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COMM.
FB
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 23 juin 2021
Cassation partielle
Mme MOUILLARD, président
Arrêt n° 548 F-D
Pourvoi n° T 19-21.919
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 23 JUIN 2021
La société Neolog, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° T 19-21.919 contre l’arrêt rendu le 28 juin 2019 par la cour d’appel de Paris (pôle 5, chambre 11), dans le litige l’opposant :
1°/ à la société EX&co, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 2],
2°/ à la société Viapost, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 1],
défenderesses à la cassation.
La demanderesse invoque, à l’appui de son pourvoi, les quatre moyens de cassation annexés au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de Mme Boisselet, conseiller, les observations de la SCP Baraduc, Duhamel et Rameix, avocat de la société Neolog, de la SCP Alain Bénabent, avocat de la société EX & co, après débats en l’audience publique du 11 mai 2021 où étaient présents Mme Mouillard, président, Mme Boisselet, conseiller rapporteur, M. Guérin, conseiller doyen, et Mme Labat, greffier de chambre,
la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Désistement partiel
1. Il est donné acte à la société Neolog du désistement de son pourvoi en ce qu’il est dirigé contre la société Viapost.
Faits et procédure
2. Selon l’arrêt attaqué (Paris, 28 juin 2019), la société EX&co, spécialisée dans l’activité des centrales d’achat non alimentaires, a confié, par plusieurs contrats successifs, à la société Neolog l’exécution, sur le site de celle-ci, de prestations de réception des produits, stockage, préparation de commande et expédition. Dans la nuit du 24 au 25 octobre 2015, un cambriolage a eu lieu sur le site de la société Neolog, au cours duquel la marchandise appartenant à la société EX&co a été volée. La société Neolog lui refusant toute indemnisation au motif que le vol constituait un cas de force majeure, la société EX&co l’a assignée en responsabilité.
Sur le premier moyen, le deuxième moyen, pris en ses trois premières branches, et le troisième moyen, pris en ses trois premières branches, ci-après annexés
3. En application de l’article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n’y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Sur le deuxième moyen, pris en sa quatrième branche
Enoncé du moyen
4. La société Neolog fait grief à l’arrêt de la condamner à payer certaines sommes à la société EX&co en réparation de ses préjudices et de la débouter de ses demandes tendant à voir juger que le vol survenu dans la nuit du 24 au 25 octobre 2015 constituait, au sens du contrat, un cas de force majeure exonératoire de responsabilité, alors « qu’à supposer que la cour d’appel ait pu se prononcer sur l’existence d’un cas de force majeure par référence aux critères du droit commun, une telle circonstance exonératoire s’entend d’un événement extérieur imprévisible lors de la conclusion du contrat et irrésistible au moment où il survient ; qu’un événement doit être considéré comme imprévisible lorsqu’il n’est pas possible de l’anticiper d’une manière permettant d’éviter sa survenance ; que, de même, il est irrésistible dès lors que des mesures raisonnables ne permettent pas d’en empêcher la survenance ; qu’en l’espèce, la cour d’appel a considéré que le vol survenu dans la nuit du 25 au 25 octobre 2015 n’était pas imprévisible au moment de la conclusion du contrat et qu’il n’était pas irrésistible, faute pour la société Neolog de produire des pièces justifiant des circonstances du vol ou permettant de déterminer si les éléments de sécurité fonctionnaient lors de ce vol ; qu’en se prononçant ainsi, sans rechercher, comme elle y était invitée, si le vol avec violence constituait, par hypothèse, un événement imprévisible dès lors qu’il n’était pas possible d’en éviter la survenance par anticipation, et s’il était irrésistible, s’agissant d’un vol avec effraction, malgré plusieurs mesures de sécurisation du site, dont la société Neolog justifiait par la production d’extraits de la vidéosurveillance et d’un document de sept pages détaillant les mesures de sécurisation du site, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1147 et 1148 du code civil, dans leur rédaction antérieure à l’ordonnance du 10 février 2016, devenus respectivement les articles 1231-1 et 1218 du code civil. »
Réponse de la Cour
5. Après avoir relevé, par motifs propres et adoptés, que les contrats successivement conclus rappelaient que les locaux utilisés devraient répondre aux conditions de sécurité adaptées tenant compte de la valeur de la marchandise confiée, qu’un avenant précisait que l’établissement était relié à une télésurveillance anti-intrusion 24 heures sur 24 et qu’il était équipé d’un système d’enregistrement numérique, l’arrêt retient que les parties avaient envisagé la possibilité de survenance de vols et que celui qui s’était produit ne pouvait donc être considéré comme imprévisible. Enonçant ensuite que le caractère insurmontable du vol, dont il est soutenu qu’il a été commis avec violence ou agression, ne peut s’apprécier qu’au vu des circonstances, l’arrêt retient, par motifs propres, qu’à l’exception de sa plainte, qui ne donne aucun élément sur le vol, de clichés d’enregistrement vidéo peu lisibles et de l’avis de classement sans suite, la société Neolog ne produit aucune pièce justifiant des circonstances du vol avec violence et ne fournit, notamment, ni l’enquête de police, ni la déclaration de sinistre à son assurance, ni la plainte du gardien ou une attestation de sa part ou un certificat médical, ce qui ne permet pas de déterminer si les éléments de sécurité fonctionnaient correctement et étaient en place, tels que les caméras et les clôtures. L’arrêt relève également, par motifs adoptés, la présence d’un seul membre du personnel pour assurer la surveillance des images de télésurveillance, sans retransmission vers un autre site de veille, l’absence d’alarme permettant de prévenir les services de police, la facilité avec laquelle les malfaiteurs ont pu s’introduire dans les locaux, et la longue durée pendant laquelle ils ont pu opérer sans être dérangés.
6. En l’état de ces constatations, desquelles il résulte qu’elle a procédé aux recherches prétendument omises, la cour d’appel a légalement justifié sa décision.
7. Le moyen n’est donc pas fondé.
Mais sur le troisième moyen, pris en sa quatrième branche
Enoncé du moyen
8. La société Neolog fait grief à l’arrêt de la condamner à payer à la société EX&co une certaine somme en réparation de son préjudice matériel, alors « que la faute lourde, de nature à écarter l’application d’une clause limitative de responsabilité, ne peut résulter du seul manquement à une obligation contractuelle, fût-elle essentielle, mais doit se déduire de la gravité du comportement du débiteur ; que la cour d’appel a écarté l’application de l’article 2 du contrat “en raison des manquements contractuels graves de la société Neolog” ; qu’en se prononçant ainsi, sans caractériser en quoi ces manquements présentaient une gravité suffisante pour être qualifiés de faute lourde, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article 1150 du code civil, dans sa rédaction antérieure à l’ordonnance du 10 février 2016, devenu l’article 1231-3 du même code. »