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COUR D’APPEL DE BORDEAUX
PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE
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ARRÊT DU : 31 JANVIER 2023
RP
N° RG 22/03695 – N° Portalis DBVJ-V-B7G-M2HU
S.A.S. JDC
c/
S.A.R.L. JDC LANGUEDOC
S.A.S. JDC MIDI PYRENEES
S.A.R.L. JDC NORMANDIE
Nature de la décision : INTERPRETATION D’ARRET
Grosse délivrée le :
aux avocats
Décision déférée à la cour : arrêt rendu le 25 janvier 2022 (RG: 18/06676) par la Première Chambre Civile de la Cour d’Appel de BORDEAUX suivant requête en date du 28 juillet 2022
DEMANDERESSE :
S.A.S. JDC, agissant en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social sis [Adresse 3]
représentée par Maître Pierre FONROUGE de la SELARL LEXAVOUE BORDEAUX, avocat postulant au barreau de BORDEAUX, et assistée de Maître Patrick DAYAU de la SCP ESENCIA, avocat plaidant au barreau de BORDEAUX
DEFENDERESSES :
S.A.R.L. JDC LANGUEDOC, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social sis [Adresse 1]
représentée par Maître Stéphane GUITARD de la SELARL STEPHANE GUITARD, avocat postulant au barreau de BORDEAUX, et assistée de Maître LE STANC de la SCP LE STANC, CARBONNIER, avocat plaidant au barreau de MONTPELLIER
S.A.S. JDC MIDI PYRENEES, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social sis [Adresse 2]
représentée par Maître Stéphane GUITARD de la SELARL STEPHANE GUITARD, avocat postulant au barreau de BORDEAUX, et assistée de Maître Florence GRACIE-DEDIEU, avocat plaidant au barreau de TOULOUSE
S.A.R.L. JDC NORMANDIE, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social sis [Adresse 4]
représentée par Maître GRANET substituant Maître Philippe DUPRAT de la SCP DAGG, avocats au barreau de BORDEAUX
COMPOSITION DE LA COUR :
L’affaire a été débattue le 06 décembre 2022 en audience publique, devant la cour composée de :
Roland POTEE, président,
Bérengère VALLEE, conseiller,
Emmanuel BREARD, conseiller,
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Véronique SAIGE
ARRÊT :
– contradictoire
– prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile.
* * *
EXPOSE DU LITIGE ET DE LA PROCÉDURE
La SARL JDC Aquitaine, aujourd’hui SAS JDC, a été immatriculée le 30 mai 1989 et exploite une activité de vente et location de caisses enregistreuses, appareils monétiques, terminaux de paiement de cartes bancaires, informatique et maintenance y afférents, fournitures s’y rapportant et service après-vente, vente d’alarmes et systèmes de vidéo-surveillance. Elle possède plusieurs établissements exerçant une activité similaire ou proche.
La SARL JDC Midi-Pyrénées, immatriculée le 23 mai 1989, exerce une activité de commercialisation de caisses enregistreuses et systèmes de gestion de terminaux de paiement électroniques.
La SARL à associé unique JDC Languedoc, immatriculée le 18 février 1993, exerce une activité d’achat, vente, SAV, réparation de tous matériels électroniques et informatiques.
La SARL à associé unique JDC Normandie, immatriculée le 4 décembre 1995, exerce une activité de vente de matériel d’équipement informatique, de fourniture de caisses enregistreuses et prestations de maintenance technique et de formation y afférentes.
Ces sociétés n’ont aucun lien juridique et ne font partie d’aucun groupe mais se sont réparties à l’origine sur le territoire français en exerçant chacune dans son secteur géographique la même activité.
Ces différentes sociétés ont déposé les marques suivantes :
* la SAS JDC :
– le 1er mars 1999 la marque semi-figurative ‘JDC S.A.’ enregistrée sous le numéro national 99779371 et régulièrement renouvelée en 2009, en classe 9 pour ‘Caisses enregistreuses, machines à calculer, appareils pour le traitement de l’information et les ordinateurs, périphériques, photocopieuses, télécopieuses’.
– le 1er août 2011, la marque verbale ‘GROUPE JDC’ enregistrée sous le numéro national 3850656 renouvelée depuis le 1er août 2011, en classes 9, 42 et 45 pour :
– 9 : Appareils et instruments pour la conduite, la distribution, la transformation, l’accumulation, le réglage ou la commande du courant électrique ; appareils pour l’enregistrement, la transmission, la reproduction ou le traitement du son ou des images ; distributeurs automatiques et mécanismes pour appareils à pré-paiement ; caisses enregistreuses ; machines à calculer ; équipement pour le traitement de l’information et les ordinateurs ; logiciels (programmes enregistrés) ; périphériques d’ordinateurs ; détecteurs ; cartes à mémoire ou à microprocesseur ; instruments d’alarmes et détecteurs, produits utilisés pour le contrôle, la commande, la télécommande, le réglage, la supervision ou la programmation d’équipements électriques ou électroniques destinés à la sécurité, à l’alarme, au contrôle d’accès, à l’ouverture et à la fermeture et au verrouillage des portes, portes de garages, portails, barrières, fenêtres, volets, stores, grille, à la man’uvre des serrures, tous ces produits étant appliqués à l’habitation individuelle ou collective, aux bâtiments publics ou privés et aux espaces publics ou privés de stationnement ;
– 42 : Conception et développement d’ordinateurs et de logiciels ; recherche et développement de nouveaux produits pour des tiers ; études de projets techniques ; élaboration (conception), installation, maintenance, mise à jour ou location de logiciels ; programmation pour ordinateur ; consultation en matière d’ordinateurs ; conversion de données et de programmes informatiques autre que conversion physique ; conversion de données ou de documents d’un support physique vers un support électronique ;
– 45 : service de sécurité pour la protection des biens et des individus (à l’exception de leur transport) ; consultation en matière de sécurité.
– le 2 août 2011, la marque ‘JDC’ en classes 9, 42 et 45,
– le 10 novembre 2011, la marque semi-figurative ‘JDC SA’ en classes 9, 42 et 45.
* la SARL JDC LANGUEDOC :
– le 23 mai 2012, la marque semi-figurative en couleurs ‘JDC LANGUEDOC’ sous le numéro 3921772 en classes 9, 42 et 45.
* la SARL JDC MIDI PYRENEES :
– le 26 mai 2011, la marque semi-figurative ‘JDC MIDI-PYRENEES’ en classes 9 et 42, enregistrée sous le numéro 3834913,
– le 12 avril 2016 la marque verbale ‘Le réseau JDC’ dans les classes 9, 42 et 45.
Une procédure d’opposition a été formée par la SAS JDC à cette dernière marque déposée le 12 avril 2016 par la SARL JDC Midi-Pyrénées, et par décision du 4 janvier 2017, le directeur de l’INPI a partiellement fait droit à l’opposition reconnue justifiée en ce qu’elle porte sur les produits ‘appareils et instruments de pesage, supports d’enregistrement numérique, caisses enregistreuses, machines à calculer, équipements de traitement des données, ordinateurs, tablettes électroniques, logiciels et périphériques d’ordinateurs’.
Par acte du 27 mai 2016, la société par actions simplifiée JDC a assigné devant le tribunal de grande instance de Bordeaux les sociétés JDC Midi-Pyrénées, JDC Languedoc et JDC Normandie, faisant valoir que ces sociétés ont commis des actes de concurrence déloyale et parasitaire :
– en créant un site internet dont le nom de domaine est le suivant :
http://www.jdc-caisse-enregistreuse.fr/,
– en demandant des référencements sur les moteurs de recherches destinés à faire de ce ‘Réseau JDC’ le premier lien visible pour la clientèle,
– en signant par ‘JDC MP Caisse’ une demande de RDV client par SMS.
Par acte du 30 septembre 2016, la société JDC Midi-Pyrénées a assigné la société JDC en nullité des marques déposées par elle les 1er mars 1999, n°113874311 et le 2 août 2011 sous le n°113850911, au motif que la dénomination de la société JDC Midi-Pyrénées est antérieure aux marques déposées de mauvaise foi et en fraude des droits de la société JDC Midi-Pyrénées.
Les deux instances ont été jointes.
Les sociétés JDC Midi-Pyrénées, JDC Languedoc et JDC Normandie ayant soulevé l’incompétence du tribunal de grande instance de Bordeaux pour statuer sur l’action engagée par la société JDC, le juge de la mise en état a, par ordonnance du 20 février 2017, dit le tribunal de grande instance de Bordeaux compétent pour statuer.
Par jugement du 27 novembre 2018, le tribunal de grande instance de Bordeaux a :
– déclaré irrecevable l’exception d’incompétence,
– déclaré recevables les demandes formées par conclusions signifiées par la SAS JDC le 16 novembre 2016,
– déclaré nulles les marques :
-‘JDC S.A.’ déposée le 1er mars 1999 par la SAS JDC sous le numéro national 99 779 371,
– ‘GROUPE JDC’ déposée le 1er août 2011 par la SAS JDC sous le numéro national 3850656,
– ‘JDC’ déposée le 2 août 2011 par la SAS JDC sous le numéro 11 3 850 911,
– ‘JDC SA’ déposée le 10 novembre 2011 par la SAS JDC sous le numéro 11 3 874 311,
– ‘JDC MIDI-PYRENEES’ déposée le 26 mai 2011 par la SARL JDC MIDI PYRENEES sous le numéro 11 3 834 913,
– ‘JDC LANGUEDOC’ déposée le 23 mai 2012, par la société JDC LANGUEDOC sous le numéro 3921772,
– rejeté l’action en contrefaçon de la SAS JDC,
– rejeté les demandes au titre de la concurrence déloyale et parasitaire,
– rejeté les demandes de dommages-intérêts,
– dit qu’il n’y a pas lieu de faire application de l’article 700 du code de procédure civile,
– partagé les dépens par moitié entre d’une part la SAS JDC et d’autre part les SARL JDC Midi-Pyrénées, SARL JDC Languedoc et JDC Normandie.
La société JDC a relevé appel de ce jugement par déclaration du 13 décembre 2018.
Par arrêt du 25 janvier 2022, la cour d’appel de Bordeaux a :
– Déclaré a société JDC Midi-Pyrénées recevable en sa demande en payement de la somme de 25 000 euros pour procédure abusive ;
– Infirmé partiellement le jugement en ce qu’il rejette la demande de la société JDC au titre de la concurrence déloyale et parasitaire ;
Statuant à nouveau dans cette limite,
– Jugé que les sociétés JDC Midi-Pyrénées, JDC Languedoc et JDC Normandie ont commis des actes de concurrence déloyale à l’égard de la société JDC ;
– Interdit l’utilisation du nom de domaine jdc-caisse-enregistreuse.fr par les sociétés JDC Midi-Pyrénées, JDC Languedoc et JDC Normandie jusqu’à ce que l’office d’enregistrement compétent se prononce sur le transfert du nom de domaine au profit de la société JDC en vertu des articles L. 45-2 et L. 45-6 du code des postes et des communications électroniques ;
– Débouté la société JDC de sa demande de restreindre l’utilisation du nom commercial JDC, de sa demande de fermeture du site Internet, et de sa demande d’une somme de 120 000 euros à titre de dommages et intérêts ;
– Confirmé toutes les autres dispositions non contraires ;
Y ajoutant,
– Débouté la société JDC Midi-Pyrénées de sa demande d’une somme de 25 000 euros pour procédure abusive ;
– Débouté la société JDC Languedoc de sa demande d’une somme de 50 000 euros pour procédure abusive ;
– Dit n’y avoir lieu à condamnation sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;
– Condamné in solidum les sociétés JDC Midi-Pyrénées, JDC Languedoc et JDC Normandie aux dépens d’appel ;
– Rejeté toute autre demande plus ample ou contraire.
Par requête en interprétation de cet arrêt, déposée le 28 juillet 2022, la SAS JDC demande à la cour de :
– dire que sa décision du 25 janvier 2022 rendue dans le litige ayant opposé la requérante aux sociétés JDC Midi-Pyrénées, JDC Languedoc et JDC Normandie doit être interprétée comme valant interdiction pour ces 3 sociétés d’utiliser, tant le nom « le Réseau JDC » que le nom « JDC OCCITANIE »
– dire en conséquence que le dispositif de ladite décision sera complété, en précisant qu’il est fait injonction aux sociétés JDC Midi-Pyrenees, JDC Languedoc et JDC Normandie de cesser d’utiliser sur quelque support que ce soit, tant le nom « le Réseau JDC » que le nom « JDC OCCITANIE »
– ordonner qu’il soit fait mention de cette interprétation en marge de la minute de la décision en cause et des expéditions qui en seront délivrées
– dire que la décision d’interprétation à intervenir devra être notifiée au même titre que la précédente décision,
Et, préalablement,
– fixer les lieu, jour et heure où les parties seront appelées pour être entendues sur la présente demande d’interprétation,
– condamner les sociétés JDC Midi-Pyrenees, JDC Languedoc et JDC Normandie aux dépens de la présente procédure.
Par conclusions déposées le 12 octobre 2022, la SARL JDC Normandie demande à la cour de débouter la société JDC de l’ensemble de ses demandes fins et prétentions.
Par conclusions déposées le 12 octobre 2022, la SARL JDC Languedoc demande à la cour de :
– rejeter la requête présentée par la société JDC SAS en interprétation de l’arrêt rendu le 25 janvier 2022,
– condamner la société JDC SAS à verser à la concluante la somme de 1.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens de la présente procédure.
Par conclusions déposées le 17 novembre 2022, la SAS JDC Midi-Pyrénées demande à la cour de :
– débouter la société JDC de l’intégralité de ses demandes, fins et conclusions tendant à l’interprétation de l’arrêt rendu le 25 janvier 2022,
– condamner la société JDC à payer à la société JDC Midi-Pyrénées la somme de 2 000 € au titre de l’article 700 du Code de procédure civile,
– condamner la société JDC aux entiers dépens.
L’affaire a été fixée sans clôture à l’audience collégiale du 6 décembre 2022.
MOTIFS DE LA DÉCISION
La société JDC expose que, dans son arrêt du 25 janvier 2022, la cour de ce siège a jugé constitués les actes de concurrence déloyale commis par les trois sociétés intimées en ce que les sociétés JDC Midi-Pyrénées, JDC Languedoc et JDC Normandie se présentent sur le site jdc-caisse-enregistreuse.fr comme ‘le réseau JDC’, sans plus de précision, l’emploi de ce terme laissant penser qu’il n’existe qu’un seul ‘réseau JDC’ formé par les trois sociétés intimées alors que celles-ci sont faussement présentées sur le site comme toutes trois créées en 1989, d’où il résulte un risque de confusion avec la société JDC, constituée cette même année, et son propre réseau d’agences ‘uvrant dans le même secteur d’activité.
La requérante rappelle que la cour a ainsi caractérisé l’acte de concurrence déloyale à l’égard des trois sociétés en décidant de réparer le préjudice en résultant par la cessation des comportements déloyaux précédemment retenus et elle soutient que, dans ces conditions, la cour a nécessairement considéré que l’utilisation du nom ‘le réseau JDC’ constitue un comportement déloyal qu’il convient de faire cesser, ce qui doit être précisé dans le dispositif de l’arrêt.
La requérante fait aussi valoir que si l’arrêt confirme le jugement qui annule toutes les marques déposées par les parties, il ne précise pas l’interdiction de l’utilisation du nom JDC OCCITANIE qui doit être ajoutée également au dispositif de l’arrêt, s’agissant d’un acte de concurrence déloyale.
Aux termes de l’article 461 du code de procédure civile, il appartient à tout juge d’interpréter sa décision si elle n’est pas frappée d’appel et il est constant que le juge ne peut, sous couvert d’interprétation, apporter une modification quelconque aux dispositions précises de sa décision
En l’espèce, c’est à juste titre que les sociétés intimées opposent à la requérante la clarté de l’arrêt relativement à la sanction des actes de concurrence déloyale retenus par la cour qui a décidé de ne prononcer qu’une interdiction d’utiliser le nom de domaine jdc-caisse-enregistreuse.fr à l’exclusion de toute autre sanction alors qu’elle était saisie par la société JDC de demandes d’interdiction générale adressées aux 3 sociétés intimées d’utiliser sous quelque forme que ce soit, le vocable JDC, ou le réseau JDC ou les signes JDC Languedoc ou JDC Midi-Pyrénées .
Il en est de même de la demande d’interdiction adressée aux sociétés JDC Midi Pyrénées et JDC Languedoc d’utiliser, non pas le nom ‘ JDC Occitanie’ comme l’indique la réquérante, mais la marque du même nom alors que le jugement initial n’a pas annulé cette marque, contrairement à ce que laisse entendre la société JDC, étant d’ailleurs observé que le tribunal n’était pas saisi d’une demande de nullité de cette marque.
La requête de la société JDC sera en conséquence rejetée et elle versera une indemnité de 1.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile chacune aux société JDC Midi-Pyrénées et JDC Languedoc.
PAR CES MOTIFS
LA COUR
Rejette la requête formée par la SAS JDC;
Condamne la SAS JDC à verser à chacune des sociétés JDC Midi-Pyrénées et JDC Languedoc une indemnité de 1.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile;
Condamne la SAS JDC aux dépens.
Le présent arrêt a été signé par Monsieur Roland POTEE, président, et par Madame Véronique SAIGE, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le Greffier, Le Président,