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6 décembre 2016
Cour de cassation
Pourvoi n°
15-18.369
COMM.
JL
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 6 décembre 2016
Rejet
Mme MOUILLARD, président
Arrêt n° 1050 F-D
Pourvoi n° B 15-18.369
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, a rendu l’arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par la société Amexsys, société à responsabilité limitée, dont le siège est […] ,
contre l’arrêt rendu le 27 février 2015 par la cour d’appel de Paris (pôle 5, chambre 11), dans le litige l’opposant :
1°/ à la société Qliktech France, société à responsabilité limitée, dont le siège est […] ,
2°/ à la société Air France, société anonyme, dont le siège est […] ,
défenderesses à la cassation ;
La demanderesse invoque, à l’appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;
Vu la communication faite au procureur général ;
LA COUR, en l’audience publique du 2 novembre 2016, où étaient présents : Mme Mouillard, président, Mme Laporte, conseiller rapporteur, Mme Riffault-Silk, conseiller doyen, Mme Arnoux, greffier de chambre ;
Sur le rapport de Mme Laporte, conseiller, les observations de la SCP Baraduc, Duhamel et Rameix, avocat de la société Amexsys, de la SCP Bénabent et Jéhannin, avocat de la société Qliktech France, l’avis de M. Debacq, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Donne acte à la société Amexsys du désistement de son pourvoi en ce qu’il est dirigé contre la société Air France ;
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l’arrêt attaqué (Paris, 27 février 2015), que la société Qliktech France (la société Qliktech) a conclu avec la société Amexsys un contrat de distribution du logiciel Qlik View ; que la société Air France, qui auparavant avait toujours commandé ce logiciel par l’intermédiaire de la société Amexsys, a demandé à celle-ci une remise supplémentaire pour une nouvelle commande; qu’après avoir refusé cette remise au distributeur, la société Qliktech a conclu la vente directement avec la société Air France en la lui accordant et a indiqué à la société Amexsys qu’elle avait informé la société Air France de ce que les conditions d’achat seraient identiques auprès du distributeur ou de l’éditeur ; que se prévalant de manquements de la société Qliktech à ses obligations contractuelles, la société Amexsys l’a assignée en réparation de son préjudice ;
Attendu que la société Amexsys fait grief à l’arrêt de condamner la société Qliktech à lui payer la seule somme de 71 753 euros alors , selon le moyen :
1°/ que les juges ne peuvent dénaturer les écrits versés aux débats ; qu’en l’espèce, l’article 2.4 du contrat du 28 juin 2010 stipulait que « Qliktech se réserve le droit de commercialiser, promouvoir, distribuer et concéder des licences des produits Qliktech aux utilisateurs finaux au sein et hors du territoire et rien dans le présent contrat ne sera interprété comme limitant d’une quelconque manière le droit de Qliktech à nommer d’autres distributeurs, revendeurs, licenciés ou agents à l’intérieur ou hors du territoire» ; que la cour d’appel a relevé que « la société Amexsys revendique la violation des articles 4-6 et 15.5 du contrat de distribution selon lesquels le distributeur assure tous les contacts avec les utilisateurs finaux auxquels le distributeur a revendu les licences de produits Qliktech et interdisant à la société Qliktech de contacter les utilisateurs finaux dont le distributeur a obtenu des commandes pour des licences de produits Qliktech » ; qu’en jugeant que l’article 2.4 autorisait expressément la société Qliktech à contracter directement avec les utilisateurs finaux, tandis que cette possibilité ne s’appliquait que dans l’hypothèse où ces derniers n’avaient pas passé de commande auprès du distributeur, la cour d’appel a dénaturé l’article 2.4 du contrat du 28 juin 2010 et violé l’article 1134 du code civil ;
2°/ qu’ en toute hypothèse, à supposer que la cour d’appel n’ait pas constaté que les articles 4.6 et 15.5 du contrat prévoyaient que le distributeur assurerait tous les contacts avec les utilisateurs finaux auxquels le distributeur a revendu les licences de produits Qlik View et interdisaient à la société Qliktech de contacter les utilisateurs finaux dont le distributeur a obtenu des commandes pour des licences de produits Qliktech, en s’abstenant de rechercher, comme elle y était invitée , si la lecture combinée des articles 2.4, 4.6 et 15.5 n’autorisait la société Qliktech à contracter directement avec les utilisateurs finaux dans la seule hypothèse où ces derniers n’avaient pas passé de commande auprès du distributeur, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article 1134 du code civil ;
3°/ que les juges ne peuvent faire application d’office d’une clause d’un contrat, non invoquée par les parties, sans les inviter à s’en expliquer ; que la société Amexsys se prévalait des articles 4.6 et 15.5 du contrat du 28 juin 2010 afin de démontrer que la société Qliktech avait manqué à ses obligations contractuelles en contractant directement avec la société Air France ; que la société Qliktech se prévalait uniquement dans ses écritures de l’article 2.4 du contrat de distribution et la société Air France soutenait qu’elle n’avait pas été complice d’un manquement contractuel, dans la mesure où elle ne connaissait pas l’existence des articles 15.5 et 4.6 du contrat ; qu’en appliquant d’office, pour limiter le préjudice à la seule commande fautive de mai 2011, l’article 2.5 du contrat, qui selon la cour d’appel permettait à la société Qliktech de « conclure des contrats de licence des produits Qliktech directement avec certains utilisateurs finaux désignés par Qliktech comme « comptes mondiaux », ce qu’est Air France » , sans inviter au préalable les parties à présenter leurs observations, la cour d’appel a méconnu le principe de la contradiction et violé l’article 16 du code de procédure civile ;
4°/ que les juges ne peuvent rejeter une demande sans examiner les éléments de preuve fournis par les parties ; que la société Amexsys faisait valoir qu’elle avait subi un préjudice né de la perte de la rémunération qu’elle aurait dû percevoir dans le cadre du déploiement du logiciel Qlik View au sein du groupe Air France, si la société Qliktech n’avait pas violé ses obligations; que la société Amexsys visait des pièces régulièrement produites, notamment des offres d’emploi et de stage publiées en février 2014, dans lesquelles la société Air France indiquait que « nous vous confierons le suivi du déploiement de l’outil d’analyse dynamique Qlik View » ; qu’en se bornant à affirmer que la demande de la société Amexsys était « basée sur un hypothétique déploiement de la solution Qlik View à l’échelle du groupe Air France/KLM en vue de commandes de 20 000 licences et des prestations de maintenance associées, pour la preuve duquel elle ne verse que de rares pièces à la force probante très limitée », sans procéder à aucune analyse, même sommaire, des pièces produites, la cour d’appel a violé l’article 455 du code de procédure civile ;
5°/ que le juge est tenu d’indemniser un préjudice certain dans son principe;qu’en se contentant de juger que la preuve d’un déploiement à l’échelle du groupe Air France/KLM en vue de commandes de 20 000 licences et des prestations de maintenance associées n’était pas rapportée, sans rechercher si les pièces produites ne démontraient pas, à tout le moins, l’existence de nouvelles commandes passées par la société Air France, le distributeur étant dans l’impossibilité de démontrer le nombre exact de commandes effectuées, et s’il ne lui incombait pas alors de chiffrer le préjudice en faisant injonction aux sociétés Air France et Qliktech de produire, par des documents certifiés par des commissaires aux comptes, l’intégralité des factures des produits et services Qlik View, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard de l’article 1147 du code civil ;
Mais attendu que c’est par une appréciation souveraine du préjudice de la société Amexsys, exempte de dénaturation, et abstraction faite des motifs surabondants critiqués par les première et deuxième branches, que la cour d’appel a retenu que la demande de cette société au titre du gain manqué sur la vente des licences Qlik View à la société Air France, qui était fondée sur un hypothétique déploiement de ce logiciel en vue de la commande par le groupe Air France/KLM de 20 000 licences et de prestations de maintenance associées, calculé par comparaison avec d’autres sociétés n’ayant pas les mêmes activité, effectifs et besoins que la société Air France, qui utilise de nombreuses plates-formes technologiques, n’était pas justifiée ; que le moyen n’est pas fondé ;