responsable des difficultés économiques invoquées au soutien du licenciement économique de M. [N],

– juger que le licenciement est sans cause réelle et sérieuse pour défaut de recherches sérieuses et défaut de respect de la priorité de réembauche,

– dès lors, condamner l’employeur à payer la somme de 134 308, 90 euros (10 mois de salaires brut) à titre de dommages-intérêts pour licenciement abusif,

– juger que la procédure de licenciement a eu un caractère vexatoire,

– par conséquent, condamner l’employeur à payer à M. [N] la somme de 26 861,78 euros (2 mois de salaire de brut) en raison du caractère vexatoire de la procédure de licenciement,

– ordonner à la société Fibre Excellence de remettre à M. [N] un solde de tout compte, un certificat de travail, une attestation pôle emploi et un bulletin de salaire rectifiés conformément aux condamnations qui seront prononcées, le tout sous astreinte de 100 euros par jour de retard passé un délai de 10 jours suivant la notification de la décision devant intervenir,

– juger que M. [N] capitalisera les intérêts échus par application de la disposition précitée,

– condamner la société à payer à M. [N] la somme de 3 500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamner la société Fibre Excellence aux entiers dépens.

Dans ses dernières écritures en date du 21 août 2023, auxquelles il est fait expressément référence, la société Fibre Excellence demande à la cour de :

A titre principal :

– juger l’absence d’effet dévolutif de la déclaration d’appel,

Ou a minima :

– juger que la portée de l’effet dévolutif est limitée à la possibilité pour la cour de confirmer le jugement et confirmer le jugement rendu par le conseil de prud’hommes de Toulouse le 24 mars 2022 dans toutes ses dispositions.

Subsidiairement :

– juger les demandes suivantes irrecevables en ce qu’elles excédent les montants sollicités dans les conclusions notifiées le 10 mai 2022 dans le délai de l’article 908 du code procédure civile en application de l’article 910-4 du code de procédure civile :

– juger que M. [N] a droit à un rappel d’indemnité conventionnelle de licenciement établi à 17 893,10 euros,

– juger que M. [N] a subi un préjudice et le fixer à la somme de 13 430,89 euros brut ‘ pour défaut d’entretien annuel,

– 48 112,79 euros brut au titre de rappels de salaires (HS 2019 et 2020),

– 4 811,28 euros bruts au titre des congés payés y afférents,

– 31 681,46 euros au titre des repos compensateurs pour dépassement du seuil conventionnel et légale des HS,

– 80 585,34 euros pour travail dissimulé,

– condamner l’employeur à payer la somme de 26 861,78 euros au titre d’un prétendu manquement au principe d’égalité de traitement,

– condamner l’employeur à payer la somme de 134 308,90 euros (10 mois de salaires brut) à titre de dommages intérêts pour licenciement abusif,

– condamner l’employeur à payer à M. [N] la somme de 26.861,78 euros (2 mois de salaire brut) en raison du caractère vexatoire de la procédure de licenciement,

– juger les demandes suivantes irrecevables en ce qu’elles ne figuraient pas dans les conclusions notifiées le 10 mai 2022 dans le délai de l’article 908 du code procédure civile en application de l’article 910-4 du code de procédure civile :

– juger que l’employeur a connaissance des difficultés économiques depuis, à minima le transfert de M. [N] à la société Fibre Excellence,

– juger que l’actionnaire unique n’a pris aucune mesure pour mettre aux normes le site de [Localité 4] et s’adapter aux évolutions du marché de la pâte à papier,

– juger la réorganisation réalisée fait peser un risque sur la rentabilité de la société Fibre Excellence,

– juger qu’en juin 2020, la situation économique du secteur de la pâte à papier était favorable à la suite des besoins découlant de la crise sanitaire,

– dans ses conditions, juger que l’actionnaire unique et donc in fine l’employeur sont responsables des difficultés économiques invoquées au soutien du licenciement économique de M. [N],

– confirmer le jugement rendu par le conseil de prud’hommes de Toulouse le 24 mars 2022 dans toutes ses dispositions,

– juger les demandes de M. [N] irrecevables ou mal fondées,

– débouter M. [N] de l’intégralité de ses demandes,

– condamner M. [N] à verser à la société Fibre Excellence la somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamner M. [N] aux entiers dépens.

En cas d’infirmation du jugement du 24 mars 2022 concernant validité de la convention de forfait annuel en jours :

– condamner M. [N] à verser à la société Fibre Excellence la somme de 2 046 euros en remboursement du salaire maintenu au titre des jours de repos résultant de la convention de forfait annuel en jours, ainsi que 204 euros de congés payés sur cette somme.

La clôture de la procédure a été prononcée selon ordonnance du 5 septembre 2023.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la procédure,

L’intimée conclut en premier lieu à l’absence d’effet dévolutif de l’appel dans la mesure où la déclaration d’appel ne précise pas si elle tend à la réformation ou l’annulation du jugement.

Il résulte de l’article 542 du code de procédure civile que l’appel tend, par la critique du jugement rendu par une juridiction du premier degré, à sa réformation ou à son annulation par la cour d’appel. L’effet dévolutif procède de la seule déclaration d’appel laquelle doit satisfaire aux dispositions de l’article 901 du code de procédure civile. Or, si ces dispositions imposent à l’appelant, sauf lorsque son appel tend à l’annulation du jugement, d’énoncer les chefs critiqués du jugement aucun texte ne lui fait obligation de mentionner que son appel tend à l’infirmation du jugement.

Cette obligation s’impose dans le cadre des premières écritures de l’appelant qui pour pouvoir avoir un effet au regard de l’article 908 du code de procédure civile doivent mentionner dans leur dispositif qu’elles tendent à l’infirmation ou l’annulation du jugement.

En l’espèce, la déclaration d’appel énonçait qu’elle portait sur le débouté de l’ensemble des demandes de M. [N], lesquelles prétentions étaient de surcroît rappelées. Elle emportait bien effet dévolutif alors que dans ses premières écritures d’appelant, le dispositif saisissait la cour d’une demande d’infirmation du jugement. Il convient donc de rejeter la demande de la société Fibre Excellence tendant à voir constater l’absence d’effet dévolutif ou la possibilité pour la cour de seulement confirmer le jugement.

Au visa de l’article 910-4 du code de procédure civile l’intimée soutient qu’un certain nombre de prétentions émises à son encontre sont irrecevables pour ne pas avoir été formulées dès les premières écritures. Il convient tout d’abord de distinguer. En effet, s’agissant du second bloc d’énonciations visées par l’intimée dans le dispositif de ses écritures, la cour constate qu’il ne s’agit pas de prétentions au sens du code de procédure civile mais d’un récapitulatif de moyens, certes repris de manière erronée au dispositif, mais sans pouvoir être qualifiés de demandes. Ces moyens, même nouveaux, doivent donc être analysés et n’ont pas à faire l’objet d’une fin de non-recevoir.

Pour le surplus la fin de non-recevoir est opposée à des prétentions dont le quantum a été modifié et donc dans la limite de l’augmentation formulée par l’appelant. Celui-ci soutient que ses prétentions sont recevables dès lors que la modification de ses prétentions sur le temps de travail découle de sa pièce 89 et celle de ses prétentions portant sur le licenciement découle des nouveaux éléments que l’employeur avait toujours refusé de communiquer et donc de la survenance ou de la révélation d’un fait.

La cour ne saurait suivre une telle analyse. Sur le temps de travail, la pièce 89 qu’il vise est une attestation d’une collègue faisant état de l’amplitude horaire de la présence de M. [N] lorsqu’il était présent sur le site de [Localité 3]. Toutefois, il s’agit là uniquement d’un élément de preuve lequel ne constitue pas la révélation d’un fait et n’est pas de nature à modifier la description que M. [N] faisait lui-même de ses horaires et le calcul qui en découlait en termes de rappels de salaire dans sa demande initiale. De même quant à la rupture du contrat de travail, M. [N] produit un certain nombre d’éléments comptables à l’appui de sa contestation du licenciement. Il s’agit là encore d’une question de preuve portant sur un licenciement qui a toujours été discuté et ces nouveaux éléments ne sont en rien de nature à faire évoluer le litige quant à l’appréciation des conséquences de la rupture.

Dès lors, les demandes présentées pour la première fois dans les conclusions n 4 de l’appelant en date du 8 août 2023 et reprises dans ses dernières écritures sont irrecevables. Il sera donc statué par la cour au vu des moyens développés dans les dernières conclusions en date du 22 août 2023 mais sur les seules demandes figurant dans les écritures initiales et reprises dans les conclusions du 10 mai 2022.

Il convient pour le surplus de reprendre chacune des prétentions de M. [N] étant observé que pour certaines une prescription est opposée, laquelle sera envisagée demande par demande.

L’avantage en nature sur véhicule de fonction,

L’appelant soutient que cet avantage a été mal calculé de sorte qu’il a surcotisé et été imposé à tort à ce titre. Il sollicite une somme de 1 230 euros.

L’employeur oppose en premier lieu la prescription et subsidiairement soutient que cette prétention n’est pas justifiée.

L’appelant ne précise pas dans ses écritures la période qui serait concernée par un calcul erroné de son avantage en nature voiture. Cependant, il résulte de ses pièces que c’est la période où il était salarié de la société Sebso qui est seule concernée par sa réclamation. Certes le transfert est intervenu dans le cadre d’une convention de sorte que les dispositions de l’article L. 1224-2 du code du travail s’appliquent. Mais il n’en demeure pas moins que la période concernée, même non autrement précisée, ne peut être qu’antérieure au 2 février 2017. Or, le contrat a été rompu le 3 juillet 2020 et la juridiction saisie le 1er octobre 2020 de sorte que par application des dispositions de l’article L. 3245-1 du code du travail la demande est nécessairement prescrite.

Le jugement, qui a retenu cette prescription mais a néanmoins examiné la demande au fond et en a tiré la conséquence erronée d’un débouté sera infirmé de ce chef et la demande déclarée irrecevable.

Sur les augmentations individuelles,

La cour n’est saisie que dans les termes du dispositif des écritures de l’appelante qui sollicite la somme de 16 083,33 euros outre les congés payés afférents. La somme de 29 972 euros visée en page 22 des écritures est ainsi en dehors de la saisine de la cour. Il est par ailleurs sollicité des dommages et intérêts au titre d’une disparité de traitement illicite à hauteur de 18 107,75 euros compte tenu de l’irrecevabilité partielle retenue ci-dessus.

S’agissant de la prétention à un rappel de salaire, M. [N] soutient qu’il n’a bénéficié que des augmentations collectives et non d’augmentations individuelles malgré les engagements de l’employeur et ce alors que la modification formelle de sa rémunération dans le cadre du transfert ne venait que compenser la perte de certains avantages.

L’employeur soutient que le salarié a bénéficié d’augmentations de son salaire et conteste tout engagement unilatéral.

La cour ne saurait retenir la thèse d’un engagement unilatéral à partir des courriers électroniques produits en pièces 15, 16 et 17. En effet, ces documents qui constituent des documents de travail de préparation comptable et budgétaire ne peuvent valoir engagement unilatéral pour des augmentations individuelles alors que l’analyse qu’en fait le salarié correspondrait à des augmentations non pas individuelles mais collectives. Or, il admet avoir bénéficié de ces augmentations collectives. Au surplus, son argumentation peut d’autant moins être retenue qu’elle revient à considérer que toutes les augmentations dont il a bénéficié seraient soit collectives, soit relèveraient de modalités destinées à compenser la perte de certains avantages dans le cadre du transfert et ce en faisant abstraction tant de la réalité de certaines augmentations que des modifications de son contrat de travail. En effet, pour considérer que le transfert de son contrat entre la société Sebso et la société Fibre excellence était exclusif de toute augmentation il intègre à sa situation précédente l’intéressement dont il avait bénéficié. Or, cet intéressement ne peut être considéré comme certain puisqu’il dépend des résultats de l’entreprise alors en outre que M. [N] fait complètement abstraction de l’accord d’intéressement mis en place en 2018 au sein de la société Fibre excellence.

M. [N] ne peut donc prétendre à se voir appliquer a posteriori une augmentation individuelle chaque année et pour un montant qu’il fixe unilatéralement. Sa demande de rappel de salaire ne pouvait qu’être rejetée, le jugement sera confirmé de ce chef.

Quant à sa demande indemnitaire, il se fonde sur le terrain de la disparité de traitement illicite. Il invoque toujours cette absence d’augmentation individuelle mais se prévaut également, dans un autre chapitre de ses écritures mais toujours au titre d’une disparité de traitement de l’absence d’entretiens annuels avant 2016 et de ce que ses avantages en nature n’étaient pas évalués avec les mêmes méthodes que pour ses collègues. Sur ces deux derniers points, il ne donne à la cour aucun élément concret qui permettrait d’envisager une comparaison de sorte qu’il n’y a pas même lieu de considérer si d’autres salariés peuvent être dans une situation comparable.

Il convient en effet de rappeler que l’employeur n’est tenu d’assurer l’égalité de rémunération entre salariés que pour un même travail ou un travail de valeur égale.

Par application des dispositions de l’article L. 3221-4 du code du travail sont considérés comme ayant une valeur égale, les travaux qui exigent des salariés un ensemble comparable de connaissances professionnelles consacrées par un titre, un diplôme ou une pratique professionnelle, de capacités découlant de l’expérience acquise, de responsabilités et de charge physique ou nerveuse.

Il appartient au salarié qui invoque une violation de ce principe de soumettre au juge les éléments de fait susceptibles de caractériser une inégalité de rémunération, et il incombe à l’employeur de rapporter la preuve d’éléments objectifs, matériellement vérifiables, justifiant cette différence, dont le juge doit contrôler concrètement la réalité et la pertinence.

La cour a exclu ci-dessus le droit à un rappel de salaire au titre des augmentations individuelles. La cour ne dispose d’aucun élément de comparaison pour les entretiens individuels et les avantages en nature. Le seul autre élément dont se prévaut le salarié au titre de la disparité de traitement est l’attestation de Mme [W]. Celle-ci y fait état de ses fonctions de directrice développement bio sources et du fait qu’elle a bénéficié de deux augmentations individuelles en décembre 2015 et en juillet 2018. Ceci est très insuffisant pour caractériser une situation comparable entre les salariés, étant rappelé par ailleurs que de son côté M. [N] avait bénéficié d’augmentations individuelles en janvier puis juillet 2012 et en février 2017, la cour ne pouvant considérer que l’augmentation de 2017 venait uniquement compenser la perte d’avantages. Ceci est très insuffisant pour constituer les éléments de fait laissant supposer une disparité de traitement illicite. La demande indemnitaire ne pouvait qu’être rejetée et le jugement sera confirmé sur ce point.

Sur la demande de rappel de salaire sur la période novembre 2018-août 2019

Cette période a fait l’objet d’un avenant lequel faisait suite à une période de travail à temps partiel thérapeutique. L’employeur discute cette qualification de temps partiel en considérant qu’il s’agissait non d’un temps partiel mais d’une organisation différente du temps de travail sur seulement quatre jours et que la réduction de rémunération était liée au droit du salarié de ne consacrer que quatre jours à son activité.

Cependant, la cour ne saurait retenir une telle argumentation. En effet, elle est contraire aux termes de l’avenant conclu entre les parties. Ce document en date du 31 octobre 2018 avait pour objet la diminution de la durée de travail du salarié et non une simple modification de son organisation. Il était expressément convenu d’une date de passage à temps partiel au 1er novembre 2018 et d’une réduction de la rémunération au prorata de la durée du travail.

Aucun élément ne permet certes de considérer que cet avenant aurait été imposé par l’employeur à son salarié et il n’y a pas lieu de se placer sur le terrain de l’abus. En revanche, il est constant que l’avenant ne comprend pas les énonciations prévues par l’article L. 3123-6 du code du travail en particulier sur la répartition de la durée du travail entre les jours de la semaine ou du mois. Il ne peut ainsi qu’être présumé à temps complet. L’employeur n’apporte pas d’éléments suffisants sur la réalité du temps de travail de M. [N] étant observé que le fait que la signature de ce contrat corresponde à une demande du salarié ne saurait suppléer aux dispositions susvisées qui sont d’ordre public. En effet, il est produit uniquement quelques courriers électroniques pour quelques semaines de la période faisant ressortir des vendredis non travaillés. Ceci est tout à fait insuffisant et l’est d’autant plus qu’il est quelque peu contradictoire pour l’employeur d’invoquer à la fois qu’il ne s’agissait pas d’un temps partiel classique mais d’organiser une plus grande flexibilité et que la durée du travail était inférieure à un temps plein. Les éléments produits par l’employeur ne permettent donc pas d’écarter la présomption de temps plein.

Il s’en déduit que M. [N] est bien fondé à venir solliciter un rappel de salaire au regard de la réduction qui avait été appliquée à sa rémunération en considération d’un temps partiel qui ne peut être admis comme tel et relève donc d’un temps plein. Le calcul n’en est pas spécialement contesté de sorte que la somme de 15 954,48 euros doit être retenue. Si les congés payés afférents qui sont demandés ne sont pas expressément chiffrés, ils demeurent déterminables et seront retenus pour la somme de 1 595,44 euros. Le jugement sera infirmé sur ce point et l’employeur condamné au paiement de ces sommes.

Sur la durée du travail lors de la période à temps plein,

M. [N] s’explique sur des heures de travail en 2018, 2019 et 2020 mais formule une demande de rappels de salaire au titre d’heures supplémentaires sur la seule période de septembre 2019 à juillet 2020. Il n’y a donc pas lieu d’envisager les autres périodes.

L’avenant qui emportait renonciation au statut de cadre dirigeant stipulait une convention de forfait exprimée en jours. La possibilité de recourir à une telle convention pour M. [N] n’est pas discutée au regard du niveau d’autonomie qui était le sien.

Pour considérer que la convention de forfait serait régulière et opposable au salarié, l’employeur se prévaut tout d’abord de l’entretien réalisé le 10 février 2020. Cette date ne présente pas de caractère de certitude étant observé que le document produit n’est pas signé par le salarié. Mais en toute hypothèse on ne peut que constater son caractère particulièrement sommaire puisqu’il est simplement mentionné, en dehors d’un point sur la rémunération, bien équilibré et gérable avec 3 nuits en déplacement par semaine, confirmé par l’avenant forfait jour du 1er septembre 2019. Or, il résulte des dispositions conventionnelles et en particulier de l’avenant du 9 mai 2012 que l’entretien suppose que soient

abordées outre la charge de travail et la rémunération, l’organisation du temps de travail, l’articulation avec la vie personnelle et familiale et la possibilité de remettre en cause la convention de forfait. Surtout, ces mêmes dispositions conventionnelles imposent l’établissement d’un document récapitulant les journées ou demi-journées travaillées ainsi que les journées ou demi-journées de repos.

Or, aucun document n’est produit à ce titre.

Dans de telles conditions la convention de forfait est bien inopposable au salarié.

Le régime devient celui du droit commun du temps de travail. Il résulte des dispositions de l’article L. 3171-4 du code du travail qu’en cas de litige relatif à l’existence ou au nombre d’heures de travail accomplies, l’employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié.

Au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l’appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d’instruction qu’il estime utiles.

Si le décompte des heures de travail accomplies par chaque salarié est assuré par un système d’enregistrement automatique, celui-ci doit être fiable et infalsifiable.

Ainsi, si la charge de la preuve est partagée en cette matière, il appartient néanmoins au salarié de présenter à l’appui de sa demande des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu’il prétend avoir accomplies afin de permettre à l’employeur, qui assure le contrôle des heures effectuées, d’y répondre utilement en produisant ses propres éléments.

En l’espèce, le salarié produit un décompte précis des heures de travail qu’il soutient avoir accomplies et permettant un débat contradictoire. L’employeur de son côté n’apporte aucun élément de contrôle du temps de travail et ne propose d’ailleurs aucun contre chiffrage. Il convient donc d’admettre la demande de rappel de salaire telle que présentée par le salarié pour la somme de 22 878 euros, au regard de l’irrecevabilité partielle prononcée ci-dessus, outre 2 287,80 euros au titre des congés payés afférents. En effet, si cette somme n’est pas exactement calculée par le salarié qui retient un taux horaire erroné puisque la cour n’a pas procédé à la réévaluation sollicitée, il applique une majoration uniforme à 25% alors que certaines heures relèveraient d’une majoration à 50%. En recalculant les sommes, le montant serait supérieur à celui sollicité de sorte que la cour s’en tiendra à la demande. Le jugement sera infirmé sur ce point et l’employeur condamné au paiement de ces sommes.

Il ne saurait être fait droit à la demande au titre des repos compensateurs, dont le calcul n’est au demeurant pas explicité. En effet, la demande de rappels de salaire porte sur la période rappelée ci-dessus de septembre 2019 au 3 juillet 2020. Le contingent d’heures supplémentaires est, par application des dispositions de l’article L.3121-3 du code du travail un contingent annuel de sorte qu’il doit en l’espèce être apprécié sur deux exercices. Or, les heures retenues par la cour n’ont excédé 220 heures ni sur l’année 2019, ni sur l’année 2020 étant rappelé qu’elles sont retenues pour un total réparti également sur toute la période, de 306,5 heures. La demande sera rejetée.

Il convient de tirer les conséquences de l’inopposabilité de la convention de forfait de sorte que l’employeur est bien fondé à venir réclamer la somme de 2 046 euros correspondant aux jours de RTT acquis en exécution de cette convention. M. [N] sera condamné à la répétition de cette somme, calculée sur la base des 5,5 jours acquis. Il n’y a en revanche pas lieu d’assortir cette somme d’une indemnité de congés payés afférents s’agissant précisément de RTT.

Sur le travail dissimulé,

L’indemnité de l’article L. 8223-1 du code du travail pour travail dissimulé suppose non seulement la minoration de déclaration telle qu’elle résulte du rappel de salaire ordonné ci-dessus mais également le caractère intentionnel de cette dissimulation. Ce caractère intentionnel ne saurait découler du seul fait que la convention de forfait est inopposable. Or, s’il est manifeste que la convention de forfait n’a pas fait l’objet d’un suivi suffisant, il n’en demeure pas moins que le salarié était initialement cadre dirigeant donc non soumis au temps de travail, puis avait exercé ses fonctions dans le cadre d’un temps partiel thérapeutique sans que son statut de cadre dirigeant ne soit initialement remis en cause, y compris par lui, puis s’est vu soumettre au régime du forfait jour lorsque les parties ont acté la modification du périmètre de ses fonctions. Cela a certes entraîné des difficultés d’application et de suivi mais ne saurait être suffisant pour établir une volonté délibérée et donc l’intention de l’employeur de procéder par minoration horaire. La demande sera rejetée.

Sur la demande de dommages et intérêts pour non tenue d’entretien annuel,

La demande est présentée de façon à tout le moins confuse puisqu’il est fait état d’une absence d’entretiens en visant parfois les entretiens liés à la convention de forfait et dans le même temps l’absence d’entretien annuel et soutenu en outre que la durée maximale du travail a été dépassée, ce qui constituerait un manquement aux durées minima de repos. Il est justifié d’entretiens annuels et le salarié dans son argumentation invoque une carence pour une période ancienne puisque antérieure à 2016, sans établir aucun préjudice subsistant pour lui. De même, le seul fait que la convention de forfait lui soit inopposable ne saurait justifier d’un préjudice après paiement des heures supplémentaires retenues ci-dessus. Quant aux durées maximales de travail, il n’est donné aucun exemple de dépassement, le salarié se contentant de généralités de ce chef. Cette demande indemnitaire ne pouvait qu’être rejetée.

Sur la rupture,

Elle est intervenue sur le fondement d’un licenciement pour motif économique énoncé ainsi que suit :

Dans le cadre du projet de licenciement économique dont vous faites l’objet, nous vous informons que vous avez la possibilité, si vous remplissez les conditions requises, de bénéficier d’un contrat de sécurisation professionnelle (CSP) aux conditions définies dans le document d’information remis en même temps que la présente lettre.

Ce projet de licenciement repose sur les motifs suivants :

L’activité économique générale française a ralenti en 2019 (+1,3% vs +1,5 % en 2018 et +2,3 % en 2017).

Ce ralentissement de l’économie a eu un impact négatif sur la production industrielle française, qui a reculé en 2019 pour la seconde année consécutive.

Par ailleurs, ce recul de la production industrielle s’observe dans la plupart des pays de l’UE. A ce titre, il peut être noté que parmi les pays avec lesquels les échanges de papiers et cartons sont les plus importants avec la France (Allemagne, Italie et Espagne) seule l’Allemagne a eu en 2019 une production industrielle dépassant celle « d’avant la crise de 2008/2009 ». Ce n’est pas le cas de la France où l’indice de la production Industrielle (indice 100 en 2015) était, en décembre 2019, 12 points en deçà de son niveau de janvier 2008.

Du côté de l’offre, l’année 2018 a été marquée par des arrêts consécutifs à des problèmes techniques, à des facteurs météorologiques (tornade en Amérique du Nord, difficultés d’exploitation forestière), ou liés à des travaux pour augmentation de capacité, ainsi que par des retards dans la mise en service de nouvelles capacités de production.

Le résultat de cette situation a été que les prix, tant de la fibre d’Eucalyptus (fibre courte) que de la pâte de fibres longues (NBSK), se sont fortement enchéris tout le long de l’année 2018, atteignant des niveaux historiquement élevés.

Cependant, à partir du début du quatrième trimestre 2018, les marchés des différents types de pâte se sont détendus et les prix ont commencé à refluer. Cette détente du marché, s’est traduite par une augmentation des stocks dans les ports, ainsi que par une diminution des cours.

Cette tendance s’est confirmée en 2019, la demande mondiale en pâte marchande opérant un fort ralentissement et demeurant inévitablement liée à l’évolution de la demande chinoise. Ainsi, face à la poursuite du ralentissement de l’économie chinoise (sur l’ensemble de l’année écoulée, le PIB chinois a augmenté de 6%, sa plus faible croissance en 28 ans) le marché mondial de la pâte marchande a dû faire face à une forte décélération.

Les prix (indice PIX) des fibres de référence sont passées du pic de 2018 (octobre) à fin décembre 2019 de :

Fibre longue Nordique (NBSK) : de 1,230 US$ / MT en Octobre 2018 à 820 US$ / MT à fin décembre 2019, soit ‘ 410 $ (-33%)

Fibre courte d’Eucalyptus (BHKP) : de 1,050 US$ / Mt en octobre 2018 à 680 US$ / MT à fin décembre 2019, soit ‘ 370$ (-35%).

Dans ce contexte, la société et par-delà le secteur d’activité commun au sien et à celui des entreprises du groupe auquel elle appartient établies sur le territoire national se trouvent confrontés à des menaces réelles sur leur compétitivité.

A ce titre, il est rappelé que Fibre Excellence SAS est la holding qui gère principalement les sociétés de l’industrie papetière et de l’exploitation forestière du groupe en France. Que le Groupe se retrouve fortement impacté par ce contexte économique mondial et ses répercussions directes sur le prix de vente de la pâte à papier qui a fortement chuté au cours de l’exercice 2019 passant de :

Pour Fibre Excellence [Localité 4] : (-23%)

882 EUR par tonne en Janvier 2019,

526 EUR par tonne en Décembre 2019,

Cette diminution du prix de vente moyen a entrainé un manque à gagner significatif pénalisant fortement les résultats de la structure : perte 2019 de 30 511 195 euros.

Pour Fibre Excellence [Localité 3] (-21%)

628 EUR par tonne en Janvier 2019,

497 EUR par tonne en Décembre 2019,

Cette diminution du prix de vente moyen a entraîné un manque à gagner significatif pénalisant fortement les résultats de la structure : perte 2019 de 2 608 305 euros,

Compte tenu de la performance des usines, Fibre Excellence SAS se retrouve également impactée de manière négative, générant une Perte de 19 035 451 euros sur 2019.

Au niveau groupe la perte consolidée sur l’exercice 2019 s’élève à 28 millions d’euros.

Sur l’année 2020, les prévisions réalisées lors du mois d’avril 2020 démontrent des résultats attendus qui restent négatifs que ce soit pour les usines de [Localité 4] (- 12.8 M euros) et [Localité 3] (-2 M euros), ou encore le siège Fibre Excellence SAS (- 2 M euros).

Il est impossible de laisser perdurer une telle situation dans un pareil environnement.

Afin d’assurer la sauvegarde de sa compétitivité, la société et par-delà le secteur d’activité commun au sien et à celui des entreprises du groupe auquel elle appartient établies sur le territoire national doivent se repositionner rapidement et limiter les risques de pertes financières pour garantir leurs ressources.

Pour redresser la situation, il est nécessaire de rapidement repenser l’organisation pour assurer la compétitivité.

Dans ce cadre, il a été décidé de mettre fin au ‘cash pooling’ le 16 février 2020, et de redonner à chaque société du groupe son autonomie en termes de gestion et financièrement.

En conséquence, la centralisation de la gestion des entreprises du groupe en France au sein de Fibre Excellence SAS se limite aux fonctions de Direction par métier rattachées au Directeur Général , de l’équipe commerciale et de l’administration des ventes, de reporting à l’actionnaire et de support informatique SAP.

Dans ce contexte, et dans le cadre de cette réorganisation nous sommes contraints d’envisager la suppression de votre poste de Directeur SIRH.

Nous avons recherché des solutions de reclassement sur des emplois relevant de la même catégorie que la vôtre, sur des emplois équivalents, ainsi que sur des emplois de catégories inférieures.

Dans ce cadre en date du 25 mai 2020, la liste des postes disponibles, situés sur le territoire national, dans l’entreprise et les autres entreprises du groupe dont l’entreprise fait partie vous a été communiquée.

Vous disposez d’un délai courant jusqu’au 24 Juin 2020 pour nous présenter, par écrit, votre candidature sur l’un ou plusieurs des postes, soit par courrier recommandé avec accusé de réception adressé à la Direction des Ressources Humaines, soit par courrier remis en main propre à cette dernière.

L’absence de candidature à l’issue du délai précité vaudra refus des offres.

A ce jour, vous n’avez candidaté à aucun poste. A défaut de candidature, nous serons contraints de constater que malgré notre recherche active de reclassement, nous ne sommes pas en mesure de vous proposer, à date, sur le territoire national, des postes de reclassement dans l’entreprise et les autres entreprises du groupe.

En revanche, si vous deviez candidater à un poste, le présent courrier de proposition de contrat de sécurisation professionnelle (CSP) deviendrait nul et non avenu.

Ainsi, à défaut de candidature sur un poste, compte tenu de l’ensemble de ces éléments, à savoir la sauvegarde de ta compétitivité de la société, et par-delà du secteur d’activité commun au sien et à celui des entreprises du groupe auquel elle appartient établies sur le territoire national nécessitant une réorganisation et la suppression subséquente de votre poste de Directeur SIRH ainsi que de l’impossibilité de procéder à votre reclassement en interne, nous vous proposons d’adhérer au CSP.

Nous vous rappelons que vous disposez d’un délai de 21 jours, soit jusqu’au 2 Juillet 2020 inclus, pour nous faire part de votre adhésion au contrat de sécurisation professionnelle en nous retournant le bulletin d’adhésion figurant dans le dossier.

Ce délai doit vous permettre de vous rapprocher de pôle emploi afin que ce dernier puisse vérifier si vous remplissez les conditions nécessaires au bénéfice de ce dispositif.

En l’absence de réponse de votre part dans ce délai, votre silence sera assimilé à un refus d’adhésion.

En cas d’adhésion, votre contrat de travail sera réputé rompu d’un commun accord le lendemain de la date d’expiration de ce délai de réflexion, soit le 3 juillet 2020. Vous bénéficierez immédiatement du statut d’adhérent au Contrat de Sécurisation Professionnelle.

Pour votre parfaite information, votre adhésion éventuelle au contrat de sécurisation professionnelle vous ouvrirait droit, outre l’indemnité compensatrice de congés payés, à l’indemnité de licenciement à laquelle votre ancienneté ouvre droit.

En revanche, vous ne pourrez prétendre à un quelconque préavis ni à l’indemnité compensatrice correspondante.

De plus, et conformément à l’article L.1233-45 du code du travail, vous pourriez bénéficier, en pareil cas, d’une priorité de réembauchage durant un délai d’un an à compter de la date de rupture de votre contrat de travail.

Pour ce faire, vous devriez nous faire part de votre désir d’user de cette priorité au cours de ce délai d’un an. Cette priorité s’applique aux emplois compatibles avec votre qualification actuelle ou avec celles que vous viendriez à acquérir sous réserve que vous nous informiez de celles-ci.

En application de l’article L1233-67 du Code du travail, nous vous informons que toute contestation portant sur la rupture du contrat de travail ou son motif devrait être engagée dans un délai de douze mois à compter de l’adhésion au Contrat de Sécurisation Professionnelle.

Nous vous informons par ailleurs, que nous avons décidé de vous libérer de l’interdiction ce concurrence figurant dans votre contrat de travail.

Enfin, en votre qualité d’ancien salarié, vous bénéficierez du maintien des garanties «prévoyance» et «santé» applicables aux salariés de l’entreprise, sous réserve d’être pris en charge par le régime d’assurance chômage, dans les conditions légales prévues à l’article L911-8 du code de la sécurité sociale.

M. [N] conteste à la fois le motif tel qu’il est énoncé et la question de la recherche de reclassement.

Le motif économique doit être apprécié au regard des dispositions de l’article L. 1233-3 du code du travail et ce au sein du secteur d’activité du groupe.

Or, il résulte des comptes consolidés tels que produits par l’employeur en pièce 23 et 23 bis qu’il existait bien de réelles difficultés. Alors que le résultat était, faiblement, bénéficiaire au 31 décembre 2018, la situation s’est dégradée au 31 décembre 2019 avec un résultat net négatif à hauteur de 35 millions d’euros. La situation ne s’était en rien redressée pendant l’année 2020, année du licenciement, puisque l’exercice était clos sur une perte de 27 millions d’euros.

Il est d’ailleurs quelque peu contradictoire de contester dans le même temps la réalité des difficultés économiques et de soutenir qu’elles ont été directement créées par l’attitude de l’employeur ou plus exactement son associé unique, qui n’est au demeurant pas dans la cause.

En toute hypothèse, le licenciement a été prononcé en énonçant un motif de réorganisation pour sauvegarder la compétitivité de l’entreprise. Or, il résulte du rapport Secafi que cette compétitivité était bien menacée par un cours de la pâte à papier au plus bas en 2020, un décrochage du cours du dollar par rapport à l’euro pénalisant les ventes et des prix de revient supérieurs aux prix de vente et ce au sein du secteur d’activité du groupe, étant rappelé qu’il n’avait pas d’activités diversifiées.

Le fait que le prix de la pâte à papier soit cyclique et qu’il ait connu une remontée en 2021, ne saurait en soi remettre en cause cette constatation puisque la cour ne peut se placer qu’à la date du licenciement et que ce caractère cyclique lui-même pouvait conduire à envisager une réorganisation.

M. [N] invoque par ailleurs des difficultés qui préexistaient à son embauche de sorte que l’employeur ne pourrait s’en prévaloir. Toutefois, l’appelant fait ici référence à des difficultés pouvant exister en 2017, c’est à dire au moment de son transfert au sein de la société Fibre Excellence. Cette date ne peut être pertinente puisqu’il a été embauché au sein du groupe en 2010 et ce dans le même secteur d’activité sans invoquer de difficultés à cette date.

Seule importe donc la question de déterminer si les difficultés ont été constituées par une faute de l’employeur. Il n’appartient pas à la cour de s’immiscer dans les choix de gestion de l’employeur de sorte que seuls des agissements fautifs allant au-delà de simples fautes de gestion peuvent avoir pour conséquence un licenciement sans cause réelle et sérieuse. Or, la cour ne peut que relever l’existence d’une certaine contradiction dans l’argumentation de l’appelant. Il est fait état d’errements stratégiques de l’actionnaire unique de l’employeur, lequel n’est pas à la cause, laissant la filiale française en situation de difficulté tout en mettant fin au cash pooling mais dans le même temps il est soutenu qu’il n’était pas établi de menaces à long terme alors que le résultat d’exploitation était de nouveau positif en 2020.

Le rapport Secafi établi postérieurement à la rupture mais concernant spécifiquement l’année 2019, soit l’année pouvant être prise en compte pour le licenciement, fait ressortir un niveau record des investissements d’exploitation en 2019 (p. 12) mais des résultats toujours négatifs avec un endettement net très important. Il en résulte certes également que l’actionnaire a modifié plusieurs fois sa position. Ceci peut cependant procéder des circonstances ou même d’erreurs de gestion mais dans le contexte d’investissements en 2019 la cour ne peut y constater la preuve d’errements allant au-delà des erreurs de l’employeur dans l’appréciation des risques inhérents à tout choix de gestion.

Dans de telles conditions alors que la compétitivité était bien menacée et justifiait une réorganisation, la suppression du poste du salarié, qui correspondait à des fonctions transverses n’existant plus dans la nouvelle organisation, ne peut être considérée par la cour comme relevant d’une faute privant le licenciement de tout caractère réel et sérieux.

Le licenciement ne peut intervenir que lorsque tous les efforts de formation et d’adaptation ont été réalisés et que le reclassement de l’intéressé ne peut être opéré dans les conditions fixées par l’article L. 1233-4 du code du travail.

En l’espèce l’employeur a proposé des postes de reclassement au salarié selon lettre du 18 mai 2020 comprenant la liste des postes, liste suffisamment précise en ce qu’elle mentionnait la fonction, la catégorie professionnelle, le lieu d’exécution du contrat et la rémunération. Il ne peut donc être retenu que la seule démarche de reclassement daterait du 28 février 2020 soit une date trop distante du licenciement puisque les offres ont été formalisées le 18 mai 2020. Le salarié a refusé ces propositions. Ceci était certes parfaitement compréhensible dans la mesure où les postes proposés étaient d’un niveau de classification très inférieur à celui occupé par M. [N]. Seuls deux postes de cadre étaient proposés et ce sans se situer au même niveau d’encadrement. Mais le seul fait que ces postes soient d’un niveau inférieur ne pouvait dispenser l’employeur de les proposer au salarié. Il justifie par la production de ses registres uniques du personnel qu’il n’existait pas d’autres postes disponibles. La mention d’une déclaration dans la presse selon laquelle 90% du personnel était reclassé est ici indifférente. Outre qu’elle est dénuée de portée juridique, il s’agissait de la discussion du plan de sauvegarde de l’emploi mis en place en 2021 au sein de l’entreprise de [Localité 4]. Cela ne saurait être démonstratif pour un reclassement l’année précédente étant observé que la difficulté principale tenait précisément au niveau de classification du salarié qui limitait nécessairement la faculté de lui proposer un autre poste de même niveau.

Il ne saurait être fait grief à la société de ne pas produire le registre unique du personnel de la société Hervey Investment. Il s’agit en effet d’une société étrangère. Outre qu’il n’est pas établi qu’un tel document soit imposé par le droit dont elle relève, cette société n’était pas incluse dans le périmètre de la recherche puisque située à l’étranger.

In fine, M. [N] oppose à l’employeur le contrat conclu avec Mme [B] et soutient qu’il aurait dû lui être proposé. La cour ne peut cependant que constater que ce poste n’était pas disponible au jour de la procédure de licenciement. En effet, la salariée avait été embauchée le 17 janvier 2020. S’il peut être envisagé, au regard des fonctions de M. [N] que la suppression de son poste constituait déjà une perspective, il n’en demeure pas moins qu’aucun élément n’est produit en ce sens. Le poste n’était pas pérenne puisqu’il s’agissait du contrat à durée déterminée. Certes de tels contrats doivent également être inclus dans les recherches de reclassement mais à la condition qu’ils soient disponibles au moment de la recherche. Or, tel n’était pas le cas puisque le contrat visait la période du 17 janvier 2020 au 31 juillet 2020, soit une période au cours de laquelle M. [N] lui-même occupait son poste, à l’exception du dernier mois.

Il apparaît ainsi que l’employeur a satisfait à son obligation de recherche de reclassement. La question de la priorité de réembauche, qui ne fait pas l’objet d’une demande spécifique ne saurait rendre le licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse. Le jugement sera confirmé en ce qu’il a considéré que le licenciement reposait sur une cause réelle et sérieuse et rejeté les demandes qui en étaient la conséquence.

Sur l’indemnité conventionnelle de licenciement,

Son montant en est discuté en fonction du salaire à prendre en considération et de l’article 2 de l’avenant 39 du 2 mai 2013.

Sur le salaire à prendre en considération, il est exact ainsi que le fait valoir l’employeur que la moyenne des trois derniers mois est plus favorable pour le salarié. Il convient cependant d’y réintégrer les heures supplémentaires dans les conditions retenues par la cour ci-dessus et de tenir compte de l’irrecevabilité partielle. Le salaire de référence sera donc retenu pour la somme de 9 053,88 euros.

Quant aux majorations, il est constant que M. [N] avait plus de 50 ans au jour de l’avenant de sorte que le dispositif transitoire avait vocation à s’appliquer. Il convient cependant de tenir compte de l’âge du salarié au jour de la rupture. Or la majoration de 20 ou 25% s’applique uniquement lorsque le salarié a moins de 60 ans ce qui n’était pas le cas en l’espèce. M. [N] pouvait donc prétendre uniquement à la majoration de 15%.

Il en résulte que compte tenu d’une ancienneté de 10 ans et 1 mois, l’indemnité de licenciement était de 45 646,64 euros à majorer de 15%, soit un total de 52 493,64 euros. Il a perçu la somme de 50 660,40 euros de sorte qu’il lui reste dû celle de 1 833,24 euros. Le jugement sera infirmé de ce chef et l’employeur condamné au paiement de cette somme.

Sur les dommages et intérêts pour licenciement vexatoire,

M. [N] soutient que son licenciement est intervenu dans des conditions vexatoires et à ce titre invoque avoir été évincé du processus de recrutement de Mme [B]. Il ne produit aucune pièce et n’explicite pas en quoi il participait habituellement au recrutement alors que celui-ci, pour un contrat à durée déterminée, a été réalisé avant la procédure de licenciement. Il n’est ainsi justifié d’aucune circonstance vexatoire et c’est à raison que le conseil de prud’hommes a rejeté la demande indemnitaire. Le jugement sera confirmé de ce chef.

Sur les autres demandes,

Il y aura lieu à remise par l’employeur des documents sociaux rectifiés dans les termes du présent arrêt sans qu’il soit nécessaire d’ordonner une astreinte.

Il y aura lieu à capitalisation des intérêts par année entière à compter du 1er octobre 2020, date de la demande en justice.

L’action comme l’appel sont pour partie bien fondés de sorte que la société Fibre excellence sera condamnée au paiement de la somme de 3 000 euros par application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens de première instance et d’appel.

PAR CES MOTIFS

Dit que la déclaration d’appel a opéré effet dévolutif,

Déclare irrecevables les demandes présentées pour la première fois dans les conclusions de M. [N] du 8 août 2023 et dit qu’il est statué sur le quantum des demandes figurant aux conclusions du 10 mai 2022,

Rejette le surplus des fins de non-recevoir présentées au titre de la procédure d’appel,

Infirme le jugement du conseil de prud’hommes de Toulouse du 24 mars 2022 en ce qu’il a débouté M. [N] de sa demande au titre de l’avantage en nature, de ses demandes au titre du temps partiel, des heures supplémentaires outre congés payés afférents, du solde d’indemnité de licenciement et statué sur les frais et dépens de première instance,

Statuant à nouveau des chefs infirmés et y ajoutant,

Déclare la demande au titre de l’avantage en nature irrecevable comme prescrite,

Condamne la SAS Fibre excellence à payer à M. [N] les sommes de :

– 15 954,48 euros à titre de rappel de salaire pour la période d’avenant à temps partiel irrégulier,

– 1 595,44 euros au titre des congés payés afférents,

– 22 878 euros à titre de rappel de salaire pour heures supplémentaires,

– 2 287,80 euros au titre des congés payés afférents,

– 1 833,24 euros à titre de solde d’indemnité de licenciement,

Condamne M. [N] à payer à la SAS Fibre excellence la somme de 2 046 euros correspondant au jours de RTT,

Rejette la demande de congés payés afférents,

Ordonne la remise par l’employeur des documents sociaux rectifiés dans les termes du présent arrêt,

Rejette la demande d’astreinte,

Ordonne la capitalisation des intérêts par année entière à compter du 1er octobre 2020,

Condamne la SAS Fibre excellence à payer à M. [N] la somme de 3 000 euros par application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

Condamne la SAS Fibre excellence aux dépens de première instance et d’appel,

Confirme le jugement entrepris en ses autres dispositions non contraires.

Le présent arrêt a été signé par Catherine Brisset, présidente, et par Arielle Raveane, greffière.

La greffière La présidente

A. Raveane C. Brisset.

 


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