Your cart is currently empty!
2 mars 2020
Cour d’appel de Paris
RG n°
18/23115
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE PARIS
Pôle 5 – Chambre 10
ARRÊT DU 02 MARS 2020
(n° , 10 pages)
Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 18/23115 – N° Portalis 35L7-V-B7C-B6TYB
Décision déférée à la Cour : Jugement du 28 Septembre 2018 -Tribunal de Grande Instance de CRETEIL – RG n° 17/01492
APPELANTS
Maître [R] [P] ès qualité de mandataire judiciaire de la société MASSIS IMPORT EXPORT EUROPE
Domicilié [Adresse 6]
[Localité 5]
Maître [U] [V] ès qualité d’administrateur judiciaire de la société MASSIS IMPORT EXPORT EUROPE
Domicilié [Adresse 4]
[Localité 8]
SARL MASSIS IMPORT EXPORT EUROPE (MASSIS DISTRIBUTION)
Ayant son siège social [Adresse 3]
[Localité 5]
Représenté-es par Me François TEYTAUD de l’AARPI TEYTAUD-SALEH, avocat au barreau de PARIS, toque : J125
Représenté-es par Me Thérèse-anne AMY, avocat au barreau de PARIS, toque : B0216
Représenté-es par Me Frédéric FOURNIER de la SELARL REDLINK, avocat au barreau de PARIS, toque : J044, substitué par par Me Anthony BOTELLA, avocat au barreau de PARIS
INTIMES
M. LE MINISTRE DES FINANCES DES COMPTES PUBLICS au nom de :
– La Direction Nationale du Renseignement et des Enquêtes Douanières
Ayant ses bureaux [Adresse 2]
[Adresse 11]
[Localité 9]
Représentée par Mme [T] [B] (Inspectrice des douanes) en vertu d’un pouvoir spécial
SA TRANSPORTS P. FATTON
Ayant son siège social [Adresse 1]
[Localité 7]
N° SIRET : 956 508 469
Prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
Représentée par Me Guillaume DAUCHEL, avocat au barreau de PARIS, toque : W09
Représentée par Me Bruno PERRACHON de la SCP DEYGAS – PERRACHON – BES & ASSOCIES, avocat au barreau de LYON
COMPOSITION DE LA COUR :
L’affaire a été débattue le 13 Janvier 2020, en audience publique, devant la Cour composée de :
Monsieur Edouard LOOS, Président
Madame Sylvie CASTERMANS, Conseillère
M. Stanislas de CHERGÉ, Conseiller
qui en ont délibéré,
Un rapport a été présenté à l’audience par Monsieur Edouard LOOS dans les conditions prévues par l’article 785 du code de procédure civile.
Greffière, lors des débats : Mme Cyrielle BURBAN
ARRET :
– contradictoire
– par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
– signé par M. Edouard LOOS, Président et par Mme Cyrielle BURBAN, Greffière à qui la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
FAITS ET PROCÉDURE
La société Massis Import Expert Europe, exerçant sous l’enseigne ci après désignée ‘Massis Distribution’ est un fournisseur et entrepositaire agréé de tabac à narguilé qu’elle commercialise en France.
A ce titre, elle importe pour les besoins de son activité sur le territoire français des tabacs de la marque Al Fakher en provenance des Emirats Arabes Unis, sous le régime suspensif des droits d’accises, par l’intermédiaire de la société Transports P. Fatton, commissionnaire agréé en douane chargé du transport et du dédouanement des marchandises depuis 2009.
En 2015, la Direction Nationale du Renseignement et des Enquêtes Douanières (DNRED) a procédé à un contrôle au terme duquel la société Massis Distribution s’est vue notifier, le 21 juillet 2016, un procès verbal de constat d`infractions ayant donné lieu le 8 août suivant à l’émission d’un avis de mise en recouvrement (AMR) n° 2016/29, d’un montant de 6.845.983 euros, en raison de fausses déclaration de valeur pour non intégration du montant du droit de consommation dans l’assiette de la TVA à l’importation et du montant des frais de courtage et d’emballage dans la valeur en douane, infractions prévues et réprimées par les articles 292, 426 3, 411 1 et 414 du code des douanes.
Par courrier du 24 août 2016, la société Massis Distribution a saisi la commission de conciliation et d’ expertise Douanière (CCED), en contestation des infractions qui lui ont été notifiées par procès verbal de constat du 21 juillet 2016.
Par courrier séparé du même jour, la société Massis Distribution a également contesté l’AMR en sollicitant un sursis à paiement, puis a vainement mis en demeure la société Transports P. Fatton de fournir, sous huit jours, une caution bancaire à hauteur de 6.845.983 euros aux fins de garantir la dette douanière mise en recouvrement par courrier du 6 octobre 2016.
L’administration des douanes ayant rejeté sa réclamation le 26 octobre 2016, par actes du 26 décembre 2016 la société Massis Distribution a fait assigner l’administration des douanes et la société Transports P. Fatton devant le tribunal de grande instance de Créteil en nullité de l’AMR et, subsidiairement, en garantie de la société Transports P. Fatton .
Par acte du 5 janvier 2017, la société Massis Distribution a également fait assigner la société Transports P. Fatton devant le tribunal de commerce de Lyon afin de la voir condamner à fournir, sous astreinte, une caution bancaire à hauteur de 6.845.983 euros.
Par jugement rendu le 27 septembre 2017 confirmé par arrêt du 8 février 2018, le tribunal de commerce de Lyon s’est déclaré incompétent et a renvoyé I’affaire devant le tribunal de grande instance de Créteil.
Par jugement prononcé le 16 novembre 2017, le tribunal de commerce de Romans sur Isère a ouvert une procédure de sauvegarde à l’égard de la société Massis Distribution et a désigné maître [U] [V] en qualité d’administrateur judiciaire, et Maître [R] [P] en qualité de mandataire judiciaire. Par jugement prononcé le 28 novembre 2018, le tribunal de commerce de Romans sur Isère a arrêté le plan de sauvegarde de la société Massis lmport Export Europe et a maintenu maîre [P] en qualité de mandataire judiciaire et l’a désigné en qualité de commissaire à l’exécution du plan .
Par courrier recommandé du 27 novembre 2017, l’administration des Douanes a déclaré entre les mains de ce dernier une créance définitive au passif de ladite société pour un montant total de 6.790.034 € au titre des droits de consommation, douane et taxes majorés d’une amende fiscale, ainsi qu’une créance provisionnelle pour un montant de 6.675.983 € au titre des droits de douane et de la TVA (hors majorations fiscales et douanières).
Par courrier recommandé du 5 décembre 2017, la société Transports P. Fatton a également déclaré sa créance au passif de la société Massis Distribution auprès de Maître [R] [P] pour un montant total de ‘6.845.983 euros ‘ correspondant à ‘2.539.668 euros de droits de douanes’ auquel s’ajoute ‘4.706.31 5 euros de TVA”.
Les organes de la procédure collective sont intervenues volontairement à la procédure.
* * *
Vu le jugement prononcé le 28 septembre 2018 par le tribunal de grande instance de Créteil qui a statué comme suit :
Reçoit l’intervention volontaire de Maître [R] [P] et de Maître [U] [V] ès qualités respectivement de mandataire judiciaire et d’administrateur judiciaire de la société Massis Import Expert Europe placée sous sauvegarde de justice ;
Met hors de cause la SA Transports P. Fatton;
Déclare l’avis de mise en recouvrement n° 2016/29 du 8 août 2016 régulier en la forme et sur le fond ;
Confirme la décision de rejet de contestation de l’avis de mise en recouvrement en date du 26 octobre 2016 ;
déboute la la société Massis Import Expert Europe de l’intégralité de ses demandes ;
Dit n’y avoir lieu à indemnité de procédure sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;
Rappelle qu’en vertu de l’article 367 du Code des douanes, il n’y a pas lieu à dépens.
Vu l’appel le 26 otobre 2018 de [R] [P] et de Maître [U] [V], ès qualités respectivement de mandataire judiciaire et d’administrateur judiciaire de la société Massis Import Expert Europe, et de la société Massis Import Expert Europe,
Vu les dernières conclusions signifiées le 13 décembre2019 par la société Massis Import Expert Europe , maître [P], ès qualités de mandataire judiciaire de la société Massis Import Expert Europe et maître [V], ès qualités d’administrateur judiciaire et de la société Massis Import Expert Europe,
Vu les dernières conclusions communiquées le 27 novembre 2019 par la directrice de la DNRED,
Vu les dernières conclusions signifiées le 19 avril 2019 par la société Transports P. Fatton,
La société Massis Import Expert Europe , maître [P], ès qualités de mandataire judiciaire de la société Massis Import Expert Europe et maître [V], ès qualités d’administrateur judiciaire de cette même société demandent à la cour de statuer ainsi qu’il suit :
Vu l’article 16 de la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen de 1789 ;
Vu l’article 28 du Traité sur le Fonctionnement de l’Union Européenne ;
Vu l’article 6-1 de la Convention Européenne des Droits de l’Homme ;
Vu les articles 4, 32, 33 et 201.3 du Code des douanes communautaire ;
Vu les article 101-1 des Dispositions Code des douanes communautaire ;
Vu les articles 95-3,67 A à 67 D modifiés en 67 A à D-4, 346 et 357 bis du code des douanes national ;
Vu le Règlement particulier valeur en douane disponible sur le site www.douane.finances.gouv.fr ;
Vu l’article 575 B du Code général des impôts ;
Vu les articles 292 et 293 A du Code général des impôts ;
Vu la jurisprudence de la Cour Européenne des Droits de l’Homme et de la Cour de Justice de l’Union Européenne ;
Vu l’article 1379 du code civil ;
Infirmer le jugement du 28 septembre 2018 rendu par le tribunal de grande instance de Créteil en ce qu’il a débouté la société Massis Import Expert Europe de l’ensemble de ses demandes
Par conséquent,
In liminé litis :
Annuler la procédure de recouvrement au motif qu’elle est fondée sur un procès-verbal d’infractions entaché de nullité car fondé sur une procédure de contrôle elle-même viciée car instaurant volontairement un déséquilibre entre le destinataire et le déclarant-représentant en douane ;
Déclarer nul l’AMR n° 2016/29, pour violation du principe du contradictoire ;
Déclarer que la DNRED a vicié la procédure de contrôle en refusant sciemment de retenir la responsabilité financière, pénale et douanière de la société Transports Fatton alors qu’elle agissait comme « déclarant » et donc, inévitablement codébiteur de la dette douanière au regard du code des douanes communautaires ;
Déclarer qu’en refusant d’appliquer la responsabilité solidaire de la société Transports Fatton , la DNRED s’est sciemment privée du droit de recouvrer la dette auprès du déclarant et donc débiteur de la dette douanière, a porté atteinte à la protection des intérêts financiers de l’Union européenne ;
Annuler la décision du 26 octobre 2016 de la Direction Nationale du Renseignement et des Enquêtes Douanières pour motif de la procédure applicable en cas de saisine de la commission de conciliation et d’expertise douanière ;
Annuler l’avis de mise en recouvrement n°2016/29 au motif que cet acte n’a pas identifié valablement la dénomination sociale de la société Massis Import Expert Europe Mettre hors de cause maître [U] [V]-Selarl 2m&associés suite au jugement du 28
novembre 2018 du Tribunal de commerce de Romans portant homologation du plan de sauvegarde ;
A titre principal
Annuler les infractions constatées par le procès-verbal de notification d’infractions du 21 juillet 2016 et l’AMR n°2016/29 au motif que la DNRED a commis des erreurs manifestes dans le calcul des droits et taxes réclamés ;
A titre subsidiaire
Juger que la société Transports P. Fatton est redevable de la dette douanière du fait qu’elle a agi dans le cadre d’un mandat de représentation indirecte ;
Juger qu’en tout état de cause, la société Transports P. Fatton est redevable de la
dette douanière de l’AMR 2016/29 du fait la violation de son obligation de conseil et des fautes commises dans le cadre de sa mission de commissionnaire agrée en douane;
Condamner la société Transports P. Fatton à garantir la société Massis Import Expert Europe de toutes les condamnations qui seraient prises à la suite de la procédure de recouvrement diligentée par la recette de la Direction Nationale du Renseignement et des Enquêtes Douanières de la DNRED sur le fondement de l’avis de mise en recouvrement n° 2016/29 ;
En tout état de cause
Condamner la Direction Nationale du Renseignement et des Enquêtes Douanières à verser à la société M assis la somme de 10.000 euros au titre de l’article 700 du cpc et aux entiers dépens.
Par conclusions du adressées le 27 novembre 2019 , la directrice de la DNRED demande à la cour de statuer ainsi qu’il suit :
A titre principal :
Confirmer le jugement du 28 septembre 2018 rendu par le tribunal de grande instance de Créteil en toutes ses dispositions, sous réserve des rectifications apportées à la liquidation
A titre subsidiaire
Condamner la société Massis à verser à la DNRED la somme de 5 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile
La société Transports P. Fatton demande à la cour de statuer ainsi qu’il suit :
Dire et juger irrecevable l’appel interjeté car portant sur un chef de demande abandonné en première instance.
Confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a débouté la Société Massis Import Expert Europe, Maître [R] [P] ès qualité de Mandataire Judiciaire de la
société Massis Import Expert Europe et Maître [U] [V] de la Selarl 2m&associés ès qualités d’administrateur judiciaire de la société Massis Import Expert Europe de leur demande de fournir des garanties à hauteur de 6 845 983 euros sous astreinte journalière de 5.000 eruos.
Condamner in solidum la Société Massis Import Expert Europe et Maître [R] [P], ès qualité de commissaire à l’exécution de la société Massis Import Expert à verser à la Société Transports P. Fatton la somme de 15.000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile ;
Condamner les mêmes aux entiers dépens.
SUR CE,
Maître [S] [V]-Selarl 2m&associés, ès qualités d’administrateur judiciaire de la société Massis Import Expert Europe doit être mise hors de cause puisque le jugement prononcé le 28 novembre 2018 par le tribunal de commerce de Romans sur Isère qui a arrêté le plan de sauvegarde de la société Massis lmport Export Europe a mis fin à ses fonctions.
A) Sur la procédure
La société Massis Import Export Europe dite ci après société Massis Distribution et les organes de sa procédure collective de sauvegarde demandent à la cour d’annuler la procédure de recouvrement en raison des violations suivantes au principe du contradictoire :
* La DNRED a fait preuve d’opacité dans la phase dite du droit d’être entendu (DEE) en dissimulant à la société MASSIS des échanges majeurs avec la société FATTON qui font grief.
* Après avoir pris connaissance des observations de la société MASSIS, la DNRED n’a pas motivé sa future prise de décision avant la notification d’infractions.
* La DNRED a, sciemment, créé un effet de surprise dans le procès-verbal de notification d’infraction alors que la procédure contradictoire du DEE vise à l’empêcher.
* La société MASSIS se trouvant seule débitrice au regard du procès-verbal, a dû répliquer « à chaud » à la fin de l’acte.
Il est également soutenu que la DNRED a manqué à son obligation de notifier la dette douanière au déclarant en douane ayant agi dans le cadre d’un mandat de représentation indirecte.
Est également invoquée l’impossibilité pour la Douane de statuer sur la contestation administrative contre l’AMR en cas de saisine de la CCED (commission de conciliation et d’expertise douanière).
Selon la directrice de la DNRED, les contestations ainsi soulevées ne seraient pas fondées.
Ceci étant observé , par de justes motifs que la cour adopte , les premiers juges, faisant application des articles 67 A à 67 D du code des douanes dans leur rédaction applicable au litige ont jugé que la procédure douanière mise en oeuvre n’avait pas porté atteinte au principe du contradictoire; que la société Massis Distribution avait bénéficié du droit d’être entendue puisqu’elle avait reçu l’avis de résultat d’enquête le 7 juin 2016 et y avait répondu par courrier daté du 1er juillet 2016. Par courrier du 7 juillet 2016 , la DNRED y a répondu dans un délai qui lui est apparu suffisant. Il a été également justement relevé que le procès verbal de notification d’infractions du 21 juillet 2016 répond aux observations formulées par le conseil de la société Massy Distribution. Il a ainsi été caractérisé que le contradictoire avait été respecté dans la phase antérieure à l’émission de l’AMR le 8 août 2016 . La société Massis Distribution est mal fondée à reprocher à la DNRED un défaut de réponse motivée avant la rédaction du procès-verbal de notification d’infractions.
Il doit ensuite être relevé que la société Fatton verse aux débats la représentation en douane qui lui a été consentie par la société Massis Distribution à effet du 20 janvier 2009 qui mentionne qu’elle relève de la représentation directe conformément à l’article 5.2 1er alinéa du code des douanes communautaire . Il s’en déduit que la société Patton n’est pas tenue au paiement de la dette douanière qui incombe à la seule société Massis Distribution en application de l’article 201 3°) du même code . La société Massis Distribution est ainsi mal fondée à soutenir que la DNRED aurait vicié la procédure de contrôle en refusant sciemment de retenir la responsabilité financière, pénale et douanière de la société Transports Fatton alors qu’elle agissait comme « déclarant » et donc, inévitablement codébiteur de la dette douanière au regard du code des douanes communautaires et qu’en refusant d’appliquer la responsabilité solidaire de la société Transports Fatton , la DNRED s’est sciemment privée du droit de recouvrer la dette auprès du déclarant et donc débiteur de la dette douanière et aurait ainsi porté atteinte à la protection des intérêts financiers de l’Union européenne.
Si la société Massis Distribution n’a pas été associée aux échanges passés entre la DNRED et la société Fatton concernant son mode de représentation en douane, cette circonstance n’est pas de nature à entraîner la nullité de la procédure douanière ayant abouti à l’émission de l’AMR du 8 août 2016.
Sur le grief relatif au fait que la DNRED a statué sur la contestation de l’AMR alors que la société Massis Distribution l’avait avisée le 24 août 2016 de ce qu’elle saisissait la commission de conciliation et d’expertise douanière (CCED) , les premiers juges ont également justement relevé qu’il résultait de la combinaison des articles 345 alinéa 4 et 346 du code des douanes que ‘l’avis de mise en recouvrement peut être délivré avant la saisine de cette commission et avant qu’il n’ait été statué sur le recours éventuellement formé.’,
Il se déduit de ce qui précède que les contestations de la société Massis Distribution sur la régularité de la procédure doivent être rejetées ainsi que sa demande d’annulation de l’AMR n° 2016/29 pour violation du principe du contradictoire ;
B) Sur le fond
a) Sur la TVA
La société Massis Distribution conteste le grief relatif à l’absence de fausses déclarations de valeur . Elle conteste l’assiette de la TVA à l’importation en exposant que les droits de consommation qui font l’objet d’une réfaction, ne doivent pas supporter des droits de douanes, la base de calcul étant alors faussée La société appelante précise que l’article 575 du CGI et la doctrine administrative confirment bien la déduction des droits de douane dont elle s’est acquittée et que la position contraire des douanes met à sa charge une taxe d’effet équivalent à un droit de douane prohibée par l’article 28 du traité sur le fonctionnement de l’union européenne .
La société Massis Distribution conteste également l’intégration dan la valeur en douane des frais de courtage qui ne constituent pas une commission ainsi que les frais d’emballage.
La société Massis Distribution en déduit que son redressement est impossible en raison des erreurs commises portant également sur la commission d’exclusivité versée à Al Fakher [Localité 10].
La DNRED s’y oppose .
Ceci étant observé, l’article 575 du code général des impôts dans sa rédaction applicable à l’espèce dispose que les tabacs manufacturés vendus au détail ou importés dans les départements de la France continentale sont soumis à un droit de consommation. L’article 291 du même code prévoit que les importations de biens sont soumises à la TVA .Selon l’article 292 :
‘La base d’imposition est constituée par la valeur définie par la législation douanière conformément aux règlements communautaires en vigueur.
Toutefois, sont à comprendre dans la base d’imposition :
1° Les impôts, droits, prélèvements et autres taxes qui sont dus en raison de l’importation, à l’exception de la taxe sur la valeur ajoutée elle-même ; (…)’
Il se déduit de cette législation que la société Massis Distribution devait intégrer dans son assiette de TVA les sommes dues au titre du droit de consommation. La DNRED expose par ailleurs que, conformément à la décision du conseil d’état du 26 décembre 2018, les droits de douane ont été soustraits du prix de vente au détail des marchandises pour le calcul de la part proportionnelle du droit de consommation. Ainsi , contrairement à ce que soutient l’appelante, les droits de douanes ont été déduits .
Il se déduit de ce qui précède que le redressement opéré par la Douane en matière de TVA est justifié les tableaux correctifs établis après application de l’article 575 C et des observations de l’appelante ayant été dressés (pièces annexes A, B, C de la DNRED).
b) sur les frais de courtage
La société Massis Distribution soutient que les commissions ne sont pas des frais de courtage à intégrer dans la valeur en douane et que les commissions versées sont des commissions à l’achat .Elle expose que la société Al Fakher [Localité 10] doit être qualifiée de commissionnaire à l’achat dans le cadre du contrat du 8 mai 2013 et que les commissions reçues à ce titre sont exclues de la valeur en douane.
La DNRED s’y oppose.
Ceci étant observé , selon l’article 32 du code des douanes communautaire :
‘Pour déterminer la valeur en douane par application de l’article 29, on ajoute au prix effectivement payé ou à payer pour les marchandises importées :
a) les éléments suivants, dans la mesure où ils sont supportés par l’acheteur mais n’ont pas été inclus dans le prix effectivement payé, ou à payer pour les marchandises:
i) commission et frais de courtage, à l’exception des commissions d’achat;
ii) coût des contenants traités, aux fins douanières, comme ne faisant qu’un avec la marchandise;
iii) coût de l’emballage, comprenant aussi bien la main-d”uvre que les matériaux ; (…)
Selon l’article 33 du même code :
‘À condition qu’ils soient distincts du prix effectivement payé ou à payer pour les marchandises importées, la valeur en douane ne comprend pas les éléments suivants:
e) les commissions d’achat; (…)’;
L’article 2315 du règlement particulier sur la valeur en douane caractérise le courtier , par opposition au commissionnaire , comme des « des intermédiaires qui n’agissent pas sous leur propre nom. Le courtier s’entremet à la fois pour le vendeur et pour l’acheteur et n’a généralement pas d’autres fonctions que de mettre en rapport les deux parties à la transaction ».
Le contrat d’apporteur d’affaires conclu le 08 mai 2013 entre la société Massis Distribution et la société Al Fakher [Localité 10] stipule en son article 1 que l’apporteur d’affaires perçoit une commission en rémunération de sa mission qui consiste à mettre en relation d’affaires le donneur d’ordre avec la société Al Fakher Ajman avec un contrat d’exclusivité pour lequel il percevra une commission (article 2) . Au terme de l’article 4.1, le donneur d’ordre s’engage à verser une rémunération à la signature du contrat d’exclusivité (article 4) , l’apporteur d’affaires s’engageant à ne percevoir aucun fonds au nom et pour le compte du donneur d’ordre . Les commissions , au terme de l’article 6, portent sur une somme perçue en début de contrat puis sur un pourcentage du montant du chiffre d’affaires réalisé par la société Massis Distribution sur l’ensemble des ventes des produits de la société Al Fakher Ajman vendus en France.
Par de justes motifs que la cour adopte, les premiers juges ont retenu que la mission confiée à la société Al Fakher [Localité 10] se limitait en une mise en relation d’affaires sans interposition et sans achat en son propre nom , les marchandises étant achetées par la société Massis Distribution, avec ses propres fonds , les factures étant émises par la société Al Fakher Factury Tobacco directement à l’encontre de la seule société Massis Distribution. Il en a été justement déduit que les commissions perçues par la société Al Fakher [Localité 10] s’apparentent à des frais de courtage et ne relèvent pas de la ‘commission d’achat’ telle que prévue par l’article 33 du code des douanes communautaires . Ces commissions devaient ainsi être comprises dans la valeur en douane déclarée.
c) Les frais d’emballage
La société Massis Distribution soutient qu’elle n’était pas tenue d’inclure les frais d’emballage dans la valeur en douane . Elle expose que, pour la période s’étendant jusqu’au 31 décembre 2013, les marchandises n’ayant pas été importés, les frais d’emballage s’y rapportant n’avaient pas à être déclarés . Pour les importations postérieures au 1er janvier 2014, elle soutient ne pas avoir acquitté des frais d’emballage mais les sommes dues au titre de l’achat , l’entretien et le stockage des équipements industriels permettant d’adapter le packaging aux normes françaises .
La DNRED s’y oppose.
Ceci étant observé , ainsi que rappelé par l’article 32 précité du code des douanes communautaire, pour déterminer la valeur en douane par application de l’article 29, on ajoute au prix effectivement payé ou à payer pour les marchandises importées (…):
a) les éléments suivants, dans la mesure où ils sont supportés par l’acheteur mais n’ont pas été inclus dans le prix effectivement payé, ou à payer pour les marchandises :
(…)
iii) coût de l’emballage, comprenant aussi bien la main-d”uvre que les matériaux; (…).
Pour la période antérieure au 31 décembre 2013, la société Massis Distribution qui reconnaît avoir pris en charge les frais d’impression des étiquettes devant être apposées sur les paquets de tabac, prétend d’une part sans en justifier que des étiquettes auraient été détruites et soutient d’autre part que des étiquettes ont été apposées sur des tabacs entreposés en France ayant fait l’objet de destruction. La DNRED relève justement que les marchandises entreposées en France ont ainsi fait l’objet d’une importation et que la valeur en douane doit alors comprendre le coût de l’emballage .
Pour la période postérieure au 31 décembre 2013, les services douaniers versent aux débats des pièces annexes 12 à 14 extraites du grand livre de la société Massis Distribution qui établissent que, d’un point de vue comptable, à chaque facture d’achat de tabac auprès de la société Al Fakher Factury Tobacco correspond une facture d’emballage. La société Massis Distribution ne peut pas dés lors prétendre que les factures porteraient en réalité sur un amortissement forfaitaire de matériels d’impression .
d) Sur les autres contestations
La société Massis Distribution conteste la méthode de calcul conduisant à l’intégration de la commission d’exclusivité versée à la société Al Fakher [Localité 10] . Elle expose que ces commissions sont prévues au contrat d’apporteur d’affaires du 8 mai 2013 qui a été conclu pour une durée de 3 années et qu’en conséquence cette commission aurait due être lissées sur les différentes IMA contrôlées et non sur les seules IMA n° 39107918 et 39509295.
La DNRED s’y oppose.
Ceci étant observé , ainsi que justement relevé par les premiers juges, l’article 6A du contrat d’apporteur d’affaires stipule que la commission est due à l’apporteur d’affaires lors de la signature du contrat soit le 8 mai 2013 , contrairement auxcommissions de 7% dues en fonction des ventes réalisées . Le moyen soulevé relatif à l’absence de ventilation de la commission doit être rejeté .
La DNRED a établi des tableaux correctifs (pièces annexe A, B, C) tenant compte des observations formulées en première instance par la société Massis Distribution .
e) Sur la demande de garantie de la société Patton
Ainsi que ci dessus relevé , la société Patton est intervenue dans le cadre d’une représentation directe au sens de l’article 5-2 du code des douanes communautaire . Il s’en déduit que la société Patton n’est pas tenue au paiement de la dette douanière qui incombe à la seule société Massis Distribution en application de l’article 201 3°) du même code. La société Massis Distribution est ainsi mal fondée à appeler en garantie la société Patton.
PAR CES MOTIFS :
La cour,
MET hors de cause maître [S] [V]-Selarl 2m&associés , ès qualités d’administrateur judiciaire de la société Massis Import Expert Europe.
CONFIRME le jugement déféré en toutes ses dispositions sous réserve des rectifications apportées à la liquidation ;
CONDAMNE la société Massis Import Expert Europe à verser sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile 3 000 euros à la directrice de la DNRED et 3 000 euros à la société Transports P. Fatton ;
REJETTE toutes autres demandes ;
RAPPELLE qu’en vertu de l’article 367 du code des douanes, il n’y a pas lieu à dépens.
LA GREFFIÈRE LE PRÉSIDENT
C. BURBAN E. LOOS