Conclusions d’appel : 7 juin 2023 Cour d’appel de Montpellier RG n° 19/07652

·

·

Conclusions d’appel : 7 juin 2023 Cour d’appel de Montpellier RG n° 19/07652
Ce point juridique est utile ?

Cour cassation 15/05/2007 n°0443663

Grosse + copie

délivrées le

à

COUR D’APPEL DE MONTPELLIER

1re chambre sociale

ARRET DU 07 JUIN 2023

Numéro d’inscription au répertoire général :

N° RG 19/07652 – N° Portalis DBVK-V-B7D-ONE2

Arrêt n° :

Décision déférée à la Cour :

Jugement du 20 NOVEMBRE 2019 du CONSEIL DE PRUD’HOMMES – FORMATION PARITAIRE DE NARBONNE

N° RG F 18/00191

APPELANTE :

Madame [H] [U]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représentée par Me Cyril CAMBON, avocat au barreau de NARBONNE

INTIMEE :

SARL DOMICIL’ SERVICES, prise en la personne de ses représentants légaux en exercice

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Représentée par Me Virginie DELHAYE-CARENCO, avocat au barreau de NARBONNE

Ordonnance de clôture du 21 Mars 2023

COMPOSITION DE LA COUR :

En application de l’article 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 12 AVRIL 2023, en audience publique, le magistrat rapporteur ayant fait le rapport prescrit par l’article 804 du même code, devant la cour composée de :

Monsieur Philippe DE GUARDIA, Président de chambre

Mme Véronique DUCHARNE, Conseillère

Madame Magali VENET, Conseillère

qui en ont délibéré.

Greffier lors des débats : Mme Marie BRUNEL

ARRET :

– contradictoire

– prononcé par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile ;

– signé par Monsieur Philippe DE GUARDIA, Président de chambre, et par Mme Marie BRUNEL, Greffière.

*

* *

FAITS ET PROCÉDURE

Par contrat de travail à durée indéterminée du 6 octobre 2016, Mme [H] [U] a été engagée à temps partiel modulé (130 heures par mois) par la SARL Domicil’Services en qualité d’assistante ménagère niveau 2 de la convention collective national des entreprises de services à la personne du 20 septembre 2012, moyennant une rémunération mensuelle brut de 1 257,10 €.

Le 16 février 2017, la salariée a été victime d’un accident du travail alors qu’elle intervenait au domicile de la bénéficiaire Mme [V].

Elle a fait l’objet d’un arrêt de travail à compter de cette date et ne devait pas reprendre son poste.

Par requête enregistrée le 6 septembre 2018, estimant que l’employeur avait commis de nombreux manquements contractuels, elle a saisi le conseil de prud’hommes de Narbonne en résiliation judiciaire de son contrat de travail.

Du 1er mars 2019 au mois de septembre 2021, elle a bénéficié d’un congé parental.

Par jugement du 20 novembre 2019, le conseil de prud’hommes a

– dit et jugé qu’il n’y avait pas lieu de prononcer la résiliation judiciaire du contrat de travail,

– requalifié le contrat de travail en contrat à durée indéterminée à temps plein,

– condamné la SARL Domicil’Services à payer à Mme [H] [U] les sommes de :

*175,79 € brut au titre du rappel de salaire des pauses non prises,

* 17,58 € brut au titre des congés payés y afférents,

* 400 € net à titre de dommages et intérêts pour violation du repos dominical,

* 179,46 € net au titre de l’indemnisation de l’utilisation de son véhicule personnel,

* 537,86 € brut au titre du rappel de salaire des temps de déplacement conventionnellement assimilés à du temps de travail,

* 53,79 € brut au titre des congés payés y afférents,

* 1 200 € au titre de l’article 700 du Code de procédure civile,

– condamné la SARL Domicil’Services à adresser à Mme [H] [U] un bulletin de salaire récapitulatif des condamnations prononcées et ce, sous astreinte de 20 € par jour de retard à compter du quinzième jour suivant la notification de la décision et qui deviendra définitive à compter du trentième jour ; le conseil se réservant le droit de liquider ladite astreinte le cas échéant,

– débouté Mme [H] [U] du surplus de ses prétentions,

– débouté la SARL Domicil’Services de sa demande au titre de l’article 700 du Code de procédure civile,

– condamné la SARL Domicil’Services aux entiers dépens y compris aux éventuels frais d’huissier en cas d’exécution forcée de la décision.

Par déclaration enregistrée au RPVA le 26 novembre 2019, Mme [H] [U] a régulièrement interjeté appel de ce jugement.

Le 8 septembre 2021, le médecin du travail a déclaré la salariée inapte à son poste, précisant que son état de santé faisait obstacle à tout reclassement dans un emploi.

Par lettre du 6 octobre 2021, l’employeur lui a notifié son licenciement pour inaptitude et impossibilité de reclassement, lequel n’est pas contesté dans le présent litige.

*

Plusieurs contentieux opposent les parties en dehors du jugement dont la salariée a interjeté appel :

– saisine du pôle social du tribunal judiciaire de Carcassonne le 19 février 2020, lequel a débouté la salariée de sa demande liée à la faute inexcusable ; celle-ci a interjeté appel de ce jugement, la procédure est pendante devant la présente Cour,

– saisine du conseil de prud’hommes de Narbonne le 28 juillet 2022 de demandes identiques, lequel a prononcé par jugement du 1er mars 2023 un sursis à statuer dans l’attente de la présente décision.

PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES

Aux termes de ses dernières conclusions enregistrées au RPVA le 15 février 2023, Mme [H] [U] demande à la Cour de

– confirmer le jugement en ce qu’il a condamné la SARL Domicil’Services au titre de

* l’équivalent en salaire des pauses non prises,

* des dommages et intérêts pour violation des règles conventionnelles mais l’infirmer sur le quantum et condamner l’entreprise à la somme de 1 000 € à titre de dommages et intérêts,

* de l’indemnisation de l’utilisation de son véhicule personnel pour réaliser ses déplacements professionnels,

* du rappel de salaire pour les temps de déplacement conventionnellement assimilés à du temps de travail,s y afférent;

* de l’article 700 du code de procédure civile ;

– réformer le jugement entrepris pour le surplus ;

– condamner la SARL Domicil’Services à la somme de 10.000 € de dommages et intérêts pour violation de l’obligation de sécurité de résultat ;

– constater l’irrégularité de l’organisation des élections des délégués du personnel et le défaut d’élection du CE et du CHSCT, et condamner l’employeur à la somme de 1.000 € à titre de dommages et intérêts ;

– condamner celui-ci au paiement de la somme de 7.569,40 € à titre d’indemnités journalières complémentaires répartie à raison de 5.335,38 € soumis à cotisations et de 2.234,02 € non soumis à cotisations ;

– la condamner à délivrer sous astreinte de 50 € par jour de retard et par document les bulletins de salaire rectifiés d’août à septembre 2017 ;

– dire et juger illicite son contrat de travail à temps partiel modulé ;

– condamner la SARL Domicil’Services à la somme de 1.000€ à titre de dommages et intérêts pour préjudice d’anxiété relatif à l’insécurité juridique de la couverture prévoyance ;

– dire et juger qu’elle doit être classée auxiliaire de vie niveau 3 ;

– condamner la SARL Domicil’Services au paiement du rappel de salaire soit aux sommes de 237,65 € à titre de rappel de salaire au minimum conventionnel ainsi qu’à la somme de 23,77 € au titre des congés payés y afférent ;

– la condamner à produire sous astreinte de 50 € par jour de retard et par document l’ensemble des bulletins de salaire rectifiés depuis octobre 2016 et jusqu’au prononcé de la résiliation judiciaire du contrat de travail ;

-la condamner à la somme de 3.000 € à titre de dommages et intérêts pour exercice illégal de la fonction d’aide-soignant ;

– la condamner à la somme de 1.000 € de dommages et intérêts pour le préjudice causé par la violation des règles conventionnelles prévoyant pour le salarié des plages d’indisponibilité ainsi que des délais et modalités de changement des horaires de travail ;

– la condamner à la somme de 3.000 € à titre de dommages et intérêts pour violation du repos dominical ;

– la condamner au rappel de salaire correspondant aux heures de mise à disposition durant les services de kinésithérapie, soit la somme de 39,32 € ainsi qu’à la somme de 3,93 € correspondant aux congés payés y afférent ;

– prononcer la résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts exclusifs de la SARL Domicil’Services ;

– condamner la SARL Domicil’Services au paiement des sommes suivantes :

* 4.814,01 € au titre de l’indemnité compensatrice de préavis,

* 481,40 € au titre des congés payés afférents,

* 1.797,76 € au titre de du rappel de salaire sur indemnité spéciale de licenciement,

* 20.000 € à titre de dommages et intérêts pour nullité du licenciement, à titre principal ; 9.628,02 € à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse à titre subsidiaire,

* 1.800 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile pour la procédure d’appel ;

– condamner la SARL Domicil’Services aux entiers dépens, y compris ceux d’exécution forcée de l’arrêt à intervenir, et lui imputer l’honoraire de recouvrement de l’huissier de justice.

Aux termes de ses dernières conclusions enregistrées au RPVA le 16 mars 2023, la SARL Domicil’Services demande à la Cour de

– confirmer le jugement en ce qu’il a débouté Mme [U] de ses demandes au sujet de la violation de l’obligation de sécurité et de protection de la santé mentale et physique des salariés et des demandes y afférentes, de l’irrégularité de la procédure des élections du personnel et des dommages et intérêts y afférent, de sa demande d’indemnités journalières complémentaires, du préjudice d’anxiété relatif à l’insécurité juridique, de sa demande de requalification en tant qu’auxiliaire de vie niveau III, de sa demande de dommages et intérêts pour exercice illégal de la fonction d’aide-soignant, de sa demande de rappel de salaires pour les heures de mise à disposition pendant les services de kinésithérapie, de sa demande de résiliation judiciaire du contrat de travail, et l’ensemble des demandes y afférentes ;

– dire et juger qu’il n’y a pas lieu à résiliation judiciaire de son contrat ;

– dire et juger que l’obligation de sécurité a été respectée ;

– constater que ses obligations en matière d’élections des délégués du personnel ont été respectées ;

– dire et juger que les indemnités complémentaires ne sont pas à devoir à Mme [U] au regard de son ancienneté ;

– infirmer le jugement en ce qu’il l’a condamnée

* pour illégalité du contrat de travail à temps partiel modulé, et a requalifié le contrat de travail en contrat de travail à durée indéterminée à temps plein,

* pour les pauses non prises,

* pour l’absence de respect des règles de prévenance conventionnelle des plannings,

* au titre de dommages et intérêts pour la violation du repos dominical,

* pour l’utilisation par la salariée de son véhicule personnel pour réaliser ses déplacements professionnels,

* pour les temps de déplacement ;

– débouter Mme [U] de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions ;

– la condamner à lui verser la somme de 2 000 € sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile.

Pour l’exposé des prétentions et des moyens des parties, il est renvoyé, conformément à l’article 455 du Code de procédure civile, à leurs conclusions ci-dessus mentionnées et datées.

La procédure a été clôturée par ordonnance du 21 mars 2023.

MOTIFS

Sur l’effet dévolutif de l’appel.

Selon l’article 562 du Code de procédure civile, l’appel défère à la cour d’appel la connaissance des chefs de jugement qu’il critique expressément et de ceux qui en dépendent, la dévolution ne s’opérant pour le tout que lorsque l’appel tend à l’annulation du jugement ou si l’objet du litige est indivisible.

Aux termes de l’article 901-4° du même Code, dans sa rédaction antérieure au décret n° 2022-245 du 25 février 2022, la déclaration d’appel est faite par un acte contenant notamment les chefs de jugement expressément critiqués auxquels l’appel est limité, sauf si l’appel tend à l’annulation du jugement ou si l’objet du litige est indivisible.

Selon l’article 954 alinéa 1er, les conclusions d’appel contiennent, en en-tête, les indications prévues à l’article 961. Elles doivent formuler expressément les prétentions des parties et les moyens de fait et de droit sur lesquels chacune de ces prétentions est fondée avec indication pour chaque prétention des pièces invoquées et de leur numérotation. Un bordereau des pièces est annexé.

Aux termes de l’alinéa 2, les conclusions comprennent distinctement un exposé des faits et de la procédure, l’énoncé des chefs de jugement critiqués, une discussion des prétentions et des moyens ainsi qu’un dispositif récapitulant les prétentions.

En l’espèce, l’employeur estime que l’absence de mention explicite des chefs de jugement critiqués dans la déclaration d’appel et dans les conclusions d’appelante entraîne l’absence d’effet dévolutif.

En premier lieu, la déclaration d’appel précise qu’il est relevé appel du jugement « en ce qu’il a débouté la salariée de ses demandes de : Constater la violation par la SARL Domicil’Services à la somme de 10.000 € de dommages et intérêts pour violation de l’obligation de sécurité de résultat ; (…) » – suivent l’intégralité des dispositions du jugement rejetées par le conseil de prud’hommes – (…) « et limité les dommages et intérêts : -pour préjudice causé par la violation des règles conventionnelles à la somme de 400 € au lieu des 1000 € demandés ‘ pour violation du repos dominical à la somme de 1 000 € au lieu des 3 000 € demandés ».

Dès lors, contrairement à ce que soutient l’employeur, la déclaration d’appel contient les chefs de jugement expressément critiqués.

En second lieu, les conclusions de l’appelante contiennent les chefs de jugement qu’elle demande à la cour de confirmer et d’infirmer.

La cour est par conséquent saisie de l’appel de la salariée, l’effet dévolutif ayant opéré.

Sur l’exception d’irrecevabilité des demandes nouvelles.

La cour d’appel est tenue d’examiner au regard de chacune des exceptions prévues aux articles 564 à 567 du Code de procédure civile si la demande est nouvelle. Il résulte de l’article 566 de ce Code que les parties ne peuvent soumettre à la cour d’appel de nouvelles prétentions, sauf à ce que celles-ci soient l’accessoire, la conséquence ou le complément de celles soumises au premier juge.

En l’espèce, l’intimée fait valoir que l’appelante n’a présenté ses demandes au titre de l’indemnité spéciale de licenciement et du licenciement nul que dans le cadre de ses conclusions numéro 4 et qu’elles sont de ce fait irrecevables.

Toutefois ces demandes, qui tendent aux mêmes fins que les demandes initiales relatives au rappel de salaire au titre de l’indemnité légale de licenciement et au paiement de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, constituent le complément de celles intialement présentées.

Dès lors, elles sont recevables et l’exception d’irrecevabilité doit être rejetée.

Sur la fin de non-recevoir tirée du défaut de mentions obligatoires dans les conclusions de l’appelante et sur la caducité subséquente de la déclaration d’appel.

L’article 961 alinéa 1er du Code de procédure civile dispose que les conclusions des parties sont signées par leur avocat et notifiées dans la forme des notifications entre avocats. Elles ne sont pas recevables tant que les indications mentionnées à l’alinéa 2 de l’article précédent n’ont pas été fournies. Cette fin de non-recevoir peut être régularisée jusqu’au jour du prononcé de la clôture ou, en l’absence de mise en état, jusqu’à l’ouverture des débats.

L’alinéa 2 de l’article 960 du même Code porte sur l’indication des nom, prénoms, profession, domicile, nationalité, date et lieu de naissance de la personne physique et sur la forme, la dénomination, le siège social et l’organe qui représente légalement la personne morale.

Ces dispositions ne tendent qu’à la sauvegarde des droits des parties avant que le juge ne statue. Or, les mentions complètes relatives tant à l’appelante qu’à l’intimée figurent dans les conclusions de l’intimée, de sorte que la communication des indications mentionnées à l’alinéa 2 de l’article 960 précité a été assurée avant que le juge ne statue.

La fin de non-recevoir sera rejetée et il n’y a pas lieu de constater la caducité subséquente de la déclaration d’appel.

Sur la caducité de la déclaration d’appel du fait du défaut de mentions.

En application de l’article 908 du Code de procédure civile, « à peine de caducité de la déclaration d’appel, relevée d’office, l’appelant dispose d’un délai de trois mois à compter de la déclaration d’appel pour remettre ses conclusions au greffe ».

L’article 58 du même Code prévoit, dans sa rédaction en vigueur jusqu’au 1er janvier 2020 applicable au présent litige, que « la requête ou la déclaration est l’acte par lequel le demandeur saisit la juridiction sans que son adversaire en ait été préalablement informé.

Elle contient à peine de nullité :

1° Pour les personnes physiques : l’indication des nom, prénoms, profession, domicile, nationalité, date et lieu de naissance du demandeur ;

Pour les personnes morales : l’indication de leur forme, leur dénomination, leur siège social et de l’organe qui les représente légalement ;

2° L’indication des nom, prénoms et domicile de la personne contre laquelle la demande est formée, ou, s’il s’agit d’une personne morale, de sa dénomination et de son siège social ;

3° L’objet de la demande.

(…) » 

Enfin l’article 901 du même Code, dans sa rédaction en vigueur du 1er septembre 2017 au 1er janvier 2020 applicable au litige, dispose que « la déclaration d’appel est faite par acte contenant, outre les mentions prescrites par l’article 58, et à peine de nullité:

1° La constitution de l’avocat de l’appelant ;

2° L’indication de la décision attaquée ;

3° L’indication de la cour devant laquelle l’appel est porté ;

4° Les chefs du jugement expressément critiqués auxquels l’appel est limité, sauf si l’appel tend à l’annulation du jugement ou si l’objet du litige est indivisible.

Elle est signée par l’avocat constitué. Elle est accompagnée d’une copie de la décision. Elle est remise au greffe et vaut demande d’inscription au rôle ».

En l’espèce, l’intimée soulève à titre subsidiaire la caducité de la déclaration d’appel aux motifs qu’elle ne contient pas les mentions détaillées de l’état civil des deux parties.

Toutefois en matière d’appel, les mentions prévues par l’article 58 précité ‘ en l’occurence la précision de l’identité exacte des parties à l’instance d’appel – ne sont pas prévues à peine de nullité de la déclaration d’appel, contrairement aux mentions obligatoires de l’article 901 précité.

Dès lors, la déclaration d’appel n’est pas caduque.

Sur le manquement à l’obligation de sécurité.

L’article L 4121-1 du Code du travail dispose que l’employeur prend les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs. Ces mesures comprennent

1° des actions de prévention des risques professionnels et de la pénibilité au travail,

2° des actions d’information et de formation,

3° la mise en place d’une organisation et de moyens adaptés.

L’employeur veille à l’adaptation de ces mesures pour tenir compte du changement des circonstances et tendre à l’amélioration des situations existantes.

En l’espèce, il est constant que l’accident du travail a été reconnu par la caisse primaire d’assurance maladie même si l’employeur avait émis des réserves liées au fait que la salariée avait initialement déclaré un arrêt de travail de droit commun avant de se rétracter quatre jours plus tard et de revendiquer un accident du travail au domicile de Mme [V] lors d’un transfert de cette dernière du fauteuil au lit. Il est tout aussi constant que la reconnaissance de l’accident du travail n’a pas été contestée par l’employeur.

La salariée fait valoir que l’employeur a manqué à son obligation de sécurité à son égard en ce que :

– elle n’a pas bénéficié d’une visite médicale préalable à l’embauche, ni avant la survenance de l’accident,

– aucun représentant du personnel ne s’est rendu au domicile de la patiente pour s’assurer de ses conditions de travail,

– il n’y avait plus de lève-malade ou de verticalisateur au domicile de cette patiente alors que ce dispositif pouvait être obtenu gratuitement à la demande de l’employeur,

– il ne lui a pas été fourni de chaussures anti-dérapantes pourtant prévues par le document unique des risques professionnels,

– elle n’a bénéficié d’aucune formation aux troubles du comportement ni aux gestes et postures,

– l’article R 4541-9 du Code du travail n’a pas été respecté, celui-ci interdisant le port de charges supérieures à 25 kilogrammes pour les femmes,

– l’article L 4141-1 du même Code n’a pas non plus été respecté.

Le défaut de visites médicales.

En application de l’article R 4624-10 du Code du travail, dans sa rédaction en vigueur du 1er juillet 2012 au 1er janvier 2017 applicable au litige, le salarié bénéficie d’un examen médical avant l’embauche ou au plus tard avant l’expiration de la période d’essai par le médecin du travail.

L’employeur établit avoir sollicité le jour de l’embauche de la salariée, le 6 octobre 2016, un examen médical d’embauche et avoir reçu les convocations par le service de santé au travail à la visite d’information et de prévention initiale pour les 18 avril 2017 et 30 août 2017, soit pendant l’arrêt de travail de la salariée.

Dès lors, le manquement allégué n’est pas caractérisé.

Le défaut de dispositif adapté.

La salariée produit les pièces suivantes :

– un écrit manuscrit du 17 février 2017 signée par Mme [M] [D], non accompagné de la copie de la carte nationale d’identité de cette dernière, aux termes duquel celle-ci indique qu’alors qu’elle allait prendre son service au domicile de Mme [V] le 16 février 2017 à 14h00, elle avait constaté que la salariée était « complètement bloquée du dos », que la patiente se laissait souvent tomber sur les auxiliaires lors des transferts, ce qui pouvait entraîner des blessures dorsales,

– la déclaration en tant que témoin de Mme [M] [D] indiquant qu’elle n’a pas assisté à l’accident du travail mais que celui-ci s’est produit pendant le transfert de la patiente du fauteuil au lit, que celle-ci de forte corpulence, se laisse tomber souvent dans les bras de l’intervenante qui doit la retenir, que la patiente avait beaucoup de mal à marcher, avait une raideur dans les jambes et le torse,

– l’attestation régulière de Mme [N] [B], auxiliaire de vie salariée au moment des faits, laquelle affirme que M. [R] était informé de la nécessité d’assurer plusieurs transferts quotidiens de Mme [V], du lit au fauteuil et du fauteuil au lit, à laquelle est jointe la copie « des cahiers de liaison », ainsi qu’une copie d’un cahier de liaison sans mention du patient concerné ni du nom des intervenants.

L’employeur verse aux débats :

– le projet individualisé d’aide et d’accompagnement du 1er septembre 2016 signé par la direction de l’entreprise et la personne bénéficiaire, Mme [V], qui mentionne l’intervention au domicile de cette dernière d’un infirmier libéral, d’un kinésithérapeute, la faculté pour cette dernière de se mobiliser elle-même, la nécessité d’une surveillance et d’un accompagnement, la visite quotidienne de son ex-époux domicilié à proximité, et qui précise les tâches à accomplir par les intervenant de l’entreprise, soit la cuisine et le ménage, l’habillage moyen et bas nécessitant un accompagnement ; il est précisé qu’elle fait seule les transferts, qu’elle se déplace seule à l’intérieur avec une canne tripode, que les intervenantes doivent la surveiller et l’accompagner, qu’elle reste tonique malgré son handicap, que sa mobilisation se fait facilement et qu’il faut une présence d’une personne toute la journée dont les missions sont la présence et l’accompagnement,

– le certificat médical du 29 octobre 2018 rédigé par le docteur [P], médecin traitant de Mme [V], lequel certifie que cette dernière « pouvait être mobilisée sans appareillage pour les soins courants jusqu’au départ de son domicile pour la maison de retraite »,

– une clef Usb et un procès-verbal de constat dressé par Maître [W], huissier de justice, dont il résulte qu’il a visionné une vidéo prise par l’ex-compagnon de Mme [V], M. [L], montrant cette dernière en train de se déplacer à l’aide d’une canne tripode dans un couloir, entourée de deux personnes dont l’une l’aidait à marcher,

– une sommation interpellative du 17 mai 2019 dont il résulte que M. [K] [X] a confirmé être l’auteur de la vidéo prise le 8 septembre 2016 et a indiqué que Mme [V] se rendait quatre fois par semaine au centre de kinésithérapie à [Localité 5],

– l’attestation régulière de la kinésithérapeute, Mme [T] [F], laquelle confirme avoir travaillé avec la patiente de novembre 2012 au 18 janvier 2018 quatre fois par semaine à son Cabinet et avoir constaté qu’elle était très tonique malgré son handicap et marchait dans le couloir avec une canne tripode avec son aide.

Il résulte de l’ensemble de ces éléments que s’il est établi que la patiente avait des difficultés à se mouvoir et avait besoin d’utiliser une canne tripode en présence d’une personne l’accompagnant, elle était en capacité d’être mobilisée sans appareillage, il n’est pas démontré que l’employeur aurait été alerté au jour de l’accident du travail sur la nécessité de procurer à la salariée un appareil de levage ou tout autre système facilitant les déplacements.

Ce manquement n’est pas caractérisé.

Le défaut de fourniture de chaussures anti-dérapantes.

La salariée estime que l’employeur aurait dû lui procurer des chaussures anti-dérapantes prévues par le document unique des risques professionnels sans pour autant expliciter en quoi ce type d’équipements aurait permis d’éviter l’accident du travail, alors que ses missions se limitaient à l’accompagnement de la patiente tel que décrit dans la fiche individualisée d’aide et d’accompagnement du 1er septembre 2016.

Ce manquement n’est pas caractérisé.

Le défaut de visite des représentants du personnel au domicile de la patiente.

Faute pour la salariée d’avoir attiré l’attention de l’employeur ou des représentants du personnel, avant son accident du travail, sur une situation de danger au travail au domicile de Mme [V], cliente auprès de laquelle elle intervenait, aucun manquement de l’employeur n’est établi ; ce, d’autant que le fils de la patiente, M. [A] [X], atteste de ce que M. [R], responsable de l’entreprise, qui « avait le souci de sa prise en charge », est passé à plusieurs reprises prendre des nouvelles de sa mère à son domicile entre le 1er septembre 2016 et le 31 janvier 2018.

Ce manquement allégué n’est pas avéré.

Le défaut de formation aux troubles du comportement et aux gestes et postures.

La salariée n’explicite pas en quoi elle aurait dû être formée aux troubles du comportement pour intervenir auprès de Mme [V], handicapée physique.

Elle estime qu’elle aurait dû être formée aux gestes et postures.

L’employeur rétorque assurer chaque année des formations pour son personnel mais n’avoir pas pu faire bénéficier la salariée de la formation « gestes et postures » du fait de son embauche le 6 octobre 2016 alors que la session devait se tenir en novembre 2016.

Il verse aux débats :

– le plan de formation pluriannuel 2016-2021 montrant que diverses formations étaient prévues pour les six années, notamment la formation « trouble du comportement de la personne âgée » en 2016, 2018 et 2020, soit une année sur deux, et la formation « gestes et postures » chaque année,

– la convention de formation « gestes et postures » signée le 27 octobre 2016 avec l’organisme de formation, la session étant prévue pour le 18 novembre 2016 toute la journée à laquelle étaient inscrites neuf salariées, autres que l’appelante.

Il résulte de ces éléments que l’employeur a respecté l’obligation de formation au sein de son établissement, que d’une part, la formation relative aux troubles du comportement de la personne âgée était prévue une année sur deux et avait été dispensée en 2016 et que d’autre part, la salariée n’a pas bénéficié de la formation « gestes et postures » entre son embauche et l’accident du travail en raison du court lapse de temps séparant ces deux événements et du fait que les inscriptions du personnel étaient déjà réalisées.

Aucun manquement de l’employeur n’est par conséquent démontré.

Le non-respect de l’article R 4541-9 du Code du travail.

L’article R 4541-9 du Code du travail dispose que ‘lorsque le recours à la manutention manuelle est inévitable et que les aides mécaniques prévues au 2° de l’article R. 4541-5 ne peuvent pas être mises en ‘uvre, un travailleur ne peut être admis à porter d’une façon habituelle des charges supérieures à 55 kilogrammes qu’à condition d’y avoir été reconnu apte par le médecin du travail, sans que ces charges puissent être supérieures à 105 kilogrammes.

Toutefois, les femmes ne sont pas autorisées à porter des charges supérieures à 25 kilogrammes ou à transporter des charges à l’aide d’une brouette supérieures à 40 kilogrammes, brouette comprise’.

En l’espèce, il n’est pas démontré que la salariée devait porter des charges supérieures à 25 kilogrammes. En effet, s’il n’est pas contesté que le poids de la patiente était supérieur à 25 kilogrammes et atteignait plus de 100 kilogrammes, il ressort de la fiche d’aide et d’accompagnement sus-mentionnée que la salariée n’était pas censée porter ou soulever la patiente qui était en capacité de se déplacer seule. En tout état de cause, il est établi que l’employeur a pris toutes les précautions utiles pour évaluer la situation, qu’il n’a pas été alerté par le personnel intervenant d’une dégradation de l’état de santé de la bénéficiaire nécessitant une nouvelle évaluation, de sorte que la violation de l’article précité n’est pas démontrée.

Le non-respect de l’article L 4141-1 du Code du travail.

L’article L4141-1 du Code de travail précise que « l’employeur organise et dispense une information des travailleurs sur les risques pour la santé et la sécurité et les mesures prises pour y remédier.

Il organise et dispense également une information des travailleurs sur les risques que peuvent faire peser sur la santé publique ou l’environnement les produits ou procédés de fabrication utilisés ou mis en ‘uvre par l’établissement ainsi que sur les mesures prises pour y remédier ».

En l’espèce, il résulte de ce qui précède que l’employeur n’a pas manqué à ses obligations liées à la formation et à la sécurité de la salariée.

De l’ensemble de cette analyse, il ressort que la demande au titre de la violation de l’obligation de sécurité doit être rejetée faute de démonstration d’un quelconque manquement imputable à l’employeur.

Sur « la violation de la convention collective dans l’établissement du contrat de travail ».

La salariée fait valoir en substance que l’état de santé très dégradé de la bénéficiaire Mme [V] impliquait l’intervention d’une auxiliaire de vie de niveau 3, voire d’une aide-soignante, et non d’une simple assistante ménagère de niveau 2 et qu’elle assumait les fonctions de ces deux emplois. Elle demande la condamnation de l’employeur à lui payer un rappel de salaire correspondant aux fonctions d’auxiliaire de vie niveau 3 ainsi qu’une indemnité à titre de dommages et intérêts « pour exercice illégal de la fonction d’aide-soignante ».

Lorsqu’il est saisi d’une contestation sur la catégorie professionnelle qui doit être attribuée à un salarié, le juge ne peut se fonder sur les seules définitions de poste résultant du contrat de travail ou de la convention collective ; il doit rechercher la nature de l’emploi effectivement occupé par le salarié et se prononcer au vu des fonctions réellement exercées.

La charge de la preuve incombe au salarié qui revendique la classification.

La convention collective nationale des entreprises de services à la personne prévoit au titre des emplois repères :

– l’emploi d’assistante ménagère niveau 2, qui s’exerce exclusivement au domicile du particulier afin d’aider le particulier dans la prise en charge de différents travaux liés au cadre de vie quotidien et accessible sans certification particulière, exige de l’autonomie dans l’organisation du travail et nécessite de rendre compte à la fin de l’intervention ; cet emploi ne comporte aucune responsabilité hiérarchique et consiste à effectuer les activités principales de l’emploi repère suivantes :

Nettoyer, entretenir, désinfecter les voilages et les rideaux selon leur nature.

Soigner les plantes d’intérieur selon les consignes.

Passer l’aspirateur sur la literie, désinfecter la literie.

Trier, identifier les modalités d’entretien du linge, détacher le linge.

Laver le linge délicat.

Utiliser le lave-linge et le sèche-linge selon les programmes.

Repasser, plier et ranger le linge délicat.

Effectuer des travaux simples de couture.

Effectuer les courses selon les repas prévus, le budget alloué, les consignes et rendre compte.

Ranger et conditionner les produits achetés dans les contenants appropriés.

Apporter et rechercher le linge au pressing selon les consignes.

Les activités de l’assistant(e) ménager(ère) (2) viennent en complément des activités de l’assistant(e) ménager(ère) (1) :

Nettoyer, entretenir, désinfecter les espaces et les sols (intérieurs et extérieurs), les sanitaires, les meubles, équipements et appareils ménagers.

Changer le linge de lit.

Repasser, plier et ranger le linge courant.

Etendre le linge.

Dresser le couvert.

Préparer un repas simple.

Laver, ranger la vaisselle et le matériel de cuisine.

Effectuer les courses à partir d’une liste définie,

– l’emploi d’assistante de vie niveau 3 (et non d’auxiliaire de vie), qui consiste à intervenir au domicile d’un particulier afin d’accompagner une personne dont l’autonomie est altérée et de l’accompagner dans son environnement pour l’aider dans la réalisation des actes quotidiens ou réaliser pour son compte les tâches de la vie quotidienne dans le cadre d’un projet de vie transmis par l’entreprise ; l’emploi peut consister, selon les consignes, à accompagner une tierce personne (infirmier ou autre) dans la réalisation des actes d’hygiène pour le compte d’une personne dont l’autonomie est altérée, à effectuer les courses pour le compte de la personne et réaliser des repas simples ou spécifiques selon le régime alimentaire suivi par la personne et l’accompagner dans la prise de son repas, à effectuer un ensemble de tâches quotidiennes afin de contribuer à maintenir ses espaces fonctionnels, propres et sécurisés (changer une ampoule, nettoyer les espaces, effectuer des tâches administratives’) et à préserver le lien entre la personne et son environnement extérieur (conduite d’un véhicule aménagé’) ; cet emploi ne comporte aucune responsabilité hiérarchique ; il est accessible à partir d’une certification de niveau V,

– l’emploi d’aide-soignante n’est pas prévu par la convention collective car l’article 3 prévoit des emplois repères regroupés au sein de trois grandes filières des services à la personne : les services de la vie quotidienne (linge, ménage, entretien et vigilance temporaire du logement et de son environnement, petits travaux de jardinage et de bricolage, repas, courses) ; les services à la famille (garde et accompagnement d’enfants, soutien scolaire et cours à domicile, assistance administrative ou informatique) ; les services d’aide et assistance auprès de personnes fragiles ou dépendantes.

La salariée verse aux débats un document issu d’une recherche sur internet dont il résulte que l’aide-soignant, qui doit être titulaire du diplôme d’Etat d’aide-soignant, exerce son activité sous la responsabilité d’un infirmier, est intégré à l’équipe de soins, que son rôle est de dispenser, dans le cadre du rôle propre de l’infirmer, en collaboration avec lui et sous sa responsabilité, des soins de prévention, de maintien, de relation et d’éducation de la santé pour préserver et restaurer la continuité de la vie, le bien-être et l’autonomie de la personne et que les huit activités constituant le référentiel d’activités de la profession sont les suivantes :

Dispenser des soins d’hygiène et de confort à la personne,

Observer la personne et mesurer les principaux paramètres liés à son état de santé,

Aider l’infirmier à la réalisation des soins,

Assurer l’entretien de l’environnement immédiat de la personne et la réfection des lits,

Entretenir des matériels de soins,

Transmettre ses observations par oral et par écrit pour maintenir la continuité des soins,

Accueillir, informer et accompagner les personnes et leur entourage,

Accueillir et accompagner des stagiaires en formation.

Pour établir qu’elle remplissait les missions d’une auxiliaire de vie ou d’une aide-soignante, la salariée verse aux débats les pièces suivantes :

– un courrier de son conseil sollicitant le SDIS pour connaître le nombre d’interventions des pompiers au domicile de Mme [V] et la réponse du 7 mars 2018 indiquant que le service ne peut donner d’informations que sur réquisitions,

– un extrait de courriel de la MDPH du 2 août 2017 en réponse à une demande de Mme [G] [S], dont les fonctions ne sont pas connues, indiquant que Mme [V] est bénéficiaire de la PCH ainsi que l’état justificatif de ses heures travaillées en février 2017 auprès de Mme [V] mentionnant « Caisse : Conseil général Aude ASG/PCH »,

– un document trouvé sur internet émanant du site Service public expliquant les conditions d’attribution de la prestation de compensation du handicap (PCH), lesquelles sont les suivantes :

* la personne doit rencontrer une difficulté absolue pour la réalisation d’une activité importante du quotidien parmi un référentiel d’activités (par exemple, se laver). La difficulté est qualifiée d’absolue si elle ne peut pas du tout réaliser l’activité.

* la personne rencontre une difficulté grave pour la réalisation d’au moins deux activités importantes du quotidien parmi un référentiel d’activités (par exemple, se laver et marcher). La difficulté à accomplir ces activités est qualifiée de grave si elle peut difficilement réaliser ces activités.

– un courrier de son conseil du 19 février 2019 relevant que M. [J] [E], infirmier, a rédigé une attestation imprécise ‘ l’attestation critiquée étant analysée dans le paragraphe précédent,

– un écrit du médecin traitant interrogé par son conseil précisant le 7 mars 2019 qu’il maintient les termes de son certificat médical du 29 octobre 2018 analysé ci-dessus, lequel mentionnait que l’état de santé de la patiente était compatible avec des soins courants sans appareillage et précisant que les soins courants recouvrent « soins d’hygiène, toilette, changes, etc ».

Il ne résulte pas de ces éléments à rapprocher des pièces précédemment analysées ‘ en particulier le projet individualisé d’aide et d’accompagnement du 1er septembre 2016 signé par la direction de l’entreprise et la personne bénéficiaire – que la salariée aurait eu à exécuter les missions d’une aide-soignante, ni même d’une auxiliaire de vie de niveau 3. En effet, aucun justificatif des tâches effectivement réalisées au profit de Mme [V] n’est produit aux débats et il ne saurait se déduire du fait que la patiente bénéficierait de la PCH que la salariée aurait été amenée à exécuter des missions ne relevant pas de ses fonctions contractuelles, alors même qu’il est constant que plusieurs intervenants s’occupaient de la bénéficiaire quotidiennement.

Les demandes au titre de l’exécution des missions d’un auxiliaire de vie niveau 3 et d’un aide-soignant doivent être rejetées. Le jugement sera confirmé de ces chefs.

Sur la violation des règles relatives aux élection des délégués du personnel.

La salariée fait valoir que les élections de délégués du personnel sont illicites et sollicite la somme de 1 000 € à titre de dommages et intérêts pour irrégularité et défaut d’information quant au processus électoral.

Elle indique avoir appris par ses collègues de travail que l’entreprise était dotée de délégués du personnel et fait valoir « une mascarade d’élections », une tentative d’escroquerie au jugement relative au registre du personnel et une tentative d’escroquerie au jugement relative à l’effectif de plus de 50 salariés : selon elle, l’employeur ne produit pas les courriers de convocation des organisations syndicales à négocier le protocole électoral, l’employeur revendique un effectif de 50 salariés alors que l’effectif affiché n’est pas fiable et est supérieur à 50 salariés et le personnel n’a pas été informé de la tenue d’élections au vu du nombre de votants (13) rapporté au nombre d’inscrits (67).

Elle relève également que la feuille d’émargement des élections des délégués du personnel fait apparaître un vote par correspondance de sa part alors que la loi n’envisage pas le recours à ce type de vote.

En vertu de l’article R 2314-23 du Code du travail, le tribunal judiciaire statue en dernier ressort notamment sur les contestations prévues à l’article L. 2314-32, c’est-à-dire relatives à la régularité des opérations électorales et à la désignation des représentants syndicaux, de sorte que seul un pourvoi en cassation est ouvert et que la présente Cour n’apparaît pas compétente pour statuer en la matière.

En application de l’article 16 du Code de procédure civile selon lequel, en vertu du principe du contradictoire, le juge ne peut fonder sa décision sur les moyens de droit qu’il a relevés d’office sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations, il y aura lieu de rouvrir les débats sur ce point afin de permettre aux parties de présenter leurs observations sur l’irrecevabilité de l’appel s’agissant de la régularité des opérations électorales.

Sur les indemnités journalières complémentaires.

En premier lieu, la salariée expose qu’ayant été victime d’un accident du travail reconnu en tant que tel, elle doit bénéficier d’une indemnité complémentaire égale à 100% du salaire net en application de l’article 6.1.5 de la convention collective nationale des entreprises de service à la personne.

Toutefois, ainsi que le relève l’employeur et ainsi que l’a jugé le conseil de prud’hommes, la garantie de maintien de salaire n’est ouverte en vertu des articles 6.1.1 et 6.1.2 de ladite convention collective qu’aux salariés ayant au moins 6 mois d’ancienneté, quel que soit le nombre d’heures de travail effectué par mois et que l’arrêt de travail soit consécutif à une maladie ou un accident professionnel ou non, pris ou non en compte par la sécurité sociale. Or, au jour de l’arrêt de travail du 16 février 2017, la salariée justifiait de moins de 5 mois d’ancienneté pour avoir été embauchée le 6 octobre 2016.

La demande doit être rejetée.

En second lieu, la salariée soulève le défaut de diligence de l’employeur vis-à-vis de la Sécurité sociale, l’attestation de salaire n’ayant été communiquée à la Caisse primaire d’assurance maladie que le 30 mai 2017 et le versement des indemnités journalières complémentaires n’ayant été réalisé qu’en janvier 2018 à hauteur de 213,78 €. Toutefois, elle ne tire aucune conséquence juridique ou pécuniaire de ce constat et ne présente aucune demande à ce titre.

Sur « l’exclusion discriminatoire de l’augmentation générale ».

La salariée fait valoir que ses collègues de travail ont bénéficié d’une augmentation du taux horaire (9,76 € à 9,79 €) dès le 1er août 2017 alors qu’elle n’en a bénéficié qu’à compter du 1er octobre 2017. Elle sollicite la condamnation de l’employeur à délivrer sous astreinte ses bulletins de salaire rectifiés d’août à octobre 2017.

Elle ne précise pas le fondement juridique de sa demande : elle ne mentionne pas le motif de la « discrimination » alléguée alors qu’il s’agit d’une condition d’application de l’article L1132-1 du Code du travail relatif à la discrimination, laquelle doit obligatoirement se rapporter à la prise en compte notamment du sexe, de la religion ou de l’état de santé du salarié ; elle ne soutient pas non plus qu’elle aurait été victime d’une rupture d’égalité et en tout cas ne produit aucun élément permettant d’établir que Mmes [I] et [B], auxquelles elle fait référence dans ses écritures, se seraient trouvées dans une situation identique à la sienne.

En tout état de cause, l’employeur admet une erreur de paramétrage du logiciel de paie et prouve qu’il a déjà rectifié les bulletins de salaire litigieux remis lors de l’audience de conciliation le 30 janvier 2019.

Il y a lieu de rejeter la demande, étant précisé que le conseil de prud’hommes n’a pas statué sur ce point qui ne figurait pas au dispositif des conclusions qui lui étaient soumises.

Sur le caractère illicite de la modulation du temps partiel.

La salariée fait valoir que faute pour l’employeur de prouver l’existence d’un accord d’entreprise et/ou de convention collective étendue, le temps partiel modulé est illicite et qu’il ne peut pas se prévaloir de l’application volontaire de la convention collective nationale de l’hospitalisation privée sur ce point. Elle ajoute que, de ce fait, le contrat de travail à temps partiel doit être requalifié à temps complet mais qu’elle ne sollicite aucun rappel de salaire à ce titre du fait du versement des indemnités journalières de la Sécurité sociale et des indemnités complémentaires de la prévoyance.

L’employeur rétorque qu’il a appliqué volontairement la convention sus-mentionnée lors de la création de l’entreprise en 2008 soit avant l’entrée en vigueur de la convention collective nationale des entreprises de services à la personne et que les modalités prévues sont bien plus favorables pour les salariés concernés, de sorte que la requalification n’a pas lieu d’être.

A la date d’embauche de la salariée, le 6 octobre 2016, les dispositions contenues dans la convention collective nationale des entreprises de services à la personne du 20 septembre 2012, relatives à l’aménagement du temps de travail sur tout ou partie de l’année pour l’ensemble des entreprises, avaient été étendues par arrêté du 3 avril 2014 sous réserve qu’un accord négocié au niveau de l’entreprise prévoie les clauses obligatoires prévues par la loi.

Par ailleurs, pour les entreprises employant habituellement moins de 11 salariés, la mise en oeuvre du dispositif d’aménagement du temps de travail sur l’année pouvait se faire par décision unilatérale de l’employeur.

Dans la mesure où il n’est pas contesté que l’entreprise comptait habituellement au moins 11 salariés ni qu’aucun accord négocié au niveau de l’entreprise n’a été signé, le temps partiel modulé sur l’année était illicite.

Il s’ensuit que le contrat de travail doit être requalifié en contrat de travail à temps complet, étant rappelé qu’aucun rappel de salaire n’est sollicité à ce titre.

Sur la production des garanties prévues au contrat collectif de prévoyance.

La salariée expose que l’employeur ne l’a pas informée de l’existence du régime obligatoire de prévoyance issu de l’avenant n°1 du 25 avril 2013 tandis que l’employeur rétorque que cet avenant, non étendu, ne lui est pas applicable.

L’avenant n°1 du 25 avril 2013 relatif à la protection social de la convention collective nationale entreprises de services à la personne (IDCC 3127) a pour objet d’instituer un régime obligatoire de prévoyance dans les entreprises relevant du champ d’application de la convention collective des entreprises de services à la personne tel que défini par l’accord du 12 octobre 2007 étendu par arrêté du 24 janvier 2011.

L’arrêté d’extension du 3 avril 2014 portant extension de la convention collective nationale des entreprises de services à la personne précise dans son article 1 que « la partie VI relative à la protection sociale est exclue de l’extension en tant qu’elle prévoit un régime conventionnel de prévoyance fondé sur une clause de désignation d’organismes assureurs et une clause de migration, pris en application de l’article L 912-1 du code de la sécurité sociale, déclaré contraire à la Constitution par le Conseil constitutionnel dans sa décision n°2013-672 DC du 13 juin 2013 ».

L’accord du 25 avril 2013 ne contient aucune disposition particulière régissant son entrée en vigueur.

En revanche, l’article 8-2 de l’avenant intitulé « Adhésion des entreprises » prévoit que « les entreprises entrant dans le champ d’application de la présente partie à la convention collective ont l’obligation d’adhérer au régime de prévoyance conventionnel à la date d’entrée en vigueur de la convention collective, auprès d’un des deux organismes assureurs codésignés ».

Il s’ensuit que l’accord n’est pas autonome et est au contraire attaché à la convention collective de 2012 et que dans la mesure où l’arrêté d’extension du 3 avril 2014 a expressément exclu la partie VI relative à la protection sociale, il a exclu également celle issue de l’accord de 2013.

L’accord de 2013 comporte d’ailleurs la désignation de deux organismes assureurs et impose aux entreprises d’une part, d’adhérer au régime de prévoyance auprès de l’un de ces deux organismes et d’autre part, de résilier dans un certain délai le contrat éventuellement conclu avec un autre organisme, dispositions qui ont été déclarées contraires à la constitution dans la décision du 13 juin 2013.

La salariée ne saurait en conséquence revendiquer l’application de l’avenant et soutenir que l’employeur a manqué à son obligation d’information sur ce point alors que l’avenant n’était pas entré en vigueur.

Le jugement n’a pas statué sur la demande qu’il y aura lieu de rejeter.

Sur le non-respect de la pause obligatoire de 20 minutes toutes les 6 heures.

L’article L 3121-16 du Code du travail dispose que « dès que le temps de travail quotidien atteint six heures, le salarié bénéficie d’un temps de pause d’une durée minimale de vingt minutes consécutives ».

La convention collective applicable ne déroge pas à cette règle.

En l’espèce, la salariée fait valoir qu’au vu de ses plannings, l’employeur n’a pas respecté ces dispositions légales à hauteur de 54 jours, d’octobre 2016 à février 2017, et réclame un rappel de salaire de 175,79 € outre l’indemnité compensatrice de congés payés y afférentes.

Il résulte en effet des plannings produits qu’aucun temps de pause n’est mentionné alors que le temps de travail quotidien pouvait atteindre six heures.

L’employeur affirme que la salariée était informée de ce que ses temps de pause quotidiens étaient rémunérés et renvoie aux bulletins de salaire. Toutefois, leur analyse ne permet pas de confirmer que les temps de pause étaient inclus dans la rémunération, de sorte que le jugement sera confirmé en ce qu’il a condamné l’employeur à payer à la salariée les sommes sollicitées.

Sur la violation du délai de prévenance de modification de l’horaire de travail.

L’article 9 de l’accord du 13 octobre 2016 relatif à l’aménagement du temps de travail stipule pour l’essentiel que le planning prévisionnel des horaires est remis chaque mois au salarié au moins sept jours avant le premier jour de son exécution, que chaque salarié bénéficie de plages d’indisponibilité, que le planning initial peut faire l’objet de modifications à l’initiative de l’employeur et le salarié est averti de la modification dans un délai minimum de trois jours avant la date prévue dans le respect des plages d’indisponibilité prévues au contrat, que pour faire face à la fluctuation des demandes inhérentes à l’activité et assurer la continuité de services, en cas d’urgence, le délai d’information de la modification peut être réduit dans un délai compris entre deux jours et une heure, l’information orale ou par téléphone du salarié se faisant au fur et à mesure et étant confirmé par écrit par l’envoi du planning modifié ou la modification de celui-ci dans l’interface numérique dans les meilleurs délais permettant la traçabilité des échanges. Il est prévu qu’en contrepartie, le salarié a la possibilité de refuser trois fois la modification des horaires sur la période de référence sans que ces refus ne constituent une faute ou un motif de licenciement.

En l’espèce, la salariée expose que l’employeur a violé les règles conventionnelles de plages d’indisponibilité, de plannings et de délai de prévenance, qu’elle a ainsi eu quatre plannings différents pour le mois de janvier 2017 et qu’elle n’a pas pu exercer une autre activité professionnelle ou familiale, devant constamment se tenir à la disposition de l’employeur, ce qui lui a causé un préjudice.

L’employeur verse aux débats un courriel de la salariée adressé le 3 janvier 2017 aux termes duquel elle lui demande de ne surtout pas hésiter à lui ajouter des heures, ainsi que le planning de janvier 2017 signé par la salariée.

Toutefois, aucun justificatif de la date de remise des plannings y compris pour 2017, n’est versé aux débats par l’employeur.

Dès lors, celui-ci ne démontre pas avoir respecté les règles régissant la remise des plannings.

Sur la violation du repos dominical.

La convention collective stipule que « le jour habituel de repos hebdomadaire est en principe accordé le dimanche afin de préserver la vie personnelle et familiale du salarié. Toutefois, compte tenu de la nécessité d’interventions quotidiennes liées à la nature particulière des services rendus aux personnes, il est possible de déroger à la règle du repos dominical, pour les activités auprès de publics fragiles et/ou dépendants et pour la garde d’enfants. En cas de dérogation au repos dominical pour des activités auprès de publics fragiles et/ou dépendants et pour la garde d’enfants, cette dérogation sera limitée à 2 dimanches par mois, sauf accord du salarié.

Pour tenir compte des contraintes liées au travail le dimanche, la rémunération du travail effectué ce jour-là est majorée au minimum de 10 % à compter du 1er dimanche travaillé dans l’année.

Un salarié qui ne souhaite pas travailler le dimanche peut le prévoir dans son contrat de travail en le précisant dans le cadre de ses plages d’indisponibilité ».

En l’espèce, la salariée fait valoir qu’elle a systématiquement travaillé tous les dimanches alors que son contrat ne prévoit aucune dérogation et aucun accord de sa part et que cette situation lui a causé un préjudice dans la mesure où son époux ne travaille pas les fins de semaine et où son enfant était âgé de 11 ans.

L’article 8 du contrat de travail stipule que « compte tenu de l’activité de la société, le salarié pourra être amené à travailler le dimanche et les jours fériés.(…) il conviendra de se reporter au dispositif légal, s’agissant des modalités financières et organisationnelles ». Les règles conventionnelles sont rappelées dans le cadre de l’article 6.

En revanche, l’employeur ne prouve pas avoir recueilli l’accord de la salariée pour travailler plus de deux dimanches par mois, et ce, même si celle-ci ne s’est jamais plainte avant le contentieux de cette situation. Le courriel de la salariée adressé le 3 janvier 2017 analysé ci-dessus est insuffisant à constituer un tel accord, le travail les dimanches n’étant pas du tout évoqué.

Il est constant que la salariée a été rémunérée avec application de la majoration de salaire liée au travail le dimanche mais le non-respect par l’employeur des dispositions conventionnelles et contractuelles a causé à cette dernière un préjudice qui sera réparé par la somme de 1 000€ à titre de dommages et intérêts.

Le jugement sera confirmé sur le principe du manquement mais infirmé sur le montant des dommages et intérêts.

Sur le décompte illicite des heures de mise à disposition durant les services de kinésithérapie.

La salariée fait valoir qu’elle est restée à trois reprises en octobre 2016 au domicile de la bénéficiaire à attendre le retour de cette dernière qui s’était rendue au Cabinet de son kinésithérapeute, que ces temps entre deux interventions lui ont été retirés du temps de travail effectif alors qu’elle accomplissait des tâches et que l’employeur lui doit la somme de 39,32 € brut outre 3,93 € brut à ce titre.

Toutefois, il ne résulte pas des documents produits par les parties qu’une déduction aurait été opérée par l’employeur à ce titre. Le jugement sera confirmé en ce qu’il a débouté la salariée de sa demande.

Sur les déplacements non indemnisés.

La salariée estime que les temps de déplacement, au moyen de son véhicule, entre son domicile et le premier lieu d’intervention et entre chaque lieu d’intervention ne lui ont jamais été indemnisés.

Le temps de trajet domicile-client et retour.

La convention collective stipule que « Le temps normal de trajet effectué par le salarié afin de se rendre de son domicile au lieu d’exécution de l’intervention, lieu d’exécution du contrat, ou pour en revenir, ne constitue pas du temps de travail effectif.

Constitue un temps normal de trajet entre le domicile et le lieu d’intervention (compris dans la zone d’intervention) le temps de déplacement professionnel, aller ou retour, d’une durée inférieure ou égale à 45 minutes ou d’une distance inférieure ou égale à 30 kilomètres.

Pour le calcul du temps de trajet ou du nombre de kilomètres, l’entreprise choisira une référence de calcul unique et commune à l’ensemble du personnel, référence qui sera portée à la connaissance du salarié.

Le dépassement du temps normal de trajet fera l’objet d’une compensation financière d’un montant qui ne pourra être inférieur à 10% du taux horaire du salarié concerné » .

En l’espèce, il est constant que la salariée devait se rendre au domicile de trois clients, Mmes [V], [C] et [O] et que son domicile sis à [Localité 3] n’était pas séparé de plus de 30 kilomètres de ceux de ces clientes situés respectivement à [Localité 4], [Localité 5] et [Localité 3] de sorte que le trajet « aller ou retour » ne dépassait pas 30 kilomètres ainsi que le démontre l’employeur au moyen de ses pièces n°13 et 14.

Le jugement sera par conséquent infirmé en ce qu’il a condamné l’employeur à payer à la salariée la somme de 179,46 € à ce titre.

Le temps de trajet entre chaque lieu d’intervention.

La convention collective stipule, dans sa rédaction applicable, que 

-« Le temps de déplacement professionnel pour se rendre d’un lieu d’intervention à un autre lieu d’intervention constitue du temps de travail effectif lorsque le salarié ne peut retrouver son autonomie.

En cas d’utilisation de son véhicule personnel pour réaliser des déplacements professionnels, le salarié a droit à une indemnité qui ne peut être inférieure à 20 centimes d’euros par kilomètre »,

– « Les temps entre deux interventions sont pris en compte comme suit :

– en cas d’interruption d’une durée inférieure à 15 minutes, le temps d’attente est payé comme du temps de travail effectif ;

– en cas d’interruption d’une durée supérieure à 15 minutes (hors trajet séparant deux lieux d’interventions), le salarié reprend sa liberté pouvant ainsi vaquer librement à des occupations personnelles sans consignes particulières de son employeur n’étant plus à sa disposition, le temps entre deux interventions n’est alors ni décompté comme du temps de travail effectif, ni rémunéré.

Une journée de travail comporte un maximum de quatre interruptions ».

Au vu du calcul exempt d’erreurs opéré par l’employeur tiré du planning de la salariée que la Cour fait sien, celui-ci doit à la salariée la somme de 109,16 € à ce titre (11,15 heures devant être pris au titre du temps de travail).

Le jugement sera infirmé en ce qu’il a condamné l’employeur à payer à la salariée la somme de 537,86 €.

Sur la résiliation judiciaire du contrat de travail.

Lorsqu’un salarié demande la résiliation de son contrat de travail en raison de faits qu’il reproche à son employeur et que ce dernier le licencie ultérieurement, le juge doit d’abord rechercher si la demande de résiliation du contrat de travail est justifiée par des manquements de l’employeur d’une gravité suffisante de nature à empêcher la poursuite du contrat de travail.

Pour obtenir la résiliation judiciaire d’un contrat de travail, le salarié doit faire état de manquements de l’employeur, d’une gravité suffisante, et de l’impossibilité de poursuivre la relation de travail.

La date d’effet de la résiliation est fixée au jour de la décision qui la prononce à la condition qu’à cette date le salarié soit toujours au service de son employeur.

En l’espèce, la salariée évoque l’ensemble des demandes examinées pour obtenir la résiliation judiciaire de son contrat de travail.

L’illécéité du temps partiel modulé, le non-respect des temps de pause, du délai de prévenance, des règles conventionnelles relatives au repos le dimanche et relatives au temps de trajet entre deux clients constituent des manquements graves de la part de l’employeur faisant obstacle à la poursuite de la relation de travail et justifient que la résiliation judiciaire du contrat de travail soit prononcée. Le jugement doit être infirmé en ce qu’il a débouté la salariée de cette demande et de ces demandes pécuniaires subséquentes.

La date d’effet de la résiliation doit être fixée au jour de la rupture du contrat de travail, soit le 6 octobre 2021.

La résiliation produira les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse, aucune cause susceptible de produire les effets d’un licenciement nul n’ayant été retenue.

Sur les conséquences pécuniaires de la rupture.

L’article L 1235-3 du Code du travail, prévoit que l’indemnisation du licenciement sans cause réelle et sérieuse d’un salarié totalisant 3 années d’ancienneté dans une entreprise employant habituellement au moins onze salariés, doit être comprise entre 3 et 4 mois de salaire brut.

Par ailleurs le 8 septembre 2021, le médecin du travail a délivré un avis d’inaptitude à l’issue du congé parental d’éducation de la salariée sans mentionner l’origine de l’inaptitude, ce qui a amené l’employeur à la licencier pour inaptitude d’origine non professionnelle.

Or, la salariée a été placée en arrêt de travail consécutivement à l’accident du travail avant d’être en congé maternité, puis en congé parental et enfin en congé parental d’éducation sans qu’aucune visite de reprise n’ait eu lieu au cours de cette période de suspension du contrat de travail. Le médecin du travail l’a déclarée inapte à la reprise à l’issue du congé parental d’éducation.

Il s’en suit que l’inaptitude est d’origine professionnelle, et ce, même si le médecin du travail n’a pas précisé dans son avis l’origine de cette inaptitude;

L’employeur est par conséquent tenu de verser à la salariée l’indemnité spéciale de licenciement.

Compte tenu de l’âge de la salariée (née le 16/06/1987), de son ancienneté à la date de la rupture après prise en compte des règles relatives au congé parental d’éducation (3 ans et 9 mois), du nombre de salariés habituellement employés (au moins 11 salariés), de sa rémunération mensuelle brut (1 604,67 €) et de sa situation postérieure à la rupture (ARE en janvier 2022) et de l’absence de justificatifs relatifs à sa situation actuelle, il convient de fixer les sommes suivantes à son profit :

– 4 815 € au titre du licenciement sans cause réelle et sérieuse,

– 4 814,01 € brut au titre de l’indemnité compensatrice de préavis,

– 481,40 € € au titre de l’indemnité compensatrice de congés payés afférents,

– 1 797,76 € au titre du rappel de salaire relatif à l’indemnité spéciale de licenciement.

Sur les demandes accessoires.

L’employeur sera tenu de rembourser à Pôle Emploi les allocations chômage versées à la salariée dans la limite d’un mois de salaire.

En revanche, compte tenu du sursis à statuer, les demandes relatives aux dépens et aux frais irrépétibles seront réservées.

PAR CES MOTIFS :

La Cour, après en avoir délibéré, par arrêt contradictoire mis à disposition au greffe ;

DEBOUTE la SARL Domicil’Services de ses demandes liées à l’effet dévolutif de l’appel, à l’irrecevabilité des demandes nouvelles, au défaut de mentions obligatoires dans les conclusions et à la caducité de la déclaration d’appel ;

SURSOIT A STATUER sur les demandes relatives au contentieux électoral et ORDONNE la réouverture des débats à l’audience du 13 décembre 2023 à 9 heures afin que les parties présentent leurs observations sur l’irrecevabilité éventuelle des demandes relatives à l’illécéité des élections de délégués du personnel et à l’indemnisation du préjudice résultant de l’irrégularité et du défaut d’information quant au processus électoral ;

INFIRME le jugement du 20 novembre 2019 du conseil de prud’hommes de Narbonne en ce qu’il a

– débouté Mme [H] [U] de ses demandes au titre de la requalification du contrat de travail à temps partiel modulé en contrat à temps complet, du non-respect du temps de pause, du non-respect du délai de prévenance, du non-respect de la règlementation relative au travail le dimanche et du non-respect des règles sur les temps de trajet ;

– condamné la SARL Domicil’Services à payer à Mme [H] [U] les sommes de 179,46 € au titre des temps de trajet domicile-client et retour et 537,86 € au titre du rappel de salaire des temps de déplacement assimilés à du temps de travail ;

Statuant à nouveau sur ces seuls chefs infirmés,

PRONONCE la résiliation judiciaire du contrat de travail de Mme [H] [U] au 6 octobre 2021 et DIT qu’elle produit les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

REJETTE les demandes portant sur les temps de trajet domicile-client et retour, sur les effets d’un licenciement nul et sur l’indemnité spéciale de licenciement ;

CONDAMNE la SARL Domicil’Services à payer à Mme [H] [U] les sommes suivantes :

– 109,16 € au titre du temps de trajet entre chaque lieu d’intervention,

– 175,79 € à titre de rappel de salaire concernant la pause obligatoire, outre 17,58€ au titre de l’indemnité compensatrice de congés payés y afférents,

– 1 000 € à titre de dommages et intérêts pour non-respect de la réglementation sur le travail le dimanche,

– 4 815 € au titre du licenciement sans cause réelle et sérieuse,

– 4 814,01 € brut au titre de l’indemnité compensatrice de préavis,

– 481,40 € € au titre de l’indemnité compensatrice de congés payés afférents,

– 1 797,76 € au titre du rappel de salaire relatif à l’indemnité spéciale de licenciement ;

CONFIRME ledit jugement pour le surplus, à l’exception des demandes liées aux élections du personnel, à l’application de l’article 700 du Code de procédure civile et aux dépens ;

Y ajoutant,

DÉBOUTE Mme [H] [U] de ses demandes au titre de la discrimination, du contrat collectif de prévoyance ainsi que de sa demande liée au licenciement nul ;

CONDAMNE la SARL Domicil’Services à payer à Mme [H] [U] la somme de 1 797,76 € au titre du rappel de salaire relatif à l’indemnité spéciale de licenciement ;

ORDONNE le remboursement par la SARL Domicil’Services à Pôle Emploi des indemnités de chômage payées à Mme [H] [U] dans la limite d’un mois et DIT que conformément aux dispositions des articles L 1235-4 et R 1235-2 du Code du travail, une copie du présent arrêt sera adressée par le greffe au Pôle Emploi du lieu où demeure la salariée ;

RÉSERVE les demandes au titre des dépens et de l’application de l’article 700 du Code de procédure civile ;

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT

 


0 0 votes
Évaluation de l'article
S’abonner
Notification pour
guest
0 Commentaires
Le plus ancien
Le plus récent Le plus populaire
Commentaires en ligne
Afficher tous les commentaires
Chat Icon
0
Nous aimerions avoir votre avis, veuillez laisser un commentaire.x