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COUR D’APPEL
DE
VERSAILLES
Code nac : 4AF
13e chambre
ARRÊT N°
CONTRADICTOIRE
DU 18 FÉVRIER 2020
N° RG 19/06064 – N° Portalis DBV3-V-B7D-TND5
N° RG 19/06070 – N° Portalis DBV3-V-B7D-TNEO
J O N C T I O N
AFFAIRE :
T… X…
…
C/
I… B…
…
Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 08 Août 2019 par le Tribunal de Commerce de NANTERRE
N° chambre :
N° Section :
N° RG : 2019L00733
Expéditions exécutoires
Expéditions
Copies
délivrées le : 18.02.2020
à :
Me Martine DUPUIS
Me Katell FERCHAUX-LALLEMENT
Me Patricia MINAULT
TC de NANTERRE
MP
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE DIX HUIT FÉVRIER DEUX MILLE VINGT,
La cour d’appel de Versailles, a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre :
– Monsieur T… X…
[…]
[…]
– SAS REP FRANCE prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège […]
[…]
– SASU OTTO’GO prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège […]
[…]
– SCI EDISON prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège […]
[…]
Représentés par Maître Martine DUPUIS de la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES, avocat postulant au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 625 – N° du dossier 1962365 et par Maîtres Georges Henri LAUDRAIN et Julien CHEVAL, avocats plaidant au barreau de PARIS
APPELANTS
****************
– Monsieur I… B…
né le […] à Mont de Marsan (40)
[…]
[…]
– SAS MAC PARTS prise en la personne de ses représentants légaux
N° SIRET : 810 308 791
[…]
[…]
Représentés par Maître Katell FERCHAUX-LALLEMENT de la SELARL LM AVOCATS, postulant avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 629 – N° du dossier 20190317 et par Maître Julien TURCZYNSKI, avocat plaidant au barreau de PARIS substitué par Maître Jean LE ROY, avocat au barreau de PARIS
SELARL C. S… prise en sa qualité de liquidateur judiciaire de la Sté AUTO PARTS DISTRIBUTION
[…]
[…]
Représentée par Maître Patricia MINAULT de la SELARL MINAULT PATRICIA, avocat postulant au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 619 – N° du dossier […] et par Maître Marie NEGREL, avocat plaidant au barreau de PARIS
INTIMÉS
****************
Composition de la cour :
L’affaire a été débattue à l’audience publique du 16 Décembre 2019, Madame Sophie VALAY-BRIERE, présidente, ayant été entendue en son rapport, devant la cour composée de :
Madame Sophie VALAY-BRIERE, Présidente,
Madame Marie-Andrée BAUMANN, Conseiller,
Madame Delphine BONNET, Conseiller,
qui en ont délibéré,
Greffier, lors des débats : Madame Sylvie PASQUIER-HANNEQUIN
En la présence du Ministère Public, représenté par Monsieur Fabien BONAN, Avocat Général dont les avis des 03 et 11 octobre 2019ont été transmis le même jour au greffepar la voie électronique
Le groupe Finapart, fondé en 2008 par les époux T… et F… X…, était constitué de la société Finapart, holding, dirigée par M. T… X…, laquelle détenait les sociétés Auto Parts Distributions (anciennement Lum Lux Distribution), Sogedifa et Auto Reserve ainsi qu’une part de la SCI Edison.
La SAS Auto Parts Distributions (APD), présidée par M. T… X… du 14 janvier 2012 au 11 février 2015, exploitait une activité d’achat, de vente et fabrication de matériels pour le secteur automobile, notamment des marques D…, […] et […] , et exerçait son activité dans des locaux situés à Gennevilliers loués d’abord à la SCI Edison, gérée par M. T… X…, puis à compter du mois de décembre 2014 à la SARL Busoni.
Selon jugements du 22 décembre 2014, le tribunal de commerce de Nanterre a ouvert des procédures de liquidation judiciaire avec poursuite d’activité au profit de la société Finapart, et de redressement judiciaire à l’égard des sociétés Sogedifa et Auto Reserve, qui ont été converties en liquidations judiciaires le 21 janvier 2015.
Le 11 février 2015, le tribunal a autorisé la cession des actifs des sociétés Finapart et Auto Reserve au profit de la société Sicoba, dirigée par M. I… B… . Parmi ces actifs figuraient notamment 84,58% des titres de la société APD, des actifs incorporels et financiers et certains actifs de la société Auto Reserve.
Le même jour, le tribunal a arrêté un plan de cession des actifs de la société Sogedifa au profit de la société GTB Distribution.
À la suite de la reprise par la société Sicoba des titres de la société APD, la SAS Rep France, dirigée par M. T… X…, a signé un contrat d’agent commercial avec la société APD.
Le 29 mai 2015, la société Sicoba a cédé l’intégralité de ses titres de la société APD à la SAS Mac Parts, laquelle a également acquis 2,08% du capital auprès de M. J… K… et 13,33% auprès de la société Automotive parts worlwide.
En avril 2016, la SAS Otto’Go a été immatriculée au registre de commerce de Paris.
Le 13 décembre 2016, la société Mac Parts, représentée par M. H…, en qualité de dirigeante de la société APD, a déposé une déclaration de cessation des paiements et sollicité l’ouverture d’une procédure de liquidation judiciaire. Par jugement en date du 21 décembre 2016, le tribunal de commerce de Nanterre a fait droit à la demande, fixé provisoirement la date de cessation des paiements au 22 juin 2015 et désigné la Selarl […] , prise en la personne de maître E… S…, en qualité de liquidateur judiciaire.
Selon jugement du 31 janvier 2018, le tribunal a confirmé la date de cessation des paiements au 22 juin 2015.
Par ailleurs, maître M… , ès qualités de liquidateur judiciaire des sociétés Auto réserve, Finapart et Sogedifa, a assigné Mme F… X…, MM. T… et Q… X… devant le tribunal de commerce de Nanterre aux fins de les voir condamnés à lui payer l’insuffisance d’actif causé par leurs fautes. Par jugements du 5 juin 2019, devenus définitifs, M. T… X… notamment a été condamné au titre de sa responsabilité pour insuffisance d’actif à payer la somme totale de 1 200 000 euros et plusieurs mesures d’interdiction de diriger ont été prononcées à son encontre.
Saisi par la société Mac Parts et M. B… aux fins d’extension de la procédure de liquidation judiciaire ouverte à l’égard de la société APD à la SAS REP France, la SAS Otto’Go, la SCI Edison et à M. T… X…, le tribunal de commerce de Nanterre, selon jugement contradictoire du 8 août 2019 n° RG 2019L00733, a :
– dit recevable l’action de la société Mac Parts agissant ès qualités de dirigeant de la société APD mise en liquidation judiciaire par jugement du tribunal de commerce de Nanterre du 21 décembre 2016, ayant désigné la Selarl […] en qualité de liquidateur judiciaire et de M. B… , ès qualités de dirigeant de la société Mac Parts, elle-même dirigeante de la société d’APD, en liquidation judiciaire, à l’encontre des sociétés REP France, Otto’Go, de la SCI Edison et de M. T… X… ;
– étendu à la société Otto’Go, à la SCI Edison, à la société REP France et à M. T… X… la procédure de liquidation judiciaire ouverte à l’égard de la société APD ;
– joint les procédures collectives qui seront poursuivies sous forme d’une procédure collective unique avec confusion des masses actives et passives, avec les mêmes organes de la procédure et le même juge-commissaire ;
– ordonné l’emploi des dépens en frais privilégiés de procédure de liquidation judiciaire.
Le même jour, saisi par la Selarl […] , ès qualités, aux fins d’extension de la procédure de liquidation judiciaire ouverte à l’égard de la société APD à la SAS Otto’Go et à la SCI Edison le tribunal de commerce de Nanterre a, par jugement n° RG 2019L00889, :
– étendu à la société Otto’Go et à la société Edison la procédure de liquidation judiciaire ouverte à l’égard de la société APD ;
– joint les procédures collectives qui seront poursuivies sous forme d’une procédure collective unique avec confusion des masses actives et passives, avec les mêmes organes de la procédure et le même juge-commissaire ;
– ordonné l’emploi des dépens en frais privilégiés de procédure de liquidation judiciaire.
Le 14 août 2019, M. T… X… et les sociétés REP France, Otto’Go et Edison ont interjeté appel de la première décision. La procédure a été enrôlée sous le numéro RG 19/06070.
Le même jour les sociétés Otto’Go et Edison ont interjeté appel de la seconde décision. La procédure a été enrôlée sous le numéro RG 19/06064.
Par ordonnances du 17 octobre 2019, l’exécution provisoire attachée aux jugements dont appel a été arrêtée.
Saisi par la Selarl […] , ès qualités, le magistrat désigné par le premier président a, selon ordonnances contradictoires du 26 novembre 2019, rejeté l’exception de nullité des déclarations d’appel ainsi que la fin de non recevoir opposée aux appels des sociétés Otto’Go, Edison et Rep France et de M. T… X….
Dans leurs dernières conclusions déposées au greffe et notifiées par RPVA le 2 décembre 2019 dans les dossiers RG 19/06070 et RG 19/06064, les sociétés Otto’Go, Edison, Rep France et M. T… X…, d’une part, les sociétés Otto’Go et Edison, d’autre part, demandent à la cour de :
– les dire recevables et bien fondés en leur(s) appel(s) ;
– constater que le tribunal a de manière illicite statué sur l’extension de la procédure de liquidation judiciaire de la société APD à leur égard en l’absence d’un rapport du juge commissaire ;
– constater que le tribunal a de manière illicite ouvert simultanément deux procédures de liquidation judiciaire à l’égard de la société Otto’Go et de la SCI Edison ;
– constater que le tribunal a de manière illicite instruit l’instance [2019L00889] et fait plaider l’affaire sans que l’assignation introductive d’instance n’ait été placée au rôle ;
– prononcer l’annulation des jugements dont appel ;
– infirmer en tout état de cause les jugements dans toutes leurs dispositions s’il n’étaient déclarés nuls ;
– déclarer que la société Mac Parts et M. I… B… sont irrecevables à demander l’extension de la procédure de liquidation judiciaire de la SAS APD à leur égard faute de qualité à agir ;
– déclarer que la société Mac Parts et M. I… B… sont mal fondés en leur demande d’extension et les en débouter ;
– écarter des débats le rapport In Extenso du 1er mars 2017 pour défaut d’autorisation et de
désignation du technicien par le juge-commissaire ;
– juger la Selarl […] prise en la personne de maître E… S… en sa qualité de liquidateur judiciaire de la société APD mal fondée en toutes ses demandes, y compris celle subsidiaire de prise en charge des frais de justice par les sociétés Otto’Go et Edison ;
– condamner d’une part la Selarl […] , et d’autre part, solidairement la société Mac Parts et M. I… B… à leur payer à chacun la somme de 10 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens.
Dans ses dernières conclusions déposées au greffe et notifiées par RPVA le 6 décembre 2019 dans le dossier RG 19/06064 et le 16 décembre 2019 dans le dossier RG 19/06070, la Selarl […] , ès qualités, demande à la cour de :
– dire et juger les sociétés Otto’Go, Edison, Rep France et M. T… X… irrecevables, et à tout le moins mal fondés, en leur demande de nullité des jugements ;
– confirmer les jugements en toutes leurs dispositions ;
– débouter les sociétés Otto’Go, Edison, Rep France et M. T… X… de l’ensemble de leurs demandes ;
– ordonner l’emploi des dépens en frais privilégiés de la procédure de liquidation judiciaire dont distraction au profit de la Selarl Patricia Minault agissant par maître Patricia Minault, avocat ;
si par extraordinaire la cour infirmait le jugement,
– condamner les sociétés Otto’Go, Edison, Rep France et M. T… X… à régler :
* ses frais et honoraires en sa qualité de liquidateur judiciaire de chaque entité, provisoirement arrêtés à la somme de 10 610,17 euros pour la société Otto’Go, 2 734,42 euros pour la SCI Edison, 613,73 euros pour la société REP France et 739,72 euros pour M. T… X…, sauf à parfaire,
* l’ensemble des frais exposés dans le cadre de la liquidation judiciaire de chacune des entités, estimés pour ce qui concerne la société Otto’Go à 25 092,85 euros, sauf à parfaire ;
* la somme de 8 000 euros chacune au titre de l’article 700 du code de procédure civile;
* les dépens de la présente instance dont distraction au profit de la Selarl Patricia Minault agissant par maître Patricia Minault, avocat au barreau de Versailles, et ce conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.
Dans leurs dernières conclusions déposées au greffe et notifiées par RPVA le 24 octobre 2019 dans le dossier RG 19/06070, la société Mac Parts et M. I… B… demandent à la cour de :
– déclarer irrecevables les sociétés Otto’Go, Edison, Rep France et M. T… X… en leurs demandes de nullité du jugement attaqué [2019L00733] ;
– les déclarer recevables et bien fondés en leurs demandes ;
– débouter les appelants de l’ensemble de leurs demandes ;
– confirmer le jugement [2019L00733] en toutes ses dispositions ;
– dire et juger que les dépens de première instance et d’appel seront employés en frais privilégiés de liquidation judiciaire.
Dans ses avis communiqués aux parties par RPVA les 3 et 11 octobre 2019, le ministère public recommande à la cour de confirmer en tous points les jugements considérant que les demandes d’extensions sont justifiées pour la société Ottog’Go par la fictivité de la personne morale et pour les trois autres par l’existence de flux financiers anormaux à leur profit exclusif et rappelle que l’insuffisance d’actif est de plus de 312 000 euros.
L’ordonnance de clôture a été rendue le 16 décembre 2019.
Pour un plus ample exposé des prétentions et des moyens des parties, il est renvoyé à leurs dernières écritures conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile.
SUR CE,
Aucun moyen n’étant soulevé ou susceptible d’être relevé d’office, il convient de déclarer les appels des sociétés Otto’go, Edison, Rep France et M. X…, d’une part, et de la société Mac Parts et M. B… , d’autre part, recevables.
1- Sur la jonction
Aux termes de l’article 367 du code de procédure civile, le juge peut d’office ordonner la jonction de plusieurs instances pendantes devant lui s’il existe entre les litiges un lien tel qu’il soit de l’intérêt d’une bonne justice de les faire juger ensemble.
Tel est le cas en l’espèce, les deux jugements déférés à la cour ayant tous deux abouti à l’extension de la liquidation judiciaire de la société APD aux sociétés Otto’Go et Edison.
Il convient, par conséquent, d’ordonner la jonction des instances RG 19/06064 et RG 19/06070, sous le premier de ces numéros et de statuer par une seule et même décision.
2-Sur l’annulation des jugements
Invoquant les dispositions des articles R.662-12 et L.640-2 du code de commerce, les appelants prétendent que les jugements sont nuls d’une part en ce qu’ils ont été rendus en l’absence de rapport du juge commissaire et d’autre part en vertu du principe ‘faillite sur faillite ne vaut’, rappelant que les jugements dont appel ont tous deux ouvert une procédure de liquidation judiciaire à l’encontre des sociétés Otto’Go et Edison. Ils font valoir pour cela que lorsque deux procédures sont ouvertes à l’égard du même débiteur, seul le premier jugement en date produit effet et qu’en l’espèce le premier semble être celui numéro RG 2019L00733, mais que la cour pourrait décider qu’il n’est pas possible de déterminer lequel des deux jugements est intervenu en premier et annuler les deux jugements. Les sociétés Otto’Go et Edison prétendent en outre que l’assignation introductive d’instance n’a pas été placée avant l’audience de plaidoiries mais après celle-ci une fois les débats clos et que du fait de cette irrégularité le jugement RG n° 2019L00889 encourt la nullité.
La société Mac Parts et M. B… soutiennent que les dispositions de l’article R.662-12 du code de commerce ne sont pas applicables aux décisions d’extension de la liquidation judiciaire et que partant l’absence de rapport ne saurait faire encourir la nullité du jugement. Ils ajoutent en outre qu’aucun texte ne fait obligation à la cour d’appel, saisie de l’entier litige par l’effet dévolutif de l’appel, de statuer sur rapport du juge-commissaire.
Considérant que les arguments étaient connus des appelants qui ne les ont pas invoqués en première instance, la Selarl […] , ès qualités, concluent qu’ils sont irrecevables à en faire état pour la première fois en cause d’appel, en application de l’article 564 du code de procédure civile.
Sur le fond, elle rappelle, s’agissant du rapport du juge-commissaire, que celui-ci n’est pas requis en matière d’extension de procédure collective conformément à l’énumération limitative de l’article R. 662-12 du code de commerce ; que les appelants ne rapportent pas la preuve d’un grief alors que la nullité alléguée est de forme ; qu’ils n’établissent pas avoir demandé la communication d’un tel rapport ; et qu’en tout état de cause la cour pourra statuer au fond même si elle estimait qu’un rapport était nécessaire du fait de l’effet dévolutif de l’appel.
S’agissant de l’impossibilité d’ouvrir simultanément deux procédures de liquidation judiciaire pour une même société, elle rappelle que si elle a sollicité la jonction des instances lors de la mise en état, demande à laquelle le tribunal n’a pas fait droit par une décision qui est une mesure d’administration judiciaire insusceptible de recours, les appelants, qui ne se sont jamais exprimés en faveur de la jonction en première instance, ne peuvent pas reprocher au tribunal, saisi à la fois par elle-même et par la société Mac Parts et M. B… , d’avoir rendu deux jugements distincts puisque il n’y a pas eu ouverture de deux procédures collectives distinctes pour chaque entité, mais extension d’une seule et même procédure principale à plusieurs entités. Elle ajoute, au surplus, que la cour peut, si elle l’estime utile, joindre les deux procédures et statuer par un seul arrêt.
Elle indique, enfin, rapporter la preuve, contrairement aux appelants, de l’enrôlement des deux exploits d’huissier de justice délivrés aux sociétés Otto’Go et Edison le 4 avril 2019.
Les assignations à la requête de la Selarl […] , ès qualités ont été délivrées le 12 mars 2019 aux sociétés Otto’go et Edison. Outre que le tampon y figurant démontrent qu’elles ont été réceptionnées par le greffe du tribunal de commerce le 4 avril 2019, soit avant l’audience du 9 avril 2019, les défenderesses qui ont comparu et n’ont soulevé aucune exception de procédure relative à la saisine de la juridiction avant toute défense au fond sont irrecevables à le faire en cause d’appel.
En revanche, les appelants sont recevables à solliciter la nullité du jugement faute de rapport du juge-commissaire dès lors que ce moyen ne pouvait être soulevé en première instance, seule une demande aux fins d’obtention d’un tel rapport aurait pu l’être.
En disposant que le tribunal statue sur rapport du juge-commissaire sur tout ce qui concerne la sauvegarde, le redressement et la liquidation judiciaires, l’action en responsabilité pour insuffisance d’actif, la faillite personnelle ou l’interdiction prévue à l’article L. 653-8, l’article R.662-12 du code de commerce impose au juge-commissaire d’établir un exposé objectif, en fait et en droit, des éléments en sa possession susceptibles d’éclairer le tribunal sur les demandes dont celui-ci est saisi.
Ce rapport, qui s’impose à chaque fois que le tribunal est compétent en application de l’article R.662-3 du code de commerce, ce qui est le cas en matière d’extension d’une procédure de liquidation judiciaire, est une formalité substantielle dont l’absence emporte la nullité du jugement.
Les jugements déférés ne comportant aucune mention démontrant que le tribunal a statué sur rapport écrit ou oral du juge-commissaire, ils doivent être annulés sans qu’il soit besoin d’examiner le troisième moyen tendant aux mêmes fins.
Compte tenu de l’effet dévolutif de l’appel, la cour, saisie de l’entier litige, doit statuer sur le fond.
3- Sur la recevabilité de la société Mac Parts et de M. B… à agir en extension
Les sociétés Otto’go, Edison, Rep France et M. X… soutiennent que la société Mac Parts, dirigeante de la société APD, et M. B… , dirigeant de la société Mac Parts, qui ne sont pas le débiteur, sont irrecevables à demander l’extension de la procédure de liquidation judiciaire.
La société Mac Parts et M. B… répliquent que le débiteur exerçant ses droits propres est recevable à agir en extension de la liquidation judiciaire.
En application des dispositions de l’article L621-2 alinéa 2 du code de commerce, applicable en cas de liquidation judiciaire par renvoi de l’article L 641-1-I du même code, la procédure ouverte peut, à la demande de l’administrateur judiciaire, du mandataire judiciaire, du débiteur ou du ministère public, être étendue à une ou plusieurs autres personnes en cas de confusion de leur patrimoine avec celui du débiteur ou de fictivité de la personne morale.
Il résulte des extraits Kbis produits que la SAS Mac Parts, présidée par M. I… B… , est la présidente de la SAS APD.
La société Mac Parts et M. I… B… ont donc qualité à exercer les droits propres du débiteur et à agir en extension de la procédure de liquidation judiciaire de la société qu’ils dirigent.
4- Sur le rapport In Extenso
Les sociétés Otto’go, Edison, Rep France et M. X… reprochent au liquidateur judiciaire et aux juges de première instance de s’être fondés sur un rapport technique du cabinet In Extenso, non signé, qui ne comporte pas de lettre de mission et qui n’a été autorisé par le juge-commissaire que postérieurement à son paiement sur les fonds de la liquidation et à son dépôt, et ce en violation des dispositions de l’article L.621-9 du code de commerce.
La société Mac Parts et M. B… font valoir que le rapport technique du cabinet In Extenso est un élément de preuve parmi d’autres, qu’en matière commerciale la preuve est libre, qu’aucune interdiction n’est faite aux organes de la procédure de se faire accompagner à leurs frais par un professionnel du chiffre et au surplus que le liquidateur verse aux débats l’ordonnance qui a autorisé ce rapport.
La Selarl […] prétend que cette demande, formulée pour la première fois en cause d’appel, est irrecevable. Elle rappelle néanmoins que ce rapport a été autorisé par le juge-commissaire, précisant que sa requête déposée en 2017 a été égarée par le greffe et réenregistrée par celui-ci en 2018, et que quand bien même il n’aurait pas été autorisé, elle est libre de produire les éléments de preuve qu’elle souhaite.
Il est établi par la requête datée du 3 janvier 2017, reçue au greffe du tribunal de commerce de Nanterre le 20 juin 2018, et par l’ordonnance du juge-commissaire datée du 20 juin 2018, autorisant la Selarl […] à se faire assister du Cabinet In extenso aux fins de procéder à un audit des comptes de la société APD et au recouvrement du poste clients, que le rapport daté du 1er mars 2017, a été réalisé par le cabinet In extenso à la demande du liquidateur judiciaire sans autorisation préalable du juge-commissaire.
Il ne ressort pas des mentions du jugement que la demande tendant à voir écarter le rapport In extenso des débats ait été formulée en première instance. Cependant, il ne s’agit pas d’une demande nouvelle dès lors qu’elle tend aux mêmes fins que celles soumises au premier juge. Elle est donc recevable.
Si le non respect des dispositions de l’article L.621-9 du code de commerce est susceptible d’avoir des conséquences sur la prise en charge de la rémunération du technicien, il est sans effet sur la capacité du liquidateur judiciaire à se faire assister dans le cadre des opérations de la liquidation judiciaire par un professionnel du chiffre et à produire parmi les pièces communiquées au soutien de ses demandes le rapport établi par celui-ci, dès lors que, comme en l’espèce, il a été soumis à la contradiction.
La demande sera donc rejetée.
5- Sur l’extension de la liquidation judiciaire de la société APD à la société Otto’Go
Les sociétés Otto’go, Edison, Rep France et M. X… contestent la prétendue fictivité de la société Otto’Go comme le détournement de la clientèle de la société APD, précisant que la fictivité à démontrer est celle de la société APD et non celle des sociétés cibles. Ils exposent que ces deux sociétés n’ont pas la même activité, la société APD ayant une double activité de centrale d’achat et de plateforme logistique alors que la société Otto’Go est une plateforme logistique, dont l’activité a démarré en mars 2017. Ils précisent que la société Rep France, agent commercial de la société APD, intervenait dans le cadre de l’activité de négoce pour acheter aux équipementiers et revendre aux distributeurs et avait simplement pour interdiction ‘de commercialiser toutes pièces similaires à ou identiques à celle définie par la société’ APD et que pour l’activité de logistique, elle intervenait non pas à la demande de la société APD mais à celle des équipementiers qui étaient ses propres clients et la rémunéraient pour les représenter auprès des distributeurs. Ils considèrent rapporter la preuve qu’à l’égard des équipementiers, la société APD n’avait qu’un rôle purement logistique et n’était pas leur distributeur et encore moins exclusif comme prétendu abusivement par le liquidateur judiciaire.
Ils affirment ensuite que la société Otto’go distribuait plus de vingt-cinq marques de pièces détachées dont seules IM… , D… et Record étaient également distribuées par la société APD dans le cadre du contrat passé avec la société Rep France et que la preuve du détournement de clientèle allégué n’est pas rapportée en l’absence de détermination des clients partis, du niveau de chiffre d’affaires et de la période y afférents.
Après avoir rappelé l’état du droit positif en matière de relations financières anormales justifiant une extension de procédure collective, la société Mac Parts et M. B… prétendent que M. X…, dont ils rappellent les différentes qualités, a détourné la majeure partie de la clientèle et de l’activité de la société APD, au travers de la société Rep France puis de la société Otto’Go sciemment créée avec ses proches dans ce but, à la même adresse que la société Rep France. Ils indiquent que celle-ci a repris plusieurs salariés de la société APD et qu’elle a récupéré les trois sociétés avec lesquelles la société APD avait un contrat de dépôt avec exclusivité sur la région parisienne. Ils déduisent de ces détournements de clientèle et d’activité, des liens capitalistiques et familiaux, des différents mandats sociaux et du manquement à l’obligation de loyauté et de bonne foi inhérent au contrat conclu entre les sociétés Rep France et APD, que M. T… X…, et les société Otto’Go et Rep France ont entretenu des relations financières anormales avec la société APD et ce dans l’intérêt personnel de M. X… et de ses structures.
La Selarl […] , après avoir rappelé les critères retenus par la doctrine et la jurisprudence en matière de fictivité, affirme que la société Otto’Go est fictive en ce qu’il s’agit d’une société écran créée par M. X…, maître de l’affaire, grâce à plusieurs prête-noms, sans affectio societatis, uniquement pour recueillir l’activité de la société APD concomitamment à l’ouverture de sa liquidation judiciaire. Elle explique que, quelques semaines avant l’ouverture de la procédure collective, M. X… a détourné les principaux partenaires de la société APD vers la société Otto’Go et que l’ensemble des flux commerciaux a été redirigé vers cette dernière laquelle a fonctionné avec les mêmes fournisseurs, les mêmes clients, le même agent commercial, le même dirigeant de fait, les mêmes employés et des prête-noms issus du cercle familial de M. X… pour dirigeants de droit. Elle considère que M. X… a utilisé des informations dont il avait eu connaissance en tant qu’agent commercial de la société APD au détriment de celle-ci et dans le seul but de frauder la procédure collective et les créanciers, en détournant des actifs au profit de sa nouvelle société.
La société est fictive lorsque les associés ne sont que des prêtes noms ou des comparses du véritable maître de l’affaire, celle-ci n’étant qu’une façade masquant les agissements de celui qui se dissimule derrière elle.
Il convient de rappeler que le groupe Finapart a été créé par les époux T… et F… X…, que la société Finapart, holding, était dirigée par M. T… X…, que ce dernier a également été président de la société APD du 14 janvier 2012 au 11 février 2015 puis qu’il en est resté associé, qu’il est depuis sa création en décembre 2011 le gérant de la SCI Edison, bailleur, et depuis le 9 novembre 2015 le président de la SAS Rep France.
La société APD, immatriculée au registre du commerce et des sociétés de Paris le 6 février 1997, avait pour activité ‘l’achat, la vente ou la fabrication de tout matériel ou accessoire pour tous types de véhicules, engins motorisés et cycles, formation pour tous éléments automobiles, diagnostique et climatisation’.
La SASU Minos invest, devenue Otto’Go, a été créée par Mme P… X…, associée unique et présidente, mère de M. T… X…. M. Q… X…, père de M. T… X…, d’abord directeur général en est ensuite devenu le président.
Elle a été immatriculée le 26 avril 2016 au registre du commerce et des sociétés de Paris pour, selon ses statuts, exploiter une activité relative à ‘la prise de participation au capital social de sociétés civiles et commerciales : activité de holding ; fourniture et dispense de services transversaux ; l’assistance technique, administrative et financière aux entreprises dans lesquelles la société détient une participation, […], accessoirement le soutien et le financement de toutes activités dans le domaine du sport mécanique, leur développement, achat et vente de véhicule à moteur, […]’.
Le 12 décembre 2016, soit la veille de la déclaration de cessation des paiements de la société APD, elle a modifié son objet social, lequel est désormais selon les extraits Kbis produits, ‘l’achat, la vente et le montage de tout matériel et accessoire pour tous types de véhicules, engins motorisés et cycles. Commerce et négoce de fournitures industrielles relatives aux véhicules roulants’, reprenant ainsi la même activité que la société APD.
La similitude des activités figurant sur les extraits du registre du commerce et des sociétés ne permet pas de retenir comme invoqué par les sociétés Otto’go, Edison, Rep France et M. X… que la société APD avait une double activité de centrale d’achat et de plate-forme logistique et que la société Otto’go n’avait qu’une seule activité de plate-forme logistique.
Son siège social, situé […] , est le même que celui de la société Rep France. Elle exploite également un local à […] , à proximité du siège social de la société APD, situé à […] .
Il convient de relever que nonobstant sa date de création, la société Otto’Go revendique sur son site ’15 ans d’expérience dans notre dur métier qu’est la rechange automobile’. S’il est justifié de l’expérience de M. Q… X… dans ce domaine, tel n’est pas le cas de Mme P… X…. De même, l’article intitulé ‘T… X… de retour aux affaires !’, paru le 17 mars 2017 sur le site du Journal de la rechange et de la réparation, indique notamment que T… X… ‘réapparaît aujourd’hui au travers de la plate-forme de distribution de pièces détachées Otto’Go […], selon nos informations exclusives, T… X… est bien l’homme fort se trouvant derrière ce projet […] si le nom de ce dernier n’apparaît nulle part, certains indices troublants renvoient directement à lui dès lors qu’il est question d’Otto’Go’.
Ainsi :
– les comptes annuels de la société Rep France montrent que celle-ci détient 5% du capital social de la société Otto’Go et qu’elle l’a assistée ‘par le versement d’une aide à son développement à hauteur de 75 K€’ ;
– la capture d’écran du site du Groupement pour l’optimisation des liaisons dans la distribution automobile (golda.fr) indique comme contacts pour la société […] pour les contrats et T… X… comme utilisateur ;
– les profils Linkedin de M. T… X… indiquent qu’il est devenu agent commercial et directeur commercial de la société Otto’go à tout le moins à compter du mois de janvier 2017 ;
En outre, il ressort :
– des contrats d’agent commercial produits,
– du contrat de crédit-bail conclu entre les sociétés Batilease, Oseo et la SCI Edison mentionnant que le permis de construire a été délivré à M. T… X… lui-même,
– des mails du 20 novembre 2016 adressé par T…[email protected] aux sociétés […] , JDH, […] et […] leur indiquant d’une part ‘ Je vous informe qu’autoparts est donc en phase d’être vendue à l’agra suite au rdv d’aujourd’hui. La situation s’accélère car il est prévu que cette vente se fasse sous mandataire ad hoc avec dépôt de bilan à l’amiable afin d’apurer le passif. Nous nous appellerons lundi de bonne heure. Vous devez impérativement donner congés aux dirigeants de la société en dénonçant votre contrat de dépôt. Comme je vous l’ai expliqué à chacun d’entre vous une solution opérationnelle sera en place rapidement…L’intégralité des points afin de créer un nouveau dépôt ont été balayés cette semaine et le haut du chapeau de nos meilleurs clients sont au courant. Si vous souhaitez contacter W… W… N… afin d’en avoir l’entière confirmation vous le pouvez, concernant A…. Il en est de même pour L…, R… étant parfaitement informé’ et, d’autre part, ‘Je voulais préciser que la nouvelle structure juridique que je créée via ma holding familiale sera composée d’un comité opérationnel dont vous ferez partie’,
– de la lettre recommandée en date du 22 novembre 2016 par laquelle M. T… X… a résilié le contrat d’agent commercial qui le liait à la société APD depuis le 11 février 2015,
– des lettres en date des 21, 23 et 25 novembre 2016 par lesquelles les sociétés […] , […] et […] , toutes trois fournisseurs de la société […], ont résilié les contrats les liant à la société APD,
– de la plaquette de présentation et des extraits du site de la société Otto’go montrant qu’elle distribue des produits de plusieurs marques dont ceux de […] , IM… et D…,
– de la liste des déclarations préalables à l’embauche, du mail de Mme F… X… en date du 7 février 2017 et des extraits Linkedin montrant que la société Otto’Go a embauché l’épouse du dirigeant à compter du 1er mars 2017 ainsi que C… G… et Y… O…, salariés de la société APD, comme responsable dépôt pour le premier et responsable call center pour la seconde à compter du 16 janvier 2017, même si ces recrutements sont postérieurs au prononcé de la liquidation judiciaire,
d’une part que la société Rep France était l’agent commercial à la fois des sociétés LumLux distribution puis APD, […] et […] , chargé de la représentation et de la distribution de leurs produits, d’autre part que M. T… X… est le véritable maître de l’affaire, la volonté de Mme X… de faire vivre cette société au moment de sa constitution faisant défaut, celle-ci ne pouvant en raison de ses liens familiaux que souscrire à la poursuite du projet de son fils, de troisième part que celui-ci a, directement ou par l’intermédiaire de la société Rep France qu’il dirigeait, transmis les clients et les fournisseurs de la société APD à la société Otto’Go permettant ainsi à celle-ci de poursuivre l’activité commerciale de la première dans un cadre juridique différent mais fictif, et ce dès avant le mois de mars 2017 contrairement à ce qui est également prétendu.
Il se déduit par conséquent de l’ensemble de ces éléments que la société Otto’Go est fictive en sorte qu’il y a lieu de lui étendre la procédure collective ouverte à l’égard de la société APD et ce sans qu’il soit besoin d’examiner les autres moyens tendant aux mêmes fins.
6- Sur l’extension de la liquidation judiciaire de la société APD à la SCI Edison
Après avoir rappelé que la SCI Edison avait été créée en 2011 pour financer l’acquisition des locaux dans lesquels étaient exploitées les activités des sociétés du groupe Finapart, les sociétés Otto’go, Edison, Rep France et M. X… soutiennent que la SCI Edison n’est pas fictive, qu’elle n’a bénéficié d’aucun mouvement de fonds anormal et que le loyer n’a pas été surévalué dans l’intérêt de la SCI. Ils détaillent l’évolution de la situation locative de la société Lum Lux Distribution puis de la société APD à l’égard de la SCI Edison et l’absence de toute opération anormale au bénéfice de cette dernière, considérant que les augmentations successives de loyers ont été cohérentes au regard des augmentions de surfaces louées corrélatives et de la remise à niveau au prix du marché comme le démontrent les comparaisons avec les baux consentis par la suite à la société Pro discount et par la société Busoni. Ils soulignent que l’indemnité de résiliation fixée au bénéfice de la SCI Edison n’a été que partiellement réglée, de telle sorte que cette dernière ne s’est pas enrichie au détriment des autres créanciers de la société APD.
La société Mac Parts et M. I… B… arguent du caractère exorbitant des loyers facturés par la SCI Edison à la société ADP, pour la situation des biens et leur surface, lequel caractérise l’existence de flux financiers anormaux entre ces sociétés afin de permettre à M. X… et ses associés de se constituer un patrimoine et de s’enrichir personnellement.
La Selarl […] prétend que l’existence de flux anormaux entre les sociétés APD et Edison est caractérisée par le fait que la SCI Edison, dont le dirigeant était également celui d’APD, a fait supporter à celle-ci le coût de son crédit-bail immobilier en calant les loyers sur les échéances du crédit-bail, et en augmentant successivement ceux-ci jusqu’à ce qu’ils deviennent sans rapport avec la valeur locative et les prix du marché, alors qu’elle connaissait parfaitement sa situation dégradée. Elle ajoute que, contrairement aux termes du contrat de crédit-bail, le montant du loyer n’a pas été réduit mais a augmenté contrairement à l’intérêt social de la société APD, que le contrat de sous location montre que la SCI Edison a entendu mettre à la charge de la société APD des coûts significatifs qui lui incombaient sans contrepartie, sans possibilité de recours et sans indemnité, que la surface des locaux et le loyer ont été augmentés sans que rien ne le justifie et ce alors que la société APD était déjà en état de cessation des paiements, que le loyer réglé en 2015 était sans rapport avec la valeur locative réelle et incompatible avec la survie de la société APD ce que savait M. X…, enfin que la résiliation du bail le 30 juin 2016, soit six mois avant l’ouverture de la liquidation judiciaire, à l’initiative du bailleur a été faite pour préserver les intérêts de la SCI et de ses associés au détriment de la locataire et de ses créanciers.
Il n’est soutenu ni par la société Mac Parts et M. I… B… ni par la Selarl […] , ès qualités, que la SCI serait fictive.
La confusion des patrimoines suppose que soit démontrée la confusion des comptes ou l’existence de relations financières anormales correspondant à des transferts patrimoniaux effectués par action ou par abstention, l’anormalité résidant dans l’absence de contrepartie et ces relations financières anormales devant en outre procéder d’une volonté systématique.
La SCI Edison, immatriculée au registre du commerce et des sociétés de Nanterre le 7 décembre 2011 et gérée par M. T… X…, a, par acte notarié en date du 12 juillet 2012, régularisé avec les sociétés Batilease et Oséo un contrat de crédit-bail immobilier d’un montant de 3680350 euros, pour durée de quinze ans, concernant un immeuble sur lequel est édifié un bâtiment composé de locaux à usage commercial situé à […] . Le contrat précise, d’une part, que le permis de construire a été délivré à M. T… X…, d’autre part que les locaux ont été donnés à bail à la société Lum lux distribution le 30 mars 2007 pour une durée de neuf années moyennant un loyer annuel hors taxe de 57 000 euros enfin, que la SCI Edison signera avec le locataire un avenant à l’effet de réduire la surface louée et de porter le loyer à 20 000 euros hors taxe.
En réalité, le 20 juin 2012, la société Lum lux distribution, devenue APD, représentée par M. T… X…, a conclu un contrat de sous-location d’une durée de quinze ans, égale à celle du crédit-bail, avec la SCI Edison, également représentée par M. T… X…, portant sur un local de 326 m² moyennant un loyer annuel hors taxes et hors charges de 57 000 euros, mettant tous les travaux à la charge de la sous-locataire et comportant une clause d’acquisition des embellissements par le propriétaire en fin de bail sans indemnité.
En l’absence de pièce relative à la valeur locative à cette date, la preuve de ce que ce contrat aurait été conclu à un prix très en deçà du tarif du marché, comme prétendu par les appelants, n’est pas rapportée.
Selon avenants en date du 2 avril 2013 et 27 avril 2015, la surface prise à bail n’a pas été diminuée comme précisé dans le contrat de crédit-bail mais a, au contraire, été portée à 1 903 m² pour un loyer annuel de 198000 euros, puis étendue au local de 365 m² précédemment loué pour un loyer annuel hors taxes et hors charges de 66 000 euros à la société Auto réserve, moyennant un loyer total de 264000 euros.
Les annonces de location d’entrepôts situés sur la commune de Gennevilliers en 2015 versées aux débats par le liquidateur judiciaire, M. B… et la société Mac parts, non contredites par d’autres annonces, montrent que le prix moyen du mètre carré pour un entrepôt dans cette commune était de l’ordre de 80 euros.
S’il n’est pas contesté que la société APD louait également depuis le 25 octobre 2014 à la société Busoni d’autres locaux situés à […] , la preuve que le loyer payé était de 194913,79 euros pour une surface de 1572 m² n’est en revanche pas faite dès lors que la copie du contrat versée aux débats par les appelants n’est signée par aucune partie.
En outre, l’avis estimatif établi le 27 janvier 2015 par l’agence CBRE concernant les locaux loués, produits par les appelants, a fixé le montant du loyer annuel hors taxe et hors charge, selon une hypothèse qualifiée d’optimiste à 250 577 euros et selon une hypothèse qualifiée de réaliste à 237410 euros.
Le loyer annuel de 264 000 euros, soit environ 116 euros du mètre carré, payé par la société d’exploitation à la bailleresse était donc manifestement supérieur au prix de marché, et ce nonobstant l’accord de la société Pro discount donné le 2 août 2016, soit plus d’un an après, pour payer un loyer équivalent.
Les augmentations de loyers ont été réalisées une première fois en 2013 alors que selon le rapport In extenso, la société APD avait déjà ‘une insuffisance de couverture active/passive de – 312 754 €’, puis quelques mois après la liquidation judiciaire de la société Auto réserve intervenue le 21 janvier 2015, et ce alors que la société APD était proche de l’état de cessation des paiements, la date en ayant été fixée provisoirement au 22 juin 2015, ce que M. T… X…, dirigeant jusqu’en février 2015 puis resté titulaire de deux actions de la société APD ne pouvait pas ignorer.
L’absence de diminution du loyer prévue dans le contrat de crédit-bail, qu’il ne pouvait pas plus ignorer en sa qualité de gérant de la SCI, ainsi que ces augmentations avaient manifestement pour objectif de faire supporter par la sous-locataire le coût du crédit bail remboursé par la SCI, laquelle devait ensuite acquérir les locaux moyennant un solde de 200 000 euros, et ce sans aucune contrepartie pour la société APD dont la nécessité dans laquelle elle se serait trouvée de disposer de locaux plus grands n’est pas démontrée.
Le contrat de location a ensuite été résilié le 30 juin 2016, soit quelques mois avant l’ouverture de la procédure collective, aux termes d’un protocole amiable intervenu entre la société APD, représentée par la société Mac parts, et la SCI Edison, représentée par M. T… X…, particulièrement favorable à la seconde puisqu’il prévoyait le paiement en douze termes égaux par la sous-locataire non seulement des impayés, soit 94215,29 euros après déduction du dépôt de garantie conservé par la SCI, mais également d’une indemnité de résiliation de 79 200 euros et ce alors que la société APD était en état de cessation des paiements.
Ces différents actes juridiques témoignent d’une volonté systématique de préserver l’actif immobilier et les intérêts financiers de la SCI sans contrepartie pour la société exploitante qui s’est appauvrie, quand bien même elle ne se serait pas acquittée de la totalité des sommes mises à sa charge.
Il se déduit de ces opérations, un ensemble d’indices concordants caractérisant l’existence de relations financières anormales constitutives d’une confusion des patrimoines entre la société APD et la SCI Edison, en sorte que la liquidation judiciaire de la première doit être étendue à la seconde.
7- Sur l’extension de la liquidation judiciaire de la société APD à la société Rep France et à M. T… X…
Les sociétés Otto’go, Edison, Rep France et M. X… contestent l’allégation de la société Mac Parts et de M. B… selon laquelle M. X… aurait détourné à son profit le chiffre d’affaires de la société ADP en bénéficiant de commissions importantes sur les ventes réalisées. Observant que le contrat de rémunération de M. X… conclu avec la société Mac Parts était limité à 5 000 euros par mois outre 1,5 % du chiffre d’affaires, ils soutiennent que cela ne constitue pas un enrichissement irrégulier, d’autant que les sommes n’ont pas été réglées et ont été admises au passif de la procédure prouvant ainsi que la mission d’apport de clientèle avait été accomplie par la société Rep France, et ne peut pas expliquer les difficultés de la société APD qui ne sont dues qu’à une mauvaise gestion de MM. B… et H…. Ils font également valoir que les résiliations des contrats de dépôt opérées en novembre 2016 ne sauraient constituer un détournement de la clientèle de la société APD, les entreprises concernées constituant le fonds de commerce de la société Rep France, en sa qualité d’agent commercial, et n’étant liées à la société liquidée que par des contrats de dépôt. Ils soutiennent enfin que l’allégation de détournement de clientèle est une invention de la société Mac Parts et de M. B… pour tenter de s’exonérer de leurs responsabilités engagées par le liquidateur judiciaire de la société APD.
La société Mac Parts et M. I… B… prétendent que M. X… aurait détourné le chiffre d’affaires de la société APD à son profit en bénéficiant de commissions importantes sur les ventes réalisées. Ils reprennent pour l’essentiel et sans les distinguer les mêmes moyens et arguments que pour l’extension à la société Otto’Go s’agissant du rôle de M. X… et de la société Rep France dans le détournement de la clientèle et de l’activité de la société APD.
La Selarl […] , ès qualités, n’a pas conclu sur ce point.
L’existence de transferts patrimoniaux effectués par action ou par abstention, notamment la perception de commissions, sans contrepartie entre la société APD, d’une part, et M. T… X…, d’autre part, dont les seules qualités de dirigeant et d’associé sont inopérantes en l’absence d’autre élément, n’est pas rapportée.
Il en est de même à l’égard de la société Rep France, dès lors qu’il n’est démontré ni une volonté systématique de détourner des actifs à son profit, les contrats de dépôt ayant été repris par la société Otto’Go, ni que les commissions perçues par cette dernière en exécution du contrat la liant à la société APD et augmentées par avenant du 1er avril 2016 de 5000 à 8000 euros hors taxe par mois alors que la société était en état de cessation des paiements, auraient constitué un avantage consenti sans contrepartie, une partie d’entre elles ayant au demeurant été admise au passif de la procédure collective.
Les demandes d’extension formulées à leur encontre seront donc rejetées.
8- Sur les frais
Les sociétés Otto’go, Edison, Rep France et M. X… font valoir que la procédure d’extension s’inscrit pleinement et exclusivement dans une logique d’amélioration de l’actif de la liquidation de la société APD et qu’il appartient ainsi à cette dernière et à elle seule d’en supporter la charge en cas d’échec.
La Selarl […] , ès qualités, argue d’une jurisprudence constante selon laquelle le débiteur redevenu in bonis à la suite de l’infirmation d’un jugement ouvrant une procédure liquidation judiciaire ou d’extension doit régler l’ensemble des frais de justice nés pendant la liquidation.
La Selarl […] , qui a été régulièrement désignée par le tribunal en qualité de liquidateur judiciaire de M. T… X… et de la société Rep France et qui a accompli sa mission à ce titre jusqu’à la décision arrêtant l’exécution provisoire attachée aux jugements, est légitime à obtenir sa rémunération en dépit de l’annulation des jugements déférés.
Il ne peut pas y avoir recouvrement direct des dépens par l’avocat de la Selarl […] compte tenu de la procédure collective.
PAR CES MOTIFS,
La cour, statuant publiquement par arrêt contradictoire,
Ordonne la jonction des instances RG 19/06064 et RG 19/06070 sous le premier de ces numéros ;
Déclare recevables les appels des sociétés Otto’go, Edison, Rep France et M. X…, d’une part, et de la société Mac Parts et M. B… , d’autre part ;
Déclare irrecevable la demande des sociétés Otto’Go et Edison aux fins de nullité du jugement n° RG 2019L00889 pour défaut de placement de l’assignation ;
Déclare recevable la demande des sociétés Otto’Go, Edison, Rep France et de M. T… X… aux fins de nullité des jugements n° RG 2019L00733 et n° RG 2019L00889 pour défaut de rapport du juge-commissaire ;
Prononce l’annulation des jugements n° RG 2019L00733 et n° RG 2019L00889 rendus le 8 août 2019 par le tribunal de commerce de Nanterre ;
Déclare recevable la demande des sociétés Otto’Go, Edison, Rep France et de M. T… X… tendant à voir écarté des débats le rapport Inextenso mais les en déboute ;
Etend la procédure de liquidation judiciaire de la société APD à la SCI Edison et à la SAS Otto’Go ;
Déboute la société Mac Parts et M. B… de leur demande d’extension de la procédure de liquidation judiciaire de la société APD à la société Rep France et à M. T… X… ;
Condamne la société Rep France à payer à la Selarl […] la somme de 613,73 euros au titre des frais de la liquidation judiciaire ;
Condamne M. T… X… à payer à la Selarl […] la somme de 739,72 euros au titre des frais de la liquidation judiciaire ;
Condamne la société Otto’Go en liquidation judiciaire à payer à la Selarl […] , ès qualités de liquidateur judiciaire de la société APD, la somme de 5 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;
Condamne la SCI Edison en liquidation judiciaire à payer à la Selarl […] , ès qualités de liquidateur judiciaire de la société APD, la somme de 5 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;
Déboute les sociétés Otto’go, Edison et Rep France et M. T… X… de leur demande d’indemnité procédurale formée à l’encontre de la société Mac Parts et M. B… ;
Déboute la Selarl […] de sa demande d’indemnité procédurale formée à l’encontre de la société Rep France et de M. T… X… ;
Ordonne l’emploi des dépens de première instance et d’appel en frais privilégiés de la procédure collective.
Prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
Signé par Madame Sophie VALAY-BRIERE, Présidente et par Madame Sylvie PASQUIER-HANNEQUIN, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le greffier, La présidente,