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COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE
Chambre 4-2
ARRÊT AU FOND
DU 20 MAI 2022
N° 2022/137
Rôle N° RG 19/01204 – N° Portalis DBVB-V-B7D-BDVBE
[D] [J]
C/
SASU PROMAN 076
SAS ADECCO
Copie exécutoire délivrée
le : 20 mai 2022
à :
Me Jean FAYOLLE, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE
(Vestiaire 375)
Me Christine ANDREANI, avocat au barreau de MARSEILLE
Me Axelle TESTINI, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE
(Vestiaire 8)
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de MARTIGUES en date du 29 Novembre 2018 enregistré(e) au répertoire général sous le n° 16/00279.
APPELANT
Monsieur [D] [J], demeurant [Adresse 2]
représenté par Me Jean FAYOLLE de la SELARL FAYOLLE JEAN, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE
INTIMEES
SASU PROMAN 076 Prise en la personne de son représentant légal domicilié au dit siège, demeurant [Adresse 3]
représentée par Me Christine ANDREANI, avocat au barreau de MARSEILLE substitué par Me Manuel CULOT, avocat au barreau de MARSEILLE
SAS ADECCO, demeurant [Adresse 1]
représentée par Me Axelle TESTINI, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE substitué par Me Apolline LANDRY, avocat au barreau de PARIS
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
En application des dispositions des articles 804 et 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 23 Mars 2022, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Madame Véronique SOULIER, Présidente de chambre suppléante, chargé du rapport, qui a fait un rapport oral à l’audience, avant les plaidoiries.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Florence TREGUIER, Présidente de chambre
Madame Marie-Noëlle ABBA, Présidente de chambre suppléante
Madame Véronique SOULIER, Présidente de chambre suppléante
Greffier lors des débats : Mme Cyrielle GOUNAUD.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 20 Mai 2022.
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 20 Mai 2022
Signé par Madame Véronique SOULIER, pour la Présidente de chambre empêchée et Mme Cyrielle GOUNAUD, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
Monsieur [D] [J] a été recruté le 29 mars 2010 par la société Adecco, entreprise de travail temporaire et mis à la disposition de la société Arcelormittal Méditerranée dans le cadre de contrats de mission temporaire à compter de la même date et jusqu’au 5 décembre 2012 en qualité de Pontier, de Grutier ou de conducteur d’engins.
Il a été ensuite mis à disposition de la société ArcelorMittal Méditerranée par l’intermédiaire de la société Proman 076 à compter du 12 mai 2014 et jusqu’au 13 juillet 2015.
Considérant qu’il s’était trouvé ainsi à la disposition permanente de la société ArcelorMittal Méditerranée durant 2 ans et 8 mois puis durant 1 an et 2 mois, il a sollicité la requalification de ses différents contrats de mission en un contrat à durée indéterminée en saisissant la juridiction prud’homale le 29 mars 2016 à l’encontre de la société Proman 076 et de la société utilisatrice ArcelorMittal Médierranée et le 12 juillet 2016 à l’encontre de la société Adecco.
Durant la procédure de première instance, il s’est désisté de sa demande de requalification des contrats de mission en un contrat à durée indéterminée et de ses demandes financières subséquentes formées à l’encontre de la société utilisatrice Arcelormittal Méditerranée.
Par jugement en date du 29 novembre 2018, le conseil de prud’hommes de Martigues, notamment au visa de la transaction intervenue avec la société utilisatrice a :
– dit Monsieur [J] mal fondé en son action,
– débouté Monsieur [J] de toutes ses demandes,
– débouté la société Proman de sa demande,
– mis les entiers dépens à la charge de Monsieur [J].
Monsieur [D] [J] a relevé appel de ce jugement par déclaration adressée au greffe par voie électronique en date du 17 janvier 2019.
Aux termes de ses conclusions n°2 d’appelant transmises par voie électronique le 12 février 2022 auxquelles il convient de se reporter pour l’exposé détaillé des moyens soutenus, Monsieur [J] a demandé à la cour de :
– le dire recevable en son appel et bien fondé en ses demandes;
Infirmer purement et simplement le jugement rendu par le Conseil de Prud’hommes de Martigues le 29 novembre 2018 ;
Et statuant à nouveau ,
– requalifier, à l’égard de la Sociéte Adecco, en contrat de travail à durée indéterminée, les contrats de missions temporaires conclus pour la période du 29 mars 2010 au 5 décembre 2012;
– fixer la date de rupture du contrat de travail au 5 décembre 2012 ;
– requalifier à 1’égard de la Société Proman 076, en contrat de travail a durée indéterminée, les contrats de missions temporaires conclus pour la période du 12 mai 2014 au 13 juillet 2015;
– fixer la date de rupture du contrat de travail au l3 juillet 2015 ;
– dire que la rupture du contrat de travail de Monsieur [D] [J] doit s’analyser en un licenciement dépourvu de cause réelle et serieuse ;
– dire que les Sociétés Adecco et Proman 076 ont exécuté la relation contractuelle de façon déloyale ;
– dire que les Sociétés Adecco et Proman 076 ont maintenu abusivement Monsieur [D] [J], en sa qualité de salarié intérimaire, dans la précarité ;
– dire qu’a été imposée à Monsieur [D] [J] , en sa qualité de salarié intérimaire, une inégalité de traitement illicite au titre de la prise des congés par rapport à la situation de ses collégues de travail titulaires d’un contrat de travail a duree indéterminée ;
– fixer la moyenne de salaires de Monsieur [D] [J] a l’égard de la Société Adecco à la somme de 2960,68 € ;
– fixer la moyenne de salaires de Monsieur [D] [J] a l’égard de la Sociéte Proman 076 à la somme de 2.865,72 € ;
En conséquence,
A l’égard de la Société Adecco :
Atitre principal,
Condamner la Société à verser a Monsieur [D] [J] les sommes de :
– 5.921,36 € au titre de l’indemnité compensatrice de préavis ;
– 592,14 € à titre de congés payés afférents à l’indemnité compensatrice de préavis ;
– 1.579,03 € à titre d’indemnité légale de licenciement ;
– 20.000 € à titre d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
– 2.960,68 € 21 titre d’indemnité pour irrégularité de procédure ;
– 2.932,02 € a titre de rappel de salaires
– 293,20 € a titre de congés payés afférents ;
Condamner la Société à délivrer à Monsieur [D] [J], sous astreinte de 50 € par jour de retard et par document, à compter de la notification du jugement à intervenir :
– une attestation destinée à Pole Emploi, mentionnant pour motif de rupture du contrat de travail ‘un licenciement sans cause réelle et sérieuse au 5 décembre 2012 ‘,
– le certificat de travail,
– le solde de tout compte,
– les bulletins de salaires conformes pour la période du 29 mars 2010 au 5 décembre 2012,
Condamner la Société à verser a Monsieur [D] [J] la somme de 2.500 € a titre de dommages et intérêts pour violation des dispositions légales relatives à la prise des congés payés et inégalité de traitement de ce chef ;
Condamner la Société à verser à Monsieur [D] [J] la somme de 2.500 € a titre de dommages-intérêts pour maintien abusif dans la précarité ;
A l’égard de la Société Proman 076 :
– condamner la Société à verser a Monsieur [D] [J] les sommes de :
– 2.865,72 € au titre de l’indemnité compensatrice de préavis ;
– 286,57 € à titre de congés payés afférents a l’indemnité compensatrice de préavis ;
– 668,66 € à titre d’indemnité légale de licenciement ;
– 20.000 € à titre d’indemnite pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
– 2.865,72 € à titre d’indemnité pour irrégularité de procédure ;
– 3.268,31 € à titre de rappel de salaires ;
– 326,83 € à titre de congés payés afférents ;
– condamner la Société à délivrer à Monsieur [D] [J], sous astreinte de 50 € par jour de retard et par document, a compter de la notification de l’arrêt à intervenir :
– une attestation destinée a Pole Emploi, mentionnant pour motif de rupture du contrat de travail ‘un licenciement sans cause réelle et sérieuse au 13 juillet 2015 ‘,
– le certificat de travail,
– le solde de tout compte,
– les bulletins de salaires conformes pour la période du 12 mai 2014 au 13 juillet 2015,
– condamner la Société à verser a Monsieur [D] [J] la somme de 2.500 € à titre de dommages et intérêts pour violation des dispositions légales relatives à la prise des congés payés et inégalité de traitement de ce chef;
– condamner la Société à verser à Monsieur [D] [J] la somme de 2.500 € à titre de dommages-intérêts pour maintien abusif dans la précarité ;
– condamner chacune des Sociétés au paiement de la somme de 1.500 € sur le fondement des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile ;
– assortir les condamnations d’intéréts au taux legal et capitalisation à compter des convocations initiales des sociétés intimées ;
– condamner les sociétés intimées aux entiers dépens.
Par conclusions d’intimée transmises par voie électronique le 27 juin 2019 auxquelles il convient de se reporter pour l’exposé détaillé des moyens soutenus, la société Adecco France a demandé à la cour de :
– confirmer le jugement du conseil de prud’hommes de Martigues en ce qu’il a débouté Monsieur [J] de ses demandes celles-ci étant irrecevables;
A titre principal :
– dire que les demandes de Monsieur [J] relatives à la rupture de ses contrats de mission pour la période du 29 mars 2010 au 5 décembre 2012 sont irrecevables faute d’intérêt à agir,
– dire que les demandes de Monsieur [J] relatives à la rupture de ses contrats de mission pour la période du 29 mars 2010 au 5 décembre 2012 sont prescrites depuis le 17 juin 2015,
– dire que les demandes de rappel de salaires de Monsieur [J] pour la période du 29 mars 2010 au 05 décembre 2012 sont prescrites depuis le 17 juin 2016,
– déclarer irrecevables en tout état de cause les demandes de Monsieur [J] à l’encontre de la société Adecco,
A titre subsidiaire :
– débouter Monsieur [J] de l’ensemble de ses demandes,
En tout état de cause:
– condamner Monsieur [J] à payer à la société Adecco la somme de 3.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens.
Aux termes de ses conclusions n°2 d’intimée transmises par voie électronique le 04 mars 2022 auxquelles il convient de se reporter pour l’exposé détaillé des moyens soutenus, la société Proman 076 a demandé à la cour de :
A titre principal :
Confirmer le jugement rendu par le conseil de prud’hommes de Martigues le 29 novembre 2018 qui a débouté Monsieur [J] de toutes ses demandes,
Constater le respect par la société Proman 076 de ses obligations,
Débouter Monsieur [J] de l’ensemble de ses demandes formées à l’encontre de la société Proman 076,
A titre subsidiaire :
Si la cour retenait la responsabilité de la société Proman 076 :
– dire irrecevables les demandes de Monsieur [J],
– débouter Monsieur [J] de l’ensemble de ses demandes,
A titre infiniment subsidiaire :
Si la cour dit la demande de requalification recevable à l’encontre de la société Proman 076:
– dire dénuée de fondement la demande de requalification,
– débouter Monsieur [J] de l’ensemble de ses demandes,
En tout état de cause:
– débouter Monsieur [J] de l’ensemble de ses demandes formées à l’encontre de la société Proman 076,
– condamner Monsieur [J] à verser à la société Proman 076 la somme de 1.500 € au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.
La clôture de l’instruction a été ordonnée le 07 mars 2022.
SUR CE :
Sur l’action dirigée à l’encontre de la société Adecco :
Sur les fins de non-recevoir opposées par la société Adecco pour absence d’intérêt à agir et en raison de la prescription des demandes liées à la rupture des contrats de mission et au rappel de salaire :
La société Adecco soutient d’une part que le salarié est dépourvu d’intérêt à agir à son encontre ayant déjà été indemnisé par la société utilisatrice ArcelorMittal dans le cadre d’une transaction qui l’a amené à se désister des demandes initiales qu’il avait formées à son encontre, qu’il ne peut donc être indemnisé deux fois du préjudice résultant de la rupture alléguée des relations de travail avec les sociétés Adecco et ArcelorMittal et d’autre part que par application des dispositions de l’article L.1471-1 du code du travail applicable créé par la loi n°2013-504 du 14 juin 2013 relative à la sécurisation de l’emploi, il disposait d’un délai de deux ans pour agir à compter du 17 juin 2013 (date de la promulgation de la loi) soit jusqu’au 17 juin 2015, qu’ayant saisi la juridiction prud’homale à son encontre seulement le 12 juillet 2016, la prescription des demandes liées à la rupture des contrats de mission est acquise, tout comme le sont également les demandes de rappel de salaire fondées sur l’article L.3245-1 du code du travail, le délai de precription de l’action portant sur la répétition des salaires étant acquis à la date du 17 juin 2016.
Elle ajoute que la saisine de Monsieur [J] en référé en date du 30 mai 2016 ayant donné lieu à l’ordonnance de référé du 6 juillet 2016 avait pour objectif d’obtenir la communication sous astreinte de l’ensemble des contrats de mission et non de contester la rupture de la relation de travail, que cette dernière n’avait pas interrompu le délai de prescription alors que les deux actions en référé et au fond ne poursuivaient pas le même objectif, l’interruption de la prescription ne pouvant s’étendre d’une action à l’autre, qu’en outre, Monsieur [J] avait toujours reçu ses contrats de mission par courrier, que le point de départ du délai de prescription de son action fondée sur les contrats manquants était le début de la mission conformément à la jurisprudence la plus récente de la cour de cassation.
Monsieur [J] fait valoir quant à lui que l’accord qui a pu intervenir avec la société utilisatrice ne le prive nullement du droit d’obtenir la condamnation des sociétés d’entreprise de travail temporaires, Adecco et Proman, 076, tiers à la transaction, alors qu’il n’a aucune obligation de révéler le contenu de celui-ci pour rendre recevable son action en requalification envers les entreprises de travail temporaire, qu’il peut parfaitement solliciter la requalification de ses contrats de mission aussi bien à l’encontre de l’entreprise utilisatrice que de l’entreprise de travail temporaire et obtenir à l’encontre de chacune d’elle les conséquences d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse, qu’enfin si la cour estimait indispensable à la résolution du litige de connaître les termes du protocole, il conviendrait de lui enjoindre de le verser aux débats afin de le préserver de tout grief quant au respect d’une éventuelle clause de confidentialité.
Il prétend également que l’action en requalification des contrats de mission n’est pas prescrite alors qu’il est incontestable que le point de départ du délai pour agir doit être fixé au jour où le titulaire du droit a connaissance des faits lui permettant d’agir, qu’en l’espèce, il n’a pas été rendu destinataire des contrats de mission pour la période antérieure à mars 2012, qu’il n’a pu ainsi connaître amiablement le motif du recours aux contrat de mission, l’entreprise temporaire n’ayant pas répondu à ses courriers du 24 février 2016 et du 20 avril 2016, et n’ayant produit devant le juge des référés qu’un document intitulé ‘synthèse de candidature’, que l’absence de motifs de recours ne lui étant apparue avec certitude qu’à l’occasion des débats devant le juge des référes saisi le 30 mai 2016, le point de départ du délai de prescription est le 1er juillet 2016, date de l’ordonnance de référé, qu’à suivre l’argumentation de la société Adecco affirmant qu’il avait jusqu’au 17 juin 2016 pour engager son action en requalification et former sa demande de rappel de salaire à temps complet ou à tout le moins interrompre la prescription, la cour constaterait que tel a bien été le cas ses conclusions adressées le 17 juin 2016 aux fins de condamnation sous astreinte à communiquer les contrats de mission dans le cadre de l’instance en référé ayant interrompu la prescription.
Sur la fin de non-recevoir pour défaut d’intérêt à agir tirée de la transaction conclue avec la société utilisatrice:
Le salarié peut exercer concurremment deux actions en requalification des contrats de mission en un contrat à durée indéterminée prenant effet au premier jour de la mission du premier contrat irrégulier à l’encontre de l’entreprise utilisatrice pour inobservation des dispositions relatives aux cas de recours au travail temporaire et à la durée des missions (article L.1251-5 à L.1251-7, L.1251-10, L.1251-11, L.1251-12-1, L.1251-30 et L.1251-35-1 du code du travail) et selon une jurisprudence établie à l’encontre de l’entreprise de travail temporaire lorsque celle-ci n’a pas respecté les conditions à défaut desquelles toute opération de prêt de main-d’oeuvre est interdite, les manquements sanctionnés portant sur l’absence de contrat de mission écrit ou signé, sur l’absence d’une clause obligatoire mais également sur le non-respect du délai de carence entre deux missions successives sur le même poste.
Par application des dispositions des articles 2048, 2049, 2051 et 2052 du code civil, les transactions se renferment dans leur objet. La renonciation à tous droits, actions et prétentions ne s’entend que de ceux relatifs au différend qui y a donné lieu. Elle ne lie pas les autres intéressés et ne peut leur être opposé.
Ainsi, la transaction conclue entre le salarié et l’entreprise utilisatrice dont l’existence n’est pas contestée par le salarié lequel s’est désisté de son action en requalification des contrats de mission en un contrat de travail à durée indéterminée ne prive donc pas celui-ci de son droit d’action à l’encontre de l’entreprise de travail temporaire Adecco, tiers à la transaction, pour l’indemnisation de manquements qui lui sont propres et des dommages qu’il peut avoir subi des conséquences d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Dès lors, Monsieur [J] ayant intérêt à agir à l’encontre de la société Adecco à laquelle il reproche de ne lui avoir transmis aucun contrat de mission sur la période allant de mars 2010 à février 2012, son action en requalification des contrats de mission en un contrat de travail à durée indéterminée exercée à l’encontre de l’entreprise de travail temporaire est recevable à ce titre.
Sur la prescription des demandes liées à la rupture des contrats de mission et au rappel de salaire:
L’article L.1471-1 du code du travail, créé par la loi n°2013-504 du 14 juin 2013 relative à la sécurisation de l’emploi dispose que ‘toute action portant sur l’exécution ou la rupture du contrat de travail se prescrit par deux ans à compter du jour où celui qui l’exerce a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant d’exercer son droit’, ayant ainsi remplacé l’ancien délai quinquennal par un délai biennal.
L’article 21 de la loi du 14 juin 2013 a prévu qu’en cas de réduction du délai de prescription ‘le nouveau délai s’applique aux prescriptions en cours à compter de la date de promulgation de la présente loir sans que la durée totale de la prescription puisse excéder la durée prévue par la loi antérieure’.
Il en résulte que lorsque la prescription quinquennale a commencé à courir antérieurement à la date de promulgation de la loi, les nouveaux délais de prescription s’appliquent à compter de celle-ci soit, selon les deux parties, à compter du 17 juin 2013 sans que le délai total de prescription ne puisse excéder cinq ans.
Monsieur [J] a expressément rappelé en pages 20 et 21 de ses écritures qu’il ne fondait pas sa demande de requalification à l’encontre de la société Adecco sur l’article L.1251-40 sanctionnant les manquements de l’entreprise utilisatrice mais sur une question de forme portant sur l’édition et la transmission des contrats de mission relevant de la responsabilité de l’entreprise de travail temporaire.
Ce faisant, contrairement à son argumentation, indépendamment du fait qu’en pièce n°3, la société Adecco ait versé aux débats onze contrats de mission litigieux sur la période comprise entre le 29 mars 2010 et le 21 septembre 2011 correspondant aux bulletins de salaire produits par le salarié en pièce n°3, que le contrat du 09 janvier 2012 au 27 janvier 2012 apparaît seul manquant, Monsieur [J], qui ne conteste pas avoir travaillé pour l’entreprise temporaire durant la période litigieuse comprise entre le 29 mars 2010 et le mois de mars 2012, avait nécessairement connaissance de l’absence alléguée de remise d’un écrit dès le début de chacune des missions de la période litigieuse, mars 2010 à mars 2012 et au plus tard à l’expiration des 48 premières heures de chacune d’elle soit à compter du 11 janvier 2012 de sorte qu’il disposait bien de tous les éléments nécessaires pour agir dès cette période pour chacun des contrats litigieux et qu’il ne peut valablement soutenir n’avoir eu connaissance des éléments utiles à son action qu’à compter de l’ordonnance de référé du 1er juillet 2016 la saisine de la juridiction des référés n’ayant eu pour but, selon le salarié, que d’avoir connaissance des motifs de recours aux missions d’intérim cette connaissance étant destinée à fonder son action en requalification à l’encontre de la société utilisatrice et non à l’encontre de la société Adecco.
En conséquence, la prescription de l’action en requalification de ses contrats de mission en un contrat à durée indéterminée exercée par Monsieur [J] à l’encontre de la société Adecco étant acquise à la date du 17 juin 2015 et ce dernier n’ayant saisi au fond la juridiction prud’homale que le 12 juillet 2016, l’action engagée est donc irrecevable à ce titre.
Au surplus, et pour les mêmes raisons, les demandes au titre des rappels de salaire de Monsieur [J] sont également prescrites.
En effet, outre l’irrecevabilité de l’action en requalification des contrats de mission en un contrat de travail à durée indéterminée entraînant de fait l’irrecevabilité des demandes de Monsieur [J] à titre de rappel de salaire sur les périodes interstitielles, sa demande de requalification à temps complet y compris sur les mois au cours desquels il n’était pas rémunéré à temps complet se heurte également à la prescription triennale de l’article L.3245-1 du code du travail également réduite par la loi n°2013-504 du 14 juin 2013 relative à la sécurisation de l’emploi.
En effet, le salarié sollicite un rappel de salaire pour la période du 29 mars 2010 au 5 décembre 2012. Or, le délai de prescription de l’action en répétitition des salaires ayant commencé à courir avant la promulgation de la loi du 14 juin 2013, Monsieur [J] disposait d’un délai de trois ans pour agir à compter du 17 juin 2013, soit jusqu’au 17 juin 2016 son argumentation relative à l’interruption de la prescription à compter du dépôt de ses conclusions dans le cadre de l’instance en référé n’étant pas pertinente cette action dont le but était de connaître les motifs de recours au contrat de mission différant d’une action en paiement d’un rappel de salaire.
En conséquence, par infirmation des dispositions du jugement entrepris qui a débouté Monsieur [J] de ses demandes formées à l’encontre de la société Adecco, la cour déclare irrecevables comme étant prescrites l’action en requalification des contrats de mission en un contrat de travail à durée indéterminée à temps complet ainsi que les demandes financières subséquentes.
Sur l’action dirigée à l’encontre de la société Proman 076:
Sur la recevabilité de l’action en requalification à l’encontre de l’Entreprise de travail temporaire:
La société Proman 076 fait valoir que la demande de condamnation du salarié fondée sur un grief tiré du non-respect du délai de carence entre les contrats de mission successifs en violation de l’article L.1251-36 du code du travail ne peut lui être opposée et ne constitue pas un motif de requalification du contrat de travail temporaire en un contrat de travail à durée indéterminée ne figurant pas dans l’article L.1251-40 du code du travail, seul texte prévoyant une telle requalification-sanction. En outre, le respect des dispositions relatives au délai de carence n’incombe pas à l’entreprise de travail temporaire mais à l’entreprise utilisatrice.
Le salarié soutient d’une part qu’ayant saisi le conseil de prud’hommes de Martigues le 29 mars 2016 son action n’est pas prescrite, le terme de la relation contractuelle avec la société Proman 076 étant intervenu le 13 juillet 2015 et d’autre part que le respect du délai de carence incombant à l’entreprise de travail temporaire, celle-ci encourt la requalification des contrats de mission en contrat à durée indéterminée en cas de manquement à cette règle.
A titre liminaire, la cour relève que l’entreprise de travail temporaire n’a opposé au salarié aucune finde de non recevoir tirée de la prescription de son action en requalification des contrats de mission en un contrat de travail à durée déterminée, laquelle n’est, de fait, pas prescrite dans la mesure où le délai de prescription biennal de l’action en requalification fondée sur le non-respect du délai de carence entre deux contrats de mission successifs a couru à compter du 1er jour d’exécution du second contrat, soit en l’espèce au vu des contrats litigieux, à compter du 21 décembre 2014 (contrat n° 102110) et du 1er avril 2015 ( contrat n° 102389) de sorte que le délai de prescription expirait le 21 décembre 2016 et le 1er avril 2017 et que le salarié a saisi la juridiction prud’homale le 29 mars 2016, avant l’expiration du délai légal.
Au surplus, contrairement aux moyens de la société Proman 076, une jurisprudence constante retient que le non-respect du délai de carence entre deux missions successives sur le même poste permet au salarié d’obtenir la requalification de ses contrats de mission en un contrat de travail à durée indéterminée auprès de l’entreprise de travail temporaire.
Dès lors, l’action en requalification des contrats de mission en un contrat de travail à durée indéterminée exercée par le salarié à l’encontre de la société Proman 076 est recevable.
Sur le bien-fondé de l’action en requalification des contrats de mission en un contrat de travail à durée indéterminée :
L’article L. 1251-36 du code du travail dispose que:
‘A l’expiration d’un contrat de mission, il ne peut être recouru, pour pourvoir le poste du salarié dont le contrat a pris fin ni à un contrat à durée déterminée, ni à un contrat de mission avant l’expiration d’un délai de carence calculé en fonction de la durée du contrat de mission, renouvellemenr inclus. Ce délai de carence est égal:
1°) au tiers de la durée du contrat de mission venu à l’expiration si la durée du contrat renouvellement inclus est de quatorze jours ou plus,
2°) à la moitié de la durée du contrat de mission venu à expiration si la durée du contrat renouvellement inclus est inférieure à quatorze jours.
Les jours pris en compte pour apprécier le délai devant séparer deux contrat sont les jours d’ouverture de l’entreprise ou de l’établissement utilisateurs’.
L’article L.1251-37 du même code dans sa version aplicable dispose que :
‘Le délai de carence n’est pas applicable:
1° lorsque le contrat de mission est conclu pour assurer le remplacement d’un salarié temporairement absent ou dont le contrat de travail est suspendu en cas de nouvelle absence du salarié remplacé,
2° lorsque le contrat de mission est conclu pour l’exécution de travaux urgents nécessités par des mesures de sécurité,
3° lorsque le contrat de travail à durée déterminée est conclu pour pourvoir un emploi à caractère saisonnier ou pour lequel dans certaines secteurs d’activité définies par décret ou par voie de convention ou d’accord collectif étendu, il est d’usage constant de ne pas recourir au contrat de travail à durée indéterminée en raison de la nature de l’activité exercée et du caractère par nature temporaire de cet emploi,
4° lorsque le contrat est conclu pour assurer le remplacement de l’une des personnes mentionnées aux 4° et 5° de l’article L.1251-6,
5° (abrogé),
6° lorsque le salarié est à l’initiative d’une rupture anticipée du contrat;
7° lorsque le salarié refuse le renouvellement de son contrat de mission pour la durée du contrat non renouvelée’;
ce dont il résulte qu’un délai de carence doit être respecté dans tous les autres cas aucune dispense n’étant prévu entre deux contrats ayant pour motif un accroissement temporaire d’activité, entre un contrat ayant pour motif un accroissement temporaire d’activité et un contrat pour remplacement d’un salarié absent ou deux contrats ayant pour motif le remplacement de salariés distincts.
Monsieur [J] soutient que l’entreprise de travail temporaire n’a pas observé les dispositions relatives au délai de carence dans le cadre de plusieurs contrats, notamment entre le contrat n°102110 pour remplacement d’un salarié absent, Monsieur [O] du 1er novembre 2014, mission ayant pris fin par avenant au 20 décembre 2014 et le contrat n°102187 pour accroissement d’activité à compter du 21 décembre 2014, puis entre cette dernière mission achevée le 31 mars 2015 et un nouveau contrat n°102389 pour remplacement d’un salarié absent dès le 1er avril 2015 et que le non-respect des délais de carence doit entraîner la requalification envers l’entreprise de travail temporaire.
La société Proman 076 fait valoir que tous les contrats de mission conclus avec Monsieur [J], sauf un, l’ont été pour un motif lié au remplacement d’un salarié absent et que par application des dispositions de l’article L.1251-37 du code du travail, aucun délai de carence n’avait à être respecté.
Or, l’examen des six contrats de mission et six avenants versés aux débats par le salarié en pièce n°2 permet de constater que si les quatres premiers contrats de travail et avenants portant sur la période du 19/05/2014 au 31/10/2014 ont pour motif le remplacement du même salarié absent, Monsieur [O], il est constant qu’aucun délai de carence ne sépare le contrat n°102110 et l’avenant 102110-01 portant sur le remplacement de Monsieur [O], salarié absent du 1er novembre 2014 au 20 décembre 2014 et le contrat n°102187 conclu du 21 décembre 2014 au 31 mars 2015 pour ‘accroissement d’activité lié à l’augmentation de l’activité chargement wagons 110 K’ alors qu’au regard de la durée de cette mission temporaire supérieure à 14 jours, un délai de carence de 17 jours aurait dû être respecté ce qui n’a pas été le cas.
Ainsi l’inobservation de ce délai de carence entre un contrat de mission destiné à pourvoir au remplacement d’un salarié absent et le contrat suivant pour accroissement d’activité par l’entreprise de travail temporaire fonde l’action de Monsieur [J] en requalification de ses contrats de mission en un contrat de travail à durée indéterminée à compter du premier contrat irrégulier soit à compter du 21 décembre 2014 et non à compter du 12 mai 2014.
Il n’est pas contesté qu’au terme du dernier contrat de mission temporaire, soit le 13 juillet 2015, la société Proman n’a pas renouvelé l’engagement du salarié mettant un terme à toute relation contractuelle à compter de cette date sans adresser à ce dernier de lettre de licenciement de sorte que du fait de la requalification en contrat de travail à durée indéterminée intervenue la cessation des relations contractuelles s’analyse en un licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Les dispositions du jugement entrepris ayant débouté Monsieur [J] de ses demandes de requalification de ses contrats de mission en contrat de travail à durée indéterminée à compter du 21 décembre 2014, de fixation de la date de la rupture du contrat de travail au 13 juillet 2015 et de licenciement sans cause réelle et sérieuse sont ainsi infirmées.
Sur les demandes financières subséquentes :
Sur le rappel de salaire à temps plein :
La requalification d’un contrat de mission en un contrat de travail à durée indéterminée ne porte que sur le terme du contrat et n’a pas d’effet sur les autres clauses du contrat notamment la durée du travail.
Le salarié a droit à des rappels de salaire pour les périodes intermédiaires entre ses différents contrats à condition de prouver qu’il a dû se tenir et qu’il est effectivement resté à la disposition de l’employeur pendant ces périodes.
Monsieur [J] fait valoir que que les contrats de mission étaient conclus pour un temps plein soit 35 heures par semaine et 151,66 heures par mois, la société Proman076 décidant à sa convenance de l’employer à temps partiel tout en le contraignant à demeurer à sa disposition à temps complet et précise que sa demande de rappel de salaire prend en compte les heures manquantes sur des mois au cours desquels il était embauché à temps complet ainsi que les périodes intermédiaires.
La société Proman 076 s’y oppose en rappelant que les salariés intérimaires sont exclus du champ d’application de la loi relative à la mensualisation ce qui explique que les heures travaillées puissent varier d’un mois sur l’autre en fonction des dates de mission et qu’en l’espèce le salarié a été payé sur la base des heures réellement effectuées répertoriées par les relevés d’heures hebdomadaires établis au sein de l’entreprise utilisatrice et qu’il ne rapporte pas la preuve de s’être tenu à disposition de l’entreprise au cours des périodes intermédiaires.
Il est constant que si par application des dispositions de l’article L. 3241-1 du code du travail les salariés temporaires sont effectivement exclus de la rémunération mensuelle, l’article L3242-3 du même code précisant que ‘les salariés ne bénéficiant pas de la mensualisation sont payés au moins deux fois par mois à seize jours au plus d’intervalle’, il n’en demeure pas moins que l’entreprise de travail temporaire doit assurer au salarié temporaire la rémunération correspondant à l’horaire garanti dans son contrat de mission même si l’entreprise utilisatrice l’occupe pendant une durée inférieure.
Or, l’examen comparé des contrats de mission et avenants avec les bulletins de paie versés aux débats met en évidence que Monsieur [J] travaillait à temps complet en 3X8 selon un horaire collectif de 35 heures, qu’il a réalisé de nombreuses heures supplémentaires et non complémentaires dont il a été rémunéré et qu’un seul bulletin de paie lui a été remis chaque mois lequel tout en se référant à des périodes mensuelles complètes à compter du 1er août 2014, (1er au 31/08/2014, du 1er au 30/09/2014 ou encore du 1er au 31/10/2014…) mentionnait des durées de travail variables respectivement de 139 heures, 134 heures ou encore de 126 heures correspondant de l’aveu de l’entreprise Proman 076 aux heures effectivement réalisées au sein de l’entreprise utilisatrice par le salarié ainsi occupé pour une durée inférieure à celle contractuellement prévue de sorte que ce dernier est fondé à réclamer le paiement de ces heures manquantes.
En revanche, Monsieur [J] ne verse aux débats aucun élément démontrant qu’il s’est effectivement tenu à la disposition de l’employeur durant les périodes intermédiaires situées en mai, juin et juillet 2014 ce qui conduit au rejet de sa demande de rappel de salaire formé à ce titre.
En conséquence, il convient par infirmation des dispositions du jugement entrepris de faire partiellement droit aux demandes du salarié à partir du décompte qu’il a produit en pièce n°3 et de condamner la société Promans 076 à lui régler une somme de 2.713,79 € à titre de rappel de salaire outre 271,37 € de congés payés y afférents.
Sur les demandes consécutives à la rupture de la relation de travail :
La société Proman 076 indique que les demandes indemnitaires du salarié ne sont pas justifiées dans leur montant lequel est particulièrement excessif.
La cour constate que pour autant, elle ne remet pas en cause le montant du salaire de référence fixé par le salarié à la somme de 2.865,72 € qu’il y a lieu de retenir.
Alors que le salarié pouvait prétendre à une indemnité de requalification, il ne la sollicite pas alors qu’il sollicite la condamnation de la société Proman 076 au paiement d’une somme de 2.865,72 € au titre du non respect de la procédure de licenciement.
Si les développements de l’entreprise de travail temporaire concernant le fait qu’elle ne serait pas tenue au respect d’une procédure de licenciement dans le cadre de contrats de mission d’intérim ne sont pas pertinents alors qu’en l’espèce, la requalification en un contrat de travail à durée indéterminée intervenue postérieurement au terme du dernier contrat de mission sans que l’employeur ne mette en oeuvre la procédure de licenciement a privé celui-ci de cause réelle et sérieuse, la cour constate que de ce fait le salarié n’est pas fondé à réclamer une indemnité pour irrégularité de la procédure fondée sur l’article L.1235-2 du code du travail laquelle n’est prévue que dans l’hypothèse d’un licenciement pourvu d’une cause réelle et sérieuse.
Les dispositions du jugement entrepris ayant débouté Monsieur [J] de cette demande sont ainsi confirmées.
Par application des dispositions de l’article 7-1 de la convention collective applicable au salariés permanents des entreprises de travail temporaire, il est en revanche bien fondé à solliciter et obtenir le paiement d’une somme de 2.865,72 € à titre d’indemnité de préavis et 286,57 € à titre de congés payés afférents, le salarié conservant le bénéfice de l’indemnité de précarité dans l’hypothèse d’une requalification des contrats précaires en un contrat à durée indéterminée.
De même, l’ancienneté de 14 mois retenue par le salarié n’étant pas contestée par la société Proman 076 à titre subsidiaire, celle-ci est tenue de verser à Monsieur [J] une somme de 668,66 € au titre de l’indemnité légale de licenciement.
Par application des dispositions de l’article L.1235-5 du code du travail, Monsieur [J], alors âgé de 26 ans ayant moins de deux années d’ancienneté, ne peut prétendre qu’à une indemnité correspondant au préjudice subi.
Pour en justifier, celui-ci, qui a bénéficié d’une transaction avec l’entreprise utilisatrice, verse aux débats uniquement une attestation Pôle Emploi datée du 1er mai 2018 mettant en évidence qu’il a perçu l’allocation d’aide au retour à l’emploi seulement à compter du 25/06/2016 et jusqu’au 21/03/2018 durant des périodes limitées mettant en évidence qu’il a continué à travailler, sans verser aux débats aucun élément concernant sa situation au regard de l’emploi entre le 15 juillet 2015 et le 25 juin 2016 et postérieurement au 21 mars 2018 de sorte qu’il convient de réparer le préjudice résultant de la perte de son emploi en lui allouant une indemnité limitée à la somme de 3.600 €.
Les dispositions contraires du jugement entrepris sont en conséquence infirmées.
Sur les demandes de dommages-intérêts pour inégalité au titre des congés payés :
Monsieur [J] reproche aux deux société de travail temporaire, la société Adecco et la société Proman son statut d’intérimaire qui a eu pour conséquence de ne pas être considéré comme un salarié de ‘droit commun’ compris dans l’effectif de la société utilisatrice, le privant ainsi du régime en vigueur au titre des congés payés à l’origine d’un préjudice nécessaire dont il sollicite la réparation en demandant la condamnation de chacune d’elle à lui payer une somme de 2.500 € à titre de dommages-intérêts.
La société Proman 076 lui oppose que le travail temporaire est légalement prévu par les dispositions du code du travail, qu’il est tenu compte de ses spécificités en matière de congés payés qu’en outre le salarié ne démontre pas subir un quelconque préjudice.
La société Adecco fait valoir que le salarié a bien perçu au terme de chaque mission une indemnité compensatrice de congés payés de 10% conformément à l’article L.1251-19 du code du travail, cette indemnité visant à compenser l’impossibilité pour le salarié intérimaire de prendre des congés payés durant sa mission, que la différence entre un salarié permanent et intérimaire est ainsi déjà indemnisée et précise qu’il n’existe plus de préjudice automatique.
De fait, alors que Monsieur [J] a transigé avec l’entreprise utilisatrice sur les conditions d’exécution de sa prestation de travail, qu’il a déjà été indemnisé par la société Proman 076 de l’irrégularité des contrats de mission et de la rupture de la relation de travail, que ses demandes formées à l’encontre de la société Adecco sont prescrites et qu’il ne peut sous couvert d’une demande de dommages-intérêts contourner les règles de la prescription, force est de constater qu’il ne verse aux débats strictement aucun élément justifiant de l’existence et de l’étendue du préjudice dont il réclame réparation et dont il a été débouté à juste titre par la juridiction prud’homale par des dispositions qui sont confirmées.
Sur la demande de dommages-intérêts pour maintien abusif dans la précarité :
Monsieur [J] reproche aux deux entreprises de travail temporaire de s’être montrées particulièrement déloyales dans l’exécution des contrats de mission en le maintenant durant 5 ans et 3 mois dans une situation de précarité du fait du prolongement dans le temps de son statut d’intérimaire ne lui permettant pas même d’envisager la conclusion d’un contrat de prêt pour l’acquisition d’un véhicule ou d’une habitation alors qu’il aurait dû être recruté dès le départ au moyen d’un contrat de travail à durée indéterminée ce qui caractérise une faute grave à l’origine d’un préjudice spécifique et distinct dont il doit être indemnisé par chacune d’elle.
L’action en requalification initiée à l’encontre de la société Adecco étant irrecevable comme étant prescrite, le salarié ne peut par le biais d’une demande de dommages-intérêts contourner les règles de la prescription.
En outre, Monsieur [J] ne peut valablement reprocher à l’entreprise de travail temporaire Proman 076, à laquelle il n’a été lié que 14 mois, d’avoir rempli le rôle qui lui était dévolu par son objet social, ce grief d’un maintien abusif dans la précarité s’adressant principalement à l’entreprise utilisatrice avec laquelle il a transigé alors qu’il n’a pas démontré de collusion frauduleuse entre celle-ci et les deux entreprises de travail temporaire et qu’il n’a justifié ni de l’existence ni de l’étendue du préjudice dont il demande réparation.
Les dispositions du jugement entrepris ayant débouté Monsieur [J] de ces demandes sont confirmées.
Sur la remise des documents de fin de contrat :
Les dispositions du jugement entrepris ayant débouté Monsieur [J] de cette demande sont partiellement infirmées.
Il est enjoint à la société Proman 076, sans assortir celle-ci d’une mesure astreinte qui n’est pas nécessaire, de remettre à Monsieur [J] une attestation Pôle emploi mentionnant comme motif de rupture ‘licenciement sans cause réelle et sérieuse’, un certificat de travail, un solde de tout compte, les bulletins de salaire conformes pour la période de décembre 2014 au 13 juillet 2015.
Sur les intérêts au taux légal et leur capitalisation :
Les créances de nature salariale allouées porteront intérêts à compter de la date de réception par l’employeur de la convocation devant le bureau de conciliation du conseil de prud’hommes et la créance indemnitaire à compter du présent arrêt.
Les intérêts échus dus au moins pour une année entière seront capitalisés dans les conditions prévues par l’article 1343-2 du code civil.
Le jugement déféré, qui a rejeté ces demandes sera infirmé.
Sur les dépens et les frais irrépétibles :
Les dispositions du jugement entrepris ayant rejeté la demande de la société Adecco au titre de l’article 700 du code de procédure civile et ayant condamné Monsieur [J] aux dépens exposés par la société Adecco sont confirmées.
En revanche, celles ayant condamné Monsieur [J] à supporter les dépens exposés par la société Proman 076 sont infirmées, cette dernière, qui succombe, devant supporter la charge des dépens exposés par Monsieur [J] à son encontre et lui verser une somme de 1.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS :
La cour:
Statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort:
Confirme les dispositions du jugement entrepris ayant débouté Monsieur [J] de ses demandes :
– d’indemnité pour procédure irrégulière,
– de dommages-intérêts pour inégalité de traitement au titre des congés payés et pour maintien abusif dans la précarité formées à l’encontre des entreprises de travail temporaire Adecco et Proman 076,
et ayant rejeté la demande formée par la société Adecco au titre de l’article 700 du code de procédure civile et condamné Monsieur [J] aux dépens exposés par la société Adecco.
Infirme le jugement entrepris pour le surplus.
Statuant à nouveau et y ajoutant:
Déclare irrecevables comme étant prescrites les demandes de Monsieur [J] formées à l’encontre de la société Adecco de requalification des contrats de mission temporaire en un contrat de travail à durée indéterminée et de rappel de salaire pour la période du 29 mars 2010 au 5 décembre 2012.
Déclare recevable la demande de Monsieur [J] formée à l’encontre de la société Proman 076 de requalification des contrats de mission temporaire en un contrat de travail à durée indéterminée.
Requalifie à l’égard de la société Proman 076 en un contrat de travail à durée indéterminée les contrats de mission temporaire conclus à compter du 21 décembre 2014.
Fixe la date de rupture du contrat de travail au 13 juillet 2015.
Dit que la rupture du contrat de travail s’analyse en un licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Fixe la moyenne des salaires de Monsieur [J] à la somme de 2.865,72 €.
Condamne la société Proman 076 à verser à Monsieur [J] les sommes suivantes :
– 2.865,72 € au titre de l’indemnité compensatrice de préavis ;
– 286,57 € à titre de congés payés afférents à l’indemnité compensatrice de préavis ;
– 668,66 € à titre d’indemnité légale de licenciement ;
– 3.600 € à titre d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
– 2.713,79 € à titre de rappel de salaires ;
– 271,37 € à titre de congés payés afférents.
Condamne la Société Proman 076 à délivrer à Monsieur [D] [J] les documents de fin de contrat suivants:
– une attestation destinée à Pole Emploi, mentionnant pour motif de rupture du contrat de travail ‘un licenciement sans cause réelle et sérieuse au 13 juillet 2015 ‘
– le certificat de travail
– le solde de tout compte
– les bulletins de salaires conformes pour la période de décembre 2014 au 13 juillet 2015.
Déboute Monsieur [J] de sa demande d’astreinte assortissant la remise des documents de fin de contrat.
Dit que les créances de nature salariale allouées porteront intérêts à compter de la date de réception par l’employeur de la convocation devant le bureau de conciliation du conseil de prud’hommes et la créance indemnitaire à compter du présent arrêt.
Dit que les intérêts échus dus au moins pour une année entière seront capitalisés dans les conditions prévues par l’article 1343-2 du code civil.
Condamne la société Proman 076 aux dépens de l’instance exposés par Monsieur [J] et à lui payer une somme de 1.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
Le greffier Le président