Contrat d’apporteur d’affaires : 25 novembre 2020 Cour de cassation Pourvoi n° 19-21.831

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Contrat d’apporteur d’affaires : 25 novembre 2020 Cour de cassation Pourvoi n° 19-21.831
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25 novembre 2020
Cour de cassation
Pourvoi n°
19-21.831

SOC.

IK

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 25 novembre 2020

Cassation

Mme FARTHOUAT-DANON, conseiller doyen
faisant fonction de président

Arrêt n° 1089 F-D

Pourvoi n° X 19-21.831

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 25 NOVEMBRE 2020

M. P… L…, domicilié […] , a formé le pourvoi n° X 19-21.831 contre l’arrêt rendu le 3 juillet 2019 par la cour d’appel de Versailles (15e chambre), dans le litige l’opposant :

1°/ à M. S… B…, domicilié […] , pris en qualité de liquidateur judiciaire de la société Kilely sécurité privée,

2°/ à l’AGS CGEA IDF Est, dont le siège est […] ,

défendeurs à la cassation.

Le demandeur invoque, à l’appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Ricour, conseiller, les observations de la SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de M. L…, après débats en l’audience publique du 6 octobre 2020 où étaient présents Mme Farthouat-Danon, conseiller doyen faisant fonction de président, M. Ricour, conseiller rapporteur, Mme Gilibert, conseiller, Mme Rémery, avocat général, et Mme Jouanneau, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l’arrêt attaqué (Versailles, 3 juillet 2019), M. L… et la société Kilely sécurité privée (la société) ont conclu un contrat le 1er janvier 2013 selon lequel M. L…, en qualité d’apporteur d’affaires percevrait en contrepartie de ses services, une commission de 5 % hors taxe sur le montant des contrats conclus par la société.

2. Par lettre du 21 mai 2015, M. L…, a été convoqué à un entretien préalable à un éventuel licenciement pour le 1er juin 2015 et a été licencié pour faute lourde le 27 mai 2015.

3. Le 29 mai 2015, M. L… a saisi la juridiction prud’homale en contestation de son licenciement.

4. La société a fait l’objet d’une liquidation judiciaire par jugement du tribunal de commerce de Créteil du 22 mars 2017, M. B… étant désigné en qualité de liquidateur.

Examen du moyen

Sur le moyen unique, pris en sa troisième branche

Enoncé du moyen

5. M. L… fait grief à l’arrêt de le débouter de l’ensemble de ses demandes en rappels de salaire, rappels de congés payés, indemnité pour travail dissimulé, indemnités de rupture et dommages-intérêts pour licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse, dommages-intérêts pour manquement à son obligation de sécurité, alors « que l’existence d’une relation de travail salariée ne dépend que des conditions de fait dans lesquelles est exercée l’activité des travailleurs ; qu’en l’espèce, il ressort des propres constatations de l’arrêt attaqué que le gérant de la société KSP présentait M. L… en qualité de directeur commercial à sa clientèle qu’il invitait à le contacter « pour toute demande de gardiennage sur toute l’île de France », qu’il lui versait un salaire fixe au lieu des commissions convenues, qu’il lui avait interdit l’accès aux documents permettant le chiffrage des missions apportées et, finalement, l’avait convoqué à un entretien préalable puis licencié pour faute « très lourde » par courrier du 27 mai 2015 ; qu’en se déterminant, pour exclure l’existence d’un contrat de travail, aux termes de motifs inopérants pris de la conclusion d’un contrat « d’apporteur d’affaires » quand il ressortait de ces constatations l’exécution, par M. L…, de sa prestation de travail selon les directives de l’employeur qui en contrôlait la réalisation et l’exercice, par ce dernier, d’un pouvoir disciplinaire, la cour d’appel a violé l’article L. 1221-1 du code du travail. »

Réponse de la Cour

Vu l’article L. 1221-1 du code du travail :

6. Il résulte de ce texte que l’ existence d’une relation de travail ne dépend ni de la volonté exprimée par les parties ni de la dénomination qu’elles ont donnée à leur convention mais des conditions de fait dans lesquelles est exercée l’activité des travailleurs.

7. Pour rejeter les demandes de M. L…, l’arrêt retient que les parties ont conclu un contrat d’apporteur d’affaires à caractère commercial, que si la société a présenté M. L… à l’égard des clients comme un directeur commercial , et que le gérant a établi une attestation dans laquelle il déclare qu’il fait partie du personnel en qualité de directeur commercial à durée indéterminée, il n’est pas établi que les parties avaient noué un accord contractuel sur le contenu de tâches salariées, la durée du travail et la rémunération, qu’il n’est pas produit d’avenant au contrat d’apporteur d’affaires, que M. L… apparaît sur les bulletins de salaire établis comme agent de sécurité ou employé commercial, qu’il ne se voyait pas reconnaître de droit de regard sur le chiffrage des missions qu’il apportait à la société, la secrétaire étant empêchée de communiquer toute indication de ce chef, que la convocation à un entretien préalable en vue d’un licenciement au motif de la violation d’une clause de confidentialité ne peut faire référence qu’à la seule clause du contrat d’apporteur d’affaires, et que le recours à cette procédure pour mettre fin aux relations contractuelles ne peut transformer rétroactivement ce contrat en contrat de travail.

8. En statuant ainsi, alors qu’elle avait constaté que la société présentait M. L… à sa clientèle, qui était invitée à s’adresser à lui pour certaines prestations, comme « notre directeur commercial », lui avait interdit l’accès aux documents permettant le chiffrage de ses missions, et l’avait convoqué à un entretien préalable à un licenciement, puis licencié pour faute lourde, avec dispense d’effectuer son préavis, ce dont il résultait que M. L… exécutait sa prestation selon les directives de l’employeur qui en contrôlait l’exécution et exerçait un pouvoir de sanction, la cour d’appel, qui n’a pas tiré les conséquences légales de ses constatations a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu’il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :

CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l’arrêt rendu le 3 juillet 2019, entre les parties, par la cour d’appel de Versailles ;

Remet l’affaire et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d’appel de Versailles autrement composée ;

Condamne M. B…, ès qualités, aux dépens ;

En application de l’article 700 du code de procédure civile, condamne M. B…, ès qualités, à payer à M. L… la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l’arrêt cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-cinq novembre deux mille vingt.

 


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