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délivrées le
à
COUR D’APPEL DE MONTPELLIER
1re chambre sociale
ARRET DU 07 DECEMBRE 2022
Numéro d’inscription au répertoire général :
N° RG 19/04535 – N° Portalis DBVK-V-B7D-OHF2
Arrêt n° :
Décision déférée à la Cour :
Jugement du 03 JUIN 2019 du CONSEIL DE PRUD’HOMMES – FORMATION PARITAIRE DE SETE – N° RG F 18/00020
APPELANTE :
Madame [J] [F] épouse [X]
[Adresse 2],
[Adresse 2]
[Localité 1]
Représentée par Me Marie josé GARCIA, avocat au barreau de MONTPELLIER
INTIMEE :
Association CENTRE [3] prise en la personne de son représentant légal
[Adresse 4]
[Localité 1]
Représentée par Me Régine BARTHELEMY, avocat au barreau de MONTPELLIER, substituée par Me Emilie GUEGNIARD, avocate au barreau de Montpellier
Ordonnance de clôture du 21 Septembre 2022
COMPOSITION DE LA COUR :
En application de l’article 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 12 OCTOBRE 2022, en audience publique, le magistrat rapporteur ayant fait le rapport prescrit par l’article 804 du même code, devant la cour composée de :
Monsieur Philippe de GUARDIA, Président de chambre
Mme Véronique DUCHARNE, Conseillère
Madame Magali VENET, Conseillère
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Mme Marie BRUNEL
ARRET :
– contradictoire
– prononcé par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile ;
– signé par Monsieur Philippe de GUARDIA, Président de chambre, et par Mme Marie BRUNEL, Greffière.
*
* *
FAITS ET PROCÉDURE
[J] [X] a travaillé au service de l’association CENTRE [3] en qualité d’employée de collectivité selon contrat de travail saisonnier du 3 avril au 31 août 2009, prolongé par avenant du 27 août 2009 jusqu’au 18 décembre 2009.
Différents contrats ont ensuite été conclus du 28 janvier au 30 janvier 2010, du 5 février au 7 février 2010, du 12 février au 14 février 2010, du 15 mars au 30 novembre 2010, du 6 avril au 31 octobre 2011, du 17 janvier au 20 janvier 2012, du 3 avril au 7 octobre 2012, prolongé jusqu’au 30 novembre 2012, du 3 avril au 30 novembre 2013, du 9 avril au 8 octobre 2014, prolongé jusqu’au 30 novembre 2014, du 8 avril au 15 novembre 2015, du 2 mai au 30 octobre 2016 et du 2 mai au 31 octobre 2017.
Elle percevait en dernier lieu un salaire mensuel brut de l’ordre de 1 820€ pour 151,67 heures de travail.
Par lettre du 31 juillet 2017, la salariée a rompu le contrat de travail pour les motifs suivants : ‘Entrée dans l’établissement le 3 avril 2009 au poste de serveuse et manifestant mon désir d’évolution et après des promesses de promotion, j’ai été déçue de voir les postes de responsables attribués au recrutement externe… De plus, entre chaque contrat saisonnier, j’ai effectué une carence pour pouvoir reprendre la saison l’année suivante, sauf qu’une fois elle a été cassée par des extras… donc mon contrat n’est plus un contrat à durée déterminée mais un contrat à durée indéterminée. Par ces motifs ainsi que la discrimination salariale (primes de fin de saison et chèques cadeaux, ancienneté et salaire) pratiquée et pas d’évolution, j’ai décidé de faire valoir mes diplômes et connaissances en postulant pour le poste Bac Pro Melec… dont je débuterai le 1er septembre 2017. Ce pourquoi, je vous demande de rompre mon contrat’.
Le 8 mars 2018, s’estimant créancière de diverses sommes et indemnités, [J] [X] a saisi le conseil de prud’hommes de Sète qui, par jugement en date du 3 juin 2019, l’a déboutée de ses demandes.
[J] [X] a interjeté appel. Elle conclut à l’infirmation, à la requalification de la relation de travail en un contrat à durée indéterminée et à l’octroi de :
– la somme de 1 967€ à titre d’indemnité de requalification ;
– la somme de 3 934€ à titre d’indemnité compensatrice de préavis ;
– la somme de 393,40€ à titre d’indemnité de congés payés sur préavis ;
– la somme de 3 278,33€ à titre d’indemnité de licenciement ;
– la somme de 11 802€ à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
– la somme de 5 000€ à titre de dommages et intérêts pour discrimination à l’emploi ;
– la somme de 5 126,39€ à titre d’heures supplémentaires et d’heures de nuit ;
– la somme de 512,34€ à titre de congés payés sur heures supplémentaires et d’heures de nuit ;
– la somme de 512,64€ à titre de 13ème mois, au prorata.
Elle demande que ces sommes emportent intérêts au taux légal ainsi que le paiement de la somme de 5 000€ sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
L’association [3] demande de confirmer le jugement et de lui allouer la somme de 3 000,00€ sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur la requalification en contrat de travail à durée indéterminée :
Attendu qu’un contrat de travail saisonnier correspond à un emploi dont les tâches sont appelées à se répéter chaque année selon une périodicité à peu près fixe, en fonction du rythme des saisons ou des modes de vie collectifs ;
Que la faculté pour l’employeur de conclure des contrats à durée déterminée successifs avec le même salarié afin de pourvoir un emploi saisonnier n’est assortie d’aucune limite au-delà de laquelle s’instaurerait entre les parties une relation de travail globale à durée indéterminée ;
Attendu que tel est le cas de l’emploi de serveuse de [J] [X] dont les contrats au sein du centre de vacances exploité par l’association [3], d’une durée inférieure à celle de dix mois par an prévue par la convention collective, couvraient la période pendant laquelle l’activité s’intensifie chaque année à date à peu près fixe, en fonction du rythme des vacances ;
Attendu, de même, que si, aux termes de l’article L. 1244-2 du code du travail, une convention collective, telle que celle du tourisme social et familial, peut prévoir que tout employeur ayant occupé un salarié dans un emploi à caractère saisonnier doit lui proposer, sauf motif fondé, un emploi de même nature pour la même saison de l’année suivante, une telle clause, qui a seulement pour effet d’imposer à l’employeur une priorité d’emploi en faveur du salarié, ne peut être assimilée à la clause contractuelle prévoyant la reconduction automatique du contrat de travail pour la saison suivante et n’a pas, en toute hypothèse, pour effet de transformer la relation de travail à durée déterminée en une relation à durée indéterminée ;
Attendu qu’ainsi, la demande de requalification en contrat à durée indéterminée sera rejetée ;
Sur la qualification de la rupture :
Attendu qu’il résulte des dispositions de l’article L.1243-1 du code du travail que lorsqu’un salarié rompt de manière anticipée le contrat de travail à durée déterminée en invoquant des manquements de l’employeur, il incombe au juge de vérifier si les faits invoqués sont ou non constitutifs d’une faute grave ;
Qu’en l’espèce, deux griefs sont invoqués par la salariée :
1- la discrimination à l’embauche :
Attendu qu’il résulte des articles L. 1132-1, L. 1134-1 et L. 2141-5 du code du travail que, lorsque le salarié présente des éléments de fait constituant selon lui une discrimination directe ou indirecte, il appartient au juge d’apprécier si ces éléments pris dans leur ensemble laissent supposer l’existence d’une telle discrimination et, dans l’affirmative, il incombe à l’employeur de prouver que ses décisions sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination ;
Que le juge, saisi d’une demande liée à la rupture anticipée du contrat de travail doit examiner l’ensemble des griefs invoqués au soutien de celle-ci, quelle que soit leur ancienneté, en sorte que les faits d’embauche invoqués ne sont pas prescrits ;
Attendu qu’en lui-même, à défaut de tout autre élément, le fait qu’en 2011 et 2012, deux salariées ait été embauchées à durée indéterminée, dans des fonctions différentes de celles occupées par [J] [X], ne laisse pas supposer l’existence d’un cas de discrimination à l’emploi visée notamment par l’article L. 1132-1 du code du travail ;
Qu’il n’est d’ailleurs invoqué aucun cas de discrimination fondé sur l’origine, le sexe, l’âge ou toute autre cause ;
Attendu que ce premier grief n’est donc pas établi ;
2- les heures supplémentaires et de nuit :
Attendu qu’il résulte des dispositions de l’article L. 3171-4 du code du travail, qu’en cas de litige relatif à l’existence ou au nombre d’heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l’appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu’il prétend avoir accomplies afin de permettre à l’employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d’y répondre utilement en produisant ses propres éléments. Le juge forme sa conviction en tenant compte de l’ensemble de ces éléments au regard des exigences rappelées aux dispositions légales et réglementaires précitées ;
Attendu qu’en l’espèce, [J] [X] fournit les décomptes hebdomadaires de ses heures de travail, contresignés par son chef de service, faisant ainsi ressortir, par comparaison avec ses bulletins de paie, que les heures de travail accomplies n’ont pas toutes été rémunérées ;
Attendu que, pour sa part, le CENTRE [3] fait valoir qu’en application des articles 2 et 7 de l’avenant n° 37 du 25 juillet 2001 à la convention collective nationale de tourisme social et familial, le principe retenu est la récupération des heures supplémentaires et que pour organiser le temps de travail des salariés, il a été décidé de mettre en place un régime de modulation dans la branche ;
Qu’il produit un décompte précis des heures effectuées par [J] [X], avec cumul des heures supplémentaires, duquel il résulte qu’en moyenne, celle-ci a réalisé moins de 35 heures par semaine en 2015, 2016 et 2017 ;
Attendu, de même, qu’à défaut de disposition conventionnelle, la seule contrepartie obligatoire au travail de nuit doit être attribuée sous forme de repos compensateur ;
Attendu qu’ainsi, après analyse des pièces produites par l’une et l’autre des parties, il y a lieu de rejeter les demandes liées à l’accomplissement d’heures supplémentaires et de nuit ;
Attendu que, par voie de conséquence, il n’est pas établi de faute grave de la part de l’employeur justifiant la rupture anticipée du contrat de travail par la salariée ;
* * *
Attendu qu’enfin, l’équité ne commande pas de faire application de l’article 700 du code de procédure civile devant la cour d’appel ;
PAR CES MOTIFS
LA COUR,
Confirme le jugement ;
Condamne [J] [X] aux dépens.
La Greffière Le Président